L'auteur : clems
La course : Le Grand Raid de la Réunion : La Diagonale des Fous
Date : 23/10/2009
Lieu : ST PHILIPPE (Réunion)
Affichage : 2319 vues
Distance : 150.1km
Objectif : Terminer
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Rien ne sert de courir...
Ma diagonale 2009
La mise en bouche commence ce jeudi 22 octobre 2009 à 19 heures, lorsque je monte dans la navette qui nous emmène à la ligne de départ de Cap Méchant. Je suis avec quelques amis, Franck, Jean-Pierre, Nadine, Jean-Luc, rencontrés à l’hôtel où nous résidons et qui font également la course. L’ambiance est conviviale mais on sent que l’atmosphère se tend au fur et à mesure que nous nous rapprochons du départ, le temps se dégrade également, de fortes pluies sont annoncées pour une partie de la nuit, je lis les SMS d’encouragements que j’ai reçu afin de me donner un peu plus de courage.
Nous arrivons aux alentours de 22h30’ je me dirige au contrôle des sacs à dos, tout est ok, je laisse mes sacs d’assistance que je récupèrerais à différents points du parcours et me dirige sous une tente car la pluie commence à tomber très fort.
23h50’ je me décide à rejoindre la ligne de départ pendant une petite accalmie, bien sûr je suis pratiquement en queue de peloton mais qu’importe, mon unique but est de terminer, le seul hic est qu’en partant de l’arrière je vais me retrouver pris dans les « bouchons » du sentier qui mène au volcan.
-00h00’ Robert Chicaud le directeur du grand raid donne le départ, il me faut 5 bonnes minutes pour passer la ligne, la pluie est repartie de plus belle, la route du littoral s’est transformée en rivière, l’eau n’est pas froide, heureusement, mais qu’en sera-t-il si ça continue lorsque nous serons à 2400 mètres d’altitude ?
Les 16 premiers kilomètres et 700 m de dénivelé se passent bien, je double énormément de monde mais ne m’emballe pas et reste très « en dedans ».
-2h13’ Premier ravito, je remplis mes bidons car un concurrent me signale qu’on en à pour plus de trois heures pour arriver au prochain point d’eau. La prochaine étape s’annonce plus difficile avec une distance du 5kms et 1400m de D+.
En fin de compte la montée se passe très bien, pas de risque de surchauffe car je suis pris dans le flot de coureurs et ma progression est plus que cool… Les nuages commencent à se disperser et les étoiles se confondent presque avec les frontales des coureurs qui se trouvent déjà au sommet, je pense à Marc qui, à des milliers de kilomètres de là s’élance sur l’Endurance Trail à Nant. Nous quittons la forêt et arrivons au Piton Hubert, le soleil commence à se lever, le spectacle est magnifique. Le sentier s’élargit et la pente devient moins raide, j’en profite pour courir et me réchauffer un peu.
-6h51’ arrivée au poste du volcan 31km, et une chute pratiquement sur la ligne, physiquement pas de mal à part quelques écorchures, on me donne mon classement, 1108ème. Ravitaillement rapide et c’est reparti, prochaine étape, Mare à Boue.
Je traverse la plaine des sables et ses paysages lunaires (magique !), Oratoire Sainte Thérèse, Piton Textor, 10km de descente roulante, je double Jean-Luc et l’encourage. A partir du Chalet des Pâtres, j’ai l’impression de me retrouver en Haute Loire, vaches et prairies à perte de vue.
Je coure tout le long mais les 3 derniers kilomètres sur route bétonnée sont durs pour la plante des pieds.
-9h27’ Mare à Boue 50km, 759ème au classement, gros ravito, j’en profite pour m’alimenter comme il faut, poulet, pates, coca, je ne sais pas si tout ça est très digeste, mais c’est très bon et ça fait énormément de bien.
Après 15’ d’arrêt direction le gite du Piton des neiges via Kerveguen et ses redoutables échelles, 1000 mètres de D+ à ajouter au compteur.
-12h51’ Gite du Piton des neiges, 62km 609ème Point culminant de la course à 2480m. Je discute avec les bénévoles du refuge qui m’indiquent que la descente est très technique, ce qui n’est pas pour me déplaire, les jambes sont là je n’ai pas de douleurs ni trop de fatigue, je décide de « dérouler » tout au long de la descente. Je repars donc et me fais plaisir, les entrainements sur les sommets du Lizieux avec les copains d’Atousports m’ont bien servi… Quelques avertissements physiques cependant, la cheville gauche me « lâche » à 3 reprises dans cette descente, il me faut faire attention car le vide est juste à côté. J’arrive au Bloc en 514ème position après 46’ de descente, la jonction au stade de Cilaos est faite par la route.
-14h05’ Cilaos, 69km, 499ème Je retrouve Agnès récupère mon sac, prends une douche, Je retrouve Franck qui vient d’arriver, je l’ai doublé dans la descente mais on ne s’est pas vu, un repas complet et c’est reparti pour la deuxième partie du parcours, pas la plus facile car la pluie recommence à tomber mais les jambes sont toujours là.
De nouveau une descente puis la remontée sur le terrible col du Taïbit. Je monte bien mais me fais doubler par deux «flèches » Réunionnaises, je les accroche 5 minutes mais le rythme est trop élevé pour moi et reprends mon rythme de croisière, c’est plus sûr, je croise des randonneurs qui m’encouragent et me disent que de l’autre côté du col il fait meilleur, ça tombe bien car le froid commence à se faire sentir. J’arrive enfin au Col, la nuit commence à tomber, le spectacle est vraiment grandiose, vue panoramique sur tout le Cirque de Mafate avec le ciel bleu, alors que derrière moi c’est le brouillard et la pluie…
-18h46’ Marla, 82km 395ème, la nuit est là, je retrouve mes deux flèches Réunionnaises, je fais le plein et ne m’attarde pas. A partir d’ici de petits groupes se forment, si jusqu’à présent on se sentait seul malgré le monde, maintenant la solidarité prend le dessus, nous prenons soin de nous mutuellement par des petits mots réconfortants, des encouragements lors de baisse de régime, à présent, les postes de ravitaillements sont proches les uns des autre, mais la fatigue aidant, la pénombre et le relief tourmenté du terrain, les temps entre les étapes sont tout aussi longs, d’autant plus que les pierres et la terre de Mafate ont pratiquement la même couleur, dans ces conditions, il est difficile d’appréhender les reliefs.
-20h29’ Trois Roches 89ème 354ème, les bénévoles nous accueillent toujours avec le sourire, les compagnons de routes changent avec les ravitaillements, certains restent pour dormir, d’autre, reposés, repartent, mais toujours la même solidarité. Je poursuis ma route en courant lors des parties plates (il y en a de moins en moins) les descentes sont si techniques qu’elles se font guère plus rapidement que les montées, le ciel est dégagé et rempli d’étoiles.
-22h04’ Roche Plate 95ème km 340ème, le moral est toujours présent mais la fatigue commence à se faire sentir, d’autant plus que bon nombre de Grand raideurs, allongés et dormant sur des cartons, nous incitent à faire de même mais je décide de continuer et refais le plein de mes bidons, m’alimente bien, soupe, coca, eau et je repars direction Grand Place, d’autant qu’un bénévole indique qu’il n’y a qu’une descente dangereuse et une petite montée mais qu’il faut compter environ trois heures pour y arriver (merci pour la petite montée, 500mD+ sur 1km900). La cote de la Roche Ancrée est un calvaire pour les cuisses, la montée se fait pratiquement à quatre pattes. Les coups de téléphones de Guillaume F. et Christophe D. dans ces parties difficiles m’ont vraiment aidé moralement. La descente sur Grand Place est un soulagement pour moi.
-24h49’ Grand Place 103km 291ème un sentier correct avec des marches d’escaliers « civilisées » avant d’arriver à Aurère.
-27h25’ Aurère 112km 247ème il ne me reste plus que 9km pour arriver à Deux Bras dernier gros ravito avant l’arrivée, que de la descente, jusque là tout va bien, j’ai même des frontales en point de mire, j’accélère un peu le rythme et double plusieurs concurrents qui ont du mal à marcher.
-29h01’ Deux-Bras 121km 227ème Le jour commence à se lever, je récupère mon sac (les militaires l’ont perdus, ça te rappelle quelque chose, Christian ? Je le retrouve dans une autre pile de sacs…), je change de chaussettes, bois beaucoup, eau + coca, une soupe et me voilà reparti pour 800 mètres de D+, je me sens en forme mais à l’entame de la côte, plus de jambes du tout, je transpire et semble être scotché au sentier, c’est le début du calvaire, je sais à quoi m’attendre car en 2005 nous sommes déjà passé par la avec Christian F., je m’aide des mains en m’appuyant sur les cuisses mais rien à faire, plus de carburant dans le moteur, d’autres coureurs sont couchés dans le fossé emmitouflés dans leur couvertures de survie, encore 26km à tenir, le moral en a pris un coup, je me fais doubler par 5 concurrents, et pas moyen de prendre leur foulée, je croise des bénévoles qui descendent sur Deux-Bras, parmi eux Marcelle Puy, vainqueur l’an passé chez les féminines, elle me glisse quelques mots d’encouragement qui, s’ils font du bien au moral ne me font pas avancer plus vite… Arrivée sur la route de Dos d’Ane il me reste 2.5km de goudron avant d’arriver au stade où Agnès m’attend.
-31h38’ Dos d’Ane 128km 215ème. Piton Bâtard, dernière montée digne de ce nom et toujours les jambes « cramées », Je suis sur l’arête d’une montagne large d’un mètre, à gauche Dos d’Ane 400m en contrebas, à droite, le cirque de Mafate que l’on domine de 800m, la fatigue gomme un peu le vertige mais quand même ! Puis c’est la descente sur le Colorado…
L’approche de l’arrivée me regonfle et je me remets à courir, doucement, j’arrive encore à doubler quelques coureurs.
-35h21’ Colorado 142kms 207ème, la descente n’est plus qu’une formalité, très technique par endroit mais à côté de ce que nous avions parcouru, ce n’était pas la mer à boire.
Un coup de fil à Agnès pour lui dire que j’arrive et enfin la délivrance lorsque j’aperçois le stade de La Redoute.
36h16’18’’ Arrivée. 148km 204ème
Je reçois ma médaille, mon tee shirt « j’ai survécu » et je pars m’allonger sur le stade, il m’a fallu pratiquement une heure pour pouvoir me remettre debout sans avoir la tête qui tourne.
Bon bilan en fin de compte, la montée très lente du volcan m'a certainement été bénéfique et m'a permis de remonter beaucoup de places, je ne suis pas sûr qu'en partant plus vite les 16 premiers kilomètres aurait été un gain de temps pour moi au final. Je suis passé par beaucoup de sentiments, des bons, des moins bons mais à aucun moment je n’ai douté, et physiquement pas une crampe, pas d’ampoules, un coup de moins bien pendant environ 3 heures mais la forme est revenue par la suite, mes entrainements ont payés ! Les rhums arrangés, les carrys et autres rougails réunionnais m’ont-ils également aidé ???
Rendez vous est pris pour 2012 et la 20ème édition.
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6 commentaires
Commentaire de maï74 posté le 04-11-2009 à 21:30:00
Impressionnante remontée, super régulière, au classement et surtout tu as l'air d'avoir relativement peu souffert, quelle chance !... Un grand bravo, bonne récup !
Commentaire de tamalou posté le 05-11-2009 à 05:38:00
quelle belle course....bravo a toi d'être arrivé et d'avoir gérer comme un chef les coup de moins bien. je suis estomaqué par l'impression de facilité qui ce dégage de ton récit. Bonne continuation a toi.
Bye
Commentaire de toto38 posté le 05-11-2009 à 06:59:00
Excellent ton CR! En plus on aurait pu terminer ensemble , j'ai mis 36h01! En tous cas, c'est clair que les rougi et carry nous ont fait du bien!
Commentaire de Sprolls posté le 05-11-2009 à 11:49:00
Une affaire rondement menée ! Félicitations et merci pour ce chouette CR
Commentaire de jepipote posté le 05-11-2009 à 17:03:00
course géré de main de maitre!!! félicitations.
Commentaire de samontetro posté le 08-11-2009 à 14:37:00
Belle course régulière, sans accrocs! Le "coup de mou" je l'ai eu un peu avant toi dans la monté de la roche ancrée faite de nuit. Quand je vois la photo du passage sur ton récit... je comprends pourquoi!
Bravo!
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