Récit de la course : Ultra Trail du Mont Blanc 2003, par L'dino

L'auteur : L'dino

La course : Ultra Trail du Mont Blanc

Date : 30/8/2003

Lieu : Chamonix Mont Blanc (Haute-Savoie)

Affichage : 4617 vues

Distance : 73km

Objectif : Pas d'objectif

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Le récit

Salut les zanimos,

Enfin me direz vous ! un CR de l'UTMB...tout vient à point pour qui
sait attendre...

Au sortir du marathon de Paris au printemps, j'ai cherché un trail
plutôt long à préparer pour l'été. Après un rapide coup d'oeil sur les
divers calendrier et après avoir éliminé les impossibles pour cause de
transhumance, je jette mon dévolu sur l'UTMB. 67 kms, 3750 m de D+,
l'idée est de progresser sur la plus grande distance parcourue et le
dénivellé effectué en une seule course. Mes perfs précédentes
étant de 55 km et 3050 m de D+ à la 6000 D deux ans auparavant. Je
m'inscrit avant le 1ier juin.

Cette course m'offre l'énorme avantage d'être placé à la fin de mes
deux mois de vacances, tip top pour l'organisation de mes séances
sans mettre à mal la vie de famille.

J'avais prévu de faire le trail de Faverges en prépa, mais en juin je
me suis fait une petite contracture aux ischio. Je renonce donc à
cette course en me disant que je pourrais éventuellement faire le
marathon du mont-blanc, que je ne ferais pas non plus. La fin d'année
fut plus difficile que prévue et je commence les vacances avec une
vive douleur au pied gauche. Doc et radio pour effacer les doutes
concernant une fracture de fatigue, et repos plus glace et
anti-inflamatoire locaux et oraux auront raison de cette douleur qui
m'empéchait de courir. Nous sommes le 10 juillet et je n'ai pas
vraiment pu m'y mettre...je vais donc nager pour ne pas gâcher en
attendant que le pied aille mieux. Je ronge mon frein.

Je cherche un trail autour du 30 juillet pour faire une course 1 mois
avant l'utmb mais ne trouve rien. Alors je me rabat sur l'organisation
d'une rando montagne sur 6 jours sur le GR 5 entre Thonon et Les
chappieux. 120 kms et 7000 m de D+ et autant en D-. Un p'tit tour chez
Le Tartarin de Bormes, la rando tip top plaisir avec mon épouse
("c'était marche ou crève !" dira t elle après) et nous sommes déjà au
6 août. Je planifie les 15 derniers jours d'entraînement avant de
relâcher et c'est reposé et fort de plus de 15 000 m de D+ que je
prépare mon sac pour partir ce 29 août au matin. J'ai emmené, juste
avant de partir ma millet goretex dans mon sac, on ne sait jamais.
Bien entendu, j'ai prévu tout ce qu'il faut en vétements et ravito
pour faire la première étape et la deuxième au cas ou.

Je fais rapidement les 1h10 qui me sépare de Cham sous un ciel très
changeant. Il a plu les trois jours d'avant et la météo est tout
simplement calamiteuse pour le samedi matin jusqu'au dimanche midi.

J'arrive sur le parking devant le lycée de cham et cherche une
place...dur dur...ah tiens y a un gars qui s'en va...mais il a un
bérêt bleu le bougre...c'est L'bourrin que je reconnais du premier
coup d'oeil...hop je le bloque par ci, par là...y comprends rien :-))
ca me fait marrer et je vois Biopuce qui s'énerve aussi...je cris..
Bourrin et ça fait tilt...on cause 5 minutes et ils repartent.
Je file vers la salle et rencontre devinez qui ????? L'festnoz.
Curieuse coïncidence...la dernière fois que cela nous était arrivé
c'était aussi dans les mêmes circonstances à la 6000 D.

Nous allons chercher les dossards, et faisons un stand by chez les
UFO. Trop cool de voir réunis là tout un tas de forumistes UFOU et de
faire connaissance de gens aussi divers qu'agréable, gentils et
stressés par...la météo.

Briefing. Michel Poletti nous accueille avec émotion. Tous le sont un
peu. Je l'étais. L'ambiance, les bérêts bleus rassemblés (La
Langouste, Biopuce, L'bourrin, La sauterelle (sans bérêt bouuuuuhhh)
et j'en oublie...sorry les gars), le discours rassurant sur la
météo... tout fut gouté avec plaisir..On y étais enfin.

Pasta party, deux assiettes de pates et quelques autres mets pour
faire le plein et nous partons à la recherche d'un salle pour dormir.
Quand je retrouve le groupe nous sommes dans l'infirmerie du lycée et
il y a des matelats :-)) et la télé...nous regardons un peu les chpts
du monde et éteignons la lumière vers 22h30 pour une nuit de 4h00.
Elle n'en fera que 2h30 pour moi....l'arve fait un bruit monstrueux en
contre bas, débit impressionnant...et même avec les bouchons je l'ai
entendu toute la nuit...

P'tit dej gatosport et café...je passe à la voiture et hésite entre ma
veste millet et mon KWAY 2000, respirant aussi mais un peu moins
chaud... je prends le Kway...

Le départ est au centre de cham...c'est magique. Les spots, l'arche,
les coureurs, la nuit. J'suis bien là et c'est tant mieux. Compte à
rebours, c'est déjà le bonheur.

Zéro....c'est parti.


Pas besoin d'allumer la frontale, les rues sont
éclairées. Il est 4 h00 et pourtant il y a des lève-tôt, ou des
couche-tard qui encouragent le peloton.

Nous sortons de cham et empruntons un sentier. Allumage de la
frontale. Les cyalumes promis sont bien là. Je m'arrête pour retirer
le kway, pas de vent et températures assez douce. Je retrouve
L'Festnoz et nous faisons un bout de chemin ensemble. Je me bat avec
mon cardio, qui ne veut pas s'initialiser...étrange...il refusera de
fonctionner alternativement sur tout le parcours.

Je prends du plaisir à découvrir la course de nuit. Ma ticka + de
petzl est bien suffisante. L'ambiance est toujours bonne. Je coure
doucement et bientôt, étrangement, je me retrouve quasi seul. Personne
à mes cotés. Je suis heureux d'être là.

Je laisse des coureurs me passer dans la descente douce vers les
houches. 1h00 de course environ et dès le ravito passé nous entamons
la montée vers le col de Voza. Rapidement la route s'élève fortement,
cela durera presque jusqu'en haut. Quelques petits faux plats tout de
même. Je marche bien entendu et discutte avec des coureurs.. c'est
cool. Il fait toujours relativement bon pour un matin. Je m'arrête
dans la montée pour faire une photo du serpentin de lumière qui monte
le col avec la vallée en lumière au dessous. J'ai aimé.

Le col arrive après 2h10 d'effort, les bénévoles sont tous très sympa
et dévoués. Ca compte. Je contrôle ma poche à eau d'hydrixir, il reste
1.3l. C'est bon. Je remets mon kway. Le prochain est aux contamines
et il y a des bassins d'ici là. Je mange une part de quatre
quart et prend un pain aux
raisins. J'avalle un tube de gel dans la descente raide qui nous
mènera à Bionnassay. Le jour se lève et je demande à un compagnon de
route de poser ma frontale dans mon sac. Tout va bien, je retrouve
avec plaisir des endroits ou mon épouse et moi même sommes passés lors
de notre rando de l'été. Ceci me permet de bien géré les petites
difficultés qui arrivent tour à tour. Le passage dans la forêt est
sympa, les torrents qui descendent des glaciers sont impressionnants
de force.

3h41 de course m'amène aux contamines. Arrêt au stand et remplissage
de la poche à eau avec du malto, histoire d'alterner le goût sucré
avec le neutre. Je repars après m'être rassasié en boisson et
victuaille, en compagnie d'un allemand avec qui j'engage la
conversation mais il ne parle pas un mot de français et moi j'ai pas
de souvenir impérissable de la langue de Goethe. Il part sans moi.

Nous arrivons sur le sentier qui va nous mener au col du bonhomme et
de la croix bonhomme. 1500 de D+ en enfilade. Des gros % puis des
passages plus cool. La voie romaine et ses dalles immenses qui
aujourd'hui ne glisse pas (la dernière fois elles l'étaient) sont passées
sans encombre. Un coureur me rejoint et nous discutons un peu. Il
vient de Paris et veut faire le tour. Il n'a qu'un petit sac, est peu
habillé et chausse des asics de route, pas de batons ! Je ne lui fais
pas mention de mes doutes sur sa tenue et le laisse filer. Il veut
courir et pas moi.

Je passe au refuge de la balme sous la pluie qui s'est remise à
tomber. Avec elle, le vent s'est levé. Les bénévoles sont pas
réchauffés. Je prends de l'eau, mange quelques part de gateau et un
pain. Je ne m'éternise pas et reprend le chemin. Ce qui s'annonce
promet d'être plutôt dur. Ce le sera. La pluie détrempe le GR qui
ruisselle par moments. Heureusement que j'ai les batons et que mes
addidas sont très efficaces dans ce terrain. Je pose un caillou sur le
monticule des dames, le replat fait du bien.. Quand j'arrive en haut
du col le vent a forci et la pluie aussi...les gars de la sécurité
sont dans la cabanne du col...on y voit rien, c'est tout.

Je ne m'attarde pas et file direction la croix du bonhomme, le trajet
est très "caillouteux" et l'on a l'impression que l'on n'avance pas.
Je retrouve mon Parisien, transit de froid et qui n'avance plus..je
m'inquiète de cela mais il me dit que ça va aller.

Je ne vois plus grand monde, on ne voit pas grand chose. Arrive le col
de la croix bonhomme. Il est 10h37. Je cherche le refuge et suis
obligé de descendre un peu pour le voir. Contrôle de passage. Il
devait faire de l'info avec des palms branchés sur le net pour envoyer
les classements intermédiaires !! avec cette purée de pois, les
volontaires sont adossés au batiment et un homme annonce nos dossards
à voix haute. C'est démentiel. Pourtant je ne me suis pas encore
demandé ce que je faisais là !!

J'entame la descente que je connais bien, glissante à souhait. Je fais
attention, quelques concurrents se ramasse dans les lacets devant moi.
Pas de bobo. Je mets 50' pour faire la descente tranquillement.

Arrivé aux chappieux je retrouve mes beaux parents qui sont venus me
soutenir. Sympa. Je me change avec un t-shirt propre et enfile ma
micro polaire, pas mon kway. 8' d'arrêts et je repars avec leurs
encouragements.

Il faut remonter à la ville des glaciers, la route est longue (7 kms)
jusqu'au refuge des mottets.la pluie s'est calmée. Je sais que je ne
serais pas à 16h00 à Courmayeur comme espéré. Je suis un peu fatigué
mais pas épuisé quand j'arrive au refuge des mottets. Je fais le plein
de la poche à eau, remet de l'hydrixir et espère trouver du salé sur
la table. Que du sucré et encore il me semble que les bénévoles font
grise mine. Il n'y en aura pas assez pour tout le monde. J'avale une
barre de céréales tirée de mon sac. La pluie se remet à tomber. Je
remets le kway et repars.

Le col de la seigne nous attend. Une forte montée puis ensuite plus
cool pour arriver au col. Le début va bien mais rapidement ma
situation va se détériorer. Le vent de face et la pluie commence à
avoir raison de ma résistance semble t il.
Des coureurs me rattrapent. Des belges, coureurs célestes ils se
disent. Un peu comme le Zoo quoi. Il reste plus de 20 kms à
parcourir arrivé en haut. J'y rencontre un ami de mon beau père, guide
de haute montagne à la retraite qui aide à l'organisation. Il devait
aussi s'occuper de pointer les coureurs avec le palm mais n'avait
aucun abri digne de ce nom pour cela.. même sur le papier s'était pas
possible.

La descente se fait sur un sentier puis un chemin large et en lacets.
J'arrive en bas vers 15h00. Courage et en avant. La fatigue est réelle
et je sais depuis bien longtemps que je n'irais pas plus loin que
Courmayeur.


De ce coté, l'Italie, le temps est plus supportable. On sent moins le
vent. La pluie cesse et l'on peut découvrir une longue ligne droite
qui longe les lacs combals. Les glaciers qui s'y jettent sont de toute
beauté. C'est géant et impressionant. Ravitaillement des lacs combal..
je repars avec un coureur et nous avons presque loupés le chemin qui
monte à l'arpe vieille... et ça monte..Il est 15h00.

Dans cette montée je vais vivre de l'inconnu pour moi. Dès que l'on
s'élève, le vent refait surface. Je suis de plus en plus fatigué. Le
vent me transit. Je regrette pour la première fois de n'avoir pas pris
ma goretex millet. Le sommeil m'envahit peu à peu, si bien que je
m'assied deux fois dans la montée et que je suis certain de m'y être
endormi. Des sommeils flash pendant lesquels mon inconscient
m'interdisait de rester là, tu vas finir en hypothermie si tu dors.
En me réveillant, le coureur que je suivait est 200 m plus haut. J'ai
dormi...
Je ne vois pas le bout de cette montée interminable.

J'entame la descente vers 16h15, la descente sera aussi interminable
que la montée. Seul le passage au col de chécroui, avec un
ravitaillement sauvage et du fromage, c'est bonnnnnnn, sera apprécié.
J'ai mal au genou gauche, le plateau du péronnet me dira la kiné qui
me massera à l'arrivée. La descente est absorbée en 1h30 environ et
c'est à 17h57, après quelques 13h57 de course, que je franchi la ligne
d'arrivée. La sauterelle est là pour m'accueillir. Sympa. On discute.
La fille me demande si je poursuis ou si je m'arrête.
Je n'ai pas besoin de réfléchir, j'arrête.

Je vais me faire masser, pas de douche, trop froide. Les muscles vont
bien et le mal du genou disparait rapidement après le massage. Je me
change et apprécie d'être au sec. Les pates chaudes sont très
appréciées et je n'envie pas vraiment ceux qui veulent repartir.

Je vais faire une sieste de 50 minutes. En émergeant je retrouve la
Sauterelle qui m'indique que L'festnoz est arrivé et reparti il y a 5
minutes. Je l'ai loupé. dommage. Je suis très fatigué.

Je monte dans le bus, passe sous le mont blanc dans le tunnel et
rentre à la maison dès mon arrivée à Cham..

J'ai apprécié de faire ce parcours. Je regrette que nous ayons subi le
pire samedi de l'été dans la région, mais ça c'était imprévisible.

J'ai augmenté mon total de km parcouru sur une seule course (70) ainsi
que mon total de D+ réalisé sur une journée, 4000 m.

Je la referai, l'an prochain peut être, mais j'y reviendrai pour aller
plus loin.

Je tire mon chapeau à tous ceux qui se sont lancés dans cette course.
Ultra félicitations à tous ceux qui sont arrivés à Courmayeur et qui
en sont repartis. Il fallait être très très solide dans son corps et
dans sa tête.

J'ai encore été vachement court. Merci d'en être arrivé là.

L'dino_toujours_autour_du_mont_blanc.


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