L'auteur : Sprolls
La course : Ultra Trail du Mont Blanc
Date : 30/8/2013
Lieu : Chamonix Mont Blanc (Haute-Savoie)
Affichage : 2426 vues
Distance : 166km
Objectif : Se défoncer
Partager : Tweet
273 autres récits :
Le récit aussi sur mon blog avec plus de photos: http://benjiscrazy.over-blog.com/utmb-2013-en-3-temps
Et voilà, fin d’un nouveau cycle. Environ 7 mois quasi entièrement consacré à préparer et tenter dans les meilleures conditions l’UTMB, le plus célèbre ultra-trail de France métropolitaine. Avec un joli chrono en moins de 29h et une 88ème place pour couronner cette épopée mouvementée, le tout bien entouré ! Une course en 3 temps: d'abord la course compèt' pour jouer une place jusqu'à Courmayeur, puis la course "survie" pour ne pas abandonner jusqu'à Champex puis enfin la course euphorique pour terminer en beauté. Laurent finit lui l'UTMB en un peu moins de 33h, de loin sa meilleure perf ici également. D'ailleurs je lui ai piqué pas mal de photos ainsi qu'à mes accompagnants pour le récit, merci !
Bon, on va reprendre les évènements dans l’ordre, attention ça va être long…
A la suite du Tour de l’Oisans et des Ecrins en 2011, j’ai eu beaucoup de mal à complètement me débarrasser d’une tendinite rotulienne. Ça tombe bien, j’ai été refusé au tirage au sort ce qui me permet de me soigner sereinement tout en étant sûr de le courir en 2013 et d’éviter une édition 2012 tronquée par les conditions météos. Je suis une veinard en fait !
Ce n’est donc qu’à l’été 2012 que j’ai pu vraiment reprendre un entrainement digne de ce nom, orienté vers le Sprint Orientation, avec 3 mois assez intensifs de développement de VMA. Cette bonne base de vitesse et le volume associé me permettent finalement une bonne transition vers les raids orientation longs hivernaux (Noctorientation et Raid 28 avec les Let’s Go78 et l’Equipe du Coeur) qui se déroulent idéalement tant d’un point de vue technique que physique. La forme est là, le plaisir aussi !
Arrivé en février, je démarre l’entrainement plus spécifique au trail, c’est-à-dire l’enchainement des côtes parisiennes avec mon sac à dos ainsi qu’un travail de fractionné alternant plat et côtes. En vue : 3 trails de préparation autour de 50km qui doivent me faire les cuisses, améliorer ma vitesse ascensionnelle et ma capacité à encaisser les longues montées, ces 2 dernier points restant mon point faible en trail. J’enchaine à un rythme un peu trop rapproché (1 par mois) Trail de la Sainte Baume, Trail de la Sainte Victoire et 3 Jours de Chartreuse. Les résultats sont excellents mais je finis un peu cuit ces 3 mois et demi.
Ça tombe plutôt bien, 3 semaines de vacances au Japon me permettent de couper et de reposer un peu l’organisme malgré un rythme de visite effréné ;) La reprise début juin est dure pour la dernière partie de l’entrainement, spécifique UTMB : essentiellement des sorties longues, si possible de montagne et quelques séances d’entretien de VMA. Mais la fraicheur et la forme sont au rendez-vous fin juin avec une 4ème place au Tour des Glaciers de la Vanoise (TGV) dont je suis très fier, sans doute la course la plus accomplie de l’année.
La fin de la préparation se fait sans course officielle mais avec plusieurs « WE chocs » ou mini-stages en montagne : une reconnaissance du parcours de l’UTMB sur 4 jours mi-juillet, 3 jours de CO et de rando-courses autour de Briançon toute fin juillet et un dernier week-end vers Grenoble à 3 semaines de la course. Une difficulté à gérer sur cette période : une tendinite au tendon d’achille apparue après le TGV qui m’oblige à faire pas mal de kiné et à un repos quasi complet entre mes longues sorties, ce qui n’est pas plus mal vu le volume avalé. Je termine le dernier WE grenoblois bien fatigué avec 3 semaines pour recharger les batteries. La tendinite sera oubliée pour l’UTMB et je me présente donc au départ en parfaite possession de mes moyens, ce qui est toujours une première victoire vue la longueur de la prépa !
Après une semaine de vacances au soleil de Sicile, l’arrivée à Chamonix 5 jours avant la course se fait dans une ambiance plus fraiche ! On se retrouve avec Oriane et les parents pour passer la semaine dans un appartement loué aux Houches, à l’écart de l’agitation chamoniarde. Isa, Marie-Jo et Laurent nous rejoindront la veille de la course.
Petite ballade vers le Lac Blanc le lundi, revival de précédentes vacances plus de 25 ans en arrière, wouahou, je prends de l’âge moi ;) C’est drôle, en cette saison, ce sont les vrais randonneurs qui sont l’exception sur des chemins où on croise des traileurs à gogo en train de faire les dernières sorties.
Mardi, après la visite du Parc animalier de Merlet, très sympa, petit buffet avec les favoris des courses du week-end (je ne sais pas trop ce que je fais là…). Puis footing sous la seule petite pluie de la semaine, histoire de faire tourner un peu les jambes sur la portion Chamonix – les Houches, la seule que je n’avais pas reconnue en juillet. Comme ça je peux dire que j’ai déjà fait le tour complet au moins une fois ;)
Mercredi, c’est la montée à l’Aiguille du Midi bien sûr. Arff, que c’est beau là-haut… On se fait l’extra avec la traversée en cabine au-dessus du glacier du Géant. Plein les yeux !! J'accompagne Oriane à l'escalade, mais sans grimper, un ciné puis petit arrêt au ravito des Houches, le dernier de la TDS, le temps de voir passer le vainqueur puis Antoine Guillon.
Jeudi, c’est retrait des dossards après une longue queue (pas loin d'une heure et demie) a priori créée par le contrôle du matériel obligatoire, réduit au minimum ensuite pour permettre à tous les coureurs de la CCC de retirer leur dossard à temps. On y retrouve Laurent, l’occasion de passer un coucou à papy Turoom sur le stand Raid 28 au salon de l’Ultra puis retour aux Houches pour ouvrir la porte à Marie-Jo. Début des préparatifs des sacs !
Et en plus les mitaines Salomon pour protéger les mains des ampoules à cause des bâtons avec surmoufles imperméables Raidlight qui resteront bien sûr dans le sac, des manchons de bras pour tenir chaud sans avoir à enfiler une couche supplémentaire en début de nuit, lunettes de soleil, casquette (ou buff pour la nuit), bonnet, 4 barres de céréales et 2 gels pour les débuts d'hypo au cas où.
La nuit est difficile, je mets beaucoup de temps à m’endormir et me réveille très tôt. J’ai quand même dû fermer l’œil 3 ou 4h environ, c’est mieux que ma nuit blanche pré TOE mais c’est pas le top… On s’en contentera ! Derniers préparatifs puis repas sportif avec le fan-club qui nous encourage déjà debout autour de la table ;)
La météo prévue est parfaite sur le week-end, après 3 années pourries. Décidément, je suis verni ! Le train nous conduit à Chamonix où Laurent doit encore récupérer son dossard. temps d'attente: 0 seconde, c'est sûr que ça a du bon des fois la dernière minute ! Dernières formalités avec la dépose du sac d’assistance à Courmayeur où j’ai casé les Mizuno Cabrakan, un nouveau T-shirt, de la boisson énergétique et quelques autres trucs plus ou moins utiles au cas où.
Pour partir bien placé dans la rue piétonne de Chamonix et ne pas perdre de temps au départ, j’ai convaincu Laurent, plutôt habitué des départs en queue de peloton, de s’installer pas loin de 2h à l’avance assis derrière la ligne de départ. C’est sûr, on est bien placés !! L’ambiance monte doucement alors que les traileurs quittent petit à petit les pelouses ou terrasses alentours pour se grouper derrière nous. Les speakers chauffent la foule mais je ne ressens pas de tension particulière, disons pas plus que depuis 2 jours ;) Catherine Poletti vient prendre un petit bain de foule et souhaiter bon courage aux coureurs avec un petit discours en prime.
A environ 30 minutes du départ, tout le monde finit par se lever alors que les favoris arrivent tout devant, avec une ovation pour Anton Krupicka, indéniablement la star médiatique de l’UTMB cette année ! L'ambiance monte encore d'un cran et devient assez énorme, un bon « Get Lucky » à fond pour faire bouger la foule et les traileurs puis la musique de Vangélis après quelques brefs discours. C’est chaud, c’est le show, la grosse machine, mais c’est honnêtement très sympa et on se laisse prendrez comme le montrent les photos... Le décompte retentit et c'est enfin le lâcher de la meute à 16h30 !
Les bords de la rue piétonne de Chamonix dans laquelle nous nous élançons sont blindés de monde, c’est énorme, on est portés ! J'ai filmé mais je ne suis pas sûr que vos estomacs supportent, alors je laisse les photos de Laurent à la place. La densité de spectateurs diminue ensuite mais on continue à nous encourager tout au long de la route vers les Gaillands puis en forêt, en route vers les Houches. J’essaierai tout au long de la course de remercier tous ces gens qui nous encouragent par un petit mot… Après 1 ou 2 km avec Laurent, je prends un peu d’avance. On est à ce stade un peu au-delà de la 200ème place à peu près je pense.
Une fois le calme revenu en forêt, je me reconcentre sur ma course. L’objectif est de 28h30 et un top 50 (sur la base des éditions précédentes), avec aussi une prévision optimiste en 27h et une plus prudente en 30h. Il me faut gérer le début de course, être facile le plus longtemps possible, idéalement jusqu’à Courmayeur… Et ensuite tout donner ! Je marche 1 ou 2 fois sur quelques petites côtes un peu raides mais cette portion passe sans effort et on arrive déjà au ravito des Houches après une dernière petite côte avec à nouveau plein de monde pour nous encourager, en un peu moins de 39 minutes. Grosse ambiance dans la traversée du village jusqu’au téléphérique de Bellevue où un groupe de rock « rêve d’un autre monde ».
C’est le début de la montée vers le col de Voza et le Délevret. Alors que je déplie mes bâtons et remercie machinalement 2 personnes de plus qui nous encouragent, avant de reconnaître Kilian Jornet et Emilie Forsberg ! Sympa ! ça monte fort au début, je laisse partir les autres, restant à la marche, avant de retrotinner quand on rejoint une portion bitumée moins raide. Toujours du monde régulièrement qui nous encourage, c’est incroyable. On repasse à la marche rapide sur la fin de la montée plus raide. Dommage, quelques nuages sur les sommets du massif. J’atteins le Délevret après 1h33 de course avec quelques minutes d’avance sur ma prévision optimiste, bien que je me sente très facile et n'ai pas l'impression d'avoir forcé l'allure.
Après le Délevret suit le sentier en balcon vers la Charme avant la raide descente vers St Gervais. Je gère mais gagne quand même quelques places. Seul un coureur me dépasse dans un style peu orthodoxe et très peu économique. je serais curieux de savoir comment il a fini sa course !
Enfin l’arrivée à St Gervais avec à nouveau pas mal de monde et l’occasion de taper dans quelques mains sur la bord de la route. Je mange un bout de banane et d’orange, boit un coca et de l’eau gazeuse avant de repartir pour faire la bise à Danny, Isa et Jean qui m’attendent à la sortie du ravito. Jusqu’ici tout va bien, j’ai la pêche et le sourire ne quitte pas mes lèvres face à cette ambiance et cette météo superbes.
La portion qui suit vers les Contamines est globalement roulante et ponctuée de quelques pentes raides où il faut marcher. Je gagne quelques places mais les sensations sont maintenant moins bonnes et cette section me paraît toujours aussi longuette, comme lors de la reco. Il me faut un peu plus de 1h10 pour rejoindre le ravito où on est accueilli en haut du dernier raidard comme à un sommet de col du Tour de France, géant ! Je retrouve Oriane qui fait l’assistance pour remplir le Kmel-back et recharger les barres de céréales. En fait je ne les mangerai jamais et elles resteront dans le sac jusqu’à l’arrivée !
Le ravito m’a bien reboosté et je me sens beaucoup mieux en repartant, un peu plus isolé par rapport aux autres coureurs, en route vers le vrai début de la montée à Notre Dame de la Gorge. En route, je reçois les encouragements de Julien, un orienteur anciennement francilien que j’avais recroisé à Briançon un mois plus tôt et qui a couru (et fini vu sa veste) la TDS. En arrivant à la chapelle, au début de la voie romaine, des feux ont été allumés. Quand la nuit sera complètement tombée, ce sera magnifique… Et toujours plein de monde pour encourager, on est vraiment portés sur tout ce début de course, c’est extraordinaire.
La montée vers le refuge de la Balme, qui marque l'arrivée dans la montagne plus sauvage, se passe correctement alors que la nuit tombe et que je m’équipe de ma frontale. Les sensations sont bonnes et j’arrive à relancer en trottinant assez facilement sur la portion assez plate au milieu des alpages qui précède le refuge. Je sens mon estomac un peu lourd comme souvent lors de mes recos, mais sans avoir mal au ventre pour autant. Disons que ce n’est pas le confort digestif parfait. Je peux néanmoins me ravitailler normalement au ravito avec un premier bouillon de pâtes, un peu de banane, de coca, etc…
Je repars assez vite après juste 3 minutes d’arrêt pour la partie plus montagneuse et pentue avant le col du Bonhomme. Cette fois on se sent plus seul avec la montagne, surtout dans la nuit noire désormais… sauf quand on se retourne et qu’on découvre le fil ininterrompu des lupiottes qui redescend jusque dans la vallée au loin. Un spectacle fantastique mais qui met un peu la pression : ils sont nombreux prêts à me bouffer si je m’arrête ou que je ralentis trop ! Je maintiens à peu près ma place dans cette montée où de légers écarts apparaissent déjà et l’arrivée au col du Bonhomme apparaît finalement plus vite que dans mon souvenir de reco. Sur la portion à flanc globalement montante et un peu technique qui emmène ensuite au col de la Croix du bonhomme un peu plus haut, je reprends même quelques places et arrive au refuge juste après la bascule après un peu moins de 6h de course. La forme est toujours là, la montée a pu se faire en T-shirt manches courtes avec manchettes en plus sans souci en l’absence de vent, même si ça fraichit sur le haut. Bref, les conditions sont toujours idéales.
Au début de la descente, je crains néanmoins d’avoir froid et j'enfile mon T-shirt manches longues. Ce sera une erreur, j’aurai trop chaud sur toute cette descente mais ne m’arrêterai pas pour l’enlever. Peut-être une erreur pour expliquer en partie les difficultés à venir ? J’avais oublié que j’ai toujours plus chaud en descente qu’en montée à cause du rythme assez soutenu que je prends systématiquement… Pourtant j’essaie de rester prudent dans cette descente agréable, un peu technique et raide sur le haut puis roulante et herbeuse sur le bas. Sans jamais vraiment forcer, je gagne encore quelques places. Quel bonheur de bien descendre quand même !
Après 33 minutes de descente j’arrive aux Chapieux où un gros ravito nous attend après un contrôle de quelques éléments du matériel obligatoire. Pas de plat de pâtes comme j’espérais mais une soupe de pâtes et haricots bien copieuse et une compote feront mon bonheur avec les habituels banane, coca et eau. Je reconnais Laurent Brochard au ravito que j’ai rattrapé sur la fin de la descente ! Quand je demande notre position aux bénévoles, ils ne savent pas bien mais estiment que 40 à 50 coureurs sont passés. Ouah, ça ferait un super classement, surtout à ce stade de la course (en fait je suis 85ème) ! Je ressors sous les applaudissements après 7 ou 8 minutes. Même ici, si loin de Chamonix, il y a du monde pour nous encourager !
Nous prenons ensuite la section de petite route en fond de vallée qui mène à la Ville des Glaciers. Je prends mon bon pas de marche et relance dès que je le peux quand la pente s’adoucit. Bien que je sois un peu plus rapide que le temps que j’avais prévu, je perds pas mal de places sur ces 5km. Ils envoient les bougres ! Première alerte des jambes aussi : une douleur inhabituelle sur le côté extérieur du genou droit, comme un syndrome de l’essuie-glace, qui m’inquiète un peu… Les étoiles me servent de distraction et la section passe plutôt vite et bien.
J’arrive à stabiliser la position sur la portion de sentier qui suit le hameau pour rejoindre le col de la Seigne. Malgré tout, je coince un peu sur la fin d’ascension et les lupiottes derrière moi (à nouveau un spectacle féerique !) font un sacré rapproché. Ça commence à devenir dur ! Je pensais bien avant la course avoir une mauvaise passe entre les Chapieux et Courmayeur, quand la fatigue commence à s’accumuler mais que l’arrivée est beaucoup trop loin pour que le cerveau se libère. Bref, je cogite, le col ne semble jamais arriver. Je commence à me dire que malgré les bonnes sensations, j'ai peut-être un peu trop relancé en courant sur les sections vers la Balme et la Ville des Glaciers... Le pointage en haut à 0h50 est une libération !
La descente n’est la plupart du temps pas trop raide, voire même nécessite quelques relances sur le plat. Les écarts entre coureurs sont assez importants, on ne voit pas grand monde. Je grignote quand même 2 places au début de la descente. Assez vite, on arrive au ravito du Lac Combal où je grignote un bout de saucisson en plus de mes mets habituels.
Je trottine bien sur le plat qui suit mais me fait quand même méchamment déposer par une féminine avant le début de la montée vers l’arête du Mont Favre, sous la masse sombre du Mont-Blanc. Sans perdre de places, je me sens pourtant à nouveau très faible, sans jus, comme sur la fin de l’ascension de la Seigne. Le moral n’est pas élevé même si je suis toujours un peu en avance sur mes prévisions en 27h. Je sais pourtant que les sensations et le ressenti en ultra ne correspondent pas toujours à la réalité et les chiffres des temps de passage sont là pour me rappeler que tout va bien même si je suis plutôt lent en montée par rapport aux coureurs qui m’entourent. C’est la descente me permet de me maintenir à ce niveau. Donc tout va bien, bordel !! Quelques vaches endormies sur le bord du chemin nous encouragent juste avant le sommet de l'arête ;)
J'attaque prudemment la descente au vu de mon état de forme. Les quelques relances nécessaires pour rejoindre le col Chécrouit sont maintenant faites en marchant, je n’ai plus l’énergie du début de course et j'ai toujours quelques craintes pour pour ma gêne sur le côté du genou droit... Je bénis les parties plus descendantes où la course ne nécessite pas d'effort particulier. Arrivé au ravito du col Chécrouit, je prends le temps de boire un coca avant de basculer dans la partie plus raide de la descente vers Courmayeur.
Le terrain me convient mieux et je regagne pas mal de places sur le monotrace terreux. J’ai à nouveau bien chaud, peut-être ai-je trop attaqué sur la section ? L’arrivée au centre sportif de Dolonne signifie que je vais retrouver les parents et Isa, une très bonne perspective pour se rebooster. Je suis tellement focalisé sur Isa et Danny que j’aperçois à l’entrée de la salle des sports de Dolonne que je ne remarque même pas les milliers de sacs jaunes alignés de chaque côté !! Il faudra que je ressorte pour récupérer le mien… A l’intérieur, Jean me fait une assistance efficace pour changer chaussures et chaussettes, le T-shirt et le dossard. Je laisse ma frontale puissante pour une plus légère vu que le lever du jour devrait survenir avant que je n’entame de descente. Il m’annonce un classement autour de la 80ème place, c’est une petite déception, l’erreur des bénévoles aux Chapieux m’avait fait espérer mieux. Je remets de la NOK sur les pieds avant de me rendre vers le ravito à l’étage au-dessus.
Le plat de pâtes est bien là cette fois mais les pâtes ne passent pas ! La nausée me vient directement quand j’en avale. Ça c’est nouveau et pas très bon ! Jamais connu ça en ultra ! J’arrive à boire un peu de bouillon aux vermicelles à la place et me force à prendre une compote en plus et du coca pour avoir quelquechose dans le ventre mais tout ça me pèse. Bof bof… Avec tout ça mon arrêt aura duré 26 minutes au lieu des 20 prévues. Je demande en sortant aux parents de récupérer du primperan pour le prochain ravito avec assistance à Champex. C’est idiot car j’y serai dans 10h au mieux et c’est maintenant que j’ai mal au ventre et la nausée… J’aurais mieux fait d’aller voir le personnel médical tout de suite !
Je repars donc en marchant doucement avec la famille pour essayer de digérer tant bien que mal les quelques trucs avalés de force. La montée vers Bertone est dure et je n’ai toujours pas la forme, c'est même de pire en pire. Je perds quelques places au début. Puis je stabilise ma position avec un gars pas loin devant et un autres pas loin derrière. Ce n'est pas parce que ça va mieux ! Visiblement nous sommes tous les 3 dans le dur en même temps car j’ai l’impression de ralentir de plus en plus, me sentant nauséeux et très fatigué, mais les écarts se maintiennent. Le chrono me confirme que je suis plus lent que mes prévisions en atteignant le refuge après 1h20 depuis la sortie de la base-vie. L’envie de dormir se fait aussi sentir pour la première fois dans la partie en forêt. Le fait d’avoir une lupiotte qui n’éclaire pas bien et me laisse dans un halo bien pâle par rapport à la Lupine ne doit pas aider. Bref, ça va pas fort !
Le refuge est un soulagement et je pars demander un médoc contre les nausées avant même d’envisager de me ravitailler. Ça ne va vraiment pas… Le responsable du ravito m’emmène à l’intérieur et me donne un comprimé tandis que mon suiveur entre lui aussi, expliquant en espagnol qu’il a vomi 3 fois dans la montée… C'est l'hécatombe gastrique ! Après quelques minutes, je finis par vomir aussi tout ce que j’avais ingurgité à Courmayeur. Visiblement tout était resté bloqué dans l’estomac… Je me pose sur un banc en me demandant si je dois abandonner et redescendre sur Courmayeur ou attendre voir si ça passe. Je préviens la famille qui me conseille de dormir un peu. Je m’exécute étant déjà somnolent avec évidemment aucune envie de ressortir. Je m’allonge sur un banc sous une couverture et dors un quart d’heure.
Au réveil ça ne va pas mieux. Je tente quand même d’avaler un peu de bouillon sans pâtes, toujours surveillé et encadré par les bénévoles du ravito. Malgré mon état physique léthargique, j’ai le cerveau en ébullition sur la suite à donner à cette course qui devient pathétique : je n’ai pas spécialement besoin de me prouver que je peux finir la course, j’en ai fini d’autres et des plus dures… Je me suis préparé pour claquer une perf et visiblement c’est raté. Et je n’ai pas envie de me retrouver en galère au milieu de nulle part avec le risque d’avoir froid si je dois vomir et m’arrêter dans un lieu moins confortable… Mais en même temps je n’ai jamais eu autant de mes proches venus pour me supporter sur une course et Isa m’a bien briefé avant le départ : « Surtout tu n’abandonnes pas » ! Au téléphone ils ne me mettent pas la pression mais ils sont déjà en Suisse à m'attendre… L’espagnol a décidé d’abandonner et redescend sur Courmayeur avec un autre coureur pour qui tout va bien sauf qu’il ne prend pas de plaisir et n’est sans doute pas à la place qu’il espérait. Le bénévole me demande ce que je fais et je décide de ne rien faire, d’attendre encore. Je m’allonge encore une fois 20 minutes, en dormant par intermittence. Je me relève sans réveil, rien de miraculeux mais c’est pas pire qu'avant. Le bouillon reste dans l’estomac et je retente un coca cette fois qui reste aussi. Je me décide finalement à tenter de repartir d’autant que le jour se lève limitant mes craintes d’avoir trop froid. J’informe les bénévoles qui m'encouragent à aller au bout et la famille au téléphone qui me soutient aussi régulièrement par SMS et me mets en route avec un malheureux bouillon et un coca en tout et pour tout dans l’estomac… On va y aller cool !
Je repars donc après 1h55 d’arrêt en tout et toujours mal au bide. J’ai les larmes qui me montent aux yeux, l’impression d’avoir planté ma course, gâché plusieurs mois de préparation… oubliant que cet aspect digestion fait partie intégrante de la course en ultra et que je n'y ai peut-être pas porté l'attention qu'il aurait fallu dans ces mois d'entrainement... De retour sur le sentier j’oublie le chrono car j‘ai maintenant 1h de retard sur mon plan en 30h et je ne me vois pas capable de rattraper un tel retard vu mon état. On va déjà essayer d’atteindre la Suisse pour éviter aux parents de revenir à Courmayeur. On s’était dit avec Laurent en rigolant au départ qu’il faudrait qu’on se ramasse l’un l’autre si on se retrouvait l'un l'autre en perdition sur le bord du chemin… Je me demande à ce moment-là si ce n’est pas ce qui va arriver. En fait Laurent passera au refuge 25 minutes après mon départ de Bertone…
Dans ma déprimante tentative de continuer, il y a un point qui me remonte le moral, c’est la vue superbe sur le Mont-Blanc au soleil levant que j’immortalise. Ce balcon est tellement beau et l’objectif chrono tellement loin désormais que j’aurai tort de me priver. Je prendrai aussi les Grandes Jorasses et le Mont Dolent plus loin. Après un début très prudent sur le balcon, je me remets à trottiner doucement sur les portions descendantes. L’avantage de m’être arrêté 2h est que le rythme des personnes avec qui je repars correspond bien au mien, un peu diminué, pour repartir. Je suis même surpris de rattraper quelques personnes sur la section malgré mon estomac vide. Allez, tout ne va pas si mal...
Arrivé au refuge Bonatti, je demande immédiatement un autre motilium pour tenter de soulager mon estomac avec lequel je suis toujours en délicatesse, ou en tout cas pour ne pas rechuter. J’arrive à prendre un bouillon avec vermicelles et du coca sans avoir envie de le rendre immédiatement à dame nature. Je repars sur le même rythme et continue à gagner quelques places malgré l’estomac douloureux, notamment dans la petite descente vers Arnuva. J’arrive aussi à boire désormais un peu de boisson énergétique. Je suis assez surpris de tenir le rythme que je m’étais prévu pour faire 30h, j’ai donc toujours une heure de retard environ.
Nouveau ravito et nouvelle quête du médecin. Une secouriste me conseille d’attendre la Fouly pour reprendre un motilium. Je demande quels aliments solides essayer avec le minimum de risque. Ce sera bouillon de pâtes à nouveau et fromage. La banane attendra. Les sensations, sans s’améliorer, ne sont pas plus mauvaises, donc pas de raison de s’arrêter là alors que toute la famille attend en Suisse. J’attaque donc le Grand Col Ferret, le col en haut duquel on peut commencer à penser à l’arrivée. Mais à ce moment elle me paraît encore tellement lointaine, je songe plus à l’abandon à la Fouly ou Champex qu’à une arrivée à Chamonix si je dois continuer avec autant de souffrance digestive qui me gâche la course et m’enlève tout plaisir d’être là… La montée n’arrange pas les choses, j’ai l’impression de me traîner. Autant sur le plat, j’arrivais à gagner des places, autant là j’ai du mal à tenir le rythme des gens qui m'entourent mais je m’accroche. Le vent m’oblige à mettre la veste. Elle est raide cette montée et je dois pousser sur les bâtons. Après un peu plus d’1h10, le col est enfin en vue, ouf. Tiens c'est le temps mini que j'avais prévu ?! J'ai dû un peu me planter là sur les prévisions !!
Je m’arrête juste en-dessous du col pour enlever la veste. Le début de descente est laborieux à cause de l’estomac douloureux qui m’empêche de me lâcher et de me faire plaisir alors que les cuisses ne demandent pas mieux. Je me surprends même à préparer dans ma tête les mots pour expliquer un futur abandon à la Fouly… Cela dit, après la Peule, la gêne liée à l'estomac diminue progressivement et j’arrive à me lâcher un peu plus sur le bas de la descente, ce qui fait temporairement évacuer les pensées d’abandon. Et puis il y a surtout un plaisir de retrouver la famille à la Fouly, un peu de soutien à qui confier mes malheurs et auprès de qui trouver du réconfort. Je mange un peu au ravito et tente la banane cette fois en plus du menu habituel, alors que le speaker annonce qu’on est 220 à être passé au ravito. Et oui forcément c’est pas le top pour le classement 2h d'arrêt ! Je m’arrête ensuite reprendre du motilium au poste de secours en sortie du ravito. Un peu plus de 10 minutes d'arrêt en tout à la Fouly.
En repartant, l’estomac qui allait mieux en fin de descente me pèse à nouveau et me plombe un peu le moral. Je me vois toujours mal continuer au-delà de Champex… J’ai besoin de marcher pour digérer sur le début de cette section roulante qui nous conduit à Praz de Fort puis Issert et me fais passer par 2 coureurs. Cela dit après quelques dizaine de minutes j’arrive à me remettre à trottiner et les rattrape à mon tour, ainsi que quelques autres coureurs. Finalement avec le temps les aliments passent et l’estomac ne me gêne plus trop. Et comme lors de la reco cette section pourtant jugée souvent longue et ennuyeuse passe sans lassitude particulière.
Dans la montée qui suit vers Champex, je me mets même à doubler en côte, ce qui ne m’était pas arrivé depuis… ben, depuis le début quasiment ! Je me rends compte que mon pas de montée, bien que lent, est finalement efficace grâce à son amplitude et ça me remonte le moral. Jean m’attend un peu sous le sommet et m’accompagne sur les dernières minutes avant le ravito où Oriane assure l’assistance. Cette fois je tente quelques penne rigate nature en plus de mon bouillon et autres aliments que je tolère. L'arrêt dure un quart d'heure, ça passe vite...
Je repars en marchant avec Oriane pour aider à digérer puisque je sais maintenant que le mal de ventre post-ravito disparaît assez vite. Au bord du lac on retrouve tout le reste de mes supporters en terrasse sauf Jean qui nous a manqué à la sortie du poste. Isa est contente de me voir avec le sourire après les passages précédents difficiles. De mon côté la motivation est revenue vite et fort alors que j’étais encore en plein doute à la Fouly. Je suis désormais certain de pouvoir finir. Sans les maux de ventre je me sens indestructible et je prends enfin du plaisir en course ! Les extrêmes de l’ultra ! Il ne faut pas grand chose pour basculer dans la déprime ou l’euphorie.
Ce sentiment d’euphorie est renforcé dès que je me remets à trottiner dans la descente qui suit Champex. Je cours sans effort, les jambes au top, ménagées par le rythme cool imposé par mon estomac depuis Courmayeur. Quelques encouragements autour de la fontaine au Plan d'Au, au pied de la montée vers Bovine qui fait généralement peur à l'UTMB. Mais de mon côté je me mets à doubler goulûment et ça va continuer jusqu’au bout pour une remontée fantastique. Le parcours emprunte la nouvelle montée de Bovine, avec moins de marches mais une pente très raide. Tout le monde semble souffrir et le dit quand on échange quelques mots. Je réponds que c’est dur mais en fait je ne souffre pas. Déjà que je double, je ne vais pas aussi en remettre une couche pour leur casser le moral ;) Un anglais de Chamonix qui vient de voir passer ses postes m’accompagne et me fait la causette pendant quelques minutes, très sympa. On débouche enfin sur l’alpage et le poste de contrôle qui est un peu plus bas que prévu suite au changement du chemin de montée.
Après le pointage, on monte encore un peu en pente plus douce et en se frayant un chemin parmi les vaches noires suisses du coin qui ont investi le sentier. Je regarde le temps de montée au sommet pour me rendre compte que j’ai été nettement plus rapide que le temps prévu pour mon plan en 27h ! Incroyable ! J’ai moins de 30 minutes de retard sur mes plans pour finir en 30h malgré des arrêts aux ravitos plus longs que prévus. Avec la confiance qui est la mienne à ce moment, je ne doute plus que je peux encore faire moins de 30h et j’attaque la descente de manière offensive ! Elle est un peu technique, notamment sur le haut, avec pas mal de pierres et de racines et je me fais à nouveau bien plaisir à pouvoir envoyer sans être bridé par mon estomac. Même la partie raide après le col de la Forclaz est une formalité pour mes cuisses, c’est trop bon ! Seule ombre au tableau : un début de tendinite derrière le genou. Pas suffisant pour me décider à ralentir cela dit, même si je sais que la douleur va aller crescendo.
J’arrive à Trient et croise Isa et Danny qui m’expliquent rapidement que tout le monde est un peu à la bourre avec mon arrivée rapide et le fait d’avoir attendu le passage de Laurent à Champex. Effectivement, je vois Marie-Jo sortir d’un café avec la sac d’assistance et me courir après pour venir au ravito faire mon assistance suite à une indisposition d'Oriane pour ce coup-ci ;) Pas de souci, je ne suis pas à 30 secondes près, la routine est bien établie et, quand ça va bien, on n’a pas besoin de grand chose, essentiellement de remplir de boisson énergétique le Kmel-back. Je repars sous les encouragements nourris de la team prêt à avaler Catogne !
J’adopte le mode Pac-Man sur cette montée. Je regarde les coureurs que j’aperçois devant moi. Ils deviennent mon objectif, les uns après les autres. Je dois tous les rattraper. Et comme ça marche, ça me motive et la montée passe vite. J’ai juste un doute sur ma vitesse réelle quand je vois 2 nanas remonter tout le monde très rapidement. En fait elles s’entraînent mais ne sont pas dans la course. J’essaye de tenir leur rythme sur la fin de la montée, de bonnes locomotives pour maintenir l’effort. J’atteins le pointage de Catogne en 67 minutes, 8 de moins que mon estimation rapide pour 27h ! ça y est j’ai rattrapé mon planning pour les 30h. Il reste une côte mais vues mes jambes je sais que c’est gagné.
Sachant que les 30h sont quasi acquises, j'attaque un peu moins dans la descente pour Vallorcine pour garder des cuisses pour l’ultime montée vers la tête aux Vents. M'enfin je ne traîne pas quand même et je reste en-dessous de mes temps de passage prévus, avec encore pas mal de places gagnées. Vallorcine, c’est le dernier gros ravito avec assistance. Oriane s’en charge pendant que je me fais mitrailler par Marie-Jo ;) Je récupère la bonne frontale pour la fin qui sera faite de nuit. Je sens toute la famille bien à bloc pour m’encourager. Ça va tellement bien que ça me parait presque bizarre qu’ils m’encouragent autant pour la fin car je sais bien que je vais finir, aucun doute là-dessus, et vite en plus ;)
Je repars au petit trot vers le col des Montets, en essayant de courir le plus souvent possible. Enfin on attaque la partie raide de la montée juste après le col. La fatigue commence quand même à rattraper mon euphorie mais je maintiens un rythme rapide, gagnant à nouveau plusieurs places. J'apprends que je suis en train de rentrer dans le top 100, wouaouh jolie remontée, confirmée par les SMS de quelques supporters ;) Sur le haut, la pente s’adoucit mais le terrain devient technique avec beaucoup de rocher et même quelques pierriers. Je retrouve avec un énorme plaisir ce type de terrain. Je dépose un concurrent en galère dans ces blocs tandis que j’ai l’impression de voltiger de rocher en rocher. En plus le coucher de soleil sur le Mont-Blanc offre une lumière de toute beauté. C’est grisant ! Je chausse la frontale un peu avant la Tête aux Vents, prêt pour une belle descente finale.
Grande satisfaction que de plonger dans le début bien technique de cette descente, vigilant mais heureux dans ces cailloux ! J’ai aussi compris dans cette fin de montée que je peux même passer sous les 29h. Je commence d’ailleurs à beaucoup penser à la ligne d’arrivée. Celle-là je ne pensais pas avoir le courage d’aller la chercher à la mi-course. Je l’aurai méritée et je compte bien en profiter avec toute la famille ! Car mes 2 précédentes arrivées d’ultra s’étaient soldées par soit une hypo soit par de sérieux maux gastriques qui m’avaient un peu gâché les minutes d’après la ligne à cause d’un finish un peu trop en trombe. Du coup, non seulement je continue de bien boire mon produit énergétique, mais surtout je n’attaque pas comme un taré comme je le fais parfois dans les dernières descentes. Attention, j’y vais franchement quand même avec la frontale à pleine puissance pour faire moins de 29h (pour la marque symbolique) mais je ne jette pas mes dernière forces dans la bataille pour gagner 2/3 places de plus, d’autant que je sais que mon arrêt a condamné mon objectif réel qui était le top 50. Déjà je sais depuis la Tête aux vents que je vais entrer dans le top 100 et, de là où je viens quand j’étais à Bertone, c’est déjà assez incroyable et suffisant à me satisfaire et effacer mes déboires italiens. Bref je descends, je m'applique mais je suis déjà sur la ligne d'arrivée dans ma tête en arrivant à l'ultime ravito de la Flégère où je me contente d'un verre de coca.
Après une courte remontée vers la gare de téléphérique de la Flégère, on plonge pour de bon dans la descente un peu piégeuse en forêt et de nuit vers Chamonix. Sans doute à cause de l'impatience de franchir la ligne, cette descente m’a semblé longue malgré ma forme et mon excellent moral, ce qui me fait penser qu'il vaut mieux l’aborder avec la patate sinon ça doit être interminable ! J’entre enfin dans les rues de Chamonix en courant à bon rythme. Personne devant ni derrière, c’est ce que je voulais pour profiter de cette arrivée. Il commence à être tard mais il y a encore beaucoup de monde pour nous encourager, c’est vraiment agréable et je remercie les spectateurs du soir. Sur la rue piétonne je vois Oriane et Isa qui déboulent comme 2 furies vers moi et m’entraînent, une sous chaque bras, vers la ligne d’arrivée en courant à fond et en poussant des hurlements bizarres ! Tiens, on dirait que l’ultra ça attaque aussi les accompagnateurs ;) Moi qui pensais franchir la ligne tranquille !! Leur bonheur est plus démonstratif que le mien mais j’ai bel et bien savouré chaque seconde de cette arrivée et je retrouve Jean, Danny et Marie-Jo sur la ligne pour la partager avec eux aussi, et avec Manu qui m’appelle au téléphone juste après le passage de la ligne qu’elle a vécu en direct sur Internet sur le live TV. 88ème en 28h57, la boucle est bouclée !
Le temps de manger du fromage (de loin ce qui me faisait le plus envie au ravito d’arrivée), retour rapide à l’appart, soutenu par Oriane : la douleur tendineuse derrière le genou qui m’avait accompagné sur la dernière partie du parcours est bien gênante maintenant que je me refroidis, en plus des cuisses dures comme du bois après ces derniers 50km un peu fous. Une douche, quelques pâtes et je m’endors direct pour 1 ou 2h seulement car Laurent vient de passer à la Flégère. Retour à Chamonix pour l’accueillir à son tour. Il a pulvérisé son temps sur l’UTMB en terminant en moins de 33h. Et il hésitait à me croire quand je lui disais qu’il valait beaucoup mieux que 40h ! Cette fois c’est moi qui l’accompagne (je me contenterais cependant des 50 derniers mètres avec mes jambes en bois ;) ).
Au bilan, quel plaisir de réussir à terminer, surtout dans ces conditions, en étant entouré de ses proches ! Un grand grand merci à vous d'avoir partagé mon "trip" malgré le stress que ça a pu parfois engendrer pour vous aussi et de m'avoir maintenu à flot et donné une bonne raison de ne pas m'arrêter en cours de route, comme les autres pourvoyeurs de SMS qui ont suivi la course sur internet ! Et bien sûr merci à Laurent qui m'a accompagné dans l'aventure, depuis notre inscription initiale fin 2011... On en a fait du chemin depuis entre les Raids 28, le TGV et la demi-reco. Tu es le parfait partenaire :)
Concernant la perf, il y a toujours le petit regret de se dire quel temps et quelle place cela aurait pu être sans les 2h d’arrêt à Bertone... Les 27h étaient jouables sans doute, ce sera peut-être une autre fois. Cela dit d’ici là il faudra que je comprenne et que je règle ces problèmes digestifs sur ultra qui m’avaient déjà touché il y a 2 ans au Tour de l’Oisans et des Ecrins. Le manque de sommeil la nuit d’avant ? Un mauvais habillement (trop froid ? trop chaud ?) ? Trop à l’attaque dans la descente avant Courmayeur ? Un aliment qui ne passes pas (le saucisson du Lac Combal ?) ? Ben j’en sais rien… Mais bon je garde une certaine fierté de ne pas avoir jeté l’éponge tout de suite à Bertone et d’avoir redressé la barre pour finir en moins de 30h malgré tout, malgré les nuages très noirs que j’avais dans la tête, et alors certains abandonnaient devant moi. Il faudra aussi que je trouve un truc pour bien dormir les dernières nuits parce que ça ne doit pas aider d’arriver au départ en dette de sommeil.
Concernant la course, objet de débats perpétuels sur les forums spécialisés, je dois avouer que j’ai adoré. La météo a aidé, sans aucun doute, après 3 années de mauvais temps, mais l’ambiance au départ et à l’arrivée, l’enthousiasme des encouragements tout le long du parcours et particulièrement de Chamonix à la Balme et bien sûr les paysages que le tour offre (même si j’en ai nettement moins profité que lors de ma reconnaissance) offrent vraiment une expérience exceptionnelle à la hauteur du défi sportif. Et quand on remplit ce dernier, il ne reste que du positif. Bien sûr il peut y avoir un côté un peu too much à Chamonix avec le monde, les speakers, les stars, le salon de l’ultra-trail, etc… On est plus dans le show (business) que dans l’ambiance montagne et il faut savoir prendre du recul pour n’en garder que le bon. En ce qui nous concerne, étant restés essentiellement aux Houches on a échappé un peu au « cirque » et on n’a pas eu le temps de saturer face à l’omniprésence de la course. C’est pour moi la formule idéale.
Sinon pas mal de monde m'a demandé quelle sera la prochaine course. Je ne sais pas encore mais je pense que ce sera un parcours bien technique. Je me suis trop fait plaisir dans les caillasses de la Tête aux Vents, ça me manque ! Andorre, la Corse ou le nouvel ultra de Belledonne par exemple me font de l’oeil… En tout cas cet automne, je me contenterai de la CO pour que ce ne soit pas trop long, faut pas déconner trop longtemps non plus ;)
Z'avez tout lu ?? Ben vous êtes courageux vous aussi ;)
Accueil - Haut de page - Aide
- Contact
- Mentions légales
- Version mobile
- 0.06 sec
Kikouroù est un site de course à pied, trail, marathon. Vous trouvez des récits, résultats, photos, vidéos de course, un calendrier, un forum... Bonne visite !
7 commentaires
Commentaire de st ar posté le 11-09-2013 à 05:31:16
J'avoue , j'ai pas tout lu...je me suis juste plongé dans les photos au réveil... Je comprends que tu as des pb digestifs, dommage mais ta perf est déjà énorme. Un grand bravo!
Commentaire de Japhy posté le 11-09-2013 à 06:34:21
C'est incroyable, énorme et monstrueux ce revirement de situation et ce suspense dans les variations du classement! Enorme bravo!
Commentaire de Maido posté le 11-09-2013 à 15:21:10
Félicitations! C'est quand même un monde à part, ceux qui visent un classement sur Ultra ;)
Je suis curieux de savoir comment tu fais pour être aussi à l'aise en descente. Ca me laisse rêveur !
Commentaire de Sprolls posté le 12-09-2013 à 21:51:05
Le secret pour les descentes: randonner sur les sentiers de montagne caillouteux régulièrement et/ou faire de la course d'orientation (pour la confiance dans les appuis et l'aisance) et avoir fait du triple-saut en compétition (pour les cuisses) ! Merci pour les commentaires en tout cas :)
Commentaire de La Tortue posté le 12-09-2013 à 14:03:27
j'ai parcouru en diagonale, mais je reviendrais me délecter du texte et des photos ce we.
bravo : top 100 à l'utmb et <30h, c'est fort, c'est très fort !!!
et surtout pas de regret pour ton arrêt prolongé. si ça se trouve en ne t'arrêtant pas, tu aurais mis plus de temps au final car tu étais encore très loin de l'arrivée et beaucoup de choses auraient pu se passer !
respect Benjamin !!!
Commentaire de Sprolls posté le 12-09-2013 à 21:54:47
Merci la Tortue ;) pas de souci le plaisir pris sur la fin de course domine très largement la petite déception de la mi-course
Commentaire de JLW posté le 10-10-2013 à 23:59:42
J'ai tout lu et curieusement me suis retrouvé avec des sensations similaires sur mon CCC il y a de cela qq années. J'avais perdu 1h à la Fouly et 1h à Champex avant de ressusciter dans la montée de Bovines. Cela dit je finis loin du TOP 100. Bravo pour cette belle perf et merci pour ton récit.
Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.