Récit de la course : Ultra Trail du Mont Blanc 2006, par UPDA
273 autres récits :
- Les récits de 2023 (3)
- Les récits de 2022 (4)
- Les récits de 2021 (7)
- Les récits de 2019 (12)
- Les récits de 2018 (6)
- Les récits de 2017 (13)
- Les récits de 2016 (8)
- Les récits de 2015 (10)
- Les récits de 2014 (15)
- Les récits de 2013 (19)
- Les récits de 2012 (7)
- Les récits de 2011 (15)
- Les récits de 2010 (6)
- Les récits de 2009 (21)
- Les récits de 2008 (27)
- Les récits de 2007 (36)
- Les récits de 2006 (37)
- Les récits de 2005 (15)
- Les récits de 2004 (5)
- Les récits de 2003 (7)
Le récit
QU'EST-CE QU'UNE COURSE DIT DE NOUS ?
Pourquoi la vie, c’est si personnel ? Pourquoi ce qui nous arrive, dans le quotidien de tous les jours, se met à jouer si pleinement, si intensément, sur ce que nous sommes, ce que nous faisons ? Comment en suis-je arrivé là ? Et puis encore là ? Une première fois, à l’entrée de Chamonix, dans la nuit de Dimanche, un peu avant 31h30 de course. Et puis, maintenant, tapotant sur mon clavier, à raconter ce qui s’est passé, et le pourquoi du comment.
Oui, pourquoi la vie, notre vie, c’est déjà si personnel, tellement à nous ? Et ce fossé, cet espace creusé au plus profond de moi, entre le moi de l’UTMB 2005, qui abandonne à La Peulaz, même pas fatigué, ou pas vraiment, simplement las. Et celui qui monte et descend, et remonte et redescend, avale les dénivelées sans sourciller, comme indécrottablement vissé vers un objectif qui serait le plus important de tous, et alors, pendant cet UTMB 2006, dans une euphorie qui, peu à peu, me gagne, qui dévale les montagnes vers Chamonix, pour terminer dans un temps qu’il n’aurait jamais imaginé.
Oui, ce que je raconte, et qui m’est arrivé, c’est si personnel. Quel intérêt de le raconter à tous ? Entre août 2005 et août 2006, ce qui change : tout, et moi, et les autres. Et puis aussi, personne. C’est toujours moi, rien que moi.
En Juin, ma femme me quitte et nous partageons la garde des enfants. Je vois s’éloigner les miens. Ma famille se dissous, ce petit monde que nous avions créé, cet univers qui était le notre, ces projets et ces histoires. Ces premiers pas, ces premiers mots, ces premières dents tombées. Ce « nous cinq » qui nous remplissait…
Elle refait sa vie, comme on a coutume de dire. Moi aussi, de mon côté. C’est d’une banalité confondante. On nous rassure, on nous rappelle qu’un couple sur deux finit comme ça...oui, oui, on peut hocher de la tête, aussi...ba, vingt ans, c'est déjà bien, hein...
Oui, moi je cours. Je cours parce que je pense à ça. Je pense au reste. Je pense à la femme que j’aime. Je pense à mes enfants et à la vie qu’ils vont vivre et qui n’est pas celle à laquelle j’avais pensé.
Oui, je cours. Je cours et je pédale. Et je pense à l’UTMB. Je pense que c’est une course vraiment incroyablement belle. Oui, moi aussi j’ai été lecteur de la grande course de Flanagan, quand j’étais adolescent, et je me suis vu parmi eux, me jetant dans la compétition de très longue haleine, à l’écoute de mon corps, à gérer, à disposer de mes forces avec mesure, avec attention. A me priver du réconfort d’une halte, parce que je suis tendu comme un arc vers l’arrivée. A m’accorder une alimentation pondérée, à m’octroyer la suavité d’une boisson, à me tenir à bout de bras, à me conduire jusqu’à l’arrivée comme un enfant par la main. Oui, comme un enfant. Comme si je pouvais m’appuyer sur ce mental, si je pouvais tout lui demander et finalement lui prêter une confiance sans limite, m’en tenir à ça : Il n’y a pas de raisons. Non, pas de raisons.
Alors, la course n’est qu’une étape rêvée, un long moment passé avec moi-même, dans une pleine confiance réciproque, ce passage dans la vie où on se dit, en fin de compte, qu’on est pas si mal accompagné par soi-même, et qu’en s’accrochant comme il faut, en tâchant de faire au mieux, en s’appliquant, chaque seconde de l’existence si futile, eh bien, on y arrivera, oui, on y arrivera, on parviendra à refaire de chaque fragment éparpillé de sa vie qui passe, on parviendra à refaire une histoire, une histoire toute simple, sans grandiloquence, sans triomphe aucun, simplement la petite histoire de son passage, au bénéfice des siens et des autres, des rencontres du hasard et de celles qui marquent. Alors, oui, j’y crois. Parce que, oui, j’ai la force d’y croire.
Ainsi, fut-il, l’UTMB 2006, aussi simple, aussi plein que peut l’être un tout petit évènement de vie, à la fois inoubliable et vain.
laurent
Accueil - Haut de page - Aide
- Contact
- Mentions légales
- Version mobile
- 0.12 sec
Kikouroù est un site de course à pied, trail, marathon. Vous trouvez des récits, résultats, photos, vidéos de course, un calendrier, un forum... Bonne visite !
3 commentaires
Commentaire de akunamatata posté le 16-01-2007 à 08:20:00
UPDA emoción !
Commentaire de Olivier91 posté le 16-01-2007 à 09:14:00
Belle évocation dans laquelle nous serons nombreux à nous reconnaître. Pour moi, l'UTMB a été la bouée à laquelle je me suis accroché pour sauver mon couple qui se délitait de jour en jour, ma femme s'enfonçant dans une dépression destructrice. CE projet est devenu un projet commun qui nous a resoudé. J'ai eu cette chance de pouvoir recoller les morceaux à temps, mais le souvenir aigu qui me reste de mes états d'âme du moment me permet de comprendre autant que possible les tiens.
Au plaisir de te rencontrer sur une course sous peu ... quel est ton programme?
Commentaire de Philippe8474 posté le 18-01-2007 à 10:05:00
Ce matin en ouvrant Kikouroù... tiens un nouveau récit sur l'UTMB... Non ce n'était pas un simple récit de plus... Merci de nous avoir fait partager cette tranche de ta vie...
Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.