Récit de la course : Marathon de Paris 2019, par Steph61

L'auteur : Steph61

La course : Marathon de Paris

Date : 14/4/2019

Lieu : Paris 16 (Paris)

Affichage : 1549 vues

Distance : 42.195km

Objectif : Pas d'objectif

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Marathon de Paris 2019

Cap sur 3h30 …

Lors de mon inscription en septembre dernier, l'idée de faire le marathon de Paris 2019 pour battre mon record (3h34 à Nantes en 2015) était mon objectif principal. Ce temps de 3h34 me laissait un léger goût d'inachevé car j'avais terminé difficilement les 3 derniers kms. Je sentais que je pouvais donc mieux faire et que 3h30 ne resterait pas une barrière infranchissable …

Après un forfait pour blessure à La Rochelle en 2015, deux marathons pour accompagner Lolo (mon épouse) à Millau en 2016 et à Bordeaux en 2018, une préparation tronquée (6 semaines …) pour Nantes en 2017 (3h51), un marathon raté à Tours (malade après la mi-course, l'objectif de 3h30 s'était transformé en un calvaire sur les 20 derniers kilomètres pour finir en 4h08), Paris 2019 allait-il être le marathon qui me permettrait de battre mon record et de me rapprocher des 3h30 ? Est-ce que Paris et ses quelques 50,000 coureurs peut permettre de faire un temps ?

Je finissais par en douter mais, comme pour chaque objectif, que ce soit dans la vie personnelle, professionnelle ou pour un marathon, je m'interrogeai sur le réalisme de celui-ci et sur la meilleure façon de l'atteindre. Je décidai donc de suivre un plan d'entrainement de 4 séances par semaine sur 3 mois (12 semaines) après un hiver rythmé à 3 sorties hebdomadaires (dont une séance dominicale d'une durée minimale de 2h en forêt avec les copains d'Ecouves).

Après quelques semaines d'entrainement, le Lutin d'Ecouves m'interrogea sur mon objectif parisien et me confia que si les 4 séances hebdomadaires aller m'apporter la qualité d'entrainement, elles ne suffiraient pas pour atteindre 3h30 … : il faut plus de volume et atteindre 70-80 km par semaine … "Eh, Lutin, tout le monde n'est pas retraité !!!!". Même s'il en dit souvent, le Lutin ne dit pas que des âneries et il a cette expérience qu'il est toujours bon d'écouter. Il a fallu concilier entre déplacements professionnels et vie personnelle en ajoutant une cinquième séance hebdomadaire (10-12km) et allonger ma sortie du mardi de 6-7 km (au lieu des 12 habituels) …. Malgré cette charge d'entrainement, le plan s'est bien déroulé : pas de blessure, bonnes sensations. Je suis confiant mais mes précédents échecs pour atteindre 3h30 étaient toujours dans un coin de ma tête. Mon expérience de marathonien me rappelle que ce n'est pas parce que le plan d'entrainement s'est bien déroulé que le résultat est joué d'avance … Pour savoir si un plan d'entrainement a réussi, il faut d'abord courir le marathon !

Hâte d'y être …

La dernière semaine est là … Arrivés en début d'après-midi dans notre hôtel parisien, BFM TV Paris diffuse en boucle un reportage sur le marathon où un commentateur indique qu'à la veille d'un marathon, le coureur ne doit rien changer à ses habitudes, ne pas boire d'alcool (on se rattrapera après …), manger normalement, bien dormir, être comme un lion en cage … Il a raison : je suis comme un lion en cage … J'ai hâte d'y être !

Avec mon épouse et quelques amis, nous croisons de nombreux concurrents qui comme nous, se rendent au Parc des Expositions de la porte de Versailles afin de retirer leur dossard. Je suis impressionné à la fois du nombre d'inscrits (plus de 60000) et de la fluidité avec laquelle on retire les dossards ….  L'organisation est impeccable. Le salon du Running permet de se remémorer quelques beaux marathons et d'en envisager d'autres …

En fin d'après-midi, tout le groupe (nous sommes 7) se retrouve à l'hôtel avant d'aller rejoindre un autre groupe pour notre traditionnel restaurant de veille de course situé à quelques centaines de mètres dans le 18ème arrondissement… Une décoration soignée où les murs sont recouverts d'étagères sur lesquelles sont entreposés des bouteilles et des magnums d'antioxydants (Bourgogne, Bordeaux, Côtes du Rhône, Vins de Loire, …) … Une ou deux gorgées de ce breuvage ne vont donc pas nuire à la préparation …. Chacun reçoit les encouragements des amis ou de la famille via des messages successifs. Vingt-deux heures : tout le monde regagne l'hôtel … La course a déjà commencé mais il faut d'abord dormir.

Le jour J

C'est la grand jour (enfin, j'espère …). J'ai bien dormi et je retrouve les autres au petit-déjeuner. Notre groupe s'est scindé en deux en fonction des sas de départ. Eric, Thierry et moi-même partons les premiers vers la zone de consigne afin de déposer les sacs de tout le groupe et rejoignons en courant la zone de départ sur les Champs-Elysées. David, Patricia, Carole et Simone partiront dans le sas de 3h45 même si leurs objectifs respectifs ne sont pas sur ce temps.

Nous sommes 49155 au départ … Impressionant ! Il fait frais ce matin mais le ciel est bleu et l'ambiance est là … Nous rentrons avec difficulté dans le sas de 3h30 pour un départ prévu à 8h40 mais qui s'étale sur plusieurs vagues. Après une bonne dizaine de minutes d'attente, nous approchons petit à petit de la ligne de départ. Nous nous sommes mis d'accord : nous partons ensemble mais chacun fait sa course selon sa forme du jour.

Une des conditions de la réussite d'un marathon est de respecter autant que possible les allures travaillées à l'entrainement … Le risque du départ de ce marathon est de se laisser emporter par l'enthousiasme et par la descente des Champs-Elysées vers la Concorde.

Le départ

Ma crainte du départ est vite levée. La course est très fluide. Je regarde ma montre dans le premier km … Je suis à la seconde près à la bonne allure. Le départ par vague d'un marathon permet donc d'être à la bonne allure de course rapidement …. Ceci serait parfait si tout le monde se positionnait dans un sas correspondant à son véritable niveau ou à un objectif réaliste. Sans modifier notre allure de course, nous devons doubler et slalomer entre des concurrents qui ont dû se tromper d'une heure au niveau de leur sas de départ … Au final, ce marathon aura donc quelques hectomètres supplémentaires.

Le marathon de Paris étant la Mecque des marathons français, nous nous dirigeons vers l'Est … et défilons successivement devant les lieux emblématiques de la capitale : Place de la Concorde, Place Vendôme, l'Opéra Garnier, la rue de Rivoli, l'Hôtel de Ville, …. Au 5ème km, Thierry et moi-même courront ensemble et sommes à 10 secondes près sur la base de 3h30 … Eric est parti plus prudemment. Nous approchons de Bastille où nous devrions voir Lolo (mon épouse), Colette et Blandine. Elles sont là et nous aperçoivent furtivement. La foule est nombreuse tant du côté des coureurs que des spectateurs. Le premier ravitaillement est proche. Tout va bien pour l'instant. Le dixième km est là : 00:49:20. Nous avons vingt secondes d'avance sur l'objectif de 3h30. Ne pas s'enthousiasmer … mais la course est agréable.

Nous passons à côté de la foire du Trône et nous dirigeons vers le Château de Vincennes lorsque j'aperçois quatre maillots rouges de La Vaillante (club associatif de St-Brieuc auquel appartient mon petit frère, organisateur d'une belle traversée de la Baie chaque année au mois de mai … Rendez-vous en 2020 !). Je les salue rapidement en m'étant fait connaitre et nous apercevons le second ravitaillement au Château de Vincennes. Je ne vois plus Thierry que je croyais juste derrière moi.

15ème km : 01:14:00. Je constate que mon allure est toujours constante et que mon avance sur l'objectif est maintenant de 39" après un peu plus d'un tiers de course …. A ce stade du marathon, on s'aperçoit tous que les slaloms du départ et les zig-zags successifs nous ont ajoutés environ 200m… Nous continuons dans le bois de Vincennes pour en sortir au 20ème km avec un temps de 01:38:23 et entrer à nouveau dans Paris. Le semi-marathon est là est le chronomètre est conforme aux objectifs (01:43:39)….

Nous retrouvons la foule dans les rues parisiennes (il y avait un peu moins de monde dans le bois de Vincennes) et je sais que je devrais revoir nos trois supportrices de Bastille aux alentours du 23ème km. Je les aperçois à quelques mètres devant moi. J'ai le sourire et elles savent que tout va bien : l'application en temps réel permet de voir l'allure de course (actualisée à chaque km) pour chaque coureur de notre groupe … Mon épouse (qui a déjà vécu 3 marathons) sait que la route est encore longue.

Nous approchons du 25ème km où nous rejoignons les quais de la Seine et où les embouteillages liés au rétrécissement de la chaussée provoquent un faible ralentissement de mon allure. Nous apercevons Notre-Dame sur notre gauche sans se douter que ce sera la dernière fois que nous la verrons dans cet état … Les tunnels arrivent et si certains groupes chantent à tue-tête dans le plus long des tunnels, la sortie pentue de chacun d'entre eux commence à faire mal aux jambes à plusieurs concurrents. Pour moi, tout va bien … ne pas chercher à conserver l'allure dans la sortie du tunnel mais la retrouver rapidement sur le plat permet de m'apercevoir que je suis toujours bien. J'aperçois même un drapeau des meneurs d'allure des 3h30 à 150m devant moi.

Tout commence à partir du 30ème

Pour tout marathonien, on a coutume de dire que la course commence au 30ème km mais qu'elle peut également être jouée bien avant. Pour l'instant, le 30ème km est là et la Tour Eiffel nous salue. Les affaires sérieuses vont commencer. Je me rapproche doucement du meneur d'allure des 3h30. J'ai calculé que rester avec lui serait la bonne option car mathématiquement j'ai environ 1:30 d'avance sur lui … Thierry surgit sur ma gauche au 31ème. Je l'interpelle. Il va bien aussi. Il sait qu'il a moins de km d'entrainement et que la fin de course sera peut-être difficile. Mais le bougre a beaucoup d'expérience sur le long (marathons, trails et ultra-trails) et je me remets à penser au Marathon de Tours 2017 où il m'avait doublé au 21ème … et où je l'avais retrouvé (deux vomissements et quelques heures plus tard) devant une bière à l'arrivée … Aujourd'hui, le doute n'est pas permis et nous avons rattrapé le meneur d'allure des 3h30 qui est très prévenant et très régulier. Ceci me conforme dans la gestion de la fin de ma course. Je reste avec lui et Thierry aussi.

Nous quittons les quais de la Seine pour prendre le Boulevard Exelmans et la montée du Boulevard Suchet au 34ème. Je me souviens des concurrents en difficulté il y a deux ans dans cette montée et nous sommes toujours aux côtés du meneur d'allure. La côte est terminée. Nous tournons à gauche vers le bois de Boulogne où nous attendent les derniers kms fatidiques (ceux qui font qu'un marathon se gagne ou se perd).

Le final

La traversée du Bois de Boulogne n'est pas sans danger (je parle de course à pied …). Un concurrent devant moi est de moins en moins lucide et manque de trébucher et de nous faire tomber à deux reprises … Je profite d'un espace suffisant pour le dépasser et assurer ma trajectoire. Une chute à ce stade pourrait compromettre la fin … Au 38ème, Thierry discute est à la gauche du meneur d'allure et je suis à sa droite. Je ne suis pas au mieux mais le mental est là … L'expérience va faire la différence.

Le dernier ravitaillement est proche. J'attrape une dernière bouteille d'eau, ralentit un peu mon allure pour bien m'hydrater et veut repartir quand j'aperçois Thierry allongé par terre … Chute au dernier ravitaillement. Rien de grave. Juste nous rappeler que la vigilance doit être présente jusqu'au bout … 39ème : je serre les dents et je maintiens mon allure marathon à 4:57 au km … Je sais que je ne suis pas loin de réussir. Thierry est juste derrière moi. Il souffre aussi. Nous enchainons les mètres les uns après les autres et un rapide regard à ma montre me confirme que tout va toujours bien au 41ème km. A l'amorce du dernier rond-point de la porte Dauphine, des coureurs se sont insérés entre Thierry et moi. Thierry m'a pris quelques mètres mais cette fois-ci, il ne va pas m'attendre deux heures au bar … Je suis vigilant dans ce dernier rond-point car l'an dernier, son beau-frère avait été victime d'un malaise ici même l'obligeant à abandonner à moins de 400m de la ligne d'arrivée … Je me dégage sur la gauche et aperçoit Thierry qui finira 10s devant moi … Les 350 derniers mètres de l'avenue Foch sont devant nous. La ligne d'arrivée aussi … Je regarde mon chrono et je sais que mon temps sera inférieur à 3h29 … et que j'aurai enfin franchi la barrière des 3h30.

Je passe la ligne d'arrivée et on se congratule mutuellement avec Thierry. Après la ligne, je marche tranquillement. Je ne réalise pas encore … J'ai envie de revoir les autres et de laisser exploser ma joie mais pour l'instant, j'ai besoin d'être seul pour savourer égoïstement ce moment particulier de la fin d'un marathon. Celle où le verdict tombe : la plan d'entrainement a réussi !

Le maillot et la médaille Finisher sont là. Ils nous sont remis après avoir montré aux bénévoles ce petit bracelet en tissu  … afin de lutter contre les tricheurs de l'an dernier qui avait honteusement volé le maillot et la médaille Finisher des derniers concurrents … Que l'on soit premier ou dernier, sur un marathon (comme sur toute épreuve de trail ou d'ultra-trail), il n'y a pas de place pour les tricheurs.

Pourquoi venir à Paris ?

On a tous une ou plusieurs bonnes raisons de courir un marathon. Que ce soit par défi personnel, en la mémoire d'un proche, contre le cancer, le diabète, la mucoviscidose ou toute autre cause (les nombreux maillots aux causes caritatives le prouvent), toutes les raisons de courir un marathon sont louables. En ce qui concerne celui de Paris, la visite de la ville, les nombreuses animations, la foule de spectateurs sont des raisons supplémentaires de venir courir ce marathon. Si vous ne voulez en faire qu'un, faites celui-là ! Le seul bémol réside peut-être dans l'individualisme de certains qui oublient qu'ils ne courent pas seuls … et qui changent de trajectoire ou s'arrêtent brusquement au risque de faire chuter les autres concurrents. Certaines raisons peuvent aussi être farfelues, comme par exemple, celle de battre le record du monde du marathon en talons hauts …

http://www.larepubliquedespyrenees.fr/2019/04/14/le-marathon-de-paris-en-talons-hauts-la-paloise-pulverise-le-record-du-monde,2541288.php

Lors de la cérémonie d'adieu à Mustang, il y a quelques semaines, le Lutin d'Ecouves rappelait que le marathon est à l'image de la vie : vous pouvez connaitre des moments d'euphorie, des moments de doutes, des moments de douleurs ou de détresse au cours de la même épreuve. Pour moi, aujourd'hui, la vie est belle !

2 commentaires

Commentaire de Amie Lutin Katia posté le 17-04-2019 à 15:53:14

Bravo un grand bravo pour ta performance. Tu as suivi les conseils du Lutin mais la performance t'appartient . C'est bon non! Savoures pleinement.
Vous avez tous fait de très belles performances avec des motivations très différentes et beaucoup de courage. Bravo à vous tous.

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 19-04-2019 à 17:42:49

Tu peux effectivement être fier de toi. Le marathon reste une belle aventure. Bravo pour ton sérieux dans ta préparation et ta parfaite gestion de l'épreuve. Je pensais les 3h30 difficiles à atteindre et tu l'as fait! Comme je suis content de m'être trompé !

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