Récit de la course : 100 km de Millau 2022, par Zaille

L'auteur : Zaille

La course : 100 km de Millau

Date : 24/9/2022

Lieu : Millau (Aveyron)

Affichage : 700 vues

Distance : 100km

Matos : Altra Paradigm 4.0

Objectif : Faire un temps

3 commentaires

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Confirmation de centbornard

Millau ! Tout bon coureur, centbornard de surcroît, connait cette destination mythique de l’ultrafond. Né il y a 50ans à l’initiative du non moins mythique Serge Cottereau, les 100km de Millau sont le plus vieux 100km de France et de loin le plus connu et le flux fréquenté avec pour cette année 1764 ultra-fondus au départ.

 

Je me sens prêt

Avec mon unique expérience sur cette distance, à Metz, sur du plat, Millau est une course qui me fait extrêmement envie mais également peur. La crainte des km à avaler mais également du profil qui promet 1100m de dénivelé positif. Je prends finalement la décision de l’inscription qu’après avoir valider une expérience plutôt satisfaisante sur les 80km de trail du Défi des Seigneurs.

J’attendrai début juillet pour enclencher mon plan d’entraînement sur la base d’un plan concocté par Bruno HEUBI avec 5 séances hebdomadaires agrémentées de fractionnés longs ou courts (pour préserver un peu de VMA) autour d’une traditionnelle sortie longue et beaucoup d’endurance à 70% de FCM. Je n’ai pas hésité à me faire plaisir aussi avec quelques sorties trail en plus ou en substitution d’une séance programmée. En tout ce seront 720km avalés durant 36 séances spécifiques, un mini-trail de 25km et un semi-marathon avec un pic hebdomadaire au-delà de 100km.

A une semaine de l’épreuve, je me sens prêt. Je suis en forme et je me le suis prouvé sur les 25 du Trail du Haut-Koenigsbourg et le semi-marathon de Colmar. Tous les indicateurs sont au vert et c’est plutôt confiant que je vais partir dans l’Aveyron avec 6 compagnons runners.

 

J’ai décidé de partir léger

Pascal et Christian ont tout organisé : train, hôtel, voiture de location, … C’est de la logistique et je leur en suis reconnaissant d’avoir gérer cette partie là de la course. On sera logé au centre de Millau à 800m du départ, c’est parfait.

C’est vers 18h après 12h de voyage en train, tram, bus puis voiture qu’on débarque à la Mecque. On est tous un peu crevé, ce n’est vraiment pas la veille de course idéale mais on est tous tellement content d’être là que ça n’a que peu d’importance. On récupère illico notre dossard et le T-shirt technique offert (vraiment beau … mais il n’y a pas unanimité dans le groupe). Je récupère aussi une veste Mizuno précommandée et siglée au nom de la course qui fête cette année son cinquantenaire.

Il pleuviote ce soir mais la météo devrait être des plus clémentes contrairement aux prévisions de début de semaine qui nous annonçaient un temps apocalyptique. Un plat de pâtes au saumon et 2 bières en guise de dîner clôtureront la soirée mais pas avant d’avoir préparer les affaires de course.

Rien de fou à ce niveau. J’ai décidé de partir léger. Pas de sac, il y a des ravitos tous les 5km. Juste une flasque que je pourrai tenir à la main et remplir selon l’envie. Pour les chaussures, je reste fidèle à Altra qui m’offre le maximum de confort avec son modèle Paradigm. J’ai fait 400km d’entraînement en HOKA mais mes doigts de pieds préfèrent avoir plus de place et donc moins de frottements. Dans mon short j’ai encore de la place pour une frontale (Je vais arriver de nuit, c’est certain), un gobelet et un paquet de mouchoir anti-attaque gastrique. Et, pour la première fois, je vais porter le maillot de la RIM (RUN IN MOMMENHEIM) où je sui sociétaire pour la première année.

  

Sub 11h

Réveil vers 6h30, Ben, mon copain de chambrée, veut prendre un vrai petit-déjeuner. Moi, je traîne au lit, j’ai juste une banane de prévue que j’ingurgiterai vers 8h00. Le départ est à 10h00 mais on sort de l’hôtel vers 9h00 car il est de tradition qu’un faux départ soit donné 30 minutes avant le départ. 30 minutes où le cortège des coureurs suivra en marchant la fanfare municipale. Un petit cérémonial qui perdure depuis maintenant 50 ans !!

Allez, faut y aller maintenant. Le moment tant attendu est enfin arrivé. Je me place à minima, je sais qu’il y a des gens qui vont mettre au-delà de 16h et moi je rêve d’un sub 11h. C’est un sacré challenge mais c’est ce genre de pari qui me fait avancer. J’ai programmé ma Garmin avec un plan PACEPRO qui devrait me donner les bonnes allures pour atteindre l’objectif. En tout cas, pour commencer, je ne voudrais pas dépasser les 125bpm et cela le plus longtemps possible.

 

Je suis déjà à 130 bpm

Départ pour une première boucle de 42km où nous sommes accompagnés par les marathoniens. Il fait beau, presque chaud, presque je cherche l’ombre. Je me place assez facilement, la route est large et je commence à m’installer dans une allure aux alentours de 5:45. Je me sens pas super à l’aise, dans une forme que j’estime plutôt moyenne. Je jette un œil à mon cardio … Damned … Je suis déjà à 130 bpm au bout de 2km. Je ne m’inquiète pas, le capteur qui déconne les premiers kilos ce n’est pas une nouveauté.

Km7, la première aire de suiveurs en vélo (les sherpas). Des centaines de cyclistes attendent leur binôme pour qui ils vont être aux petits soins durant les 93km suivants. Un sacré bénéfice logistique et psychologique pour ces coureurs accompagnés. C’est un peu le bordel mais de courte durée. Je me fraie un chemin entre VTT surchargés et VTC électrique, chevauchés par des cyclistes plus ou moins aguerris.

 

Je décide d’oublier mon palpitant

Km10, premier ravito où je marche un peu pour prendre quelques sucres et boire. Ma forme n’est toujours pas là et il reste …. Non n’y pense pas ! Le cardio tourne autour de 140 alors que je cours entre 5:45 et 6:00, c’est incompréhensible. Est-ce la pseudo chaleur de cette matinée, la fatigue, le COVID, la faute à Macron, à Poutine … ? Je n’aurai probablement jamais la réponse et je décide d’oublier mon palpitant en me calquant « bêtement » sur les allures PACEPRO.

Les paysages sont de toute beauté et j’oublie un peu mes inquiétudes de runner. Au ravito du km15 je prends des pâtes de fruits vraiment excellentes. Les ravitos sont vraiment très complets avec plusieurs boissons, des tartines, du salé, du sucré. Tout le monde y trouvera son compte, Millau ne faillit pas à sa réputation.

 

On est dans les clous

Je commence à avoir un peu d’avance sur l’objectif, avance que j’engraisse surtout dans les descentes. L’objectif est de terminer la première boucle de 42km en 4h15 environ. Cette boucle qui passe par le Parc de la Victoire qui également le point d’arrivée est psychologiquement très important. Pour l’instant, je n’y pense pas encore, je m’étonne juste des montées et descentes de ce premier tronçon pourtant décrit comme plat et commence à m’inquiéter de la 2ème moitié qui promet d’être corsée.

Aux alentours de la distance du semi je suis rejoins par Ben que j’avais déjà aperçu un peu plus tôt. Il est en forme mais joue, avec sagesse, la prudence. Il trouve qu’on est trop rapide. C’est son premier 100 et il n’a qu’une petite expérience sur marathon. Le palier qu’il envisage de franchir est un gros morceau, je comprends ses inquiétudes. Pour moi, on est dans les clous du sub11 et je veux m’y tenir.

 

Bonjour Monsieur Cottereau

Km25, 1er pointage chrono pour le live : 2h23, 5:43 de moyenne. On est dans l’objectif avec un peu de rab même. Laetitia m’envoie un message, je lui réponds par un selfie in situ, tout va bien. Je tape la discut’ avec Ben et d’autres coureurs, on arrive assez rapidement au km30. Il fait toujours beau, toujours presque chaud et le Coca (ou plutôt le Pepsi) coule à flot. Je me gave au ravito et dans l’euphorie goûte même un œuf dur. Va falloir que je me calme quand même, ce n’est pas une marche gourmande.

Après avoir croisé Bruno Heubi qui remontait le peloton à la recherche de ses apprentis centbornards, voilà qu’on passe devant un papi assis sur un muret au bord de la route. C’est Serge Cottereau, l’inventaire des 100km de Millau, le 1er vainqueur, le maître Yoda de l’ultra en France. Une runneuse le reconnais en premier : « Bonjour Monsieur Cottereau ». Un passionné jusqu’au bout !!

 

Jusqu’ici tout va bien

Stéphane Mathieu, l’homme qui comptabilise près de 200 100km, multi-vainqueur de la Mil’kil, est également de la partie. Je suis étonné de la voir à mon niveau. Il me dépasse à petites foulées. Km32, c’est le début d’une longue descente vers Millau où je déroule sans forcer aux alentours des 5:45. La première grosse étape, celle du marathon, approche, et avec une petite avance qui me fera un bon petit matelas pour la suite … J’espère.

« I’m back », Ben me rejoint une nouvelle fois, il prend toujours un peu plus de temps aux ravitos. On rentre ensemble dans Millau et arrivons au 2ème checkpoint en 4h11 pour 4h15 de prévu, jusqu’ici tout va bien. On consacre 2 minutes au ravito situé dans la salle d’arrivée. Rendez-vous ici dans 58km. Dans 6h45 … ?

 

Le viaduc de Millau

Un gros morceau nous attend maintenant la première côte, celle qui passe sous le fameux Viaduc de Millau, le symbole de toute une région. Une première amorce montante me sépare une nouvelle fois de Ben qui ne veut pas courir, toujours soucieux de s’économiser. Je fais l’effort, advienne que pourra. Un petit arrêt express au ravito du km45 et voilà que l’on voit se profiler le gigantesque profil futuriste de cette véritable œuvre d’art qu’est le Viaduc de Millau.

Une montée d’un peu plus de 2km à 5% de moyenne nous dirige vers la mi-course en passant sous l’ouvrage d’art. Ici tout le monde marche mais j’ai décidé d’adopter ma foulée de trailer. Des petits pas, productifs à minima mais peu énergivores. Je suis donc quasi seul à courir dans mon groupe. Je dépasse pas mal de monde et passe relativement bien c’est première grosse difficulté.

Le tournant de la course

Le panneau des 50km est derrière moi à présent. Mon avance a quelque peu diminué malgré ma course forcée mais elle est encore de 3 minutes et je me lance dans la descente du même acabit avec l’espoir cette fois de reprendre ce que j’ai perdu. Je suis plutôt bien et déroule avec un autre coureur à des allures avoisinant les 5:15, mon avance reprend effectivement du gras jusqu’au ravito des 54km.

Le tournant de cette course en apparence parfaite prendra sa place ici, là où, subitement, l’envie de m’alimenter me quitte. Je prends une pâte de fruit, j’ai du mal à l’avaler mais me force. Je prends un petit jambon-beurre, je le mache mais, pareil, impossible d’avaler. Il est évident que je ne pourrais pas faire 46km sans m’alimenter. J’essaie de prendre ma dose de glucide via une énième verre de Pepsi mais vraiment à contre-cœur.

 

La bière

Je repars un peu inquiet et me lance à l’assaut de la 2ème grosse difficulté qui se fera via un long faux-plat de 7km. J’y croiserai le premier qui, dans une foulée aérienne, est déjà sur le chemin du retour pour achever sa tâche en un peu plus de 7h. En effet, A partir du km 42, le parcours est en aller-retour. On va donc commencer à croiser du monde. Je commence à fatiguer et me force à courir. Je suis tenté de marcher mais refuse encore cette option … Pour l’instant.

Km61, St Rome, Xème ravito, je suis éreinté. Christophe, le suiveur d’Alain est là. Il a décidé de zapper les prochaines difficultés et attendre son coureur ici. Il me prend en photo mais je ne peux tenir la photo, je m’assoie sur une chaise. Il me reste 40km, 3 côtes et je n’ai plus d’énergie. Je change de régime alimentaire, plus de solide, impossible pour moi. J’essaie plusieurs boissons et trouve du réconfort avec … La bière !! Il y en a à tous les arrêts, de la 1664 et ça me fait vraiment du bien. Je me force malgré tout à descendre un verre de Pepsi mais ce goût qu’il me laisse dans la bouche est vraiment écœurant. On ne se refait pas …

 

Je me couche

Allez, il faut repartir, la voilà, la côte de Tiergues, 4km à un peu plus de 4%. Voilà, je marche, le début de la fin. Mon cardio est bas mais je suis essoufflé, quelque chose cloche ! Les mains sur les hanches je marche, je souffle, je ne sais pas quoi faire, ma vue se trouble, je vacille même ! Je me fais dépasser de tous côtés. J’en peux plus, je décide non plus de m’assoir mais de me coucher, une grande première.

Km63, je me couche de tout mon long sur un muret ensoleillé. Je ferme les yeux, souffle, une spectatrice s’inquiète : « Monsieur, ça va ? », « oui, je veux juste me reposer », « Vous voulez de l’eau ?», « non », « vous voulez un sucre ? », « noooooon ». Désolé madame mais ce n’était pas le moment de me faire ch…

2 minutes, 5minutes, je ne sais pas mais je finis par me relever et bizarrement ça va mieux. Juste assez du moins pour continuer ma marche du forçat. Un alsacien m’accoste après avoir identifié mon pédigré grâce à mon maillot. On discute un peu, le mal semble s’en aller comme par magie. J’ai cependant hâte de joindre le prochain ravito, km66.

 

La machine est repartie

Rebelote bière, Pepsi. Je suce 2-3 quartiers d’orange assis sur une chaise. J’essaie de récupérer, la descente qui s’annonce me motive. Ce seront des km facilement avalés, je l’espère. Direction St Affrique, le point de demi-tour, le km71, le dernier pointage chrono, une grosse étape psychologique. Je me lance vaille que vaille dans cette grosse descente.

5km non-stop de descente. J’arrive à tenir le 5:30, étonnement la machine est repartie. Interdit de marcher ! Je scrute le côté gauche où les coureurs sont sur le retour. Alain a un objectif de 10h30, je devrai donc le croiser et plus tôt je le verrai, plus il sera dans son objectif. Finalement, il est là, c’est lui qui me voit en premier. Je l’encourage pour un sub11 qui pour ma part est à oublier depuis la dernière côte. 11h15 est peut-être encore jouable …

 

Plus question d’abandonner

St Affrique, enfin !!! Km71, 7h37 et une joie inattendue au ravito : de l’Orangina !! Oh joie !! Ma boisson sucrée préférée. Elle n’est pas très fraîche mais quel bonheur accompagné de quelques chips pour un apport en sel qui ne m’écœure pas encore à ce moment. Il reste 29km, pas les plus faciles mais plus « que » 29km. Il n’est plus question d’abandonner. Cette pensée parasite m’a pourtant traversée l’esprit quand j’étais au plus mal il y a 10km mais là plus question !

Toute la descente est à présent à remonter et tant pis s’il faut la faire en marche forcée, tant pis si je mets 12 ou 13 heures, il n’y a plus d’autre option possible : terminer. La sortie par St Affrique se fait directement par un raidillon où autre chose que la marche n’est même plus envisageable pour moi. Je l’accepte, résigné mais trop satisfait d’être arrivé jusqu’ici et d’avoir bu un Orangina.

 

A présent je connais le parcours

La suite de la montée est moins rude, j’alterne marche et course selon la pente. Il n’y a pas beaucoup de coureurs dans mon troupeau. Je surveille à nouveau la gauche de la route et scrute le passage du trio Pascal, Christian et Thierry qui ont l’objectif de terminer ensemble. A présent je connais le parcours, on revient sur nos traces jusqu’à Millau et je sais donc que le ravito est encore loin. Km75 je croise le trio d’amis, ils sont souriants, on se tape dans la main, on s’encourage. A bientôt !

Retour au ravito du haut de la côte de Tiergues, re-bière, re-Pepsi, re-chaise. Je tente le jus de fruit mais reste méfiant. Une fanfare joue et me casse les oreilles, je ne m’éternise pas, je n’ai pas le cœur à la fête, pas encore ! C’est reparti pour une nouvelle descente, je repasse devant le muret où j’étais à l’agonie. Ce n’est déjà plus qu’un souvenir, tout passe avec la volonté.

 

Il commence à faire nuit

Elle tape bien cette descente et suis content d’arriver en bas, au ravito où Christophe attendait Alain. Il n’est plus là, encore heureux, mais je crois qu’il a bu toute la bière, il n’y en a plus. Je me rabats sur la St Yorre et ce foutu Pepsi (mais pourquoi ??). Je prends mon temps et repars en courant sur ce faux plat à présent descendant. Au préalable, Je prends le temps d’envoyer un message à la famille : « 15, j’en peux plus ». Les encouragements qui suivront vont m’aider à tenir.

J’arrive malgré tout à courir et même à emboîter la foulée de certains coureurs qui « déroulent » encore à 5:30. Il commence à faire nuit, c’est une nouvelle ambiance. On continue de croiser des coureurs (et marcheurs) qui sont encore sur l’aller. Je ne voudrais pas être à leur place, ils vont passer la nuit dehors et rentrer au petit matin. Quel courage !

 

Très lentement

Le décompte est pénible : 15, 14, 13, … En plus je remarque que j’ai un décalage de 1km sur les bornes kilométriques de la course et évidemment à mon désavantage ! Il reste encore une belle bosse à gravir, celle du viaduc que j’avais dévalé après le km50 et il restera 11km. Au ravito juste avant, je reste sur mon régime dissocié à la bière. Assis sur un banc j’estime mon arrivée autour de 11h30 de course à présent et ça me va bien pourvu qu’on en termine. Les bénévoles nous demandent de mettre les frontales, il fait nuit noire.

3km de montée, je cours, lentement, très lentement mais j’avance et dépasse quelques coureurs à la marche. L’obscurité cache le dénivelé et ce n’est pas plus mal, je préfère ne rien voir. Je scrute malgré tout l’horizon pour deviner le viaduc sur lequel des loupiottes rouges clignotent en-haut des pylônes. On m’encourage, j’aimerai bien rendre la pareille mais je n’en ai pas la force, juste un petit geste de la main parfois, plus je n’en suis pas capable.

 

Un mal recommence à m’envahir

L’objectif à court terme est le sommet de cette dernière bosse où il restera encore 8km. Avant ça je m’accorde encore une petite portion de marche puis bascule dans une longue descente que j’arrive encore à courir aux alentours de 6:00 avec la vue sur Millau by-night qui me réjouit même si un mal  recommence à m’envahir. Un essoufflement exagéré pour l’effort immédiat fourni. Il faut que je m’alimente ! Il reste un ravito. Dans mes souvenirs il est au pied de la bosse, c’est dans pas longtemps, il faut que je tienne.

Rien, pas de ravito, est-ce qu’ils ont plié bagage ? Je me sens mal, nauséeux comme au km60. Je marche, encore une montée que j’avais complètement zappé. Elle n’est pas longue mais bon … Je suis seul et marche tête baissée. De temps en temps un coureur me dépasse, m’encourage. Il reste 4km, je vais y arriver mais dans quel état. La circulation n’est plus coupée sur ce tronçon, je reste prudemment sur les trottoirs, n’ayant pas d’éclairage dans le dos.

 

Je me libère

Aaaah, le voilà, à 3km de l’arrivée, le ravito tant espéré. Les bénévoles sont sous le chapiteau, attablés. Je me fais discret, je ne veux déranger personne, ils ont fait un travail incroyable. Je prends une boisson, je ne sais même pas ce que je prends, je me sens mal. Je me couche sur un banc juste à côté, je ne suis pas bien. Va quand-même falloir y aller mais impossible de courir. Je ne peux pas continuer comme ça, ça ne rime à rien.

Je prends la décision de me faire vomir. Je cherche un buisson, une plate-bande verte pour faire ça le plus « proprement ». L’index dans la bouche je me libère … Plusieurs fois … Et je me sens immédiatement mieux. Je repars en trottinant/titubant. Je rentre dans Millau dans l’anonymat le plus total même si grâce à ma frontale quelques passant à pied ou en voiture identifient un centbornard et m’encouragent. L’émotion commence à grandir, je pense à la souffrance endurée mais aussi à l’accomplissement d’un défi sportif hors-norme (en toute humilité).

 

Exténué mais incroyablement heureux

La dernière ligne droite, la borne 99, un faux-plat montant, interdit de marcher mais l’envie est forte. Je rentre dans le parc de la victoire, l’allée dédiée aux coureurs, je l’avais déjà emprunté au km42 mais là c’est pour de bon. Au bout, la petite structure métallique pour monter dans la salle, fouler le fameux tapis vert et passer sous le chrono pour la photo finish ! Yesss ! 11h32 !

La salle est blindée de monde, j’entends mon nom. Christophe est là et me prends en photo, merci. Heureux, fatigué, exténué mais incroyablement heureux. Je rejoins Alain en bas de l’estrade et m’assoie, me couche à côté de lui par terre. Il n’a pas fait de sub11 mais a terminé 15 bonnes minutes devant moi, bravo !

 

On en a vraiment bavé

Je mets la médaille autour de mon coup et boit sans réelle envie un verre de Pepsi que Christophe me ramène gentiment. Je ne sais plus comment me mettre, je ne suis toujours pas bien. Avec Alain on se débriefe nos courses respectives et promis, juré, jamais plus jamais on ne reviendra (on verra …) . On en a vraiment bavé. Je demande à Christophe de m’accompagner à l’infirmerie pour qu’on me donne quelque chose pour mon mal. C’est le ballet des civières, beaucoup de malaises.

On me couche sur une civière les pieds relevés avec une prise de tension extrêmement basse (9/6) et une glycémie dans les chaussettes. Je reste 20 minutes comme ça mais retrouve la forme finalement très rapidement. Assez pour sortir tout seul, prendre une douche et rejoindre mes amis attablés. Entre-temps Ben est arrivé aussi en un peu plus de 12h suivi d’un peu plus loin de Pascal, Christian et Thierry (64ans et 1er 100km !). Moi, j’ai retrouvé des couleurs et un jambon-beurre accompagné d’une bière clôtureront définitivement cette folle journée.

3 commentaires

Commentaire de philkikou posté le 28-09-2022 à 21:11:22

Bravo pour ce 100kms mythique bien géré avec une bonne perf ! Dommage que tu ne te sois pas noté dans le Kivaou, on aurait pu te suivre à distance

Commentaire de Zaille posté le 30-09-2022 à 15:21:15

Merci, c'est vrai j'ai complètement zappé le Kivaou !

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 04-10-2022 à 16:34:23

Quelle souffrance ! Mais ça valait le coup avec ce chrono qui me fait rêver... Bravo à toi.

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