L'auteur : akunamatata
La course : Le Grand Raid des Pyrénées
Date : 28/8/2009
Lieu : Vielle Aure (Hautes-Pyrénées)
Affichage : 5850 vues
Distance : 150km
Objectif : Terminer
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137 autres récits :
Namaste ami(e) traileurs,
Dans le monde de l'ultra trail la fin Aout est souvent l'apex de la saison. Le poids lourd de la catégorie Ultra l'UTMB attire près de 5000 traileurs du coté de Chamonix, un petit nouveau, plus sauvage, plus jeune, encore dans la catégorie des super welter, pointe le bout de son nez simultanément. L'ultra trail Grand Raid des Pyrénées se prépare au second round avec presque 1000 compétiteurs.
La première édition fut épique, tellement root que les organisateurs (Hugues, Simon, Michel) hésitèrent longuement à remettre les couverts. En effet, les coureurs les plus rapides furent prompt à ...se perdre (victimes de débalisage mal intentionnés), rendant la course digne d'une manche d'orientation sans cartes, ni balises. Coureur Solitaire s'en souvient encore, mais lui aussi revient pour cette seconde édition tant le cadre fut synonyme de d'alléchantes promesses.
Nous jetterons notre dévolue sur le camping 4 étoiles du Rioumajou. Un fort bel endroit que je conseille à tous campeurs. Nous y retrouvons Jean-Marc, Emmanuel d'Ufo et Sandrine, le Troll (Malik) et Guitoune et plein d'autres traileurs croises lors de nos précédentes pérégrinations "trailisantes".C'est toujours sympa de se retrouver presque en famille ou que l'on aille. Et cette édition du grand raid ne déroge pas à la règle, c'est vraiment la taille idéale car contrairement à l'UTMB ou l'on connait énormément (trop ?) de monde. Et Chamonix, c'est comme à son propre mariage: impossible de voir tout le monde, le temps passe à une vitesse insensée et l'on repart frustré de ne pas avoir pu partager ses émotions ou simplement un bon repas.
La course est programmée le vendredi à 5h du matin, c'est une sage décision car cela permettra à beaucoup de coureurs de ne passer qu'une seule nuit dehors contrairement à son alter ego Alpin ou le départ sera donné à 18h30 (c'est dommage pour les 1er du grand raid qui eux arrivent au milieu de la nuit dans un relatif anonymat, il faut faire des choix...). Nous avons toute la journée de Jeudi pour faire les procédures administratives. Pour ma part c'est de bâtir mon plan de route coureur-photographe avec Michel et donner un coup de main sur le stand Ultra fondus (partenaire de la course), Tibichique, bien qu'officiellement inscrite, va se proposer comme bénévole et ainsi s'économiser une dépense de frais inutile.
Ci dessus Sandrine et Manu (le rédac en chef)
Badgone avec Martine et Arnaud Gueguen (le vainqueur de l'an dernier), puis Pascal notre Toulonnais du MTC qui va se tester après sa déconvenue lors de la récente Montagn'hard (tête de péroné en compote)
Michel me conseille de partir du Col de Portet au (km 10) puis d'aller jusqu'à Villelongue (km 65), puis de couper directement à l'autre base de vie Luz St Sauveur (km 110). Passer la nuit dans le gymnase et repartir de bon matin en stop en direction de Tournaboup (km 123). De ce dernier point, je joins le flot des coureurs pour rallier l'arrivée à Vielle-Aure (km 152).
Michel a la géniale idée de proposer à Jacqueline de faire les ravitos de Hautacam et Tournaboup, lui permettant ainsi de m'épargner des heures de stop bien hasardeuses entre les bases de vie. Jacqueline fera au final deux ravitos, les navettes entre Luz et Villelongue, puis la kinésithérapeute à l'arrivée pour les coureurs... ouf ! Week-end très bien rempli.
Nous zappons la pasta party pour aller à Saint Lary en touriste et acheter quelques spécialités locales. Nous mangeons sagement avec Malik et Jean-Marc au camping sous une douceur étonnante puis dodo pour un réveil à ... 3h du matin. La nuit est exceptionnellement chaude, ce qui n'est pas de bon augure car la météo prévoit une bonne couche de nuage pour la journée de vendredi. On espère pouvoir trouver le soleil au delà de 1900 m d'altitude. Pas bon pour moi ces prévisions, la purée de pois n'est pas la panacée pour prendre de belles photos évidemment.
Je me réveille avant la sonnerie du mobile, un classique quand on est motivé. Tibichique commencera son rôle de bénévole bien plus tard le temps que les premiers arrivent à Hautacam (km 55). J'enfile mon accoutrement et rejoins la ligne de départ grâce au kikoureur madmike qui m'a gentiment pris en stop. Peu à peu le village tranquille de Vielle-Aure (300 Habitants) est envahi par des ombres en spandex serres et lampe de gynéco sur la tête...
Les MTC boys sont prêts a en découdre et occupent le lieu hautement stratégique d'avant course...les toilettes ! Le départ approche et l'ambiance reste relax, il fait doux en contrepartie les étoiles nous sont cachées par une épaisse couche nuageuse. J'espère que la première montée (col de portet km 11) sera synonyme de rencontre avec un ciel étoilé retrouvé.
Les coureurs s'élancent quasiment à l'heure, on distingue devant Philippe Verdier (Organisateur de la no finish line en novembre a Monaco) et le futur vainqueur Nicolas Darmaillacq entrain de filmer (voir son récit) !
Je donne un coup de main aux bénévoles qui doivent disposer les éléments du ravitaillement en place, c'est un joyeux bordel car la responsable a eu une panne d'oreiller, j'essaye d'instiller quelques conseils avisés sur les besoins de trailers et l'ordre dans lequel ils désirent en général le sucré, salé, remplissage camel etc.. Mon plan de marche est simple, partir avec les premiers, me laisser décrocher au fur et a mesure (comme si j'avais le choix..), rester sur les beaux spots ensoleilles si possible, jusqu'à Villelongue. Cela fait un petit bout de 55 km (a comparer avec les 150 km des coureurs) a tenir a une allure très variable mais le plus dur n'est pas vraiment la, car c'est plus une histoire de concentration de tout instant sur les paysages et les coureurs.
Les premiers coureurs arrivent avec un peu d'avance sur l'horaire, je dois ôter de toute urgence ma polaire sous peine de cuire lorsque je vais essayer de les suivre. J'arrive a prendre la roue de Nikoverdose en troisième position, sans me douter que le premier Daniel Lévy (je n'ai pas réussi a me changer assez vite, et peut être que cela aurait changé le cours de la course) va vivre une expérience hors du commun !
J'embraye sur Nicolas et Régis Coumenges, les deux inséparables en tête de course. Ça avoine a un bon 15 km/h sur le plat, et a 18 m/min dans les montées, pas très prudent me dis-je intérieurement. D'autant que pour le moment pas la peine de prendre des cliches, il fait trop sombre...Alors je tente quelque photos qui ne donnèrent rien, et bien sur impossible de revenir sur eux sans hypothéquer le reste de ma course, Philippe Verdier, Guitoune (voisin Ufo de camping), Coureur Solitaire me doublent d'autres aussi naturellement, mais c'est très clairsemé a l'avant. Je suivrai les gaillards a portée de fusil mais pour une photo au lever de soleil avec en toile de fond la mer de nuage c'est mort...
Pour le moment, c'est toujours le brouillard. Quelques éclaircies ravivent la flamme de l'espoir mais cela reste sporadique. Le chemin est monotrace, un peu technique de nature piegeuse et longe des lacs très typiques des Pyrénées. Nous passons de vallée en vallée assez facilement , c'est pour dire que le paysage est loin d'être monotone.
La video de niko ci dessous montre les conditions en tête de course sur la monotrace en balcon.
Le plat de résistance arrive sous la forme d'une montée sèche en direction du col de Bastanet (2500 m altitude). Les 25 premiers ont déjà basculé de l'autre coté...et toujours les nuages qui nous bouchent la vue . Pour la petite histoire, les organisateurs ont pris un maximum de précautions quant au balisage et debalisage. C'est dans cette même fin de montée que Philippe (ouvreur parti avec 2 heures d'avance et quelques kilo de rubalises, voir son récit ici) découvre qu'une main malveillante a enlevé les piquets de balises ...et les a replantés vers un chemin a gauche menant vers un tombant. Je vous laisse le soin d'imaginer la stupidité d'un tel acte alors que la visibilité était réduite lors du passage des premiers. Philippe fait son boulot, or quand les premiers arrivent a ce niveau (30 minutes plus tard)...extrait du récit de Niko
"Très vite, nous voilà dans le mur final du Col de Bastanet, au milieu de tous ces cailloux ... j'adore ! Le groupe hésite à partir à gauche, mais je sais que le chemin est cairné à droite, donc nous restons sur l'itinéraire. Nous basculons. Je range mes bâtons. Je suis aux côtés de Régis, Patrick Bruni, Philippe Verdier, et Gilbert Etchegoimberry. Chacun attaque sa descente, sans prise de risque, car le milieu est hostile ! Le temps de prendre quelques photos, et nous voilà de nouveau dans la purée ... "
Durant ce laps de temps, on soupçonne fortement encore cette main invisible d'avoir agit...Quel bachibouzouk comme dirait le capitaine haddock.
Ha ! il me semble voir un point lumineux a travers le voile de nuages, je reste campé sur mes ergots a ce sommet. Bingo, le ciel se déchire nous livrant des bribes de paysages, un vrai strip tease car nous n'avons jamais plus d'un quart de la vue complète. Dire que les premiers ne virent pas ce jeu coquin de dame nature.
Waouh, les montagnes sont hautes, il y a un lac en bas, non plusieurs ! Je me régale de voir un paysage si changeant au gré des caprices du vent et de la pression atmosphérique. Je me tourne vers les coureurs grimpant au sommet et leur promet une vue exceptionnelle, je ne sais pas s'ils me croient tant la vallée qu'il viennent de parcourir reste ensuquée de nuages.
Toutes les bonnes choses ont une fin et une attaque de nuages en formation serrée vient me dégager de mon poste de sentinelle, je vais suivre une stratégie lumineuse lors de ce trail: rester au soleil ! Au niveau de la multitude de lacs devinés depuis le col du Bastanet, le soleil décide de chauffer notre couenne ramollie par l'humidité.
Ça tombe à pic, c'est un des nombreux endroits magiques du parcours, et tomber dessus sans crier garde (because nuages joueurs) ne fait que renforcer la beauté de lieux .
Les MTC boys ont la banane
Nous sommes bel et bien au dessus d'une mer de nuages, et pour moi inutile de me presser. J'espère que plus le temps passe plus les rayons de soleil pourront faire "fondre" cette couche blanchâtre de gouttelettes en suspension. Les paysages scéniques s'enchainent à une vitesse insensée, tantôt le soleil rasant donne une couleur chaude à l'écrin de montagne entourant un lac bleu vert, tantôt une brume vient lécher le bord de lac comme si elle venait en reconnaissance avant de tout engloutir. Exceptionnel, c'est le terme exact a appliquer sur cette dizaine de bornes du parcours.
J'ai beau attendre la mer de nuage ne bouge pas d'un iota, tant pis quand faut y aller...Plouf ! Nous arrivons à Artigues, gros ultra ravitaillement (sucré, salé, soupe etc..) dans une maisonnette. J'ai la tête encore au dessus des nuages et j'ai du mal à croire a ce temps humide et frais. J'ai hâte de prendre de la hauteur.
L'humidité, la brume décolorant, condensant l'eau autour de (et sur) nous, donnent un cachet étrange, feutré à l'atmosphère. Nous croisons des chevaux en liberté avec des cloches autour du cou, des moutons à la toison bleue (peinturluré à la bombe, c'est pas des schtroumpfs ou des créatures du monde de Narnia non plus). Je me verrai bien avec mes compagnons du moment entrain de rejouer les 10 petits nègres, bien croiser Jack Nicholson avec sa hache sorti tout droit de shining...mais par dessus tout cela me rappelle le film the others avec Nicole Kidman. Une histoire de fantome, brrrrr....
Nous montons vers le col de Sencours depuis longtemps, je lève les yeux mais impossible de voir quand cette montée se termine. Des coureurs sont déjà dans un état de fatigue avancée, je cède quelques sporténine de ci de là, mais la plupart des traileurs gisant sur le bord de route sont simplement épuisés (hypoglycémie ou vomissements) je crois voir un mirage dans les nuages sous la forme d'une tour blanche très pointue ?!
Tout le monde regarde ses pompes et se demande quand cela va se terminer, mon altimètre ne me sert pas à grand chose (pas le parcours en tête) et j'ai la flemme de sortir la carte IGN de mon sac. La montée est terrible. Enfin nous sortons du cocon coton, et c'est pas trop ton ! Je réalise que c'est l'observatoire du pic du midi que j'entrapercevais quelques minutes auparavant, la camisole c'est pour une autre fois.
Le soleil ça se mérite ici bas on dirait. Le ravitaillement fait du bien, et bien du monde lézarde avant de repartir de plus belle dans les nuages. Et on a bien fait car l'enchainement jusqu'à Hautacam est un concentré de difficultés que j'ai rarement subi. Un conseil: Il faut absolument faire le plein de tous les niveaux (liquide, solide et moral) à cet endroit pour espérer tenir.
C'est encore l'heure du bain de nuages ! Les cols s'enchainent, sans répit, point de platitudes échangées entre coureurs pourtant on en voudrait bien du plat. Peu avant le lac bleu ou plutôt le lac invisible car même en le longeant on ne le voyait pas ou bien on pensait que c'était un bord de falaise à pic, la partie la plus technique du tracé nous attend.
Imaginez un couloir bien étroit, des dalles de pierre en devers parsemées de mousses mouillées de surcroit, une pente nécessitant un filin d'acier, le tout sur une bonne cinquantaine de mètres. Le seul avantage c'est que l'on ne voit pas le vide (on est dans le brouillard) .
C'était la séquence frisson, le col de Bareil et le col de la hourquette d'Ouscouacou (non ce n'est pas un juron du capitaine Haddock) sont franchis. La jauge à eau est sur la réserve depuis trop longtemps pour moi. Plus de 3h50 pour faire seulement 17 km, or sur le papier cela ne paraissait pas si dur, et pourtant on passe la plupart du temps a plus de 1900 m. Hautacam refuge des âmes a la dérive... je retrouve Tibichique au four et au moulin. Je ne peux rester ce cet endroit trop exposé aux intempéries, je gagne la base de vie de Villelongue et j'attendrai sagement au chaud que Jacqueline finisse son tour de garde pour m'emmener à Luz St Sauveur.
La base de vie de Villelongue atteinte à 18h45, synonyme d'affaire de rechange et vrai repas, dommage pour le manque de douches, un tuyau d'arrosage est disponible pour les moins frileux. Je retrouve Pascal qui ne prend aucun risque et arrête la à cause de son péroné.
La suite dans le prochain épisode
Les photos sous flickr sont ici le diaporama est la
Akuna
Hola como estas ami(e)s traileurs,
Reprenons le plan du récit:
A Villelongue, l'attente de tibichic se fait longue, je reprends trois fois des pâtes. Fait le tour des popotes avec Surfboy et Tiboug' chapeau la paille mais je m'ennuie un peu. Vraiment bizarre cet état, la course est en suspend pour moi, un peu comme une course a étape, sauf que je suis le seul dans ce cas. Je fouine dans tous les sens, tourne en rond. Je tombe sur Supersteph entrain de recharger ses accus dans la tente des "morts" (ben oui, c'est la ou ils stockent les traileurs morts sur des lits de camp militaire).
Pascal, allongé sur un lit, a déjà pris place sous une couverture. Il attend comme moi Jacqueline qui devrait se pointer vers 22h ici. L'organisation, dans un premier temps, prévoit de rapatrier les abandons sur la base de vie de Luz St Sauveur, puis dans un second temps une autre navette samedi à 5h du matin les acheminera jusqu'à l'arrivée à Vielle-Aure.
Bon après tout, Ti Boug' n'a pas tort, je vais suivre son exemple et nous voila comme deux petits vieux sous les couvertures. On pourrait se dire que l'ambiance est morne, mais point du tout. Ti Boug et moi sommes en forme et on se marre vraiment bien sous la tente. Cela tranche avec les visages aux traits tirés arrivant au fur et a mesure dans la tente.
La nuit tombe, et nous on rigole comme des bossus, Supersteph est remonté comme un coucou après sa gigue techno-membres inférieurs. Sandrine arrive vers 21h, et je l'invite à nous rejoindre sous la tente avec son plateau repas. Que n'avais je fais là ! Se joint à nous aussi la Castafiore (des Célestes belges), ben c'est reparti pour un tour, discussion sans fin dans une bonne humeur surprenante. Franchement on dirait pas que tout ce beau monde vient de faire 65km sur et sous les nuages, et sous la pluie pour les derniers arrivants.
Supersteph du mode coucou est passé au mode terminator, il va tout exploser dans son sillage de cyborg. Las, il revient vers nous en disant que la course est neutralisée / arrêtée à partir de Villelongue (ici). C'est vrai qu'il pleut beaucoup et la montée au Cabaliros (1800 m D+ d'un coup ) est un gros morceau, mais il n'y a point d'orage ? En fait l'explication vient progressivement après les rumeurs les plus folles: tout le monde est entrain d'imploser à mi-pente vers le Turon de Bene (1550 m altitude). Hypoglycémie, hypothermie, le poste médical de Turon de Bene est saturé et crie stop au PC course "arrêtez d'envoyer les gens au casse pipe ils tombent tous comme des mouches ici !" . Qui dit chaine médicale saturée dit neutralisation de la course en attendant que les capacités de secours reviennent à la normale. En effet,toute organisation de course a une obligation de moyens (et non de résultats) , c'était la bonne décision à prendre (de garantir des moyens de soins et rapatriement) .
La Castafiore et Sandrine bon pied bon œilJe suis à moitié surpris car la difficulté col de Sencours - Hautacan a du puiser profondément dans les organismes. Et repartir de suite dans la nuit sous une pluie persistante réclame une gestion antérieure prudente. Supersteph n'a plus la lueur rougeoyante du cyborg indestructible dans les yeux, comme beaucoup il gamberge et ne veut pas mettre sa santé en danger. Tout le monde sent que la chaine médicale est sous flux tendu et qu'en cas de défaillance c'est presque sans filet. Il y a un flottement d'une bonne heure ou personne ne sait si la course va reprendre. Finalement le go est donné sous condition. L'heure d'arrêt sera décomptée du chrono final.
Beaucoup de traileurs sont sortis mentalement de la course durant cette parenthèse, mais s'ils autorisent de nouveau les coureurs à partir cela signifie que les secours sont de nouveau opérationnels. C'est un peu la psychose au sein du groupe, Supersteph a la patate en comparaison à d'autres qui sont partis auparavant en se disant tant pis si j'explose (alors qu'ils étaient déjà bien cramés). Ti Boug' et moi encourageons Sandrine et la Castafiore pour continuer, on est pas trop crédible sous nos couvertures bien au chaud . L'organisation décide de laisser partir les coureurs de Villelongue s'ils passent devant un médecin (check up basique tension, lucidité...). Bizarrement cela fout encore plus les jetons aux coureurs indécis. Halala, le mauvais trip, comme quoi le moral ça se joue à peu de choses. Bref, Supersteph comme nos deux belles vont rester bien au chaud dans la tente, le piège idéal quoi . La prochaine fois je prend mon fouet et mon air martial, et ça va pulser tidjoudenondidjou !
Jacqueline, tout juste sortie d'Hautacam sous un brouillard épais, nous délivre de la base de vie, direction Luz. On y croise Philippe Verdier qui repart avec la tête des mauvais jour malgré sa bonne place provisoire (6eme), chute, matos défectueux...Alors cette nuit fut l'occasion de:
ci dessus Philippe, Guitoune au cote de Pascal et Tibichic qui s'octroie un bon sommeil réparateur, Tito le local pointe à la 13eme place vraiment super frais ! Il est passé en 80eme position au col du Bastanet et il finira 6eme au scratch ...On se doutait qu'il allait faire un beau score ici vu la façon dont ils nous a tous pourri au tour du Off du Queyras. Oliv'BCA casse la baraque également en étant dans les 50 premiers ici. Tounik et Langevine inséparables.
A les voir repartir, j'ai trop envie d'y aller mais je dois attendre le soleil, alors je me recouche...Des fois je trouve une tête connue a cote de moi allonge, alors je coasse quelques bafouilles. Je trouve le temps long, quelques incidents émaillent le petit train train de mon attente, tel la seconde féminine qui arrive tout sourire mais qui enchaine soudainement malaises vagaux comme des perles..abandon. Le troll arrive avec la navette de 6h, abandon à Cauterets plus de jus. Termite aussi est venu avec la navette, il s'est brulé les ailes au Cabaliros suite à son jeu du chat et la souris avec les barrières horaires avant Villelongue.
Enfin l'heure d'y aller, je réveille tibichic, elle va prendre son tour de garde a Tournaboup (km 123, altitude 1460 m) bientôt . La météo est encore bouchée . Je bouffe encore de la purée de pois en rongeant mon frein. Les traileurs sont vraiment dans le dur à ce moment. La montée sur le col de Barege (km 131 altitude 2470 m) est vraiment très variée, j'arrête de maugréer et prend par ci par là une toile d'araignée déformée par les gouttelettes de rosée, un gros rocher coloré le long d'un torrent. Si la vue ne porte pas loin, il faut juste découvrir les pépites du monde macroscopique qu'il y a sous son nez.
Je rattrape pas mal de traileurs dont Tounik et le photographe Arnaud Begay (voir ses photos ici), mais surtout j'attrape sur le coin de la gueule une scène quasi mystique. Le soleil fend la brume tel un brise glace, le halo lumineux devient un fin pinceau colorant la petite prairie terne dans laquelle j'évoluais. De cette clarté blanche Jésus apparait marchant dans l'air entoure d'anges virevoltant et gazouillant ... La rosée matinale amplifiée par une nuit humide est frappée de mille feux, ou que mon regard se pose la nature brille intensément de rayons diffractés multicolores, des volutes de brume s'élèvent du moindre brin d'herbe, les arbres fumants au loin apparaissent comme sortir de terre par la volonté d'un tremblement de terre silencieux. Je n'en crois pas mes yeux, je prends des clichés qui malheureusement ne restituent en rien la beauté éphémère de l'instant. L'œil humain surpasse encore les capteurs électroniques dans ces conditions. Quel fabuleux cadeau que me fait Dame nature ici.
Le soleil ! Enfin...je reste sérieusement sous le charme du moment passé, j'aurais beau revenir 100 fois ici, les conditions particulières de ce jour, à cet endroit, ne seront pas réunies.
Le col de Barege est un point remarquable du parcours, un point au delà duquel on peut raisonnablement penser à l'arrivée. J'attends patiemment ici (il est 10h) le temps que la mer de nuages se retire avec la marée solaire...Je discute avec les bénévoles et la terrible nuit qui les a enserrés dans ses griffes froides, humides et venteuses. Les premiers sont passés de nuit et n'auront eu que 2h de soleil sur le week end...
Vincent, notre ami de la Santamariccia, est un dur au mal. Le visage marqué par l'effort, il me répète inlassablement que cette course est très dure, je le crois sans problème.
Ci dessus Stef34 qui fait bonne figure malgré son manque flagrant d'entrainement, Daniel me dit "hé, fallait me prendre quand j'étais en tête de la course" alors il me dit qu'il était en tête en haut du col de Portet et....si vous avez cliquer le lien sur le billet précédent vous savez sinon le voici. Mais sur le coup j'étais dubitatif, il a pris un coup sur le coco le gaillard ou quoi ?
Enfin la mer reflue, je peux continuer mon périple. Je déboule à une relative vive allure en comparaison aux coureurs mais un traileur me passe a une vitesse supersonique, il s'agit de Franck Gilleron le leader du 75 km parti ce matin de Vielle-Aure. Aller, je me fais plaisir et le suis. Il carbure le bougre et me distance sur le plat par contre dès que cela devient technique en descente je reviens sur lui. J'irai jusqu'au ravito de l'Oule avec lui.
Ouf sacrée suée, mais bon ça ne sert à rien de courir comme ça sans vraiment profiter du paysage, au final Franck a conservé, voire augmenté son avance (4 minutes) jusqu'à la ligne d'arrivée.
Ça sent l'écurie, il faut longer l'Oule et grimper au col de Portet puis redescendre à Vielle-Aure. Je suis super en avance mais j'ai promis à Tibichic que je revenais vers 16h, alors je trace...
Ci dessus le Lac de l'Oule puis la vue sur la vallée depuis le col de Portet, Je croise la coureur solitaire family avec qui je tape la conversation, une belle 4eme place pour Éric. Il fut longtemps 3eme mais le jeune varois Romain Guillaume qui possède toujours un finish de folie lui aura mis un vent vers le col de Barège. Je continue ma fin d'étape et pousse le plaisir à franchir quand même la ligne d'arrivée même si je ne suis pas finisher. Bière immédiatement avec Philippe et Philippe sur la place du village, Tibichic a quitté Tournaboup et vient suppléer la seul Kiné prévue.
L'ambiance est excellente, une arrivée comme on l'imagine, pleine d'émotions, de bains de soleil en sirotant une bière, la tête dans les nuages...euh non pas les nuages... dans les montagnes c'est mieux. Coté MTC Jean-Marc fait fort avec une 26eme place qui le place encore une fois sur le podium, Philippe Simion ne s'est pas tordu la cheville sur les 150 km technique du parcours ! (alors qu'en descendant d'un trottoir deux jours avant..).
La remise des prix est le lendemain matin, ce soir c'est merguez et saumon au camping avec les kikoureurs et MTC + visionnage des photos (déjà!).
Niko et Régis nous font part de leur prise de pied respectif et salue aussi bien les bénévoles, organisateurs et coureurs. De beaux vainqueurs qui ont explosé les prévisions les plus optimistes. Coureur Solitaire sur le point de faire un discours et....extrait de son récit (une petite merveille, a lire absolument).
"Mister Bean sur le podium
24h35, 4ième au scratch et premier V1. Je n’aurais jamais parié sur une telle performance !
La fête dure encore deux jours. Le samedi après-midi, nous montons en famille à Soulan voir arriver quelques coureurs dans cette descente assez difficile. Le dimanche matin, remise des prix. Les coureurs défilent sur le podium et chacun y va de son petit discours de félicitations tant aux bénévoles qu’aux organisateurs. Une organisation sans faille, exceptionnelle est soulignée par toutes et tous. Lorsqu’arrive mon tour de grimper sur le podium, j’ai moi aussi préparé un petit truc à dire oui mais voilà… le problème c’est que je suis un grand timide et l’expression orale n’a jamais été mon fort. 500 ou 600 personnes sont là devant et je me sens complètement con. On m’avait dit que courir rendait intelligent et moi, naïvement, je pensais attraper le cerveau d’Albert Einstein mais pas de bol, je n’ai fait que récupérer les pieds de Frankenstein ! (voir photo ci-dessous)
Je suis donc là, sur l’estrade, les bras ballants à me demander si je vais oser dire un ou deux trucs et je n’arrive pas à me décider. C’est bête hein ! Mais je sais que si j’empoigne le micro, voici en gros ce que j’arriverais à dire : « super, cool, trop top, les gars ! Merci tout le monde ! C’était sympa… trop cool ! »
Alors qu’en réalité, j’ai en tête précisément ce que j’aimerais dire mais qui ne pourra jamais franchir le bord de mes lèvres autrement que dans un borborygme vaguement articulé. Si, donc, j’étais moins con, voici ce que j’aurais dit :
Tout d’abord, j’aurais demandé une vrai Standing Ovation pour les bénévoles et les organisateurs qui ont réalisé un sans faute pour cette deuxième épreuve : tout était parfait, de l’accueil au balisage en passant par les ravitaillements… parfait, absolument parfait !
J’aurais ensuite adressé un immense merci à Muriel, mon épouse, et à mes deux filles qui ont eu le courage et la gentillesse de me suivre toute la journée et une bonne partie de la nuit du vendredi. Elles ont été pour moi une magnifique source de motivation et un grand réconfort à chacune de leur rencontre alors que la pluie et le froid m’avaient transi jusqu’au os.
J’aurais enfin terminé par rendre hommage à un ami, Michel, du club d’escalade de mon village de Maîche, dans le Haut-Doubs, lui aussi passionné de montagne et décédé d’un arrêt cardiaque au tout début du mois d’août. J’avais décidé de lui dédier ce GRP2009…..
Oui mais voilà, je suis un peu con et trop timide pour oser et surtout être capable de dire tout ça devant toute cette foule.
Alors que ce soit fait ici ! "
Puis Tine toujours poignante quand elle dédie ses courses à Gazelle81, Le repas de fin de course prend la forme d'un buffet libre, cela est ma foi très bien vu de la part de l'organisation car c'est une occasion conviviale de plus (de surcroit c'est délicieux, pour une fois que les végétariens en ont pour leur argent). Les organisateurs auront prévu un prix spécial consolation à Daniel Levy pour ces 10 000m de dénivelé positif et ses 180 km !
Après "eat my vegan food !", c'est "eat my wake !" un peu plus à l'ouest le lendemain
Vous l'aurez compris, le grand raid de Pyrénées est déjà un poids lourd de sa catégorie, je ne doute pas de son succès à l'avenir.
Les photos sous flickr sont ici le diaporama est la
Akuna
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15 commentaires
Commentaire de Fredy posté le 05-10-2009 à 20:44:00
Toujours à la pointe de l'info akuna. Les photos sont magnifiques, çà donnerai presque envie de se mettre à la CAP ;)
Commentaire de CROCS-MAN posté le 05-10-2009 à 21:07:00
Bravo Jean-Marie, encore un SUPER reportage et de magnifiques photos.
Commentaire de shunga posté le 05-10-2009 à 21:13:00
ouais. Magnifique ! Ca donne envie d'y être !
Le coup des 180km faut y aller quand même ^^
Commentaire de calimero posté le 05-10-2009 à 22:14:00
Vraiment un EXTRAORDINAIRE récit pour un non moins fabuleux exploit!!!
Chapeau bas Monsieur Akuna!!!
Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 05-10-2009 à 22:38:00
Bon, je n'ai plus qu'à ranger mon appareil photo...
J'apprécie particulièrement la photo des trailers s'enfonçant dans la brume avec la fleur en premier plan... du grand Jean-Marie !
Commentaire de millénium posté le 06-10-2009 à 07:21:00
Des paysages médiocres. Des photos banales.Un récit commun. Bénévole sur 2 ravitos seulement , et masseuse uniquement pour quelques dizaines de coureurs à l'arrivée......
Un WE tout repos quoi !!!!
Extraordinaire jean-marie (et non moins courageuse jacqueline). Votre présence est un véritable bonheur ! MERCI
Commentaire de Mustang posté le 06-10-2009 à 07:57:00
un point de vue sur la course bien sympa!! oui les photos, pas mal!!!!
Commentaire de taz28 posté le 06-10-2009 à 08:06:00
J'attendais d'avoir un peu de temps pour savourer ton récit illustré de tes magnifiques photos ...
Je ne suis pas déçue, c'est juste superbe !!!
Merci Jean-Marie pour ces paysages et ce récit ...
Taz
Commentaire de RogerRunner13 posté le 06-10-2009 à 17:28:00
Toujours aussi sublimes tes photos, un grand merci.
Commentaire de tounik posté le 06-10-2009 à 18:53:00
J'étais avec toi lorsque le soleil a percé les nuages et inondé le petit vallon.
Ô temps ! suspends ton vol ....
Commentaire de akunamatata posté le 06-10-2009 à 18:55:00
ah ben oui, c'etait pas jesus c'etait toi Didier ;-)
Commentaire de Yvan11 posté le 10-10-2009 à 20:33:00
Magnifique photo-reportage !!
Un oeil qui sublime les paysages au point de faire oublier les efforts et la souffrance vécus en ces lieux magnifiques.
Content d'avoir fait ta connaissance aussi.
Yvan
Commentaire de termite posté le 12-10-2009 à 07:32:00
" l'auteur du récit a la possibilité de modérer lui-même les commentaires "....
Donc j'ouvre la porte en silence et je referme aussi bien .
Merci pour le récit et les photos , toujours mieux que pas mal !!
Tapluka faire la course en entier en 2010
et moi aussi .
Commentaire de laurentclem posté le 08-01-2010 à 15:08:00
avec un très léger retard je te remercie pour ce récit et ces magnifiques photos.
On a dû se croiser à Villelongue puisque je suis reparti après la neutralisation.
On finira bien par se rencontrer puisque je suis sur Marseille. Peut-être au TSB !
Clem
Commentaire de raspoutine 05 posté le 29-06-2012 à 00:29:20
Une bonne chose que la réalisation de ce livre sur les récits ! On découvre du coup des trésors enfouis... que dis-je ... C'est plutôt que je n'ai pas su regarder au bon moment! Quoi qu'il en soit, un récit qui invite au voyage par la beauté de ses photos dont tu as le secret ! Hum, c'est réussi, et un regret, j'aurais bien aimé partager tout ça avec toi!
un plaisir jusqu'au bout ! Merci pour ce moment d'évasion !
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