L'auteur : miouasse
La course : Ultra Trail du Mont-Blanc
Date : 31/8/2018
Lieu : Chamonix Mont Blanc (Haute-Savoie)
Affichage : 2295 vues
Distance : 171km
Matos : trop lourd
Objectif : Pas d'objectif
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Petit retour sur cet UTMB.
Départ 16h de St Gervais pour se rendre sur Chamonix le temps est très maussade mais depuis le matin pas de pluie, l'organisation nous a fait parvenir un SMS nous indiquant qu'il fallait prévoir le materiel plan grand froid ce qui nous a déjà cassé le moral avant de commencer. Rajouter du matos dans le sac!!! Impossible plus de place. Bon ben pas le choix ou alors craindre une élimination à n'importe quel moment. Je rajoute ce qu'il faut tant bien que mal et c'est parti. Sylvain me laisse un message pour me dire qu'il assistera au départ ce qui me remonte fortement le moral car d'habitude on est tous les 2 sur la ligne , je sais qu'il aurait dû être de la partie mais sa santé avant tout. Sur le trajet la pluie commence à tomber de plus en plus, pas très rassurant, on s'arrête vite fait pour acheter un poncho afin de rester sec avant que ça commence. Sylvain m'a rejoint, les adieux avec Kiki comme si je partais à la guerre, on dépose vite fait le sac de délestage pour Courmayeur et c'est parti direction ligne de départ.
On se rend vite compte qu'il est déjà un peu trop tard car je me retrouve tout derrière, il est environ 17h20 et j'ai un peu les boules mais je me dis que j'ai vraiment le temps de remonter. Sylvain me laisse je me mets dans ma bulle, la musique commence et le départ est lancé. Forcément de là ou je suis je mets beaucoup de temps à passer la ligne, mais je me rend compte que malgré le temps qui est exécrable il y a une foule immense, jamais vu autant de monde sur un trail toute la sortie de Chamonix jusqu'au premier village des Houches ,une ferveur intense un public de fou, par contre nous tous les un derrière les autres à alterner marche et course ,ce que je n'aime pas du tout car il est très dur de prendre un rythme, je profite donc des gens pour ne pas trop ruminer je tape dans les mains des enfants, on nous donne des bonbons, mais bon au bout d'un moment faut peut-être se mettre à courir? Pas possible de doubler on se croirait à la saintelyon durant les 20 premiers kilomètres, j'arrive à St Gervais où je sais que j'ai un petit comité d'accueil qui m'attend ce qui me ravi par contre il pleut des cordes, je me dis que je leur fait vraiment passer une sale soirée de vacances, ils ont dû attendre longtemps dans cette humidité, mais je passe, heureux de les voir, je sais que je les reverrai 11km plus loin aux comtamines. Après ce ravito on commence à pouvoir courir ce qui me ravi surtout que je connais très bien ce passage, je suis vite rattrapé par un manque total de jambes, impossible de prendre mon petit rythme habituel, le moral commence à prendre un coup, surtout que la pluie et la boue n'arrange rien. Je commence vraiment à me poser des questions, l'année dernière j'ai abandonné sur l'UTPMA au même Km et je m'étais dit que j'avais baissé les bras trop tôt. Je m'arrête au ravito je vois mon frère toujours sous la pluie, je rejoins Kiki sous la toile de tente pour me changer et être sec pour la nuit. La tente est blindée de monde il faut trouver une place, je m'installe me change, je lui fait part que je ne vais pas vraiment fort, elle me remonte le moral et j'y retourne, toujours aucune sensation je trottine et là à notre dame de la gorge un fou me rejoint, c'est Xavier un pôte du boulot qui fait un petit bout de chemin avec moi en me regonflant un peu, il me quitte avant de ne plus pouvoir reprendre sa navette pour rentrer, la forme n'est pas là mais je me dis qu'il y a tout un tas de monde derrière moi que je ne veux surtout pas décevoir, si j'abandonne c'est que je ne pourrai plus marcher comme l'an dernier.
J'attaque le col du bonhomme tant bien que mal mais là au moins je peux monter en marchant avec toujours beaucoup de monde autour de moi, je me demande quand est ce que ça va s'étirer mais il va falloir attendre encore. Je passe le ravito les chapieux 1008eme c'est un peu pour ça que nous sommes vraiment nombreux je suis dans le coeur du peloton, on nous demande de montrer du matériel obligatoire avant de gravir le col de la Seigne et là je commence à m'apercevoir que l'état d'esprit trail n'est pas de la partie tout le monde essaie de passer devant les autres c'est un carnage, pareil pour demander à boire un coup ou manger ,mais si tu essaies de faire la queue tu n'as rien faut se battre, impossible de repartir sans rien dans le ventre donc je joue des coudes je m'alimente et je repars direction le col de la Seigne, longue montée interminable au sommet beaucoup de vent un bon ressenti de moins 10 degrés, le semaine d'avant j'étais sur un Catamaran aux Canaries ça calme. Je suis épuisé j'ai froid beaucoup de choses se déroule dans ma tête, ce n'est pas du tout ce que je recherche dans ce sport j'ai fait 75km jusqu'àu Mont Favre et je n'ai pas eu un moment ou j'étais bien, je me désespère vraiment commence à chercher des excuses pour abandonner, mal au tendon d'Achille, genoux tout un tas de choses vraiment négatif. L'abandon se rapproche je me dis que Courmayeur va marquer la fin de mon UTMB si longtemps attendu. Le soleil commence à se lever je pose ma frontale que je ne supporte plus, j'arrive dans une zone que je connais depuis la TDS ce qui me sort un peu de ma sphère négative, l'hélicoptère nous survole je lui fait des signes ,nous attaquons la longue descente sur Courmayeur et là les jambes commencent à repondre doucement ça fait du bien de pouvoir courir sans forcer. J'arrive au gros Ravito Italien mon sac de délestage m'y attend je devais revoir ma douce et tendre😉 et mon frère adoré😉 mais ils ont faillit se battre pour monter dans les navettes ce qui les a rebuté à retenter cette expérience, surtout dans la position où je me trouve dans le gros du peloton c'est l'enfer pour tout le monde.
La faute à une méforme inexplicable, bien que depuis L'UTPMA je n'ai vraiment plus de jus et surtout plus trop de plaisir à l'entrainement, c'est sûrement la punition d'avoir été bien tout le long des 110 km à Aurillac je ne sais pas j'y ai sûrement laissé trop de force.
Enfin arrivé à Courmayeur j'apprends que je suis dans les 850 environs, la forme vient juste de venir je décide encore de me battre pour m'alimenter jamais vu ça j'hallucine. Je me change, mange des pâtes, on est loin des ravitos du Mercantour où on te dis d'aller t'asseoir et on t'emmène tout ce dont tu as besoin, comme au resto, ici c'est un autre monde il faut de l'énergie même pour se ravitailler.
Je repars, enfin il fait beau on commence à admirer le paysage et ça fait plaisir. On passe les refuges Bonatti, Bertone et le soleil recommence à disparaître tout allait à peut près bien, je passe Arnouvaz avant la montée du grand col Ferret , je commence tout doucement ce col qui doit être très long comme son nom l'indique. Les heures s'enchaînent et la forme commence à décroître, et le moral reprend un coup, c'est reparti je me dis que je n'ai pas eu beaucoup de KM de plaisir ,que se passe-t-il je ne veux pas être dans le dur encore une fois, dans le milieu du col Sylvain est là? Quel plaisir de le voir ça me fait du bien mais j'ai plus rien dans les chaussettes, on monte tous les 2 vraiment à faible allure il doit se rendre compte à ce moment là le pauvre niveau que jai, même à la descente sur la fouly plus rien, je lui dis que je vais essayer de faire une sièste une première pour moi sur un trail, et que si la forme ne revient pas la course sera terminé pour moi, trop c'est trop. Je me pose sur un banc la tête sur une table, c'est parti pour 20mn, une fillette commence à mettre des coups de pied sur le banc ,un bref coup d'oeil lui fait vite comprendre d'arrêter, je lui fait un petit clin d'oeil quand même avant de m'endormir lamentablement.
Sylvain me réveil il faut y retourner je mange pleins de cochonneries sucrées et repart, Sylvain me dit qu'il m'attend à Champex avec ma douce😂 et Fred, je lui redit que peut être ça sera la dernière pour moi si la forme ne revient pas. Je repars donc tout doucement et là je me rend compte que j'ai l'impression de commencer à courir je ne me pose pas trop de questions j'y vais et me dit que tant que tout va bien j'avance du mieux que je peux tout ce que je ferai maintenant sera derrière moi.
Je regagne Champex où je retrouve tout mon petit monde,je me change, mon frère m'aide à me laver avec des lingettes, je sents le mort, je mange un plat de pâtes et on repart tous les 4 en marchant le long du lac de Champex, un coin magnifique d'ailleurs ,je leur dis que tout va aller maintenant et que je sais que quoi qu'il arrive sauf blessures j'irai au bout, je monte le col de la Giete et redescend sur Trient, sûrement un peu fort vu mon état car une fatigue générale se réinstalle avec un mal de cuisses et surtout aux adducteurs et là je repense au Mercantour où j'ai abandonné cause à un épuisement musculaire l'an dernier. Je décide donc de refaire une sieste de 15mn à Trient.
Arrivé au ravito une copine de Christele, Chloé et son copain kévin que j'ai croisé à la Plagne pour la 6000D, sont là, il m'avait dit qu'il passerai sur la course mais je ne m'attendais pas à les voirs ici, ça me fait super plaisir de les voir en pleine nuit, il me propose même leur voiture pour faire la sièste mais vu mon odeur je n'ose pas y aller. Grosses erreur car le ravito de Trient c'est un vrai bal, musique à Donf avec DJ qui essaie de remotiver tous les arrivants, impossible de dormir ,un peu agacé même je repars, Chloé et kevin toujours là pour me rebooster ,avant de partir doucement mais sûrement je suis convaincu que la fin va être dur et longue mais que je vais terminer.
Je n'ai encore jamais parcouru autant de distances, je repart en plus avec un autre, on fait la causette pendant la montée et une partie de la descente, moi ne pouvant et ne voulant plus trop courir pour ménager mes muscles afin de parvenir maintenant au bout par n'importe quel moyen , même si ce n'est vraiment pas les valeurs du trail que je défends, mais avoir fait tout ça pour rien pas possible. J'arrive donc à Vallorcine où Sylvain est encore là, il a passé lui aussi un sacré périple, il doit être autant fatigué que moi, mais il n'est pas seul, Tony et Blandine sont là olala quel bonheur de les voir eux aussi, ils ont gardés Evan durant toute la course qui était malade, un grand merci à eux d'ailleurs, je dis à Blandine qu'elle serait mieux dans son lit plutôt que de se cailler à 2 plombes du mat pour voir une guenille se trainer jusqu'au bout.
Ravitaillement vite fait, Chloé et Kevin devait être là j'ai dû les louper je suis vraiment dégoûté ils sont venus exprès. Mais il faut que j'en termine, je monte vers le col des Montet je connais bien ce morceau là, on ne monte pas au col la tête au vent comme prévu suite à un éboulement, ce qui me ravi un peu car je déteste cette montée à la Flégère. C'était bien sûr sans penser que les organisateurs sont des sadiques psychopathes, là on monte d'une seule traite dans la pente je me dis que la montée va être raide mais rapide, on se retrouve un petit groupe vers ce dernier ravitaillement, et de là on commence à redescendre puis remonté puis redescendre puis remonté, je me dis, ils nous amusent, et ça dure comme ça 6km interminables, je commence à m'endormir en marchant, j'ai des hallucinations de fou , je vois des personnages de Star Wars, des animaux, des cabanes avec des personnes dedans, toutes les banderoles de balisage je crois voir des fenêtres de maisons, mais on avance entre les rochers les racines, je ne sais pas comment personne se blèsse,mais on veut tous aller au bout. On voit enfin le chalet de la Flégère, en haut d'une pente de ski, je connais c'est le parcours du marathon du Mont Blanc et je sais que c'est très raide, là je me rappelle que personne ne m'a forcé à être là, alors tu la fermes et t'avances. Je prends un petit café au ravito, je laisse partir tous ceux qui étaient avec moi, car ça redescend très raide et il ne me reste plus rien surtout dans la tête, je suis épuisé et j'ai du mal à lever les jambes. Je marche jusqu'au chalet de la Floria entre les racines les cailloux, je l'ai faite plein de fois cette descente mais jamais aussi lentement, je me fais doubler par des coureurs qui sont pressés eux de terminer, j'arrive enfin à Chamonix je me remets à trottiner, tout le monde m'attend pour eux aussi ça a dû être interminable, il ne fait pas très chaud. Fred et Tony viennent à ma rencontre pour m'aider à finir, je vois même Evan qui même malade est là, je suis heureux de les voirs tous. J'avoue que c'est la première fois que je passe sous l'arche sans trop d'émotions, je suis dépité outre le temps qui ne me réjouis pas, de finir sans avoir pris finalement de plaisir, depuis le temps que je souhaitais la faire cette course. Je n'ai pas pu apprécier.
Finalement avec un peu de recul je suis ravi d'avoir fini mais reste un peu sur ma fin. Tant d'heures à s'entraîner, à sacrifier beaucoup de choses , pour enfin ne pas savourer, je ne sais pas si ça en vaut la chandelle.
Ça sera peut-être mon Jubilé sur ultra distance.
A savoir qu'il y a 10 ans quand j'ai vu Kilian Jornet gagner son 1er UTMB à la télé, je me suis dit que ces gens étaient des grands malades de faire un truc comme ça, et que si j'arrivais à faire déjà la saintelyon qui me semblait insurmontable à l'époque serait déjà pas mal.
Puis j'ai commencé à en rêver et maintenant c'est fait.
Je ne peux à la fin n'être qu'heureux d'avoir accompli un rêve, qui à la base était inaccessible pour un mec qui à part courir après un ballon et une boite de night ne savait pas mettre un pas devant l'autre.
Le compte rendu est très long mais tout comme la course.
Je remercie du fond du coeur tout ceux qui m'ont soutenu de prêt ou de loin, je sais qu'il y avait du monde.
Merci à ma famille ,mon frère, que j'aime de tout mon coeur. Sylvain,Blandine, Tony, Chloé Kevin qui sont venus me voir.
Et je ne vais pas citer tout le monde j'en oublierai, mais j'ai reçu beaucoup de messages avant, pendant et après la course et j'en suis très heureux. Merci à tous.
J'embrasse plus particulièrement José et Paula qui sont dans mes pensées les plus profondes quand je suis au fond du trou😉😘. Et qui grâce à eux je me bât dans ces moments là😉😉😉
Encore un grand merci à vous.😂😂
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5 commentaires
Commentaire de Titus73 posté le 06-09-2018 à 12:02:26
Bravo ! Pour avoir vu l'UTMB en observateur cette année, tu peux largement savourer d'avoir fini même si l'impression que laisse ton compte-rendu est un peu différente. C'est bien aussi de dire le vrai sur une course qui est devenue mythique au fil du temps.
Et si tu regardes les favoris au départ, seuls 30% voire moins ont fini. Ca dit le morceau de bravoure que cela représentait cette année avec la météo...
Il ne faut pas raccrocher les crampons trop vite, il y a beaucoup de choses à voir encore en trail, même en ultra distance
Bravo encore.
Commentaire de GlopGlop posté le 07-09-2018 à 11:46:58
Miouasse. C'est un CRA très instructif que voilà ! Je ne peux passer sous silence la performance et la volonté associée au mental pour en venir à bout. Bravo!
L'année dernière, j'ai suivi sur la WebTV, le duel mémorable entre D'haene et Jornet. J'ai été frappé par le fossé existant entre les élites et le 'gros des troupes' en constatant qu'à l'arrivée de François d'Haène, plus de 1000 trailers gravissaient le Grand Col Ferret !
Ainsi ton CRA nous emmène dans ce monde des anonymes et en devient très intéréssant.
Enfin, outre le fait qu'il met en avant la dérive mercantile de ces mega-courses et la perte induite de l'esprit Trail au profil du plus grand nombre, n'y a t'il pas intérêt toi qui l'a faite, à se porter sur des formats plus petits mais qui engendrent un bien être au sein de communautés plus humaines et un respect des limites de son corps ? Ton retour m'intéresse, perso, je sens mes limites autour des 50K et j'ai l'impression qu'aller au delà fera fondre mon plaisir comme neige au soleil et engendrera des dégâts corporels qui ne sont pas en corrélation avec ce que l'on peut attendre d'un sport.
Commentaire de miouasse posté le 07-09-2018 à 12:28:42
Non, ne te fais aucun souci sur le fait de passer sur des distances superieurs, il faut accepter le fait d'aller moins vite et de passer plus d'heures à l'entrainement. Après c'est des choix qu'il faut faire. Personnellement les degats corporels ne sont pas trop importants
je trouve, j'ai très bien récupéré et eu des petites courbatures seulement 2 jours. La fatigue physique par contre est toujours présente et j'attends qu'elle s'en aille pour une reprise lente. J'ai passé un UTMB où j'ai plus souffert que pris du plaisir mais avec du recul je ne regrette pas, ça me permet de tester mes limites. Assurément si je réitère cette distance ce sera sur la diagonale des fous et je m'arrêterai là en se qui concerne l'ultra. Mais je ne ferme pas la porte aux trail de 100 à 110km.
J'espère que tu trouveras le format qui te convient,le seul paramètre qu'on ne maitrise pas c'est d'être en bonne forme le jour J.
Longue vie au trail.
Commentaire de GlopGlop posté le 07-09-2018 à 16:02:30
Merci pour ce retour !
Commentaire de fred_1_1 posté le 09-09-2018 à 07:53:34
J ai aussi vécu, un UTMB il y a 2 ans au coeur du peloton, avec une grosse partie de la course vers la 1000eme place. c'est vrai : c'est la jungle, au ravito, mais aussi sur les chemins, personne ne laisse passer ceux qui veulent doubler...
... essaye une course avec moins de monde , tu vas peut-etre changer d'avis.
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