Récit de la course : Courmayeur - Champex - Chamonix 2008, par Sandrine74

L'auteur : Sandrine74

La course : Courmayeur - Champex - Chamonix

Date : 29/8/2008

Lieu : Courmayeur (Italie)

Affichage : 2104 vues

Distance : 98km

Objectif : Pas d'objectif

9 commentaires

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CCC Deuxième !

 

Courmayeur - Champex - Chamonix

98,3 km - 5505m+ - 5690m-

Vendredi 29 Août 2008 11h

CCC Deuxième !

 

 

Mercredi 9 Janvier 2008

Je sais que les inscriptions vont se jouer serré mais pas à ce point. Il faudra 10min pour remplir le listing des participants qui auront la chance de participer cette année à la Courmayeur - Champex - Chamonix.

Un premier sprint qui verra bon nombre de participants potentiels rester sur la touche.

Ainsi des amis ne pourront participer à cette course, je ne peux pas m'empêcher de penser à eux.

 

Pourquoi la CCC et pas l'UTMB ???

Cette question, je l'ai entendue bon nombre de fois. Effectivement, je suis loin d'avoir un souci de points pour accéder aux inscriptions UTMB.

Mais il faut être réaliste, et vu mon temps sur la CCC l'an dernier 22h20, je veux m'améliorer avant de passer à plus pour ne plus être à courir devant les barrières horaires.

 

Et l'entraînement ???

En 2007, j'ai eu de la chance... Mais la chance n'est pas toujours au rendez-vous.

En début d'année, j'en ai marre : prise de poids et manque d'entraînement (l'an dernier une moyenne d'un entraînement par semaine). Il faut que ça change.

Alors changement des habitudes alimentaires et Emmanuel se charge de me coacher dans mon entraînement.

Objectif : passer de 71 kg à 63, et prendre du plaisir sur les courses.

 

Le jour J :

Je dois être à 64 kg.

Je suis stressée, j'ai la boule au ventre, c'est mon objectif majeur pour cette année.

Côté entraînement rien qu'en course à pied et rando course :

132 sorties depuis le 1er janvier.

1548 km parcourus en course et 36000m+.

 

Au total course + marche : 2512 km et 46900m+.

 

 

Dans 5 jours maintenant, nous serons dans les starting-blocks.

La tension monte, je passe toutefois toujours des bonnes nuits. La dernière sortie est programmée pour le dimanche avec un départ des Houches, Aiguillette des Houches, Bel Achat, Bossons, Les Houches. Voilà une belle journée et surtout une belle sortie qui réconforte sur la forme.

 

Comme chaque fois avant une course majeure (dans mon programme), je ressens des petites douleurs qui me rappellent les petits soucis, les chutes ou les entorses.

Toutefois en ce début de semaine, une douleur bizarre m'accable. J'ai mal à la pose du talon droit.

Je me dis tout simplement que ça va passer, toutefois mercredi la douleur continue à s'amplifier surtout le matin. Cela ne nous empêche pas d'aller voir le départ de la Petite Trotte à Léon (PTL) et aussi d'aller les prendre en photo à Servoz.

 

Jeudi je suis bénévole à la remise des dossards, j'ai toujours cette douleur, mais j'évite d'y penser de toute façon j'ai récupéré mon dossard et je verrai bien ce qu'il adviendra !

 

J'ai bien du mal à voir ma course, je parle de cette douleur à Emmanuel mais pour lui ce n'est pas grand chose, juste une douleur qui partira le jour J.

 

Vendredi 6h15 le réveil sonne pas plus d'une fois, je suis contente de me lever, j'ai vraiment bien dormi que 4h, le reste... Quelqu'un a parlé de stress ? J

Bien entendu la première pose du pied par terre, m'extirpe complètement de tout sommeil.

Mes affaires sont prêtes de la veille, nous sortons doucement de la chambre pour ne pas réveiller Jean-Marie et Jacqueline.

Je stresse pour rien peut être, j'avale tant bien que mal mon petit-déjeuner avant de partir des Houches direction Chamonix où je dois prendre le bus pour Courmayeur à 8h.

Emmanuel m'accompagne : ça me fait vraiment plaisir qu'il soit avec moi jusqu'à Chamonix.

 

Après c'est comme les jours précédents, je croise et recroise des ami(e)s, des collègues bénévoles...

Arrivée à Courmayeur je pars me mettre au calme au Stade Dolonne, pour éviter d'attendre dans la cohue de l'aire de départ surtout que le soleil tape déjà fort et que niveau commodités ce n'est pas top (2 WC sur le départ).

Du coup je retrouve pas mal de personne que je connais, Marc l'ami Québécois, Yannick le franco-Suisse, Rouba et Olivier.

 

Photo Cyril Bussat.

 

Je croise Marianne connaissance du Luxembourg, les amis du CMBM. J'ai vraiment l'impression d'être chez moi, mais pour autant j'ai toujours la boule au ventre. Je m'efforce de manger un sandwich mais ce n'est pas facile, je continue à bien m'hydrater, oui aussi une banane c'est pas mal ça !

 

9H50

La procession vers l'aire de départ commence à être importante.

Le sac pour Chamonix est fin prêt, je trempe ma casquette un peu dans l'eau de la fontaine. Je remonte les coureurs déjà installés au départ. Il faut aller au bout pour poser le sac.

J'irais bien encore une fois aux toilettes mais vu le monde, je renonce et préfère me placer dans l'aire de départ, et commencer à me concentrer sur la course, sur cette course, sur ma course.

 

Beaucoup de coureurs sont debout, je profite donc de leurs ombres pour m'installer. C'est ainsi qu'assise, je fais le point sur tout le matériel que j'ai emmené, sur l'optimisation et surtout le poids de mon sac qui avec 1,5 l d'eau et le ravito pèse 3,8 kg.

 

Les sonos hurlent les paroles des speakers, je me rappelle surtout des paroles de Catherine Poletti envers tous les coureurs : "Avant de penser à l'abandon, penser à tous les coureurs qui n'ont pu s'inscrire, et avant de prendre une décision reposez-vous et mangez".

J'ai toujours mal au talon, je fais partie de ces coureurs qui peuvent abandonner.

Mais déjà il y a 3 mois je prenais le départ du GR73 avec une entorse à la cheville fraîche d'une semaine, alors ce n'est pas ce mal de talon qui va me pourrir ma course quand même ! Enfin je me vois mal faire la course sur la pointe du pied ! ;)

 

11h : 3; 2; 1.... La suite vous la connaissez, je respire un grand coup et je tente d'avancer

Photo Cyril Bussat.

 

Les trente dernières minutes je me suis remémoré tout ce qu'Emmanuel a pu me donner comme conseil, et il y en a.

Les bases s'est de ne pas partir en dernier et de vite me positionner, de relancer à chaque fois que je peux, et 600m/h dans les montées.

 

Photo Cyril Bussat.

 

Courmayeur - Planpincieux 6,7km 359m+

 

Les deux premiers km dans Courmayeur se font lentement, c'est dense, trop dense...

Rapidement je suis dans ma course, concentrée j'avance, je fais attention aux trottoirs, aux trous éventuels...

A peine sortie de Courmayeur il faut continuer à bonne allure pour éviter de se retrouver en queue de peloton. Ce n'est pas facile et à chaque petite montée je marche pour m'économiser.

Un lavoir nous offre une eau bien fraîche dans laquelle ma casquette plonge une nouvelle fois.

Rapidement j'entends "Sandrina", je n'ai pas besoin de me retourner pour répondre "Andrea", nous étions bénévoles ensemble l'an dernier et nous avions fait aussi un bout de chemin ensemble sur la CCC2007.

Il y a pzellner aussi... Du coup ces premiers km finissent par passer assez rapidement.

Il me faudra environ 1h pour effectuer cette portion.

 

Planpincieux - Bertone 5,6km 471m+ 61m-

 

Je discute avec Cyr, mais rapidement je le laisse partir. J'ai mal aux mollets et aux cuisses ça tire beaucoup.

Nous ne sommes qu'un nuage de poussière qui avance. Cette semaine qui vient de passer a été chaude et sèche, transformant la terre en fine poussière qui vient s'engouffrer dans nos bronches.

Nous sommes beaucoup à essayer de l'expulser par une toux sèche, même l'eau que je bois ne suffit pas à tout faire passer.

Je jette un dernier coup d'œil sur ce point jaune que nous voyons brièvement, là bas tout au fond de la vallée, je ne dis trop rien, je sais... C'est le poste du Grand Col Ferret. Mes yeux fixent de nouveau la poussière virevoltante, pour vite oublier que plus de 20km nous séparent de ce point.

 

La file est dense, mais ça avance pas trop mal, certes je ne tiens pas un 600m/h, mais je ne peux guère faire mieux, et comme je souffle déjà beaucoup je ne me tente pas à accélérer.

Il n'y a pas un nuage pour voiler le soleil, ce dernier nous grille sur place en ce milieu de journée. L'hélico passe et repasse faisant encore plus voler la poussière par moment.

Enfin, nous arrivons en dessus du Refuge Bertone, et nous apercevons une petite file d'attente, en fait 2min d'attente pour se faire scanner notre dossard.

Photo Lepine74

 

Il est 13h02, déjà 2h de course et je suis grillée à point !

Comme prévu je ne recharge pas en eau, je me contente de boire de l'eau et du coca.

 

Bertone - Tête de la Tronche 4km 653m+ 58m-

 

Il serait dommage de ne pas profiter de ce beau paysage, de ce temps magnifique que nous offre cette édition. Le chemin se dessine de lui-même, coloré par les couleurs des maillots des coureurs.

Je regarde en arrière suite à l'entente d'une huée, et je m'aperçois qu'il y a du monde derrière, et surtout la queue s'est formé pour scanner les dossards (certains témoigneront de 20min d'attente).

Je continue sur ce sentier qui fait rapidement disparaître les gouttes de sueurs qui tente de s'échapper de nos corps. Abruti par la chaleur, dans ce superbe paysage où la seule végétation est une herbe rase. Nous avançons pas à pas vers cette bosse, là-bas.

Photo Lepine74

 

C'est un moment très pénible, je subis la chaleur, je me mets sur le côté pour avaler un gel, mon arrêt fait arrêter d'autres coureurs et à ce moment là je vois Nikolas qui passe, quelques encouragements... Je repars.

J'arrive sur le point haut de la CCC : 2584m La Tête de la Tronche, après plus d'une heure de galère depuis Bertone. Oufff ! Je vais enfin pouvoir respirer...

 

Tête de la Tronche - Bonatti 5,5km 90m+ 654m-

 

Alors que certains se sont arrêtés pour reprendre leur souffle ou attacher leurs lacets, je file dans la descente vers le Col Sapin. Le sentier est un lit de terre finement émiettée, cette dernière vient délicatement s'accrocher sur le sel de nos visages. Ces visages déjà marqués, de nous coureurs ayant déjà un peu donné.

De loin je repère ce petit cours d'eau par lequel nous passons, nous nous y arrêtons rapidement, le temps de mouiller la casquette et d'enlever sel et terre de nos visages.

Le peloton est bien plus espacé que l'an dernier.

J'apprécie, même si je ressens mon talon. Je n'y pense pas pour ne pas accentuer la douleur. Je trottine, je bois, oui je bois beaucoup.

J'ai l'impression d'être déjà vidée de ne plus pouvoir, c'est comme être sur une arête de glace en plein soleil, l'équilibre est très précaire.

Je reconnais ce sentier, mais j'en avais oublié la dernière petite montée qui va à Bonatti où j'avale les dernières gouttes d'eau restant dans ma poche à eau dans un bruit caractéristique qui veut dire qu'il faut faire le plein.

Il est 15h09, déjà 4h passé de course.

 

Bonatti - Arnuva 4,4km 96m+ 347m-

 

C'est toujours autant la cohue, nous nous agglutinons autour de la fontaine comme des abeilles autour d'un pot de miel. Effectivement, pour remplir les poches à eau ou bidon il faut être patient, 2 bénévoles essayent de faire du mieux qu'elles peuvent, mais certains coureurs essayent de passer devant beaucoup...

Bien 10min plus tard c'est bon, j'ai avalé rapidement une soupe et du coca, il faut déjà repartir, l'eau très froide est difficile à avaler et j'ai un peu peur que ça me génère des problèmes.

C'est fou je croyais Bonatti plus proche d'Arnuva, en fait j'avais oublié toute la partie vallonnée en balcon, même si c'est beau, ce n'est pas ce que je préfère car tantôt y'a une petite montée, tantôt c'est plat. Ce que j'aime le plus c'est au bout de tout ça attaquer la descente, tout en entendant les clameurs et les sonnailles dont le son vient à nos oreilles, toutefois c'est 300m plus bas que ça se passe...

L'arrivée à un ravitaillement c'est toujours un bon moment surtout quand c'est du solide. Roger est là et m'encourage.

Il est 16h15.

 

Arnuva - Grand Col Ferret 4,5km 768m+

 

Je re-complète l'eau, et je bois, je mange, je prends aussi 2, 3 pruneaux pour la montée. J'évite de traîner car j'aurais vite fait d'y passer du temps déjà que 10min s'écoule.

Je marche en sortant du ravito, je suis avec Pascal.

 

Photo Roger Amblard

 

Je lui indique la vitesse à laquelle je vais monter, je ne suis pas en très grande forme, mais je m'y tiens lui reste derrière.

Je souffle fort de nouveau, j'ai un peu la nausée et mal à la tête. Mon pas est régulier je ne veux surtout pas m'arrêter. C'est un cheminement qui se fait en silence, régulièrement des encouragements se font entendre. Des coureurs redescendent d'Elena, ça paraît long, et pourtant 1h20 plus tard nous y sommes, soufflé par les vents le jour décline 17h53, c'est l'heure du basculement vers la Suisse et je ne sais pourquoi j'ai la sensation que j'irai au bout.

 

Grand Col Ferret - La Fouly 9,4km 30m+ 964m-

 

Je prétexte auprès de Pascal que je dois refaire mes lacets en fait je dois en refaire qu'un... Mais il faut que je souffle et que je mange. La nausée est omniprésente, je prends tout juste une petite pause de 5 min en appréciant le paysage.

Pascal suit son chemin, mais nulle doute que nous nous reverrons plus tard.

Pour finir je prends une pastille Vichy, que je laisse fondre sous la langue. Je trottine et je me surprends à commencer à avoir des bonnes sensations, après plus de 30km ça fait du bien au moral !

J'arrive assez vite à La Peulaz, et surprise nous ne prenons pas le même chemin que les autres années.

Nous prenons un sentier monotrace fort agréable qui nous fait aller en pente légère d'abord, vers La Fouly. Ce qui nous évite une descente assez sèche, suivie des quelques km de faux plats des années précédentes.

Je cours presque constamment, je double, je passe régulièrement des coureurs, j'ai toujours des personnes derrière moi, qui ne veulent pas me dépasser. J'arrive à La Fouly, je ne veux pas cesser de courir et cela jusqu'à la petite montée qui mène au ravito. Là je vois Cyr, qui me dit arrêter là, j'aimerais dans ces cas là remédier à tout cela, dire aux personnes de me suivre mais je sais que c'est une décision personnelle.

Il m'aura fallu moins d'une heure trente pour descendre du Grand Col Ferret.

 

La Fouly - Champex lac 14,6km 533m+ 649m-

 

Le ravito est bien, j'en profite : remplissage de poche à eau, je mange, j'attends que les nausées passent, je sors les manchettes et la frontale...

Et voilà 25min passées déjà bien trop vite.

En fait, je ne veux pas renouveler l'expérience de l'an dernier où dans la montée de Champex j'avais calé.

J'ai une allure régulière, je continue à courir. Le fait d'avoir sorti ma frontale me fait gagner quelques minutes, car aux Issert elle est déjà allumée. J'ai retrouvé le sourire et aussi le plaisir de ces sensations qui nous transportent et nous font voler au dessus des chemins.

Alors que de nombreux coureurs s'arrêtent pour sortir la frontale, je commence la montée replongeant dans la concentration d'une respiration régulière. 600m/h mais pas plus.

Dans cette montée nous croisons un gars dans sa couverture de survie, alors que les coureurs précédant relèvent son numéro de dossard, je m'arrête pour m'inquiéter de savoir s'il lui faut quelque chose, à boire ou à manger... Enfin juste essayer de le faire repartir.

Là tout de suite ce n'est pas possible mais il va essayer.

Champex est déjà là, ça m'a presque semblé court cette année !

Il y a beaucoup de monde, je suis en pleine forme et le public aussi... Petit moment de délire et de plaisir. Arrivée 21h54, je suis prise en photo.

 

Champex lac - Trient 15,4km 778m+ 955m-

 

Je retrouve bien vite Pascal qui n'était pas très loin derrière !? Il y a Roger, et puis Sandrine, et puis Andrea...

Décidément, jamais vraiment seule !

Nous mangeons et ce, malgré le mal à avaler les pâtes, ça finit par passer... Je ne m'arrête que 30min. Avec Pascal nous enfilons nos vestes, et nous voilà déjà repartis.

Nous longeons le lac en marchant et en parlant de la Montagn'hard... Et puis la descente arrivant, j'ai les jambes qui fourmillent. Une fois de plus Pascal et moi nous nous séparons, pour que chacun soit à son rythme.

Il n'y a pas grand monde, et parfois des coureurs cherchent leur coéquipier, et ainsi m'appelle "Laurent" ou autres... Et quelle est leur surprise quand ils voient des cheveux longs ! J

J'ai juste un peu chaud le reste c'est une horloge finement réglée. Hop ! C'est la fin de la descente, j'enlève une couche et me voilà redevenue métronome.

Pour me caler je reprends la marche Afghane, la nuit aidant je verrais presque Jean-Charles devant moi, comme l'an dernier où ce pas montagnard m'avait mené jusqu'en haut de Bovine.

Je double de nouveau un grand nombre de coureurs les uns après les autres, là où certains ont du mal, j'y prends beaucoup de plaisir.

Je décroche difficilement mon gobelet fourni par l'organisation, je bois un peu, un coureur m'aide à le remettre sur mon sac, je suis déjà loin.

 

Le Col de Portalet et puis cette descente, la fatigue présente n'aide pas, et parfois les rochers, les racines, les arbres et tout ce qui m'entoure se transforme au passage de cette lumière qui tranche au milieu de la nuit.

Je fais le yoyo avec deux coureurs jusqu'au Col de la Forclaz, et de là machinalement un pas après l'autre malgré de petites douleurs aux genoux, je joue dans la descente vers Trient, allant même étonner le bénévole qui fait la circulation, sur ma facilité à descendre encore les escaliers.

Il est 2h du matin et beaucoup de personnes attendent le bus qui doit les ramener vers la France pour encourager leurs proches.

15h de course, et je ne pense même plus à savoir combien il me reste à faire. C'est une évidence maintenant "Je termine".

 

Trient - Vallorcine 10,4km 788m+ 828m-

 

Alors que je me ravitaille, je vais me soucier de savoir où est Emmanuel sur l'UTMB, et aussi Marc et Yannick... Bon je ne demande pas pour toutes les personnes que je connais sans ça je ne serai pas arrivée !

30min une fois encore, la nausée est de nouveau passée.

Je n'ai pas pu avaler du fromage, ni du coca... J'en ai un peu marre de ce qu'il y a sur le ravito. Même mes papilles trouvent que la soupe n'est plus aussi bonne.

Je quitte cet environnement chaud et festif repartant vers la pénombre de cette nuit, que seules les étoiles éclairent.

De ce sentier tortueux et régulier, je marque de nouveau un pas régulier. Christophe c'est la seule chose dont je me souvienne... Ne veut pas me passer, mon pas lui convient bien surtout quand je lui dis l'allure que je tiens. Nous dépassons ainsi nombre de personnes, à un moment il s'arrête (coup de barre ?), je continue.

Arrivée au chalet des Tseppes je m'arrête à mon tour pour prendre un gel, la disparition de la nausée n'était qu'éphémère. Les personnes que j'ai eu passé, me repassent à leur tour c'est ainsi depuis de nombreuses heures.

Repartie vers Catogne, il fait encore bien nuit et je m'imagine le barrage d'Emosson là bas sur la droite niché dans les aiguilles rouges. Je ne me souviens pas si l'on voit le Buet ou même le Cheval Blanc.

 

Je pointe à Catogne à 4h05. La descente n'a pas vraiment changé sauf qu'elle n'est pas trop détrempée cette année. J'aime cette première partie car elle est ludique et très amusante, jusqu'au moment où nous arrivons à la piste et là... Je n'aime vraiment pas !

Ces lacets me paraissent interminable, jusqu'au moment où il y a ce petit chemin qui part sur la droite.

J'ai l'impression que l'histoire se répète d'une fois sur l'autre, quand j'arrive à cet endroit la piste me tanne les pieds. Mais cette année un peu moins.

J'aperçois le chapiteau où se trouve le ravito.

5h16 et déjà 18h15 de course. Il est l'heure de m'engouffrer dans cet endroit bien chaud et douillet. Trop chaud et trop douillet devrais-je dire ! J

Nous ne sommes plus que des coureurs aux visages blafards, aux yeux perdus dans la prochaine épreuve.  

La chaleur dégagée par le brûleur, nous prend délicatement dans ses bras. Mes yeux bien fatigués se ferment. André est le spectateur de ces âmes égarées.

Je remplis une nouvelle fois ma poche à eau.

Un thé sucré c'est ce qu'il me faut, puisque plus rien ne passe...

 

Vallorcine - Chamonix 17,8km 939m+ 1164m-

 

C'est de nouveau trop de temps que j'ai laissé filer à Vallorcine : une demi heure.

Mais est-ce trop de temps face aux coups de moins bien évités ?

A chaque fois que je repars des ravitos, je suis prête à affronter ce qui m'attend. J'ai pallié à la déshydratation mais pas "le plus envie de rien" depuis des km au niveau alimentaire.

Sur le chemin qui mène au Col des Montets, d'un bon pas j'avance. Je me questionne aussi.

Réveillée comme jamais, les montagnes se dessinent petit à petit sur le ciel qui s'éclaircit.

Je n'ai aucun doute à ce moment précis que tous ces arrêts sont bénéfiques, et que sans ça j'aurais à un moment donné dû faire une pause beaucoup plus conséquente qui m'aurait coûté beaucoup de temps !

Arrivée au chalet de la réserve, j'enlève veste et frontale, je retourne ma casquette et lève les yeux vers ce qui m'attend.

Un grand sourire se dessine sur mon visage, je me sens d'un coup tellement bien.

J'entame cette montée par le sentier botanique d'un bon pas, celui de la montagnarde que je suis.

Je connais les virages, les escaliers, je sais à quel moment je vais commencer la traversée. Même si je connais bien, je ne peux pas rester là sans admirer ce qui s'offre à moi.

Les premiers rayons de soleil viennent caresser le flanc des aiguilles rouges, alors que la lumière rend encore plus blanche la neige sur la Verte d'ailleurs Franck et Denis doivent y être ce matin ! Et puis là-bas je distingue le Dolent...

Au moment d'entamer la traversée, j'ai des ailes c'est de ces moments tellement rare. J'ai beau connaître la chaîne du Mont Blanc, mais une fois de plus je suis en extase face à elle.

 

A la Tête aux Vents, un nouveau pointage à 7h58.

Dans la magie des lieux les kilomètres ne comptent plus, la progression se fait naturelle.

J'entends dans mon sac le téléphone qui vibre.

 

8h45 la Flégère.

Tiens c'est bizarre un message d'Emmanuel qui me dit que je peux l'appeler quand je veux ???!

Je bois juste de l'eau gazeuse et je suis déjà loin.

J'attrape le téléphone pour entendre la voix d'Emmanuel, il est à Courmayeur depuis un moment il attend un bus pour rentrer. Ca me fait de la peine mais il m'expliquera pourquoi plus tard !

Les yeux grands ouverts, le sourire figé, je me concentre dans cette dernière descente.

Je passe certains coureurs qui me disent ne plus pouvoir courir. Certains autres me doublent comme des avions.

Arrivée à la Floria, je lâche les chevaux, c'est l'heure d'enterrer l'année 2007 qui ne fut pas terrible en course et de voir l'accomplissement de tous les efforts fournis en 2008.

La route est déjà là, j'accélère encore un peu le pas. En finir franchir cette ligne, je me délecte de chaque seconde. Des encouragements volent : "MERCI" à vous tous !

On me dit que je peux traverser la route, mais il n'y a personne à la circulation, donc je fais bien attention avant de traverser.

Il y a des moments où l'on se sent bien même très bien. Ce moment là, je le vis intensément ces dernières dizaines de mètres d'une course où plus rien ne peut nous arrêter, où les douleurs sont effacées.

La ligne d'arrivée se dessine, je vois mes parents, Marc, Yannick, plus loin Marie. Je cours avec des sensations excellentes. J'aurai aimé être avec Emmanuel sur ce final mais il n'est pas encore arrivé.

 

 

 

J'y suis, je franchis cette ligne d'arrivée en 22h46'32". 686ème et 30ème de ma catégorie.

 

Comme l'an dernier c'est René qui m'accueille.

 

Tout va très vite après, trop vite... Puce, caution, veste finisher, des photos, UN cookie au chocolat si c'est bon !

 

 

Fabienne, Jean-Bernard, Gilbert et ma sœur Eliane arrivent trop tard, je suis allée trop vite dans la descente !

 

 

Mes parents et ma sœur Eliane... J'ai du mal à redescendre !

 

 

Complètement ailleurs, dans un autre monde j'ai du mal à atterrir, après avoir laissé mes parents et amis, j'appelle Emmanuel et je pars le rejoindre.

Le sac récupéré je pars prendre ma douche et après c'est un bon repas qui nous attend.

 

Résultat : des pieds avec une peau de bébé, pas une ampoule. Douleur à l'intérieur des deux genoux (mais en 2 jours plus rien), le lendemain grosse difficulté à poser le talon droit par terre (visite chez le médecin, visiblement une tendinite d'insertion).

 

Des chiffres :

Dossard n°6174

2032 partants

1315 arrivants

187 femmes à l'arrivée

686ème au scratch

72ème femmes

30ème senior femme

22h46'32"

 

La suite, nous retrouvons les Célestes l'après-midi qui nous racontent leurs aventures sur la PTL.

Après une bonne nuit, le lendemain nous sommes de nouveau là pour encourager et voir les amis. J'attends tout particulièrement Jean-Paul et Isa partis mercredi matin sur la PTL.

 

Je les rejoins à l'entrée dans Cham' pour immortaliser leur arrivée. Entretemps j'en ai vu passer des coureurs, j'en ai vu des larmes versées : larmes de joies !

La podium se fait, et le meilleur moment vient quand Jean-Claude Marmier nous fait le briefing de ce qui c'est passé pendant 5 jours sur la PTL. C'est un moment mémorable, et certainement le meilleur moment que j'ai passé sur les 2 heures de remise des prix.

 

 

Où est la Célestie ??? ;)

 

Il faut bien que ça se termine, alors bonne récupération à toutes et à tous.

 

Les arrêts et abandons :

Ce petit mot s'adresse tout particulièrement à tous ceux qui n'ont pu aller au bout de leur rêve.

C'est dur, c'est très dur pour beaucoup d'entre vous. Vous vous posez certainement la question pourquoi ? Maintenant que c'est terminé, mais rappelez-vous ce moment là quand vous avez dit que c'était terminé : c'était le choix du moment, votre choix et certainement le bon choix.

 

Mon avis sur tant d'abandon, sur tant de hors délais :

Ce n'est pas la petite course que beaucoup veule faire entendre, c'est 98km de montagne. Il faut se préparer, s'entraîner.

Dans la liste de ce qui a pu être la motivation de tant de non-arrivant, il y a ceux qui veulent faire mieux que les années précédentes et qui partent vite (trop vite ?), la chaleur et son coup de chaud, une mauvaise hydratation et / ou alimentation, une gestion de course pas forcément optimisée.

Mais surtout je pense que la difficulté de s'inscrire à ces courses, fait que certains partent blessés (tendinites ou autres...) et ainsi amputent leur chance d'arriver.

 

Merci Emmanuel. Merci à ma famille, mes amis, et tous les bénévoles avant, pendant et après, aussi aux spectateurs loin d'être avare avec les encouragements.

Merci à la famille Poletti et l'organisation.

 

Cette année par rapport à l'an dernier :

L'an dernier, l'épreuve faisait 86km et 4600m+/-, j'étais juste au niveau entraînement, je me souviens de nombreux moments de moins bien et de beaucoup de marche, ainsi qu'un arrêt conséquent à Champex.

J'étais aussi très fatiguée sur le matin.

http://www.kikourou.net/recits/recit-3627-courmayeur_-_champex_-_chamonix-2007-par-sandrine74.html

 

Cette année j'ai beaucoup trottinée et j'étais moins fatiguée, je dirais que je suis arrivée fraîche et j'aurais pu continuer.

 

 

Ce que j'ai le plus aimé... Le fait que l'organisation essaie d'améliorer d'année en année les épreuves...

Ce que j'ai le moins aimé... Le trop grand nombre de participant générant des problèmes d'affluence...

Et si c'était à refaire... On verra le programme de l'an prochain... Mais si je reviens ça sera pour l'UTMB ou la PTL !

 

J'espère que la lecture aura été bonne.

Amicalement,

 

Sandrine...74 UFO !

9 commentaires

Commentaire de Tercan posté le 08-09-2008 à 08:53:00

Excellent récit Sandrine.
J'avais lu ton récit 2007 et je viens de finir celui ci : quelle evolution !!!

Le gars que tu as vu sous sa couverture de survie dans la montée de Champex : je l'ai vu aussi, et maintenant il me semble que je t'ai vu a coté de lui aussi (c'est moi qui suit parti prévenir les secours).

On etait a vallorcine au meme moment d'apres tes temps de passage... pourtant tu fini 45 minutes avant moi : gros coup de pompe sur la fin pour moi.

Encore felicitations et vonne année 2009 (on se voit à la montagn'hard ? :))

Commentaire de Mustang posté le 08-09-2008 à 09:56:00

récit passionnant , félicitation!!

Commentaire de Bicshow posté le 08-09-2008 à 10:11:00

Bravo, félicitations, belle gestion.
J'ai remarqué qu'on arrive ensemble à Vallorcine j'avais le dossard 7169 :


Toi : Vallorcine S-05:16 18h15mn10s 728
Moi : Vallorcine S-05:15 18h14mn27s 726

Et ci-dessous à Catogne, avec plus de lumière et de lucidité vu nos passsages à Catogne j'aurais pu te saluer, j'ai du te croiser au pied de la descente à quelques encablures de Vallorcine j'ai doublé deux ou trois personnes à l'entrée du village.

Toi : Catogne S-04:05 17h04mn51s 732
Moi : Catogne S-04:14 17h13mn17s 758

En tout cas bravo, quelle course.
J'ai vu ta fiche, tu annonces 14km/h de VMA, quand on fait 46' au 10 km on a surement une VMA beaucoup plus élevée :-)
Arrête la modestie, t'es une championne, encore bravo !!!!



Commentaire de akunamatata posté le 08-09-2008 à 10:35:00

excellent Sandrine !
J'etais super content pour toi, c'est bien mérité et je vois que l'expérience sourde en toi.
L'UTMB est mûr pour t'accueillir à bras ouvert l'an prochain.

Commentaire de frankek posté le 08-09-2008 à 11:34:00

super réçit ! bravo à toi!
récupère bien...

Commentaire de JLW posté le 08-09-2008 à 19:01:00

Récit superbe et gestion de course très bien maitrisée. J'ai pu me replonger dans cette superbe course et je partage quelques unes de tes impressions (mais pas toutes).Merci de nous faire partager ton expérience

Commentaire de millénium posté le 08-09-2008 à 19:31:00

magnifique course , si bien narrée en plus !!!
Toutes mes félicitations , super !

Commentaire de manu26 posté le 08-09-2008 à 22:21:00

Bravo Sandrine, belle course, très sereine.
Tes pensées, les arrêts bien comme il faut et ton cumul mD+ depuis janvier y sont pour quelque chose.

Et quand la poche à eau va...

Commentaire de joy posté le 13-11-2008 à 11:17:00

Gros bisou!!!! et a bientôt ma poto!

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