L'auteur : maxou76
La course : 100 km de Millau
Date : 26/9/2015
Lieu : Millau (Aveyron)
Affichage : 1737 vues
Distance : 100km
Objectif : Terminer
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Petit préambule: ce compte-rendu est très très long, je vous déconseille donc fortement de le lire! Par ailleurs, il est fait aussi bien pour les spécialistes de l'ultra que pour les non-avertis, ce qui explique que certaines explications seront évidentes pour certains.
26 septembre 2015, 9H30 le peloton commence à suivre la fanfare qui doit le mener du Parc de la Victoire à la ligne de départ de la course. Ma douce et tendre (Adeline) qui m’accompagnera en principe à vélo sur la totalité du trajet, m’a quitté pour rejoindre la zone de départ vélo située au km 7.
Par conséquent, je suis seul, dans ma bulle, quasiment extérieur à ces petites festivités de départ. C’est l’occasion de repenser aux raisons de ma présence ici, aux sacrifices réalisés pour être simplement là.
La Préparation :
J’ai commencé à courir il y a déjà une quinzaine d’années, sans doute pour honorer la mémoire de mon père décédé en 1987 d’une crise de diarrhée aigüe au troisième kilomètre de La Parisienne…sans doute n’était-il pas fait pour le monde de l’ultra…ahahahaha Bon ok, il n’en est évidemment rien mais j’ai toujours pensé qu’un bon compte-rendu devait forcément contenir une petite dose de pathos.
Plus sérieusement, l’idée saugrenue de faire les 100 bornes m’est venue 2 semaines après le marathon de Paris pendant lequel j’ai un peu craqué (je termine en 3H54 alors que je visais 3h30…) et durant lequel je me suis souvent dit qu’après avoir fait plusieurs marathons et 2 IronMan, je n’éprouvais vraiment plus de plaisir à faire des épreuves d’endurance…c’est donc tout naturellement que j’ai donc pris la décision de m’inscrire à ce 100 bornes mythique (ne cherchez pas une quelconque logique, la seule que j’ai trouvée c’est : « Quand on est con, on est con… » ! ). J’ai évidemment parlé de ce projet à Adeline, mais celle-ci sait très bien que dès que j’ai une idée en tête c’est déjà trop tard pour essayer de m’en dissuader, ce qu’elle n’a donc pas essayé de faire, et je ne la remercierai donc jamais assez de me laisser rêver et vivre mes trips foufous.
On dit parfois que l’inscription c’est ce qu’il y a de plus facile dans une compétition, mais pour moi ça a déjà été une vraie épreuve car ma folie devait l’emporter sur la raison. Il faut quand même avoir une bonne paire de cor…. pour passer à l’acte, j’en tremblais presque !
L’inscription actée. J’ai évidemment beaucoup lu de comptes-rendus sur cette épreuve (ceux-ci m’ayant tellement inspirés que je me suis promis d’en rédiger un si je venais à bout du monstre) et dévoré également le livre référence en la matière, à savoir celui de B. Heubi.
A partir des infos recueillies, je me suis astreint à préparer mon propre plan personnalisé que…j’ai évidemment pris soin de ne pas respecter ! Mais si ma préparation n’a pas été rigoureuse, elle a tout de même été assez consciencieuse avec 4 à 6 séances par semaine (+ des séances quasi quotidiennes de gainage). 3 semaines avant l’épreuve, je me suis décidé à suivre la fameuse « méthode Cyrano ».
Pour les non-initiés, il s’agit d’une stratégie de course visant à avancer selon un cycle prédéterminé course/marche, afin de ne pas subir en fin d’épreuve la nécessité de marche. Le temps de marche permet en principe de faire tomber le rythme cardiaque et de relaxer un peu les muscles. J’ai donc choisi pour ma part de partir sur un cycle de 9 min 15 sec de course pour 45 secondes de marche sur le plat ou quasi plat, et une minute de course/ une minute de marche dans les montées.
Cette préparation a occasionné d’importants sacrifices familiaux avec des grosses sorties pendant nos vacances dans les Alpes, ou mes séances tardives sur tapis à la maison remplaçant souvent des moments bien plus conviviaux avec ma femme ou mes monstres… (ah bah si finalement je l’ai ma petite dose de pathos ! ). Et je me tâte à citer dans les sacrifices « familiaux » mon arrêt de l’alcool pendant 5 semaines, et ma grosse pause de steack frites à la cantoche…
Bref, ayant vécu une bonne vie de me… pendant un bon moment, m’étant bien entraîné, n’ayant pas connu de blessure, la météo étant parfaite (soleil intégral mais pas trop chaud), j’étais donc bien prêt pour la bataille sur cette ligne de départ.
MILLAU – MILLAU : Premier marathon
10 h : Départ. Je me place dans le premier tiers du peloton, car n’ayant pas de rectificatif entre le temps scratch et le temps « réel », je me dis que ça serait quand même con de perdre 1 ou 2 minutes avant même le passage de la ligne de départ (même si au final qu’est ce qu’une minute sur un 100 km ?).
Je pars donc tranquillement sur mon cycle 9m15s / 45s, je fais bien attention à ne pas m’enflammer grâce à ma montre GPS, et je me fixe de courir sur l’allure travaillée à l’entraînement, à savoir environ 10,7 km/h en course et environ 6,5 km/h en marche. Pendant, mon temps de marche, je prends bien soin de boire (boisson énergétique puis eau).
J’arrive au km 7 et suis ravi de retrouver Adeline qui m’attendait parmi les autres accompagnateurs à vélo. On se fraie un chemin sur la chaussée bondée. On a récupéré un vieux vélo (après une révision générale) de mes parents avec un panier à l’avant, ce qui permettra à Adeline de me donner mes bidons de boisson énergisante, et d’eau, mes gels, etc… a priori sans difficulté.
Au premier ravitaillement en commun, alors qu’Adeline devait en principe s’arrêter et me ramener à manger et à boire, je décide finalement d’y aller moi-même vu le monde présent et la difficulté de garer le vélo. Je m’arrête donc vite fait, grignote un truc…et je passe vraisemblablement devant Adeline sans la voir (ou alors je suis tellement dans mon truc que je la vois sans même tilter qu’il faut que je me signale à elle…je ne sais pas), et là c’est le drame ! J’avance mais je ne la vois pas me rattraper…au moins 10 minutes passent et pas de trace de ma petite blonde. Je commence donc à penser qu’elle a peut être eu un problème mécanique avec son vélo, et je commence à envisager sérieusement de faire les 90 kms restants, seul.
Ca me crispe, mais je reste concentré et focalisé sur l’objectif. Elle me rejoindra finalement après un peu moins de 15 minutes de séparation, et le moins que l’on puisse dire c’est qu’elle n’était pas ravie de m’avoir perdu. J’ai donc pas mal encaissé sa mauvaise humeur sur le coup, ce qui a bien fait marré (à juste titre) les concurrents avec qui je courais alors. Je me doutais bien que des tensions apparaîtraient entre nous à un moment ou à un autre, mais dès le km 13 ça c’est une surprise ! Ca promet pour les 87 kms à venir ! Mais au bout de quelques minutes, le calme est revenu entre nous, et on se cale dans notre routine de course révisée à l’entraînement.
Le circuit serpente entre les collines et le paysage verdoyant est agréable à regarder ce qui fait passer le temps, même si je suis tellement dans mon trip que finalement je m’ouvre assez peu au monde qui m’entoure.
Je passe au semi-marathon en 2h02 soit un tout petit peu en avance sur mon temps prévisionnel, et jusqu’ici tout va bien (…mais l’important ce n’est pas la chute, c’est l’atterrissage !).
La première toute petite côte à Peyreleau (km22), qui m’avait assez impressionné dans la vidéo du circuit, passe finalement très facilement. Il s’en suivra une série de faux plats descendants et ascendants qui s’enfilent comme des perles pour l’instant mais laissent forcément des traces pour les kilomètres suivants. Je m’aperçois assez rapidement que les pansements posés à titre préventif sur mes tétons se décollent et que ceux-ci commencent à saigner…je décide donc d’ôter mon maillot (c’est le moment un peu sexy de ce C.R, imaginez cette scène ô combien sensuelle ! ahahaha), et me demande si je ne risque pas une élimination (un passé d’arbitre en triathlon laisse forcément quelques traces de psychorigidité réglementaire ! ), mais j’ai trop mal alors au diable les éventuelles sanctions !
Peu avant le km 40, je commence à ressentir des douleurs gastriques, ce que je redoutais depuis le début car ces douleurs sont souvent apparues pendant ma préparation. Mais pour l’instant, rien d’alarmant, alors on « fonce » à Millau, pour achever ce premier marathon.
J’arrive au gymnase de Millau. Je fais une petite pause ravito, un arrêt salvateur aux toilettes (j’étais heureux de voir qu’il y avait du papier !!!! wouhou…parfois des petits détails procurent des grandes joies ! ahahaha), et je repars après ce marathon en 4H16 (soit carrément dans mon temps de passage prévisionnel). J’apprendrais plus tard que j’étais alors en 368 ème position.
MILLAU – SAINT AFFRIQUE :
On dit souvent (ce « on » raconte souvent des conneries d’ailleurs…ahahah) que la course ne commence que maintenant, et qu’il faut être parfaitement frais pour attaquer la suite. Autant préciser tout de suite que même si je suis plutôt en forme, ma fraîcheur est toute relative mais j’ai hâte d’en découdre avec le « monstre ».
La sortie de Millau se fait encore sur un rythme quasi régulier. Arrive la première véritable difficulté du parcours, à savoir la côte du Viaduc (on passe en dessous du fameux viaduc), d’une longueur de 2,5 kms à environ 12%. C’est impressionnant en bas de la côte de voir les concurrents qui marchent plus haut sans qu’on en aperçoive la fin.
Comme prévu, je suis un rythme d’une minute de course pour une minute de marche. Un ou 2 coureurs peut être me dépasseront en courant la totalité de la côte, mais sinon ma tactique me permet de remonter facilement une grosse dizaine de camarades de galère, ce qui forcément est assez grisant et donne des ailes. Mais malheureusement Adeline n’a pas réussi à suivre ce rythme de sénateur (ah mince…certains se sont fait critiquer pour avoir utilisé cette expression récemment ! ) à cause de ce satané vélo. En soit, ce n’est pas grave mais il n’est pas concevable que nous ne passions pas ensemble au km 50 pour la traditionnelle photo sous le viaduc (et puis accessoirement c’est elle qui a mon maillot avec mon dossard, au cas où il y aurait une vérification de l’organisation). Je l’attends donc au sommet, et toutes les personnes que j’ai doublées dans la montée me passent devant… aaarrrggg ! c’est frustrant. Quel boulet !!!!! Elle vient pour m’aider mais c’est moi qui doit l’attendre ! Ahahahahaha (je plaisante évidemment ! ). Je dois perdre 2-3 minutes, mais bon gré mal gré je me dis que c’est toujours quelques minutes de repos pour la suite, et qu’au final ces minutes ne représenteront rien.
La photo passée, la descente s’opère sans difficulté, mais je m’aperçois rapidement que contrairement à ce que j’avais osé espérer, il ne m’est pas possible d’accélérer vraiment en descente par rapport au plat.
Commence alors au km 52 mon calvaire.
En effet, je commence à avoir un petit point de côté en dessous du cœur. En ralentissant un peu celui-ci passe tant bien que mal…mais c’était sans doute une feinte de mon corps, car apparaît alors une véritable douleur aigüe en bas à droite de mon ventre (j’avoue que ma description anatomique n’a pas reçue l’aval de la Faculté de médecine ! ahahah). Petit à petit la douleur s’intensifie, et peut alors être assimilée à un coup de poignard dans l’abdomen. Je n’arrive alors plus à courir. Je ne cours que par séquences de quelques mètres (100 maxi ?).Dès que je reprends la course je geins tel un animal qu’on égorgerait…La crainte se lit évidemment sur le visage d’Adeline, mais elle n’évoque pas ses inquiétudes pour ne pas rajouter à mon angoisse. Pour ma part, je m’énerve devant mon incapacité totale à pouvoir courir. Forcément, l’éventualité de l’abandon me passe par la tête mais je rejette cette idée aussi vite qu’elle est venue car je n’ai pas fait tant d’efforts, de sacrifices, pour repartir la queue entre les jambes.
En outre, j’ai lu tellement de comptes-rendus dans lesquels les « héros » relataient leurs failles momentanées, mais finissaient souvent par décrire que souvent cette faillite ne durait pas éternellement, et qu’ils retrouvaient plus tard la patate…dans ces moments là, on se raccroche à n’importe quel motif d’espérance. L’abandon n’étant donc une option possible, il ne me reste plus que celle de finir en marchant ou presque.
Il me reste alors plus de 40 kms à faire et je m’apprête donc à marcher (80% du temps/ courir 20% ???) jusqu’à l’arrivée…Alors là je me dis que la nuit va être beaucoup plus longue que prévue, que plutôt que faire un 12/ 13 h comme envisagé initialement, je risque plutôt de faire un 17/18 h. Bref, c’est vraiment la soupe à la grimace… Je m’arrête quelques minutes au ravito du km 55, la douleur passe…mais revient dès que je recommence à courir.
Je m’arrache sur chaque séquence courue mais combien de temps tiendrais-je mentalement à supporter une telle douleur ?
Durant cette période de chaos personnel, j’ai commencé à croiser les premiers qui étaient pour leur part sur le retour. Evidemment, la différence de vitesse entre eux et moi à ce moment là est abyssale…mais je reviendrai un jour les gars alors ne restez pas sur vos acquis !!! (je sens que s’ils me lisent, les gars sont flippés !!! ahahahah).
J’arrive ainsi clopin clopant au ravito du km 60, en meuglant quasiment à chaque foulée…Un bénévole de l’organisation qui a dû voir l’accablant spectacle que je produis me conseille d’aller voir le médecin qui était à l’intérieur du gymnase. Je refuse d’abord poliment en bon bourricot que je suis, car je ne veux pas perdre plus de temps. Il insiste en arguant qu’il a vu un mec en ressortir en galopant…bon après tout, vu mon état, et compte tenu de mes nouvelles prévisions de temps, je décide que je peux bien prendre le risque de perdre encore 5 ou 10 minutes.
Je décris alors mes symptômes au doc. Il me prend ma tension : nickel no soucy à ce niveau là. Pour lui, c’est un problème d’intestin qui ne reçoit pas assez de sang, car d’après lui, dans ce genre d’effort un peu extrême, le sang est distribué en priorité à d’autres organes (cerveau, muscles…). Il faut donc s’allonger 10 minutes, boire beaucoup de St Yorre (je ne suis pas payé pour le placement produit…enfin quoi que si les responsables de la marque veulent me contacter qu’ils n’hésitent pas ! ), et espérer que ça passe…
J’ai respecté bien volontiers cette période de repos, et je suis reparti après 10 minutes. Premières foulées de reprise : OK tout va bien ! Je sens qu’il ne va pas falloir aller trop vite tout de même, mais de toute façon ce n’est vraiment pas prévu !
S’amorce alors la fameuse côte de Tiergues qui dans ce sens là fait quasiment 4 kms. Je continue d’appliquer ma technique d’une minute de course pour une minute de marche, avec toujours autant de succès car je double tout le monde, aussi bien les « marcheurs » que ceux qui s’obstinent à vouloir courir la totalité de la course.
Malheureusement, je sème encore Adeline qui, malgré son courage, galère vraiment dans les montées avec son vélo d’un autre temps…Au détour, des lacets de la montée, je l’encourage pour ne pas qu’elle perde espoir, mais je sais qu’elle est à 2 doigts de craquer. Elle me rejoindra au ravitaillement du sommet. Je lui dis de prendre bien son temps, de bien se restaurer et de me rejoindre plus tard dans la descente.
J’entame donc la descente vers Sainte Affrique longue de 7 kms, avec le cœur léger car je me dis maintenant que le plus dur est fait ou en tout cas que ça commence à sentir bon. Les finishers de Millau le disent « les descentes sont plus dures que les montées », en effet, au début je suis content de descendre mais rapidement mes quadriceps se durcissent et rendent ma progression douloureuse. Malheureusement faute de temps, je dois bien avouer que je n’ai que très peu fait de séances d’entraînements spécifiques à la descente (à quand un tapis de course qui ferait également des descentes ??? ), je le savais, alors il va falloir serrer les dents.
Peu avant l’arrivée à Sainte Affrique, Adeline me demande la permission de me lâcher un peu avant pour aller préparer le ravitaillement en question en garant son vélo etc…permission accordée (je sais que je suis trop sympa avec elle ! Ca ne durera peut être pas !!! ). J’arrive donc enfin à Sainte Affrique, il fait toujours beau, les gens sont sur les terrasses à nous encourager, c’est sympa. J’entends alors un gamin (sans doute payé par Adeline ! ) dire à son pote « Hey, regarde les abdos du mec ! », ahahah merci les gamins ça ne fait pas avancer plus vite mais ça remonte le moral et ça fait toujours plaisir !
J’arrive sous les applaudissements au gymnase qui fait office de ravitaillement et de demi-tour pour Millau. A ce moment là, j’ai méchamment la patate car je connais le fameux proverbe « Qui voit Sainte Affrique, voit Millau », maintenant c’est clair que quoi qu’il arrive je finirai ! Je ne reste que 5 minutes au ravito (alors que j’en avais prévu une vingtaine sur mes temps prévisionnels de passage) le temps de grignoter vite fait quelques toasts au roquefort et autres trucs salés, de demander des straps pour mes tétons toujours douloureux (or le froid commence à tomber donc je vais devoir me rhabiller), et de récupérer mes affaires de nuit (frontales etc…) pour plus tard.
En sortant du gymnase, je suis surpris de la présence d’un chronométreur car je n’ai pas compris où étaient les capteurs…or, je m’en rends compte qu’en arrivant, j’ai fait un petit détour de quelques mètres pour rejoindre Adeline qui garait son vélo pour récupérer mon maillot avec mon dossard, ce qui a fait que je n’étais pas passé sur les capteurs. Heureusement que je m’en suis aperçu en repartant sinon je n’aurais sans doute pas été classé…un petit tour donc sur les capteurs (passage en 8h06 minutes en 447ème position) et c’est parti pour les 29 derniers kms.
En repartant, je dis tout de suite à Adeline qu’à ma prochaine pause de marche, je souhaiterais qu’elle me tende mon haut manches longues ainsi que mon maillot avec mon dossard, car je commence à avoir froid. Mais dès les premières foulées on arrive, sur une petite rue de Sainte Affrique qui monte assez sèchement et je lâche tout de suite Adeline…
J’apprendrais plus tard que sur ces 200 premiers mètres de montée, elle a déraillé 2 fois…Je commence donc cette montée de 7 kms déjà isolé, sans ravitaillement. Bon va falloir s’accrocher mentalement jusqu’au sommet et espérer qu’Adeline n’ait pas connu un incident mécanique « définitif ».
La montée se passe incroyablement bien toujours avec ma même stratégie de montée, je remonte mes « concurrents » un par un, voire même par petits paquets. La montée est longue certes, mais finalement, je trouve que le dénivelé n’est pas aussi important que ce que j’imaginais, à croire que mes petits exercices sur tapis et mes vacances dans les Alpes, m’ont habitué à pire. Cela se passe tellement bien que je décide même d’adapter ma stratégie pour faire 2 minutes de course pour une minute de marche.
Au milieu de la côte, je commence à avoir soif, alors je demande à un accompagnateur s’il ne pourrait pas me donner un peu d’eau, ce qu’il accepte bien gentiment (encore Merci à lui !). A ce moment là, j’entends Adeline qui crie « Maaaxxxiiiimmmeeeee…. », elle a dû me voir me ravitailler auprès d’un tiers, et doit se sentir inutile si elle ne peut pas me servir pour les ravitaillements.
Ca me rassure vraiment de la voir, alors que je ne pensais pas la revoir avant la descente. Malheureusement, elle n’arrivera pas à me rattraper car je continue mon bonhomme de chemin et elle a dû subir une nouvelle fois un petit incident mécanique…peut-être aurais-je dû l’attendre pour la réconforter, mais rien à faire je suis dans ma bulle et je ne pense qu’égoïstement à réaliser mon objectif.
Finalement, on se retrouvera au ravitaillement du sommet. Elle est très énervée à son arrivée, elle a envie de jeter son maudit vélo qui a déraillé 5 fois dans la montée et n’a pu utiliser qu’une vitesse (j’avoue qu’à sa place j’aurais tout balancé depuis longtemps !). Elle est tout de même contente d’en avoir fini avec cette difficulté. Elle se calme et je la laisse reprendre des forces et manger à sa fin. Je repars et elle me rejoindra dans la descente.
La descente se passe normalement. A la fin de celle-ci je croise Crocs-Man que je salue et le remercie pour ses nombreux comptes-rendus qui m‘ont inspiré (Crocs-Man étant pour les non avertis, un coureur atypique qui comme son nom l’indique court en…Crocs, et accessoirement déguisé en gladiateur pour le coup…tout en finissant cette année aux alentours de 11h40 je crois !!! bref un sacré personnage !).
Je ne pousse pas trop dans la descente car je sens que mes points de côté ne sont pas partis bien loin, à tel point que je décide à titre préventif de m’arrêter 5 minutes pour m’allonger sur le même lit de camp qu’à l’aller (faudrait que je pense à noter cette auberge sur Tripadvisor ! ).
Au bout de 5 minutes, je repars comme prévu sans que le sentiment de petite gêne n’ait vraiment disparu. Mais bon il doit me rester 18 kms à faire, j’arrive à courir, je suis bien parti si je ne craque pas pour finir en moins de 12 heures (soit un meilleur temps qu’espéré), alors je vais serrer les dents et ça passera…Il ne peut plus en être autrement !
Je repars donc, toujours accompagné de ma fidèle assistante toujours aux petits soins pour moi. Je repasse sur la longue partie entre les 2 côtes dans laquelle j’avais tellement souffert à l’aller. Cette fois, tout se passe normalement. La nuit commence à tomber alors Adeline nous sort les frontales. L’ambiance change alors, les petites lumières dans la nuit rendent la course un peu plus intimiste. C’est assez particulier de croiser des coureurs toujours dans leur « aller », et de les saluer sans voir leur visage.
J’arrive à la dernière difficulté de la journée, à savoir la remontée vers le viaduc, courte mais au dénivelé important. Même stratégie, mêmes conséquences, je double encore pas mal de partenaires de bitume, c’est grisant ! Cette fois, Adeline a décidé de prendre les devants, et est partie le couteau entre les dents dans l’optique de réussir sa montée, sans que j’aie besoin de l’attendre…C’est réussi car je ne la rattrape que dans les derniers hectomètres de la montée !
Peu avant le passage sous le viaduc, on croise le dernier marcheur (Tonio apparemment), qu’on encourage, car il est 20h, et il lui reste juste 50 kms à faire en pleine nuit…Quel courage !
A compter du passage au sommet (km 93), plus aucun calcul, je vais essayer d’envoyer le peu de jambes qu’il me reste, et ça commence dans la descente. Ca pique mais ça fait plaisir de retrouver un peu de vitesse. Je vole…Enfin presque ! Je dois être aux alentours de 11km/h…donc oui, je vole !!!
A partir de là, je pars du principe que je donne tout et donc je zappe les périodes de marche. En bas de la descente, je reçois un petit encouragement d’une accompagnatrice à vélo…j’avais déjà remarqué le couple qu’elle formait avec son homme (manifestement venu s’entraîner et accompagner lui aussi) puisque celui-ci portait une tenue de l’équipe de France (ça ne passe pas inaperçu… ). A posteriori, j’ai compris que l’accompagnatrice en question était donc Anne-Cécile Fontaine, multiple championne du monde de 24h…alors évidemment tous les encouragements font plaisir, mais certains font encore plus plaisir que d’autres.
Je cours, je cours, je cours plutôt à bonne allure…la machine tient. Petit ravito express au km 95 et avant l’entrée de Millau, je demande à Adeline d’accélérer, de prendre de l’avance et d’aller ranger son vélo à l’arrivée pour qu’on ne rate pas une belle arrivée ensemble pour un petit détail technique.
L’arrivée est pour moi assez importante, car lors de mon second IronMan (à Roth en Allemagne pour les connaisseurs) j’ai raté une super arrivée en famille dans un stade hyper festif de 5000 personnes en liesse pour une simple question d’une minute, pourtant insignifiante à mon niveau, et je crois que je m’en voudrais toujours…
Je fais donc les 3 derniers kms seul. Je savoure ce moment tant attendu.
L’arrivée dans Millau est loin d’être triomphale, mais quelques félicitations fusent toujours des restaurants ou des fenêtres des immeubles. Merci les amis d’un moment, j’aimerais beaucoup boire une mousse avec vous mais ma dulcinée m’attend en principe pour clôturer cette aventure !
Les jambes tournent toujours bien, mais après un kilomètre de poursuite acharnée (imaginez Louis la Brocante qui poursuivrait un faussaire du troisième âge en déambulateur ), je ne reprends pas un mètre au coureur situé 300 mètres devant moi, et personne à l’horizon derrière (comme si une place en plus ou en moins avait une quelconque importance à mon niveau ! ahahah)…alors à la vue du km 99, je peux me permettre une petite pause de marche d’une quinzaine de secondes pour profiter du moment présent et me reposer en vue des tous derniers mètres.
C’est reparti, et cette fois c’est pour finir. J’arrive dans le Parc de la Victoire. Je cherche Adeline dans la foule mais je ne la vois pas.
Je remonte l’allée principale qui mène au gymnase et je suis inquiet car je ne la vois toujours pas. Mon Dieu, ce n’est pas possible. Je ne peux pas encore rater mon arrivée pour un problème de rangement de vélo !!! J’avance craintif et… je la vois enfin 50 mètres avant l’entrée du gymnase !!!
Mes yeux se remplissent immédiatement d’un liquide lacrymal. Ma gorge se noue immédiatement. J’ai du mal à respirer. En la rejoignant, je la prends évidemment dans mes bras pour la remercier. J’ai du mal à lui dire tout ce que je ressens, mais vu mes yeux en larmes, je pense qu’elle le comprend. On réalise main dans la main les quelques derniers mètres nous séparant de l’entrée. Sous la fameuse horloge de l’arrivée, je lui fais la surprise de la prendre dans mes bras, pour faire une photo actant ce moment inoubliable. Bon les clichés c’est sympa, mais il reste 5 mètres à faire pour monter sur l’estrade d’arrivée.
Ca y est, c’est fait ! C’est officiel ! J’ai le papier de finisher. 11h38 minutes et 15 secondes, et une 334ème place. Jamais je n’avais osé imaginer un tel résultat. J’ai toujours cette boule dans la gorge, et je tente de retenir mes larmes (après tout il ne s’agit que d’une course ! ).
L’après course :
Après m’être assis par terre juste après l’arrivée. Il a fallu se relever, et ça c’est clair que c’était un vrai défi en soit. Ne trouvant pas de bière à l’arrivée, ou en tout cas n’ayant plus la force d’en chercher, je décide d’aller me faire masser. Si avant l’arrivée j’avais l’impression que je pouvais encore courir quelques petites dizaines de kms (30 – 40 kms ?), mes jambes semblent dorénavant ne pas partager cet avis car bien qu’assis, elles ne cessent de trembler frénétiquement. Un massage salvateur, un bon repas et c’est l’heure de rentrer à l’Hôtel et de quitter Millau.
Voila, je l’ai fais. Etant plutôt critique envers moi-même, je n’ai pas souvenir d’un fait sportif dont j’aurais été fier, mais là je suis fier de moi et je n’ai pas honte de le dire (même si j’ai bien conscience que ma « perf’ » ne fera pas la une de l’Equipe ! ). Cette course étant pour moi une réussite, elle ne sera qu’une étape vers d’autres objectifs...
PS : MERCI :
- Mes enfants qui acceptent mes absences (vous me direz ils n’ont pas trop le choix ! ),
- Ma femme pour tout ce qu'elle est simplement... mais bon j'en rajoute pas plus, elle a déjà eu sa dose de divers remerciements durant ce récit… ahahah,
- Mes amis, qui supportent mes discussions pédestres peu intéressantes (mais vous savez je peux aussi parler d’autre choses ! ),
- Les chatons de BoostPigalle (et notamment Gio et Simon qui ont prolongé leurs séances pour rajouter un peu de dénivelé avec moi) qui m’ont redonné goût à la course à pied entre 2 bières,
- Mes parents sans qui je ne serai pas venu au monde etc etc…ahahah…et que j’ai toujours pris soin de bien énerver en m’inscrivant à des épreuves qu’ils redoutaient, et puis aussi pour avoir garder nos monstres pendant ce week-end de compet'.
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8 commentaires
Commentaire de CROCS-MAN posté le 09-11-2015 à 17:44:07
Hello Maxou, merci pour ton récit et ton clin d'oeil :) super chrono dis donc, oui tu m'as mis 5'dans la vue . Et bravo aussi à ton accompagnatrice, elle a eu aussi du mérite
Commentaire de Masquerade7 posté le 09-11-2015 à 20:14:25
Belle performance à vous deux car l'accompagnant à vélo a vraiment, à mon sens, un rôle primordial !!
Le mien m'a vraiment permis de réaliser le temps visé.
A bientôt sur une autre course !
Commentaire de maxou76 posté le 10-11-2015 à 17:50:39
Merci à vous 2! Gladiateur, je me rappelle encore la clameur générale lors de ton arrivée...j'étais allongé non loin de la ligne, heureux...mais déjà je touchais du doigt le fait que se relever était une très mauvaise idée! ahahah
Commentaire de Hervé2285 posté le 10-11-2015 à 22:54:42
Très beau compte rendu Maxou. çà me donne vraiment envie de me lancer dans l'aventure Millau !!! J'espère que çà arrivera... un jour... Et si je le fais, ce sera aussi un peu grâce à toi !!
Commentaire de teddom posté le 11-11-2015 à 22:07:40
le monde est petit en lisant le commentaire précédent je m'appercois que c'est l'ami Hervé rencontré aux 48 h de royan salut l'ami
Commentaire de teddom posté le 11-11-2015 à 22:00:14
bravo a toi et a ta suiveuse très beau récit, a te lire j'ai bien envie un jour de retourner faire MILLAU la dernière fois que je l'ai fait le viaduc n'existait pas merci a vous deux
Commentaire de maxou76 posté le 12-11-2015 à 00:44:02
Teddom et Hervé vous me faîtes vraiment plaisir en me disant que ça vous donne envie de vous (re)lancer dans l'aventure! Si c'est le cas, il ne faut vraiment pas hésiter, c'est une magnifique épreuve, parfaitement organisée pour un prix très modeste. Les paysages sont magnifiques, l'ambiance générale est excellente (tous les niveaux y trouvent leur compte)...bref, 2016 est votre année! ahahah
Commentaire de Hervé2285 posté le 12-11-2015 à 22:09:12
Salut Teddom !! Content de te lire !! En effet le monde est petit !
Maxou, j'ai vraiment envie d'y aller... Merci pour tes encouragements et bravo encore !! Ce sera en 2016 ou 2017.
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