L'auteur : jematt10
La course : Le Grand Raid des Pyrénées - Le Tour des Cirques
Date : 26/8/2016
Lieu : Vielle Aure (Hautes-Pyrénées)
Affichage : 3992 vues
Distance : 120km
Matos : Cascadia
Olmo 12L
Garmin F3
Objectif : Terminer
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GRP 120 – Le tour des cirques.
Il est 13h ce dimanche 28 août et j’attends avec impatience le bus qui doit me ramener auprès de ma petite famille, de Vielle-Aure vers Paris. Je vais avoir un peu de temps devant moi pour me souvenir des détails qui ont fait de ce trail un succès ; je veux tout raconter pour mes proches qui m’ont supporté de loin ou de près et aussi pour le plaisir de revivre ces 120km dans les Pyrénées, ces 7000D+ et 7500D-, raconter les rencontres, expliquer les déconvenues et aussi la beauté de la nature du coin.
Vous êtes prévenus, ce compte-rendu sera long, aussi long que la course. Bon, pour ceux qui n’ont pas de patience voilà un résumé :
Excellente course réalisée dans un cadre exceptionnel et super technique avec une météo exceptionnelle. Une chaleur énorme qui éliminera certainement bc de concurrents (45% d’abandon à l’arrivée). 34H30 de course avec 2 coups de moins bien mais gérés par une progression que j’aie pu maintenir constante, je ne me suis jamais mis dans le rouge. Mon objectif de finir avant tout, en cherchant à arriver avant le coucher du soleil m’allait bien. Une superbe orga et des bénévoles tous aux petits soins des traileurs. J’ai été suivi de loin par ma famille et des amis et ça, en termes d’énergie, c’est énorme. Des complications aux pieds m’ont bien freiné mais j’ai terminé pile dans l’objectif, content et prêt à repartir !
La version ultra maintenant ;)
Le départ de la course prévue à 8h30 m’oblige à un levé matinal à 5H30. Petit déjeuner copieux mais sous contrôle (pas de café, pas de graine, pas de laitage afin d’éliminer tout risque d’irritation de l’estomac – principe que j’ai tenu sur deux semaines avant le départ en tentant de faire un petit régime dissocié) je monte dans le bus qui nous hissera à Piau Angaly (1900m) car ce trail n’est pasune boucle classique et le départ s’effectuant de Piau, nous devrons arriver à Vielle-Aure après un peu de tourisme dans les montagnes, situé bien plus bas à une altitude de 750m.
8H, nous recherchons déjà l’ombre ! Il fera extrêmement chaud (finalement le samedi aura été déclaré comme la journée la plus chaude 2016) et cela me stresse beaucoup parce que je me connais, je n’aime pas trop courir sous les chaleurs qui me fatiguent et aussi, je n’ai pas eu l’occasion de m’entrainer récemment sous ces températures, bref le stresse monte. Nous aurons été nombreux à respecter les consignes données lors du briefing, à savoir exploiter dès que possible les points d’eau naturels du parcours : prendre le temps de se mouiller la tête complètement, de tremper sa casquette dans l’eau et de mettre de la crème solaire. D’ailleurs lors du briefing de la veille vers 17h, le pompier responsable de la sécu nous a fichu la trouille, il a mis le paquet : « vous allez devoir gérer le risque de déshydratation qui peut entrainer des complications à l’estomac, au intestins, vous n’arriverez plus à vous alimenter car vous allez mettre votre corps dans une situation de conflit, vous gérerez le risque ceci et cela… » Bref il met le paquet pendant 15 minutes ; tout le monde écoute et change de visage, stress stress LOL…
8h30 Piau-Piau par le sommet de la station de ski km8, alt 2600m.
Le départ est donné et tout le monde s’élance à un rythme que je trouve trop rapide ; il faut d’abord descendre sur 800m pour mieux remonter et attaquer le sommet de la station à 2600m. Le chemin est large et caillouteux mais roulant. J’ai les mollets qui commencent à bruler alors je contrôle la force et finalement au sommet, nous trottons tous, je suis bien. Je savais que la première BH était serré, mais là c’est juste juste, il est 10H10, je n’ai donc que 20 minutes d’avance en arrivant à re-Piau, ! cela augmente un peu le stresse pour la suite. Bizarre d’ailleurs de devoir repasser par là après 2h de course, une sorte de sur-place après beaucoup de travail, ça me fait penser à la banque LoL !!!
Montée sur port de Campbiel; km10, alt 2650m :
Mon camelback rempli à 1,5l et mes deux bidons de 750ml chargés à bloc avec les bonnes pastilles GU pour hydrater correctement, je m’élance donc sans tarder vers port Campbiel. Très vite, la nature qui sera la nôtre sur les 120km se révèle : les pierriers. Comment définir ces bêtes… un amas chaotique de blocs de pierres, recouvert d’éboulis de pierres, dans lequel il est souvent difficile de repérer un chemin. Bref, la route se fait minéral, nous devons monter à 2650m sur un chemin en lacet pentu de 30% environ je pense. A 2150m, je vois un traileur sur le bord avec un réel problème respiratoire. Nous sommes en plein soleil. Je m’arrête. Il m’explique tant bien que mal les difficultés respiratoire dû à des crampes je sais plus où mais près des poumons. Je m’inquiète un peu pour lui, nous parlons et je lui demande si je peux néanmoins repartir. Il me dit que ça devrait rentrer dans l’ordre après s’être reposé. Je lui lance par sympathie « allez, tu me rattraperas, t’inquiète.. » et je continue mon ascension dans un paysage minéral hallucinant. Je voudrais prendre une photo mais ne le fais finalement pas car pas la force d’ouvrir la poche et retirer l’appareil. Tout de suite dans cette montée je retrouve les mêmes gestes que lors de mes entrainements d’hivers en ski de randonnée, 1000D+ tous les matins (enfin que 4 sur la semaine heinˆˆ) : monter le pied droit, planter le bâton de droite, monter le pied gauche, planter le bâton de gauche… et ainsi de suite mais doucement, le tout en buvant, petites gorgées après petites gorgées, certainement toutes les unes ou deux minutes.
Descente sur Gèdre: Km25, alt 1050m.
La descente passe par un éboulis schisteux, les jambes répondent encore bien donc en assurant le rythme tout va bien. Alors que nous rejoignons le GR10 plus roulant, voilà que je rencontre Christian, un traileur de 62 ans, qui vient de Belgique. Je l’avais repéré car il mesure 1m60 environ, est super light et il n’arrête pas de relancer en courant genre « même pas peur !! » ; sauf que là il stoppe net et semble gêné. Etant derrière lui je m’arrête et lui demande ce qui se passe. Un insecte c’est glissé entre son T-shirt et son sac et l’a piqué. Comme il est allergique aux piqures de guêpes il s’inquiète. Je lui propose un cachet d’aerius, un antihistaminique que je porte toujours avec moi car je peux potentiellement être emm…. par des allergies genre pollen, bêbête etc... Il l’accepte me remercie et repart, à un rythme que je ne soutien pas !! il faut dire que Christian a déjà à son actif l’Embrunman, des ultras et touti, une grosse expérience. Comme moi, il n’aura pas été tiré au sort de la CCC cette année. Arrivée sur Gèdre je le retrouve et il me remercie encore et me dit bien réagir donc il roule, tout va bien. Je regarde l’heure (13H48), je suis rassuré car j’ai creusé l’écart avec la BH de presque une heure.
Gèdre- Hourquettes d’Alans Km41, alt 2430m puis refuge d’Espuguettes (Un peu plus bas).
Arrivé à Gèdre je suis tout excité de pouvoir badger pour montrer à ma famille et amis que j’avance ;). Je suis en pleine forme, heureux et bien dans mes guibolles ; par contre je garde au fond un petit stress pour la prochaine BH car les chemins sont quand même hyper techniques. De Gèdre pour Hourquettes il y a presque 1500D+ entre coupé d’une petite pose, descente à Hount Le Clouzet (Km 28). Passez ce point qui nous permet de refaire le plein de flotte, nous sortons du ravitaillement et devons longer une rivière, superbe rivière mais qui ne nous fait pas monter tant que cela.
Christian que je rejoins dit même « mais il va bien falloir grimper bientôt » un peu excédé. Effectivement nous avançons toujours sur un faux plat et finalement la montée se dévoile un peu plus loin : une sorte de mur genre 30% dans la caillasse bien sur et en plein cagnard. Le moindre petit point d’eau me permet de mouiller constamment la tête et ma casquette ; je mets aussi de la crème à intervalle régulier tant ça cogne. Finalement la casquette et saharienne mouillés agissent bien comme un écran contre le soleil, mais tout redevient sec après 15’ ; aussi avant de quitter cette belle rivière aux eaux cristallines, je fais ce que je considère être m’a première conn.. erreur : j’ôte chaussures et chaussettes et plonge dans une petite piscine naturelle, quel bonheur pour les quadris qui font pchhhh dans l’eau ; par contre en sortant, j’ai la peau des pieds fripée, je remonte chaussettes et chaussures avec un peu de Nok mais qui ne tenait pas facilement car j’étais encore un peu mouillés… je me dis sans trop y penser que cela peu favoriser les ampoules, nous y reviendrons…
Allez, maintenant il faut attaquer la grimpette, un peu de ski de rando pour changer : droite, gauche, droite, gauche, il y a juste la conversion en moins ;). Au refuge, point ravitaillement je mange du pain, du jambon cuit et des TUC, mon grand regret est qu’ils n’ont plus d’eau gazeuse, je pense alors à la bouteille de Saint-Yorre que j’ai déposée dans mon sac de ravitaillement et qui m’attend à Luz Saint Sauveur. Luz, la base vie au 75e km, je la considère comme une étape charnière qui me permet de découper dans ma tête la course en deux : une première partie qui correspond peu ou prou à une distance et un dénivelé que j’ai déjà fait d’une traite lors des Hospitaliers ou les Templiers, et après Luz jusqu’à l’arrivée où c’est l’inconnu. C’est Pierre qui m’a donné cette idée, je trouve que ça aide à gérer la longueur psychologiquement. Avant d’arriver au refuge, je rencontre un chic type qui arbore un drapeau breton sur son sac, c’est Nono. Tout de suite nous parlons de la Bretagne et des trails du coin ; car quand un traileur rencontre un autre traileur, il parle de quoi ????… Nono film la course pour son blog, il me fait se présenter à sa caméra. On rigole bien, on se retrouvera plus loin dans la descente qui nous permet de rallier Gavarnie.
Descente sur Gavarnie Km49 Alt 1600m.
Je fais finalement une descente vers Gavarnie quasi-solitaire (Nono attend un de ces potes, nous ne nous verrons plus), je trottine quand cela est possible. En passant dans le cirque, pouhaaaa, je découvre une chute d’eau magnifique ; un gars du coin m’engueule presque parce que je ne suis pas resté là à admirer le site 5’ « hé mais j’ai pris une photo moi !!».
Nous badgons à ????????? ; c’est un point de contrôle pour repérer les traileurs qui coupent éventuellement car Gavarnie peut être rejoint plus facilement par un autre petit chemin. Là je ne comprends plus rien : le point de contrôle prévu au refuge n’était pas là et ici je découvre un passage obligé qui n’était pas indiqué. Tout à coup, j’entends derrière moi « et bien je ne te croyais pas quand tu me disais que je te retrouverai… » C’est le traileur qui était bloqué dans la fameuse montée dans le pierrier, là c’est un autre homme, quelle reprise ! Il m’explique qu’il a bien avancé mais qu’il abandonne à Gavarnie car il ne peut plus prendre le risque de retrouver ces spasmes. Nous faisons le chemin ensemble jusque là en discutant, chic type. Bref, j’arrive à Gavarnie à 20H10, en avance de 1H30. Je change de chaussettes car je commence à avoir des ampoules (j’isole un petit doigt de pied avec un tube de silicone ; 2e grosse conn…bêtises), je remplie mes gourdes, mange un bout et repars avec l’idée de garder mon avance sur les BH. Je suis toujours en forme, nous n’avons « que » 49km dans les pattes. Il est temps de se préparer pour la nuit maintenant. J’hésite à changer le haut, demande conseil à Christian qui est finalement en phase avec mon allure : « avec cette chaleur ? (il se marre) Je reste en T-shirt voyons… » J’hésite et finalement je décide de ne pas me changer et repars de Gavarnie. Et là il faut que je vous parle de ma rencontre avec Marc. Marc, triathlète de La Rochelle, me demande si on peut faire la nuit ensemble. Honnêtement au début je voulais vraiment la faire seul, je me réjouissais pour ce morceau, genre ours solitaire, musique, micro sieste, me rappeler les supers entrainements avec Pierre à Fontainebleau aux 25 bosses de nuit, etc... donc au début je lui réserve un accueil assez… froid (allez Marc, tu as dû le sentir à ma voix un peu non ? lol). Et bien finalement la combinaison de nos efforts fut un vrai succès : je m’explique: plutôt léger, Marc avançait super bien dans les côtes, même les plus raides, moi je le freinais. Par contre sur les plats, même les plus techniques, je marchais super vite, alors avec sa facilité il me suivait et finalement on se trouve super efficace ; il faut maintenant viser Trimbareilles puis Luz.
Vers Trimbareilles Km65 alt 1000m puis Luz K75 alt700 en passant par les crêtes de Pouey (alt 1870m).
La sortie de Gavarnie est tranquille par contre pour rejoindre les crêtes il faut passer par une montée un peu technique, c’est le seul passage câblé de la course ; le précipice est à droite et la main courante à gauche accrochée à la falaise. On y arrive de nuit alors on voit plutôt le noir que le vide, même si on le devine. D’autant que nous n’avons pas de lune cette nuit là, le ciel est découvert et juste magnifiquement étoilé. Je me suis même vu expliquer à Marc comment retrouver l’étoile polaire à partir de la grande ourse, Cassiopée et… c’est tout car je n’y connais rien d’autre. Ah oui, un détail : au début de la nuit j’étais contrarié par le vent qui rafraichissait un peu; je décide alors de changer mon T-shirt par le super Odlo manche longue que ma femme m’a offert ; tout de suite ce fut un bonheur, reparti comme en l’an 40 !! Trimbareilles arrive. C’est le genre de ravitaillement que j’aime bien : une tente genre bivouac, de la soupe excellente et comme toujours des bénévoles super sympas, aux petits soins. Marc y retrouve un de ces potes qui hésite à repartir car il vient de faire une hypothermie. Pas mal de mecs abandonnent. Finalement nous le convainquons de repartir. J’ai insisté pour qu’ils partent ensemble en leur expliquant mes pieds mais rien n’y fait. Son pote c’est Ben, genre déménageur rapide ;) il avance super vite, Marc à la capacité de le suivre mais moi je suis déjà très freiné par les ampoules alors je gère comme je peux. Ils m’attendront tout le temps. Changement de la batterie de ma frontale dans un chemin montant. La je décide de recharger celle qui est vide, 3e erreurs car cela épuisera ma batterie et du coup je n’aurais plus de jus ni pour le téléphone, ni pour ma montre, ni pour… écouter les chansons que mes enfants et ma femme mon préparer pour me donner du courage ; je suis vert dégouté et contrarié. Pour rejoindre Luz il y a deux bosses à négocier, les descentes sont durdur, je commence à douter pour le reste de la course mais je classe l’information rapidement au placard. A partir de là, j’adapte ma démarche et recherche les appuis les moins douloureux, ça fonctionne plutôt bien... dans une montée de dingue, droit dans la pente, certains traileurs sont de côtés, épuisés de fatigue mais nous continuons à progresser puis finalement Luz arrive enfin, nous avons parcouru 76k et gravi environ 4300m.
Luz, base vie :
Enfin arrivé à Luz Saint Sauveur, grosse étape comme expliqué plus haut et là j’ai tout faux... J’aurais dû :1/récupérer mon sac de ravitaillement, 2/vider mon sac sur le doc, 3/charger du neuf dans le sac à dos, 4/faire le plein d’eau et 5/manger puis réfléchir à la suite : partir ou se reposer, voir un podologue ou pas. En fait j’ai tout mélangé… j’ai récupéré mon sac, commencé à manger, puis desserré mes chaussures, puis boire, puis finalement sortir les affaires de mon sac à dos, puis je suis parti chez le podologue, revient pour brancher ma montre paniqué car il lui reste 1% de charge mais ne trouve pas de prise donc demande au mec de l’orga de l’aide qui l’a branche sur le PC qui permet de pointer les coureurs, remange et je fais finalement la queue chez le podo. Les pieds rapidement soignés, le podo dit que ce n’est pas très beau et que le petit orteil est très touché ; je lui explique le coup de l’isolement avec un tube silicone, il me confirme qu’il ne faut pas faire ça… je repars de cette consultation en me demandant comment rechausser mes chaussures, j’ai un gros gros coup de mou. Le moral dans les chaussettes je pense à Tournaboup et la longue montée qui nous attend ensuite vers la Hourquette, soit 1800m de dénivelé. On en a parlé toute la journée de cette montée, elle à une sale réputation. Sur ce, le temps passe forcément et Marc s’impatiente. Son pote plus direct s’en va. Je dis à Marc qu’il aurait dû le suivre car je vais le freiner mais il préfère rester avec moi. Il m’aidera finalement en prenant mon sac ravitaillement et le rendra à ma place, il m’attendra alors que je fais le plein d’eau. Avec le recul, je pense qu’il m’a bien aidé à décoller !!
Montée sur Tournaboup (Km87, Alt 1600) puis la Hourquette Nere (Km100, Alt 2300m) en passant par la cabane d’Aygues Cluses.
C’est le début du jour et nous rencontrons un groupe de cinq traileurs dont 2 femmes, rythme tranquille qui me va bien. Ils se disent le groupe des « finishers » ce qui me va encore mieux. Il faut dire que Luz passé, nous n’avons plus de pression sur les BH qui sont bien plus cool maintenant parce que nous avons rejoint le parcours du GRP160km ET que l’orga ne souhaitait pas dissocier les passages des dossards rouge (le 160) des bleus (le 120). Les coureurs du 160 sont parties le vendredi comme nous mais à 5H du matin ; donc ceux que nous croiserons auront 40km de plus dans les pattes, sans parler du D+, et ils auront avalé ça en 3h30 environ si mes calculs sont bons ; bref ceux que l’on croisera seront fortich. Et ça ne manque pas, on voit un mec frais comme s’il avait 10km dans les pattes seulement, il court, on l’applaudie et on l’encourage. La vache, quelle facilité ! Marc se détache car il a la pêche et il a bien raison (je ne le reverrais plus, il aura fini 40’ avant moi). Finalement je me détache à mon tour du groupe des « finishers » et continue ma route seul. Je croise Aude et Myriam que j’ai déjà vue la veille et avec qui je blaguais (Myriam) en lui disant qu’elle allait hyper vite ; nous nous reverrons à plusieurs points de la route. Aude et moi tempêtons contre un traileur qui coupe les virages… Aude calcule tout le temps la route qui reste à faire, c’est rassurant de l’écouté dire « il ne reste plus grand-chose maintenant… ». Après 1 ou 2 heures de route seul je rencontre Sébastien, un chic type avec qui le courant passe super bien. Il est assis sur un tronc d’arbre, certainement avec un coup de moins bien, je lui demande si tout va bien, il me dit ça va et relance alors on fait un bout de chemin ensemble. En fait il m’expliquera plus tard qu’il n’arrive plus a s’alimenter, mais il m’impressionne néanmoins par sa facilité, il relance et relance, je m’inspire de ça force pour oublier mes douleurs aux pieds. En fait nous nous retrouverons plus loin et je lui dois beaucoup, car sans le savoir il m’a aidé à relancer, j’y reviendrais. La monté sera difficile, mais finalement je retrouve encore le tempo « ski de rando », je gère assez bien la chaleur, quitte Seb qui préfère marquer une pose. Après la cabane, il y a un mur de pierre qui m’inquiète. Les paysages sont magnifiques.
Je croise un traileur du 160 qui me dépasse à une vitesse vertigineuse, il est équipé de son coupe vent et me dit en rigolant : « j‘ai tapé un roupillon de 45’ en plein soleil et maintenant je suis couvert de coups de soleil, mais bon il faut bien avancer, que veux tu !! » ; encore une source d’inspiration… puis soudain, sans prévenir, je vois des serpents au sol qui se transforment en brindilles de bois, des petites bêtes en petits cailloux, j’ai aussi les yeux qui piquent avec un voile… il est temps de mettre en œuvre une micro sieste, d’autant plus que j’arrive sur le mur. Au creux de la descente, car pour bien monter il faut d’abord descendre c’est connu, je me pose de côté et enclenche le compte à rebours de ma montre sur 5’. Puis soudain elle sonne, y a pas de doute j’ai bien dormi, j’en reviens presque pas mais j’ai la même impression de pêche retrouvée que l’autre nuit dans les 25 bosses, en entrainement ! J’attaque la côte heureusement à l’ombre car des nuages sont apparus. Arrivé au sommet ou l’on découvre un superbe paysage juste avant la bascule, je rencontre un gars du coin qui me raconte les montagnes, un pure bonheur de l’écouter et il me dit « voilà, maintenant que tu es là, tu n’a plus que de la descente, mais avant cela, « ils » (les organisateurs de la course) t’obligent à passer sur cette saleté là », et son doigt désigne un versant de la montagne, en face de nous, recouvert d’éboulis de pierres encadré par des sapins aussi secs qu’un saucisson vieux de 15 ans ! Ce truc je ne l’avais pas anticipé car sur le profil papier, il ressemble à un demi accent circonflexe… ça pique bien là
J’arrive au sommet (2450m), la vue est superbe, en contre bas deux superbes lacs.
J’attaque la descente directement alors qu’un traileur que j’avais rattrapé s’assoit pour admirer le paysage. Je fais tout de même un panoramique avec mon téléphone et puis je redescends vers le restaurant Merlans. Là, je retrouve Seb avec qui je resterai un bon bout de temps. Le resto arrive, c’est le genre de ravitaillement que l’on aime car c’est le dernier ! Je pointe avec fierté pour signifier à ma famille et aux copains que j’avance et enfin Seb à une pêche d’enfer, il me dit « alors Jerome, prêt pour repartir ? », ça commence à sentir l’écurie ;)
Col de Portet (Km 105, Alt 2225m) – Vielle-Aure (Km 117, Alt 750m).
Et nous voilà parti. Seb est rapide, il avance d’un pas efficace que je n’arrive pas à suivre dans la montée. Il me dit être impressionné par ma relance, c’est bien car je le suis tout autant par son second souffle ! (rappel : il tient avec du coca-cola depuis longtemps car le solide ne passe pas). Nous allons alors découvrir au col de Portet la fameuse piste noire à descendre. Illusion d’optique ou réalité, elle nous parait pas trop terrible que cela, (sauf les premiers 200m) ; ça pique bien quand même, l’entrainement des squats en PPG paye bien ! puis la pente se fait moins raide, nous relançons alors en courant ; j’hésite et finalement j’arrive à adopter une allure pas trop mal… nous trottons à la manière de Christian le Belge (il finira en 33h finalement), le moral est au top jusqu’à ce qu’une décharge électrique m’arrive dans l’orteil droit… je regarde, l’ampoule à éclaté et saigne … je vais devoir finir en boitant. Seb me dit « allez, tu gères comme tu peux » et nous nous quittons. La descente est interminable, je calcule qu’en boitant mais du genre efficace, je pourrais certainement tenir l’objectif de terminer avant le couché de soleil, cela me réconforte mais je suis deg car j’ai juste la pêche pour courir et je ne peux pas. Je croise un coureur du coin sans dossard qui me dit « bravo, encore 4km » alors j’avance comme je peux. Arrive la route, une personne me dit « allez, plus que 400m » mais me désigne une route longue d’au moins 1km avec le village au bout ! Je relance en courant comme un crabe ou un jenesaispasquoi et arrive au village.
Les personnes m’encouragent, je pleure… j’arrive… je suis médaillé, je me précipite dans un coin isolé pour appeler ma femme, ma mère et ma sœur. C’est alors que je comprends qu’une chaine de l’information c’était mis en place entre eux, pour le suivi de mon avancée. Ce sera mon premier ultra-trail et je suis fier de l’avoir terminé !
Il y a un truc que je ne comprends par contre pas, c’est comment souffrance et plaisir peuvent être si proches. Il faut que je reparte méditer cette question sur les chemins, la réponse sera certainement au bout
5 septembre 2016.
Jerome, dossard 1301.
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10 commentaires
Commentaire de philippe.u posté le 06-09-2016 à 07:05:05
Bravo, joli récit ! J'espère être sur cette course l'an prochain
Commentaire de jematt10 posté le 06-09-2016 à 08:55:21
Merci Philippe; excellent choix, il FAUT le faire ce trail, il est super beau ;)
Commentaire de tiblam posté le 06-09-2016 à 11:11:16
Bravo pour cette course gérée d'une main de maître !!!
J'ai appris un truc : prendre un antihistaminique , pu... tu aurais pu me donner ce conseil là ...
C'est quoi le lien du blog de Nono qu'on te voit en live ?
Sinon, pour les coureurs du GRP160, tes calculs font qu'ils ont fait 40kms avec du D+ en 3h30, alors soit tes calculs sont faux, soit ceux que tu as croisés sont les 1ers du peloton, mais les barrières sont encore loin derrière eux du coup ...
Et encore un truc que je ne comprends pas (désolé, je fais toujours le mec chiant toujours sur le meme sujet des batteries lol) : Tu as dit que tu n'avais plus de chargeur de batterie, donc impossible de recharger le téléphone, montre etc , deg de ne plus appeler ta famille, mais à l'arrivée tu arrives à les appeler dans un coin ... Mystère ...
Bon, la prochaine fois, il faudra arriver avant le coucher du soleil; mais sans faire de nuit blanche ... Tu peux le faire, j'ai tout le temps dit que tu étais fait pour l'ultra trail, et tu le prouves là. Une seule micro sieste hyper bien rentabilisée !
Chapeau bas!
Commentaire de jematt10 posté le 09-09-2016 à 11:50:51
Oulalalala coach, je vois que ma réponse n'est pas passé !! Merci pour ton commentaire qui compte, tu le sais bien. Bon sur les batteries je t'expliquerais; par contre à moi de ne pqs comprendre: que veux tu dire sur la nuit blanche ?? Biz!!!
Commentaire de tiblam posté le 09-09-2016 à 14:31:37
Ben, une nuit blanche, c'est une nuit à courir.
Là, tu dis que tu arrives avant le coucher du soleil, mais il a eu le temps de se coucher une fois quand même hein ? Tu es arrivé avant son 2e coucher , la prochaine fois, il faudra arriver avant son 1er coucher ...
Commentaire de jematt10 posté le 09-09-2016 à 17:37:53
Ah oui mais là c impossible; ou alors il faut reduire ke parcours LoL
Commentaire de Bruno Kestemont posté le 07-09-2016 à 11:54:43
Waaou ! Ca a l'air magnifique. Merci pour ce récit qui me donne bien envie de faire cette course à l'occasion ! Et bravo !!
Commentaire de jematt10 posté le 07-09-2016 à 19:07:11
Fonce Bruno, inscrit toi, c'est juste magic (j'ai presque envie de la refaire maintenant) Par contre attention j'ai vue que tu souhaites faire l'utmb et cette course ne participe pas au business-system de l'itra, donc ici point de point ;-)
Commentaire de Miche posté le 09-09-2016 à 09:09:14
Merci pour ton long récit et tes photos qui me permet de me sentir dans la course a posteriori alors que pendant la course, je suis scotché derrière le téléphone du PC course en espérant ne pas recevoir d'appels de coureurs en détresse. Et puis ca remotive aussi pour repartir dans l'organisation de la dixième édition. Je suis bien content aussi de voir que le tracé du 120 plait et que l'effort consenti pour convaincre le parc d'y passer se traduit par des coureurs heureux.
Commentaire de jematt10 posté le 09-09-2016 à 11:46:43
Oulala j'imagine les tracas admin avec les communes et tout; surtout ne baissez jamais les bras toi et l'orga, le parcours est top. J'insiste sur un autre point: l'orga, la signaletique, l'avant et l'apres course sont super bien organisés, les benevols sont topissimes; un seul mot : BRAVO :-)
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