Récit de la course : Ultra Trail du Mont Blanc 2006, par philft

L'auteur : philft

La course : Ultra Trail du Mont Blanc

Date : 25/8/2006

Lieu : Chamonix Mont Blanc (Haute-Savoie)

Affichage : 3366 vues

Distance : 158.1km

Objectif : Se défoncer

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Le récit

Lorsque nous arrivons ce mercredi 23 août à Chamonix, j'ai du mal à réaliser qu'une année s'est écoulée depuis ma première participation en 2005. Rien n'a changé, seules les dates ont été modifié sur l'arche de départ. Cette année est passée si vite, cette course m'a tellement obsédée chaque jour, que déjà nous revoilà à l'aube de recommencer.

Je suis venu avec mon ami Jean-Luc, qui a abandonné sur tendinite à Bertone l'année dernière plus un autre compère de trail, Jean-Pierre, qui souhaite lui aussi connaître le grand frisson de l'UTMB.
Seul changement, cette année nous logeons dans un gîte ( le Chamoniard volant pour ne pas le citer) que de nombreux autres coureurs ont également investi.

Le moins que l'on puisse dire c'est que nos G.O. ne sont pas des gens statiques. Ainsi les quelques petits couacs de l'année dernière se sont transformé en une avant-course à l'organisation impeccable: remise des dossards sans faille, pasta party sous chapiteau spacieux et remise des sacs pour Courmayeur et Champex hyper bien réglée. L'avant – course est nickel, seul le temps n'est pas de la partie, mais n'était-ce pas déjà le cas l'année dernière, alors croisons les doigts.

Fort de ma première expérience, je me suis fixé quelques objectifs pour cette année. Rien de précis mon temps final où le but est avant tout de terminer mais plutôt sur la durée des arrêts où l'année dernière j'avais perdu la bagatelle de 6h. Tout ceci pour me permettre d'atteindre un deuxième objectif, primordial celui-là : aborder la redoutable montée de Bovine de jour. Tout ceux qui ont fait ce trail savent de quoi je veux parler. Une montée interminable, un sentier introuvable, des blocs de pierre énormes à franchir, un torrent à traverser multes fois. Le cauchemar de l'UTMB. Je me dis que l'aborder de jour sera déjà un avantage dans le sens où il sera déjà plus facile de repérer le chemin et le balisage.

Lorsque nous nous rendons place du triangle de l'amitié aux alentours de 18h30, un très grand nombre de coureurs sont déjà sur place. Nous nous faufilons sur un côté et nous insérons dans la masse. 2500 coureurs cela commence à faire beaucoup. Je crains le départ car déjà l'année dernière, nous avions mis 5 minutes à passer la ligne .Et là nous avons un bon millier de concurrent devant nous. Les discours et la musique sont cette année totalement inaudible. La sono n'est visiblement pas à la hauteur de l'événement. C'est dommage car le frisson est garanti. Tant pis, nous aurons bien d'autres émotions durant la course. Quand le maire de Chamonix donne le départ, je sens qu'il vaut mieux être prudent et faire attention à ne pas trébucher sur les marches ou à prendre un coup de bâton d'un des concurrents qui nous entourent.
Nous ne commencerons véritablement à trottiner qu'à la fin du centre de Chamonix. La foule des coureurs est très compacte et j'ai bien l'intention de me dégager pour pouvoir courir librement à mon rythme.

Contrairement à l'année dernière, où nous avions fait course commune avec Jean-Luc jusqu'à son abandon à Bertone, il a été décidé que chacun ferait sa course. Pourtant nous décidons de partir ensemble pour remonter l'interminable file qui s'égréne devant nous.
Arrivé aux Houches, nous avons dépassé un sacré paquet de coureurs. Une foule dense nous accueille et nous acclame, avec cependant une bronca d'enfer pour quelques coureurs qui coupent le virage montant au village pour gagner quelques places. Bravo messieurs pour votre état d'esprit et chapeau aux spectateurs de les avoir hué. Un court arrêt au ravitaillement où je prends quelques gâteaux secs et nous repartons vers les hauteurs des Houches pour aborder le col de Voza.

Comme l'année dernière, nous avons droit à un superbe coucher de soleil sur le massif du Mont-Blanc. Magnifique. Lorsque nous abordons le premier chemin en forêt, je décide de sortir mes bâtons. Je sais qu'à partir de ce moment là je vais les avoir jusqu'au bout, mais je ne le regretterai pas car Voza n'est pas très long mais le pourcentage est déjà bien élevé. Je vais bientôt perdre mon ami Jean-Luc qui à un problème d'attache sur une bretelle pour une de ces gourdes. Nous allons, à partir de là, mener la course chacun de notre côté. Avec succès pour tous les deux cette année.

A Voza, je me ravitaille rapidement, sort mes manchettes et ma frontale, et plonge dans la descente qui est sans doute une des plus faciles de la course car sur un chemin très carrossable. La nuit commence à tomber et de petits groupes se forment. Je continue à remonter des coureurs, me sentant très en jambes. Attention à ne pas s'enflammer. Les derniers passages en forêt avant les Contamines sont difficiles avec des racines et des descentes assez raides. L'arrivée aux Contamines est encore plus grandiose que l'année dernière. Il n'y a le passage que pour un seul coureur tellement la foule est dense. A ce moment là, tu ne cours plus, tu voles littéralement sous les acclamations. Je m'arrête pour un ravitaillement minimum et décide de repartir très vite. Par rapport à l'année dernière, nous plongeons directement en contrebas sur un chemin. La solitude redevient immédiate après ce bain de foule. Il commence à faire froid mais j'ai décidé de ne changer de tenue pour la nuit qu'à la Balme.

Avant d'attaquer l'ancienne voie romaine qui démarre au pied de Notre-Dame de le Gorge, le chemin est plutôt roulant et je vais à bon rythme. Les coureurs sont espacés maintenant. Dés le début de la montée, je sens un coup de moins bien. Je manque de puissance dans les jambes et mes bras ont du mal à pousser sur les bâtons. Plusieurs coureurs me passent sans coup férir. Heureusement la montée est courte et je peux récupérer sur une partie relativement plate avant d'aborder le dernier coup de rein qui arrive sur la Balme. Première chose en arrivant : se changer complètement car j'ai beaucoup transpiré et je suis trempé, j'ai froid. Des vêtements secs sur le dos, une bonne soupe et me voilà requinqué, prêt à attaquer le col du Bonhomme. Le début de la montée est facile, j'avance à mon rythme. Personne n'est là pour me ralentir, les coureurs se suivent à distance respectables. Mais la montée est longue et sur la fin, je commence à coincer. Beaucoup de coureurs me rattrapent. Sentant que je les gêne dans leur progression, je les laisse passer. Je commence à me demander si je ne suis pas parti trop vite. Je m'accroche tant bien que mal jusqu'au col puis jusqu'au refuge de la Croix du Bonhomme avec la crainte maintenant d'aborder la descente vers les Chapieux où j'avais particulièrement souffert l'année dernière.

Et bien bis repetita, je vois encore nombre de coureurs qui me passent. J'essaie de faire de mon mieux mais la descente ce n'est vraiment pas mon truc. A l'arrivée aux Chapieux, j'ai perdu la bagatelle de 150 places depuis la Balme. Ce n'est pas grave, la course est encore longue. Je m'arrête une dizaine de minutes avant de repartir transi de froid malgré deux soupes. La montée vers le village des Glaciers est exposée à un vent glacial qui souffle en cette nuit claire et étoilée. J'ai beaucoup de mal à me réchauffer. Heureusement je suis reparti des Chapieux avec un coureur (dossard 166) avec qui je vais faire route commune jusqu'au début du col de Seigne. C'est un cent bornard, finisher l'année dernière et qui vient d'Anglet. Nous n'arrêterons pas de discuter, ce qui me fera un peu oublier le froid. Dés le début de la montée vers le col de Seigne, je le lâche, nous nous reverrons plusieurs fois au cours de la course mais il finira nettement mieux que moi. L'année dernière, le jour se levait lors de mon arrivée au col de Seigne. Cette année la nuit est encore dense à mon passage. La montée s'est passée sans encombre même si encore une fois, la fin a été difficile.

Je sais que cette année le ravitaillement d'Elisabetta est un peu plus loin en contrebas du refuge. C'est dommage car je sens que j'ai vraiment besoin de manger. Je me sens au bord du malaise hypo. Encore une fois, je vois un tas de coureurs me passer et moi qui avance péniblement pas à pas. Impossible de seulement trottiner. Je suis au plus mal en arrivant au contrôle d'Elisabetta. Je prends mon temps et mange des soupes avec du pain pour plus de consistance. Je repars en continuant à manger du pain et du fromage le long du lac Combal sur cette partie plane et facile.

Avant d'aborder l'arête Mont Favre, je sais que le soleil ne va pas tarder à poindre. J'attaque la montée de manière très prudente cette fois-ci. J'arrive ainsi au contrôle sans baisse de régime et j'attaque la descente vers Chécroui en trottinant. Je me sens requinqué, je renais avec le lever du soleil, j'ai trouvé de nouvelles ressources et mes petits ennuis de la nuit sont oubliés.

Le refuge de Maison Vieille est vite atteint et j'aborde la descente sur Courmayeur avec un moral d'enfer. J'ai 3 heures d'avance sur l'année dernière et un moral au zénith.

Arrivé à la base de Courmayeur, je récupère prestement mon sac et vais m'installer dans un coin pour me changer. J'ai vraiment l'intention de perdre un minimum de temps. Première décision, pas de douche. Je me change entièrement avec une tenue légère pour une journée qui s'annonce ensoleillée. Un auto massage bienfaisant; de la crème sur les pieds et je vais me ravitailler avant de repartir. A cette heure, je n'ai pas envie de pâtes, ni de soupe. Aussi je mange 3 yaourts et quelques gâteaux et je repars. Bilan de l'arrêt = 35 minutes tout de même.

A cette heure (8h20), les rues de Courmayeur sont tranquilles, heureusement car il faut traverser un carrefour avant de partir sur de petites rues. La montée vers Bertone commence dés Courmayeur par une rue particulièrement pentue. Personne derrière, personne devant. Je suis seul au monde. Pas de risque de m'être trompé car je reconnais parfaitement le coin. Encore une fois, j'aborde prudemment le sentier qui monte vers Bertone. Malgré cela je double quelques coureurs qui coincent déjà. Le soleil brille, les conditions sont idéales. Un ravitaillement express à Bertone et en route vers Bonatti.

Le panorama est splendide et la course nous offre enfin un peu de répit. Je me prends à souvent trottiner, preuve que je me sens encore bien. Bonatti atteint, en route pour Arnuva. Je prévois d'attaquer le grand col Ferret aux alentours de midi.

Mes prévisions seront exactes et j'attaque tranquillement la montée vers le refuge Elena. C'est le seul grand col abordé de jour. Est-ce un avantage ? Oui car l'on voit où l'on met les pieds, non car en levant la tête, on aperçoit toujours plus haut les coureurs qui nous précédent en se disant qu'il va nous falloir monter aussi là-haut.
Arrivé au col, j'ai les muscles des jambes explosés et je sens que la longue descente qui va me mener à la Fouly ne sera pas une sinécure.

Effectivement jusqu'à la Peulaz que j'atteindrai péniblement en 45 minutes, c'est un flot de coureurs qui va à nouveau me passer en courant alors que je n'arrive plus qu'à marcher péniblement.
A la Peulaz je me ravitaille et m'assoie un peu ( c'est la première fois depuis Courmayeur)
Deux coureurs qui ont abandonné attendent d'être redescendu vers la Fouly.

Je souffre encore beaucoup sur la première partie de la descente menant vers la Fouly avant de rejoindre la route où je vais tranquillement me laisser glisser jusqu'au ravitaillement.
Je prends au vol pain et fromage et repars immédiatement vers Praz de Fort. Je mange tout en marchant d'un bon pas. Les coureurs sont toujours aussi espacés autour de moi. Soudain au détour d'un virage, un contrôle inopiné. Y aurait-il des coureurs qui trichent sur l'UTMB ?

Sur le chemin vers Praz de Fort, je me souviens de la traversée en pleine forêt d'un sentier parsemé de racines qui était particulièrement impressionnant à aborder en pleine nuit l'année dernière. L'effet magique a disparu car en plein jour, il a perdu tout son charme et son côté mystérieux.
Praz de Fort atteint, le soleil commence à se voiler mais rien de menaçant pour l'instant.

J'attaque la montée vers Champex avec Ralf, un coureur suisse qui a déjà 2 UTMB à son actif ( 2003-2004) Nous monterons et arriverons ensemble à Champex.
Presque arrivé, je suis obligé d'enfiler ma goretex car la pluie se met à tomber. Heureusement, le ravitaillement est signalé tout au début de Champex cette année.

Une mauvaise surprise nous attend. Aucun endroit n'est réservé aux coureurs sous le chapiteau pour se changer. Il faut redescendre dans des douches à priori exigues pour le faire. Heureusement j'obtiens des kinés l'autorisation d'utiliser leur emplacement réservé. Malgré tout, il n'est pas facile d'y déballer son sac et il faut que je me change complètement pour aborder la pluie et la nuit. J'arrive tout de même à mes fins mais en ayant perdu 30 minutes. Encore une fois, je décide de ne pas perdre plus de temps. Je mange trois flans en 2 minutes, prends du pain et du fromage et me dirige vers la sortie. Et là c'est le coup de poignard : il tombe des cordes et on n'y voit plus à 3 mètres avec le brouillard. Je n'ai pas le choix, aussi je sors du chapiteau et m'en vais vers Bovine sous des conditions climatiques insoupçonnées en plein après-midi quand le soleil brillait.

Cela ne fait rien car j'ai un moral d'enfer, je sais que je vais grimper Bovine de jour. Oh certes la marge est minime mais normalement, je pense être au sommet juste avant la tombée de la nuit. Je marche donc d'un bon pas vers la sortie de Champex avant d'entrer dans la forêt. Les coureurs se font rares. Je pense que certains vont attendre une accalmie pour repartir voir vont s'arrêter là.

Je sais que maintenant je devrai faire mieux que l'année dernière même si je dois marcher jusqu'au bout. Par chance la pluie cesse juste avant d'aborder la montée e et je rejoins un coureur, ce qui va me permettre de garder un certain rythme lors de la grimpette. Je ne sais pas encore à ce moment là que nous ferons cause commune et franchirons ensemble la ligne d'arrivée le lendemain matin à Chamonix.

Même de jour, cette montée est un enfer dont on ne voit pas le bout. Je n'ose pas imaginer ceux qui vont devoir l'aborder de nuit avec la pluie ( qui va retomber c'est sûr).Lorsque nous arrivons enfin sur le sentier à flanc de montagne qui nous mène au contrôle, il pleut de nouveau, le vent souffle très fort et la nuit tombe. Les conditions deviennent à nouveau dantesques. Nous profitons quelques instants de l'abri de la tente des soins de Bovine où plusieurs coureurs se sont réfugiés pour se réchauffer. Nous repartons en pleine tempête et je me dis que la fin de course va être terrible.
La descente jusqu'au col de Forclaz puis Trient se fait pas à pas, le sol est glissant et nous risquons la chute à chaque enjambée. J'ouvre le chemin car mon compère n'est visiblement pas plus hardi que moi dans ces parties boueuses.

A l'arrivée à Trient, le mauvais temps s'est un peu calmé. Nous profitons d'un ravitaillement bienvenu avant d'attaquer les Tseppes, dernière grosse montée de la course.

Nous décidons de monter à un rythme mesuré mais régulier. Nous sommes rapidement rejoint par un groupe de 4 coureurs que nous laissons filer, puis par 2 autres auxquels je décide de m'accrocher. Marc mon compère ne peut suivre le rythme et il est lâché par notre petit groupe. Je pense ne plus le revoir. La montée semble sans fin. Je me souviens d'ailleurs qu'une fois au contrôle, il faudra continuer à grimper encore un moment avant d'aborder enfin la descente pour un retour en France. Enfin arrivé au ravitaillement, le temps de boire un verre de Coca et Marc arrive. Il a retrouvé quelques forces et a fait l'effort pour revenir.

Du coup je l'attends et une nouvelle fois nous voici réuni pour continuer côte à côte notre périple vers Chamonix. Maintenant c'est la brume qui tombe avant d'arriver au sommet des Tseppes. Heureusement le sentier monte sans difficulté particulière et le balisage reste parfaitement visible. Lorsque nous abordons enfin la descente, le sentier se transforme très vite en pataugeoire. Je ne suis guère étonné car l'année passée, bien que l'ayant abordé de jour, j'avais connu quelques glissades spétaculaires. Jusqu'aux Essarts, nous avançons à 2km/h, essayant tant bien que mal de tenir debout. Quelques coureurs plus téméraires nous passent en dévalant la pente : de vrais kamikazes, j'en vois chuter et repartir de plus belle. De les voir nous rend encore plus prudent.

A l'arrivée aux Essarts, nous retrouvons un chemin large et carrossable. Je suis maintenant mon compère car ma frontale commence à faiblir et son double équipement ( frontale + ventrale) me permet de suivre sa trace facilement sur ce "boulevard". Je me fais toutefois du soucis pour la fin de la course car je n'ai pas mis mes piles de rechange dans un plastique et je suppose qu'à cette heure elles sont comme tout le contenu de mon sac: trempées donc inutilisables. Juste avant d'aborder Vallorcine, nous plongeons dans la forêt sur de nouveau un sentier bien abrupte, truffé de pierres et de racines. En pleine forêt, tout à coup, nous apercevons deux frontales venant vers nous. Sortis de nulle part, c'est un couple d'amis de Marc qui est venu à sa rencontre. Cela lui redonne un moral d'enfer, d'autant qu'ils nous disent que le ravitaillement n'est plus très loin.

Effectivement celui-ci est juste après un pont, dés la sortie de la forêt ( contrairement à l'année passée où il se trouvait plutôt en sortie de Vallorcine). Nous nous arrêtons un bon quart d'heure avant de décider de repartir. Nous discutons un peu avec ses amis qui vont aller se coucher et qui nous attendrons à Chamonix pour une arrivée que nous prévoyons vers 6h. J'aperçois Ralf, le coureur suisse avec qui je suis arrivé à Champex, assis sur une chaise l'air très fatigué et le visage très marqué. Mais ne suis-je pas dans le même état ? Depuis Bovine, nous naviguons ensemble avec Marc et ce qui était implicite est cette fois clairement établi : nous irons jusqu'à Chamonix ensemble quoiqu'il arrive. En quelque sorte nous passons un contrat moral. Son objectif est d'arriver à 6h à Chamonix pour battre sa performance de l'année dernière (arrivée à 6h19' en 2005).En ce qui me concerne, je suis sûr de battre mon temps de l'année écoulée ( arrivée à 9h55') sauf blessure.

Nous repartons vers Argentière, accompagnés des amis de Marc, regonflés à bloc. Avant de nous quitter pour aller se reposer, ceux-ci me prête une frontale Petzl qui va prendre le relais de ma Black Diamond qui est de plus en plus faiblarde. Nous décidons jusqu'au col des Montets de nous relayer pour avancer d'un bon rythme. Tant que nous montons, ce plan fonctionne à merveille mais dés que nous amorçons la descente sur Argentières, il se met à pleuvoir assez fort et nos douleurs musculaires encaissent de plus en plus mal les chocs. Nous sommes donc contraints à nouveau de ralentir le rythme de marche et à arriver au dernier ravitaillement de la course comme nous pouvons.

Que tout cela devient laborieux. Les bénévoles du contrôle nous coupent encore un peu plus les jambes en nous annonçant qu'il nous reste 9 kms. Mais quels 9 kms. D'abord sur un sentier boueux et caillouteux à souhait qui casserait les "pattes" à n'importe quel coureur "frais et dispo" alors après 150kms …

Marc est à bout de force et je me retourne souvent pour voir s'il suit. Soudain un coup d'œil en arrière et je ne vois plus personne. J'attends un peu et voit débouler un groupe de 4 coureurs, malheureusement il n'est pas dedans. Je décide de l'attendre encore car j'ai pris un engagement envers lui et je n'ai qu'une parole. Enfin après 2 minutes d'attente, je l'aperçois qui arrive péniblement. Il me dit être sans force et ne plus en pouvoir. Je lui suggère de passer devant moi, ainsi je ne risque plus de le perdre. Je lui dis d'oublier notre objectif et d'avancer comme il peut pour terminer. Il nous reste environ 5 kms avant Chamonix. Durant tout ce trajet, je vais m'efforcer sans cesse de le motiver, de l'encourager pour le faire avancer. Avec un courage admirable, vu son état de fatigue, nous atteignons les hauteurs de Chamonix. Notre pari reste même possible car il n'est pas 6h. Sur le large chemin descendant vers la ville, je lui propose de trottiner mais il n'en a plus la force. Bientôt nous apercevons ses amis qui vont nous accompagner jusqu' à la ligne d'arrivée, le poussant dans ses dernières limites.
Finalement nous franchissons la ligne à 6h07' exténués mais tellement heureux.

Sitôt la ligne franchie, je vais m'enquérir de la situation de mes amis. Jean-Luc est attendu aux Tseppes vers7h.
Tant mieux, car je sais qu'il est largement dans les temps et qu'il ira cette année lui aussi au bout. Jean-Pierre s'est arrêté à La Peulaz. Un grand bravo à lui pour cette première expérience dont il a pris le départ blessé.

Cette course est vraiment magique. Depuis que j'ai décidé de la courir en décembre 2004, j'y ai pensé chaque jour. C'est devenu une obsession, elle fait partie intégrante de ma vie. C'est pourquoi je pense que l'année prochaine je passerai à autre chose pour essayer de l'oublier un peu, pour découvrir autre chose et repartir sur de nouvelles bases. Cette année, j'ai réussi à finir en 35h, je pense pouvoir faire mieux mais ce n'est pas une assurance car trop de paramètres sont à prendre en compte. Aussi je préfère m'arrêter sur ce magnifique résultat pour moi. Un peu comme mon dernier marathon que j'ai arrêté avec ma meilleure performance en 2000 ( 2h49'). Je dois avouer aussi que 2500 concurrents, peut-être pas tous dans l'esprit (j'ai vu plus déchets sur les chemins que l'année dernière) me font penser que l'évolution future de l'UTMB est incertaine. J'espère que les organisateurs sauront lui garder son côté authentique.

Un grand bravo en tout cas à eux et aux bénévoles pour cette organisation sans faille et cette grande fête.
Merci à tous mes compagnons de route pour leur compagnie et particulièrement au dossard 166 le cent-bornard d'Anglet, Ralf le suisse et Marc d'Orléans.
Bravo à mes amis Jean-Luc et Jean-Pierre pour leurs performances.


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