L'auteur : float4x4
La course : Le Grand Raid des Pyrénées - L'Ultra Tour
Date : 24/8/2017
Lieu : Vielle Aure (Hautes-Pyrénées)
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Distance : 220km
Matos : - La Sportiva Ultra Raptor
- Sac veste Camp light
- Bâtons Guidetti Plume
- Poche à eau + une flasque + une bouteille de powerade vide
- Plein de bouffe, des snikers, des bounty, des mars...
Objectif : Terminer
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Voilà le récit d'un GRP220 à la sauce Dukan ou d'un GRP160 « enlarged », c'est selon. C'est copieux, à peu prêt aussi digeste qu'une pizza-choucroute, mi texte, mi photo, mi loisirs créatifs.
Avant la course.
Deux cent vingt bornes dans les Pyrénées !
Au départ, j'avais prévu de partir sur l'UTMB, ayant enfin obtenu le précieux sésame après deux ans de tirage au sort négatif. Mais lorsque les premières rumeurs concernant le GRP220 ce sont concrétisées, il n’a pas fallu longtemps pour que je me ravise. Je n'ai rien contre le grand barnum chamoniard mais simplement je n'avais pas envie d'être tout seul à aller faire le guignol dans les Alpes, comme l'an passé sur l'UT4M. Tous les traileurs Bordelais préparaient leur migration sur Vieille-Aure, donc j'ai fait une petite boulette avec mon ticket UTMB et j'ai rempilé sur le GRP. L’année 2016 tirait à sa fin et j’étais en plein pic de forme. La dimension homérique d’une telle virée ne m’effrayait nullement, dans ma tête c'était juste un 100 miles augmenté de 60 km.
Les ennuis ont débuté en Mars lorsque j’ai récolté une bonne tendinite à la cheville gauche en pleine prépa marathon. À peine remis, j’ai enchaîné sur l’Euskal 130 en duo pour ne pas planter mon binôme. C’est passé, mais quelques semaines plus tard, nouveaux tiraillements à la cheville droite ce coup-ci. L’entraînement estivale pris donc une tournure sinusoïdale, alternant semaines de repos et semaines ou je pouvais trotter à peu près correctement. Avec deux amis traileurs, Laurent et Fred, nous avions prévu une reconnaissance sur quatre jours en Juillet. Mes comparses la firent en entier tandis que je préférai stopper au troisième jour, dépité mais préférant préserver mes tendons pour la suite. J’aurais au moins tâté les nouvelles portions Cauterets-Gavarnie-Luz et Luz-Lac d’Oule qui sont les morceaux les plus exceptionnels du tracé.
Le splendide col d'Araillé, tout en cailloux
À trois semaine de la course, lors d’un petit footing sur les quais de Bordeaux sans méchanceté, voilà que ma cheville gauche pince à nouveau. Tendinite ? Calcanéum bloqué ? Douleur psychosomatique ? Aucune idée… L’appel de la montagne est toujours là, mais j’ai le moral dans les chaussettes. Repos jusqu’au jour J.
Histoire de continuer à me foutre des handicaps, je participe à un mariage en Angleterre la semaine précédant la course. Je parviens assez facilement à fuir la picole, par contre niveau repos c’est la misère et il m’est impossible de manger sainement. Tout suinte l’huile et la friture là-bas. Pour l’affûtage, on repassera…
Faute de mieux, la seule chose positive dont je me réjouis quand j’arrive à Vieille-Aure le lundi d'avant course, c’est le fait d’être en vacances avec ma copine et d’avoir l’assurance de buller pépère si jamais la course tourne court. J'ai le droit à deux jours placés sous le signe de la glande. On ne fout pas grand chose. Je prépare de manière distraite mes affaires et avachi devant la TV, je salive devant « Les rois du gâteau ». Après la course, j'irai trop faire péter mon indice de glycémie...
Le mardi nous effectuons une petite rando en descendant du Plat d’Adet jusqu’à Vignec. Je constate que rien qu’en marchant, ça coince encore dans le pied gauche. Au surplus, une de mes flasques quasi neuve me pisse dessus. Non décidément, je ne la sens pas cette course.
Réveil – 4h50
J'ai l'impression de ne pas avoir fermé l’œil de la nuit. C'est bizarre parce que j'ai rarement été aussi calme avant un ultra. Avec la quasi certitude de foncer droit au casse-pipe et d'aller me recoucher passé Merlan ou la Mongie, je suis à la limite du je-m’en-foutisme. Cela dit, je ne peux pas non plus échouer sans coup férir, alors je me prépare quand même à aller au charbon, histoire de dire que j'ai essayé.
Après avoir pris un copieux petit déjeuné arrosé d'un bon café, j'entreprends de renforcer mes chevilles. Je bricole un truc que j'ai déjà essayé durant le bloc reco de juillet. Je me fais un strapping avec de la bande K-Tape. C'est souple et ça maintiendra l'articulation juste un peu sans pour autant la bloquer. Par dessus la gauche, j'enfile en plus une chevillère légère de chez décathlon. D’expérience, je sais que cette escamotage n’empêche pas la cheville de vriller en cas d'appui foireux, mais ça limite les tiraillements.
J'en profite aussi pour me mettre deux bandes de tape sur les épaules. Je termine toujours mes ultras avec le haut du dos couverts de petits boutons et de brûlures à cause du frottement du sac et de la transpiration. C'est désagréable et ça fait très collégien qui découvre les joies de l'acné.
Je passe mon Garmin 310 XT au poignet et l'allume afin de désactiver le mode GPS. Je n'ai pas envie de passer mon temps à le recharger durant la course et le chrono suffira pour... Ah ? Tiens ? Un bouton de sélection vient de céder sous mes doigts. Après cinq années de bons et loyaux services, je viens de péter ma montre. C'est de bon augure à votre avis ?
Départ – Vielle Aure, 6h : 267ème
Cette fois ci, ma compagne et moi avons convenue qu'il serait plus simple que j'aille seul sur la ligne de départ et qu'elle m'attende à la sortie de Vignec, à deux pas de notre logement. Ça lui épargnera le trajet nocturne, et moi je pourrais plus facilement lui faire coucou en attaquant la première bosse.
En parlant du trajet, je comptais faire ce kilomètre et demi à pied. Mais je me suis fais ramasser par deux homologues véhiculés et forts courtois à peine sorti de la résidence. Qu'ils en soient remerciés.
Je badge vers 5h45. Je tombes sur Xavier et Raphaël, deux coureurs Bordelais d'A2 Running venus nous encourager. M'enfonçant un peu plus dans la foule, je retrouve tous les autres. Tous les autres, c'est le cheptel venu en masse de Bordeaux, et je suis loin de connaître tout le monde.
Au nombre de ceux que je ne risque pas de voir très longtemps, il y a Laurent, mon binôme et ami de l'Euskal. Fred, notre génial organisateur de reco. David Dubos qui possède un sacré tableau de chasse sur ultra et Fred Domino, un très bon pistard ayant réalisé une excellente perf' l'an passé sur le GRP120. Romain est aussi dans les starting-blocks, je m'attarderais plus tard sur son cas. Ils y a aussi ceux avec qui j'espère pourvoir jouer au chat et à la souris. Le binôme David Lussac et Franck, ainsi que Céline, grande baroudeuse qui s'est farci la totalité du parcours en entraînement mais qui se trouve dans des disposions de flemme identiques aux miennes...
En tous cas, ça rigole, ça cogite et ça fait des plans sur la comète. Je sens tellement la molle foirade arriver que j'ai évité de faire des calculs, me disant que si ça passait, ça devrait être en un minimum d'une soixantaine d'heure.
Quand la musique annonçant le départ retentis, je retrouve un peu la patate. Nous nous élançons doucement vers le pied des montagnes. Je laisse les autres Bordelais bombarder à leur rythme. À ce moment, je ne sais toujours pas si je peux trotter à 10km/h sans avoir mal à la cheville.
Deux bornes plus loin, dans le virage devant l'église, je trouve ma chérie. Nous échangeons un rapide bisou et c'est avec un large sourire que je me mets à bâtonner les premières sinuosités menant au col du Portet.
Pas grand chose à noter lors de cette première ascension. Un petit rythme avec respiration nasale est de mise. Autour de moi, je trouve que ça va très vite. Des gens me doublent en trottinant alors que ça n'en fini pas de monter. Soit ce sont les favoris qui ont eu une panne de réveil, soit il va y avoir de casse...
C'est pas mal à la queue leu-leu au départ...
Une fois traversé le plat d'Adet, le soleil illumine les montagnes et ça claque pas mal. Les prairies tordues prennent des teintes orangées sur un ciel encore pourpre et les vaches trottent à nos cotés. C'est cool.
Restaurant Merlant – Jeudi 8h34 : 176ème
C'est l'heure de prendre un second petit dej'. Coté santé : zéro douleur. Bonne nouvelle, ça signifie qu'en montée les chevilles répondent bien et que je vais pouvoir passer au niveau suivant, qui se compose principalement d'une bonne descente sur un lit de caillasses.
Je retrouve David Lussac et Franck que je continuerai à croiser pendant encore un certain temps. Il est toujours agréable de voir des mines familières surtout quand celles-ci ont la bonne humeur communicative. Je m'envoie une soupe, du coca, du cake, et deux trois bouts de bananes. Cinq minutes plus tard, je repars en direction du col de Bastan.
Le sentier démarre facile. Ondulant au dessus les pinèdes du lac d'Oule, on peut s'offrir le luxe d'y cavaler. Une fois le refuge passé, les relances se font plus caillouteuses et on grimpe par petits à-coups. À mesure que la trace s'enfonce dans le Néouvielle, le terrain devient grossier et de plus en plus minéral. De petits plans d'eau reflètent un ciel bleu qui viendra certainement nous cramer la couenne plus tard.
Après Le col de Bastan, on bascule dans une descente qui nous conduit à trois kilomètres de la Mongie. En temps normal je suis assez mauvais descendeur, surtout quand le terrain est jonché de pierres. Avec mes chevilles interrogatives, c'est encore pire. Il faut ajouter à cela que les coureurs me devançant on enduit les rochers d'une terre légèrement humide qui provoque quelques moves de hip-hop involontaires. Je serais d'ailleurs témoin de plusieurs gaufres heureusement sans gravité.
J'ai aussi la désagréable l'impression d'avoir pris le départ d'un marathon tant je perds des places par paquet de dix. Sérieux, je suis en petite foulée économique, et je me fais déborder par des gars qui dévalent en bondissant. Aucun problème à me faire doubler hein. Mais ici ça dépasse n'importe comment, limite avec agressivité, alors que je fais de mon mieux pour laisser passer quand la situation le permet.
Vers Campana, j'en entends même deux pester à mon encontre :
« P'tain, le gars devant, il avance pas ! ».
Courtois, je m'écarte sans moufeter... #NoRageDesEmbouteillages hein ! J'aurai la joie mauvaise de les retrouver le bide en vrac, subclaquant quelques heures plus tard. Sérieux, on est parti pour 220km. C'est quoi le problème de perdre deux minutes dans une descente ? Alors je vous entends déjà : « gnagna t'es parti trop vite, tu te fais remonter et tu fais chier tout le monde ». Que nenni ! Tel Pacman, je boulotterai la majorité de ces cuistres avant Hautacam et beaucoup bien avant Sencours. Comme dirait l'autre, faut attendre la fin du foiridon pour compter les bouses, et à ce rythme, à la fin, il n'y en aura pas beaucoup à ramasser...
Malgré cela, j'arrive à la cabane de Barrassé sans m'être fait mal, et la beauté des paysages tempère ma grogne – Tout va bien.
Un bon coup de cul nous amène vers la Mongie durant lequel je regagne pas mal de place. Très très grosses ambiance en arrivant à la station. Les pâturages sont couverts de spectateurs et les encouragements pleuvent, voilà qui donne du cœur à l'ouvrage.
La Mongie – Jeudi 11h47 : 136ème
En arrivant je croise Romain qui est sur le départ. Les autres sont déjà repartis tandis que le team David & Franck suit quelques hectomètres derrière. Je m'applique à faire le plein car la température grimpe à vu d’œil et il serait dommage de couler une bielle sur les 1500m de D+ qui nous attendent jusqu'au Pic. Je m'offre un passage aux cagoinces, très satisfait de constater que le transite fonctionne bien. Je décolle une quinzaine de minutes plus tard en compagnie de David.
On embarque Fred Domino dans la bosse d'amorce avant le chemin du Sencours. Assez marqué, il faisait une pause assis sur un rocher. Rien de notoire à signaler concernant cette chaude et longue ascension. J'enclenche le mode marche régulière et pépère ce qui rend l'effort peu difficile, il suffit juste d'être patient. Je me détache progressivement de David et Fred tout en contemplant le panorama bien mastoc qui défile doucement au gré des virages.
Sencours, Aller.
L'arrivé au col est signalé par la présence de nombreuses familles et accompagnateurs venus nous applaudir. Coté météo, depuis quelques centaines de mètres déjà il fait plus frais. Un vent modéré a pris le pas sur la chaleur moite qui nous engluait jusque là. Je m'avale une petite soupe confortablement abrité dans la cabane du Sencours et je repars au bout de dix minutes en direction du Pic.
La piste est roulante ce qui permet d'apprécier le paysage, de zieuter vers le lac d’Oncet ou de regarder les télécabines passer. La densité de coureur en redescente augmente au fur et à mesure de mon ascension. Je croise Fred, Laurent et David au niveau du refuge – C’est à cet endroit que j’avais déjà croisé Fred lors de notre GRP160, il y a deux ans. Je suis conforté dans l’idée d’être parti au juste rythme et apparemment ce n'est pas le cas de tout le monde. D’après leurs dires, ça commence déjà à surchauffer en amont.
La portion sommitale est un peu usante. Le rétrécissement du chemin combiné au nombre de coureurs et de randonneurs oblige à une vigilance permanente. Arrivé au sommet, je ne fais pas de vieux os. Il est 14h45 et à peine ai-je bipé que je tourne les talons. Je m’apprête à replonger lorsque je tombe sur les parents de Laurent. Nous échangeons pendants quelques instants, une petite photo et puis après avoir accroché mes bâtons au sac, je repars en petite foulée.
Rien ne sert de s’enflammer, c’est à peine si je dois être à 9km/h. Certains piquent comme des dératés alors qu’il reste encore 180km… j’ai décidément du mal à comprendre la finalité de cette stratégie. Et ça ne rate pas : un Stuka me doublant pleine balle vient s’étaler dans un artistique roulé boulé agrémenté d’un joli panache de poussière une cinquantaine de mètres devant moi.
Tuuuchhusss, m'enfin pas vraiment en fait
Je continue à croiser du beau monde, genre Rafion qui grimpe à l’aise dans les éboulis. La semaine passée il s’est déjà cogné l’UT4M 160, et à l'heure ou j'écris ces lignes, il est sur UTMB - Comment fait-il ? Pas la moindre idée... Non loin du ravitaillement, Fred Domino monte au pas, les traits tirés et semblant hélas encore être dans le dur.
Sencours, Retour - Jeudi 15h21 : 134ème
J'effectue un court arrêt aux stands extérieur pour faire le plein de flotte. C'est l'occasion de déconner avec les bénévoles au sujet de mes bâtons-antennes qui me permette soit disant d'écouter la radio tout en courant. Je m'enfile une nouvelle soupe et un rapide kawa dans la cabane. En ressortant, David Lussac qui arrive juste du Pic m’annonce que Romain est reparti il y a tout juste deux minutes. Je me remets donc en chemin avec entrain direction Hautacam, mon godet de pur arabica soluble encore à la main.
Cette section peut être longue et usante malgré un profil plutôt descendant, surtout quand le soleil fait des siennes. Heureusement, on va dire qu’aujourd’hui ça reste gérable. La moiteur qui était pénible dans le Sencours a laissé place à une chaleur plus sèche. En cheminant vers le col de la Bonida, je me met à talonner un coureur. Le sentier est étroit et je ne suis pas pressé, donc je ne cherche pas à doubler. Dix minutes passent ainsi, jusqu’au moment où, au détour d’un lacet, je vois enfin le coureur de face, et je me rends compte qu’il s’agit de Romain. Comme dirait l’autre, je suis hyper content (mais je ne vomi pas).
Je ne sais pas pourquoi, je beugle sur mon compagnon de route...
Romain, c’est un coureur Bordelais dont les chronos gravitent autour des miens. Bon, ces derniers temps, il est nettement au-dessus vu ma forme précaire. Cette année sur l’Euskal 130, il nous a mis près de 3h dans la vue. Mais je me prend tout de même à espérer faire un bout de route avec lui.
Concernant notre traversée, rien de bien fameux à en dire. On effectue une petite pause technique au niveau du lac bleu : soin des pieds pour moi et vidange pour mon comparse. Nous devisons tranquillement. On se dit que décidément, 220km, c'est un peu une ânerie et qu'il faudrait penser à se rabattre sur des courses plus courtes à l'avenir... Enfin on dit ça... un vœu pieux quoi.
col d'Aoube, dans les cailloux du massif d'Hautacam.
Dans la montée du col de Bareille, il marque un peu le pas. Je continue à grimper histoire de ne pas m’enfermer dans un faux rythme. Je suis certain qu’il viendra vite me recoller. En descendant sur le lac d’Ourec, je grappille quelques places, à mon tour de doubler en descente. Celle-ci est un peu cassante et je commence à être ballonné. Il faudrait que j’évacue du gaz, mais je n’arrive pas à passer de la théorie à la pratique… Tant pis. Je modère l’allure pour éviter d’aggraver mon cas et ça me donne du temps pour contempler ce qui m’entoure. L’heure tourne et les ombres s’étendent progressivement sur les pentes environnantes. En arrivant sur la hourquette d’Ouscouaou, j’ai une vue implacable sur le lac en contre bas et sur les sommets voisins. Je traverse l’interminable balcon qui conduit à Hautacam en faisant le yoyo avec un gars habillé en bleu. On reste taiseux, mais bien que je ne le sache pas encore, il s’agit d’un futur partenaire de course.
Hautacam – Jeudi 19h07 : 106ème
Je profite de mon avance sur Romain pour passer aux toilettes et je parviens à faire sauter le bouchon de champagne, si vous me passez l'expression. Mon ventre va tout de suite mieux. Il est notoire que pendant les ultras on a tendance à devoir régulièrement dégazer afin de soulager nos viscères endoloris. Pendant cette course cependant, j'atteindrais un niveau supérieur en matière de méthanisation. Ça sera concerto de clarinette tout au long de la balade, j'aurais pu jouer des morceaux entier de Kenny G avec mes boyaux. Excuses sincères à mes compagnons de route...
Bref, je sors à peine des lieux d'aisances que Romain pointe le bout de son nez en compagnie de… Rafion ? Punaise comment il revenu le bougre ! Il avait quasiment un Pic du Midi de retard et paf, le revoilà. Nous ressortons sustenté au bout d’une dizaine de minutes, direction la première base de vie qui se situe mille mètres en contrebas.
Les premiers kilomètres étant constitués de chemins dégagés et de pistes, je remets les bâtons au sac. Ça me permet d’avoir une foulée plus légère. Le rythme est correct et tout va pour le mieux. Romain accélère le tempo une fois atteint les sous-bois surplombant Villelongue. Malgré le crépuscule, la chaleur est encore très présente en fond de vallée et nous suons comme des porcs. L'air est limite visqueux lorsque nous débouchons dans le village. Nous profitons d'un riverain qui arrose son potager pour nous ébrouer sous son jet d'eau. Nous nous dépêchons ensuite d'arpenter le bitume restant et dégommons énergiquement la méchante conduite d'eau forcée menant au dessus de Pierrefitte. La base de vie est là, on va enfin pouvoir souffler un peu.
Pierrefitte Entrée – Jeudi 21h01 : 103ème
Hé bien ! Si on m'avait dit que je parviendrais jusque là... J'ai la baraka et je suis encore plus content lorsque j’apprends que Fabien est venu nous supporter. Romain avait vaguement évoqué la chose, mais je n’y avais pas prêté attention. Camarade arpenteur de sentier, il est venu faire l’assistance pour toute la clique Bordelaise sur les différentes bases de vie. Son aide appréciable sur le plan matériel s’avérera surtout bénéfique au niveau du moral. Il faut dire que le bonhomme sait communiquer son enthousiasme et lever nos doutes lorsque la peur se glisse dans nos cœur de traileurs : en somme, on rigole bien. Ça nous permet aussi d'aller à la pèche aux infos. Fred et Laurent ont déjà repris leur route. C'est à peine si ils se sont arrêtés une demi-heure. En revanche David est plus entamé et attend son tour pour passer entre les mains du kiné, mais hélas, en définitif, il ne repartira pas.
De notre coté, Fabien nous trouve frais. Je ne sais pas si c’est vrai, mais c’est réconfortant. Il se propose d’aller nous chercher des pâtes et des compotes pendant que nous farfouillons dans nos sacs de changes. Romain a bien organisé le sien. Chez moi c’est l’anarchie. J’ai tout bourré pèle-mêle. Les snickers et autres pâtes de fruits côtoient les textiles techniques et les bandes de strapping. Il faut dire que je n’avais pas prévu d’aller bien loin donc j’ai un peu fait n’importe quoi. Laissant un petit tas de fringues puantes sous la table, je file en calbute sous la tente extérieur pour prendre une douche. Enfin quand je dis prendre une douche, comprenez se foutre à poil et se rincer au jet d’eau froid. J'en profite pour lessiver mon short car tête de linotte que je suis, j'ai omis d'en mettre un propre dans mes changes. Au moins est on décrassé et revigoré après ça. L'ennui c'est que la crasse et la flotte ont détrempé mes strapping. Ils se décollent de partout. Après réflexion, je décide de les refaire et j'arrache tout. Mes pied étant trempés, je dois les sécher, sauf que je n'ai embarqué qu'un petit bout de serviette déjà bien humide... Le bordel quoi.
Pendant que j’attends que ça sèche, annonce officielle dans la salle. À cause d'une météo tempétueuse, la section de Cauterets à Luz passant par le Vignemal et Gavarnie est redirigée vers le Col du Riou. On perd 35km et 1600 mètres de dénivelé dans l'histoire. Tachons d'être honnête et de ne pas se raconter d'histoire : Avec le recul et sachant que tout s'est bien passé, je suis évidement déçu de ne pas avoir parcouru l'intégralité de ces deux cent vingt kilomètres.
Sur le coup en revanche, je me suis réjouis. Malgré l'absence de pépin physique, j'avais encore du mal à me sentir en course et n'envisageais pas d'atteindre l'arrivée. Je n'avais pas envie d'avancer en serrant les dents et je prévoyais d'abandonner à la moindre alerte. Mécaniquement, la probabilité d’échec dans un futur plus ou moins lointain, vers Cauterets ou Gavarnie mettons, était assez forte. Le fait que la course soit ramenée à 190km a complètement changé la donne, et paradoxalement, ça a produit un déclic qui m'a motivé à vouloir terminer coûte que coûte.
Retournons à mes petons. Fabien m'aide à recoller des bandes présentables autour de mes chevilles. Effet bonus du truc, c'est que ça me protège aussi d'éventuelles ampoules. Par contre on perd du temps. Déjà une heure d'écoulée et Romain est prêt à repartir. Fabien va demander à un bénévole de me remplir mes gourdes : un tiers coca pour deux tiers d'eau. Je récupère celles-ci bien noires. Visiblement il a fait l'inverse. Pas grave, je n'ai que trop traîné. Nous vissons nos frontales sur nos cranes et repartons sur les pentes du Cabaliros.
Pierrefitte Sortie – Jeudi 22h10 : 104ème
Je suis assez motivé par ce qui nous attend car si on excepte les huit premiers kilomètres de cote jusqu’à la cabane de Turon de Béné, la suite jusqu’à Cauterets va être une découverte intégrale pour moi. Je laisse Romain mener la danse. Dès le départ il imprime un tempo que je trouve très vigoureux et on ne tarde d’ailleurs pas à boulotter un petit groupe de coureurs. Je sens que je suis bien au-dessus de mon rythme de croisière. Ma respiration se fait plus rapide et je sens mon ventre se contracter. Sur le GRP160, c’est précisément dans cette pente que j’avais choppé la nausée, et je ne souhaite vraiment pas réitérer l’expérience. Je demande à Romain de ralentir mais que voulez-vous, il est lancé et en plein forme. Je connais ça et il faut mieux que je le laisse filer quitte à ce qu'on se rejoigne plus tard.
Laissant le halo de sa frontale s’éloigner tranquillement, je me cale sur une cadence plus raisonnable. Un des coureurs croisé précédemment a pris le train en marche. Ce n’est autre que le monsieur bleu avec qui j’avais rallié le ravito d’Hautacam. Yes ! Je ne serais pas rester seul très longtemps ! J’ai gagné un nouveau binôme prénommé Yves. Je vais pouvoir achever cette longue ascension en bavardant gaiement.
Nous traversons une dernière prairie sous les étoiles puis atteignons la cabane marquant le début de la redescente vers Estaing. Celle-ci débute par des lacets en pente douce. Le changement de décor est radical. Nous pénétrons au cœur d’une pinède plutôt sauvage, pas le truc rectiligne et morne comme dans les Landes. Je me risque à faire un peu plus de lumière avec ma frontale. La rosée donne un aspect blanchâtre à la végétation. De gros troncs à demi couchés forment des arches au dessus du chemin. Le terrain est souple voir même carrément molletonné tant certaines sentes sont couvertes de feuilles. C'est très… mignon, je ne trouve pas d'autre adjectif.
Par contre, histoire de me ramener à ma triste condition d'homme égaré dans ce milieu féerique, je suis pris de brûlures d'estomac. C'est beaucoup moins emmerdant qu'une nausée ou des maux de bide mais c'est très irritant de roter de l'acide chlorhydrique dès qu'on avale quelques choses. Je soupçonne fortement le surdosage de coca dans mes gourdes d'y être pour quelque chose. Ça et les dégueulasses « Mules Bars » goût pina colada que je me suis enfilé un peu plus tôt. Rien que d'y penser j'en ai de nouveau des aigreurs.
Les remontées acides pourraient me permettre de dissoudre la concurrence...
Une fois en bas, nous attaquons une section en dents de scies composée d'une alternance de petites routes et de chemins. Difficile de se repérer dans le noir, mais Il semblerait que nous remontions le long d'un torrent en fond de vallée. C'est un peu longuet mais l’apparition d’éclairage public dans la brume marque notre arrivée au gîte d’Estaing.
Estaing – Vendredi 1h59 : 92ème
Je décerne la palme de la quiétude à ce ravitaillement. J’ignore si c’est dû au bruit du ruisseau dehors ou au fait qu’il soit deux heure du mat’, mais il y règne une atmosphère douillette. Tout le monde parle à voix basse. Les bénévoles nous dorlotent. Une large tenture scinde la pièce et dissimule des lits de camps propices aux roupillons. On aurait tellement envie de se rouler dans une couette devant un feu de cheminé, une tasse de chocolat chaud dans les mains... Mais non, on est sur un ultra, et sur un ultra, on ne s'attarde pas.
Alors que je suis assis sur une chaise à bricoler mon sac, le rideau s’écarte et laisse échapper un Romain aux yeux embués. Il émerge d’un somme et Yves va à son tour s’allonger pour une dizaine de minutes. Je l'imite même en l'absence de sommeil. Je me relève au bout de huit minutes précisément contraint et forcé par ma tuyauterie interne qui s’ébranle. C’est un phénomène curieux qui me poursuivra jusqu’à la fin de la course : dès que je passe à l’horizontal, je suis obligé d’aller aux toilettes. Attention hein, je ne suis pas malade, j'ai juste un besoin impératif de passer aux WC. Je mets ça sur le compte du grand nombre de bananes que j’ai ingurgité durant l'épreuve (au moins huit ou neuf). Voilà pour le bilan intestinal. Ne riez pas, c'est important sur ce genre d'experience.
Après avoir bullé une bonne demi-heure, je reprends ma route en compagnie d'Yves, Romain ayant déjà filé. Nous rejoignons le GR10 qui poursuit le torrent et s'élève calmement vers le lac d'Estaing. Quelques bon petits coup de cul en sous-bois nous revigorent tandis que le brouillard et quelques gouttes font leur apparition. Cette purée de pois est par endroit tellement dense qu'il nous faudrait une tronçonneuse pour la débiter. Ça devient carrément gênant lorsque nous arrivons sur la dernière portion de bitume. J'ai beau mettre les pleins phares, nous galérons pour localiser les balises et doutons à plusieurs reprise de notre itinéraire.
Au bout d'une heure, nous parvenons au pied du raidar menant au col d'Ilhéou. Je cru comprendre qu'il s'agissait d'une montée sèche de 1200m de dénivelé étalés sur cinq ou six kilomètres, donc les vérins risquent de couiner un peu.
Le KV Bruegelois
On attaque tout de suite dans le vif du sujet par un méchant coup de rein en sous-bois. Je me place en tête et active le mode « petits pas avares» histoire de ne pas gaspiller trop de jus. On doit quand même tenir une bonne cadence parce qu'on reprend pas mal de monde.
Après un court moment de répit matérialisé par un petit faux plat couvert de vaches dubitatives, on aborde la seconde partie. C'est simple, c'est cash, c'est droit dans la pente jusqu'en haut. Ce n'est pas le pourcentage qui rend cette grimpette laborieuse, c'est le fait qu'à aucun moment la pente ne s’infléchisse pour nous laisser souffler. Ça et aussi le fait que de nuit, même à découvert et sans brouillard, nous n'avons aucune information visuelle quand à la proximité du sommet. Nous nous contentons donc d'avancer mécaniquement, mutique et sans nous poser d'autre question que de mettre un pied devant l'autre. Je lève les yeux de temps à temps, histoire de sauter d'une rubalise à une autre et je m'avale un ou deux bounty histoire de garder des forces.
Ça sera peut être la seule hallucination visuelle que j'aurais, mais à un moment donné, je crois atteindre le sommet car devant moi je distingue un genre d'antenne radio dessinée par l'alignement vertical de trois lampes. Je m’apprête à partager ma découverte quand je me rend compte qu'il s'agit juste de trois étoiles vaguement d'aplomb.
Par contre je ne me suis pas trompé sur tout. Le col Ilhéou ? Bah il est là, ça y est. Et hop, bonus calembour.
Après cette cuisante ascension avalée d'une seule traite, je m'attendais à un final rutilant, un peu épicé, mais non. La pente se contente de mollir jusqu'à finalement s'incliner dans l'autre sens en direction du refuge. Hormis une corniche à flanc de rocailles ouverte sur un vide insondable, la descente est plutôt facile et souple. Ça fait un bien fou de pouvoir courir un peu.
Refuge d'Ilhéou – Vendredi 5h50 : 76ème
Je gratifie ce ravitaillement de la palme « Jean-Pierre Coffe ». Certes, en terme de bouffe l'offre se réduit à des bonbons Haribo et à une garbure qui glougloute sur un réchaud. Mais cette garbure c'est juste le plat salé le plus succulent que nous aurons de toute la course.
On a récupéré Romain et aussi Rafion qui à l'air de déambuler au radar. Il doit lui rester un bonne tranche de fatigue de L'UT4M. Du reste, le ravito étant physiquement assez sommaire et exigu, nous décidons de ne pas trop nous y attarder.
Le tiercé que je forme désormais avec Romain et Yves repart sous les aboiements d'un patou fainéant couché sur le bas coté. Une piste pour 4x4 nous fait doucement redescendre sur Cauterets. Alors une bonne petite piste à sept huit pourcents, c'est fastoche me direz vous hein ? Bah non. Celle-ci est jonché d'un remblai que je qualifierais de planche pour fakir tant la granulométrie des cailloux semblent avoir été étudié pour nous défoncer la voûte plantaire.
Le petit salopard...
Tandis que nous arpentons ces quelques bornes chiantes, le ciel commence à rosir. L'aube nous offre un panorama plutôt cool avec les montagnes environnantes qui transpercent une mer de nuages.
Nous finissons par déboucher sur un parking faisant jonction avec ce qui ressemble à du chemin pour VTT. Le parcours se fait moins monotone et la végétation redevient luxuriante. Le revêtement terreux nous permet de courir sans trop nous fracasser les cuisses. On en profite pour dévaler jovialement la succession de zigzags et de marches piquant à travers la brume. La nuit est définitivement révolue lorsque nous arrivons sur la place de Cauterets.
Cauterets, entrée – Vendredi 7h21 : 70ème
Cette seconde base de vie est niché dans le casino de la ville. Niveau standing, c’est difficile de faire mieux, manquerait juste que les bénévoles ressemblent à De Niro ou à Joe Pesci. Nous avons l’excellente surprise d’être accueilli par Laurent et Fred qui malgré leur avance n’ont pas encore repris la route. Il faut dire qu’ils ont joué les marmottes pendant plus d'une heure. Fabien, toujours fidèle au poste, est là pour nous proposer de succulentes viennoiseries. Mention spécial à ses croustilles aux myrtilles. C’est juste une pure tuerie, qu’il en soit mille fois remercié ! Concernant les nouvelles du front, Après David, c'est Fred Domino qui aurait lâché à Pierrefitte : La course continue à faire son lots de victimes.
Des bénévoles à Cauterets
Après avoir fait un brin de causette, je file prendre une douche à la piscine municipale. L'eau chaude m’attendris les jambons, c'est salvateur. Une journée ensoleillée s'annonce, donc j'opte pour une tenue plus légère mais décide de conserver mes chaussures actuelles vu que mes pieds sont en parfait état.
J’essaye d’imiter Yves qui pique un petit somme, mais rien à faire. Le sommeil ne vient pas et de toute façon au bout de dix minutes je me relève parce que mes intestins dansent la rumba et que j’en ai marre de serrer les fesses. Entre temps, Laurent et Fred ont filé. Il va falloir que nous aussi nous fassions nos paquetages. C’est le morceau suivant qui se trouve largement amputée à cause de la météo. Nous devions contourner tout un massif en grimpant au pied du Vignemale puis redescendre par Gavarnie. Au lieu de cela, nous allons simplement enjamber la montagne en passant par le col du Riou, le chemin classique du GRP160. Ça nous fait grosso modo une étape d’une vingtaine kilomètres sans grosses difficultés à l'horizon.
Cauterets, bien en cuisse, prêt à repartir
Cauterets, sortie – vendredi 8h40 : 87ème
Notre triumvirat reprend sa route en direction du GR10. Après avoir contourné les termes on s’élève progressivement au-dessus de la ville par le même chemin que nous aurions dû emprunter pour aller à la fruitière, sauf que nous bifurquons ensuite vers la gauche. La suite est simple. Nous avalons bon train une piste faisant des lacets qui nous mène en sous-bois. De là, la déclivité s’accroît et on s’élève plus franchement. On croise peu de monde et ça pourrait presque devenir ennuyeux si le paysage champêtre n’était pas si sympathique. Un dernier segment à découvert fini de nous conduire au col où nous sommes chaleureusement accueillis par une poignée de bénévoles. Ils nous annoncent dix kilomètres jusqu’à Luz. Je connais bien, sauf que... nous en reparlerons.
On commence notre descente assez sèchement puisque nous traversons droit dans les herbages. Les quadriceps frétillent un peu mais la suite est moins violente. Nous poursuivons en empruntant des chemins de traverses qui nous évitent les larges virages goudronnés montant à la station d'Ardiden. On peut enfin se relâcher. Quel plaisir de pouvoir gambader sur ces sentiers rieurs ! Nous arrivons dans les bucoliques petites bourgades de Grust puis de Sazos. Luz est juste devant nous, deux kilomètres en contrebas.
Oui sauf que le balisage ne semble pas décidé à nous faire traverser le village et nous déporte de plus en plus sur la droite, si bien que nous finissons par remonter et ressortir au dessus du hameaux. Je comprend rapidement de quoi il retourne. Nous sommes en train de rattraper le GR10 qui poursuit en direction de la croix de Sia. Pour des raisons certainement imputables à des histoires de sécurité et de logistique, l'organisation nous fait rejoindre le point par lequel nous aurions du arrivé si nous étions venu de Gavarnie. En soit ce n'est absolument pas dérangeant. Le parcours a subit une telle cure d'amaigrissement qu'on ne va pas se plaindre si un détour roulant de quatre ou cinq bornes est remis au menu.
Une carte du Mordor du coin qu'on bypass
Mais bon, soyons franc, sur le coup, un détour imprévu reste un coup du sort qui nous fait pester contre le vent. La chaleur monte également, et nous commençons tous à être un peu en rade de flotte. Les bourgs que nous venons de quitter gargouillaient du bruit de nombreuses de fontaines, sauf qu'aucune gourde n'a été remplie vu qu'on se voyait déjà arrivé à la base de vie. Tant pis. Ronchonnant dans nos barbes, nous tachons d'arpenter aussi vite que possible ce balcon en faux plat montant. Pour ne rien arranger, je commence à ressentir une petite gène au dessus du genou droit lorsque j'avance en terrain peu pentu. Et moi qui surveillait mes chevilles...
Au abord de la ville, après une volée d'énormes marches de schiste, nous sommes accueilli par une amie de Romain. Le brin de causette qui s'en suit m'extirpe un peu de la bulle de noirceur dans laquelle je m'étais enfermé, mais je suis encore de mauvais poil en arrivant au ravito.
Luz, entrée – vendredi 13h09 : 84ème
C'est la dernière base de vie avant d'attaquer les cinquante derniers longs kilomètres franchissant le massif du Néouvielle pour nous ramener à Vielle-Aure. Fabien est encore là, bon pied bon œil pour nous filer un coup de main. Il me propose un reste de purée de patate douce que Fred n'a pas mangé. J'accepte volontiers, j'en ai un peu marre des pâtes natures. On apprend aussi que Lazare est hors du tombeau : Fred Domino est revenu d'entre les morts. Ayant conservé son dossard, il est finalement reparti de Pierrefitte puis d'Estaing avec les barrières horaires lui fouettant le cul. C'est excellent !
De mon coté, je décide qu'il est temps d'aller me faire masser les guibolles histoire de retrouver un zeste de fraîcheur musculaire. Une jeune pompier vient essayer de détendre mes quadriceps endoloris. D'après elle, rien de bien méchant, je suis encore bien souple en comparaison de la plupart de ses autres patients. Elle parvient à libérer une ou deux tensions sur l’extérieur de mes genoux, autour de la bande du fascia lata. C'est toujours ça de pris.
Pendant que je me fait pétrir sur la table de massage, mes compagnons s'impatientent. Je leur dis de filer. Nous formions une joyeuse troupe, mais nécessité faisant loi, je dois vraiment faire un arrêt au stand plus conséquent afin de poursuivre ma route sans encombre.
Fabien m'adresse ses derniers encouragements. Il pense que je vais rattraper les autres pour finir avec eux vers deux-trois heures du matin. Plus pessimiste et comptant y aller mollo sur la fin, je lui dis que je risque plutôt de terminer vers cinq heure.
Je repars donc seul mais assez serein un quart d'heure derrière mes anciens comparses.
Luz, sortie – vendredi 14h03 : 84ème
Il n y a pas grand chose à dire à propos de ces huit bornes de montée tranquille. Quelques coups de klaxon sporadiques viennent m'encourager alors que je quitte Luz et me dirige vers Viella. Une alternance de petits sentiers pastoraux tantôt en sous-bois, tantôt à flanc de prairie me permet de rejoindre le village de Sers. Peu avant de grimper sur la croix de Saint Justin qui surplombe Barèges, je récupère Rafion. Sous sa saharienne rouge, il est groggy de fatigue et donne l'impression de dormir debout. Un chemin tout lisse permet ensuite de trotter avec aisance jusqu'au petit bois à l'entrée du village. Alors que je débouche sur la place, j'entends qu'on me hèle. C'est Romain qui s'était arrêté pour faire une petite sieste dans l'herbe à l'ombre d'une bicoque. Je l'ai dépassé sans même m'en apercevoir. Yves a filé pour de bon, il finira une bonne heure devant nous.
Barèges – vendredi 15h46 : 81ème
Je m'applique à refaire les niveaux parce que sur ces hauteurs, le soleil m'a un peu fait suer. Je déblatères avec des bénévoles et des accompagnants, je picore, et vu que la salle est relativement calme, malgré l'absence de sommeil, je vais m'allonger dix minutes. Vous devinez la suite. Sept minutes montre en main et je me redresse pour aller faire une offrande scatologique aux WC des lieux. Romain ayant déjà pris la poudre d'escampette, je repars en solo toujours à mon rythme, sans chercher à le rattraper.
Je me souviens bien de la suite. Mon objectif est d'atteindre le refuge de la Glère en début de soirée afin de pouvoir passer le chantier des hourquettes « néouviellesques » de jour. Je m'extrais délicatement du village via un large ruban forestier ombrageux partant sur le versant droit de la vallée. Passer ce moment reposant, je débouche sur le parking du Lienz et j'attaque la piste en fond de vallon qui me conduira au pied de l’enchevêtrement caillouteux en haut duquel trône fièrement le refuge. Je chemine en parallèle d'un petit ruisseau, à découvert, et c'est assez monotone. Le soleil reste timide mais par contre, un vent venu du fond de la cluse me frappe en pleine face. Inutile voir impossible de courir contre lui, même quand la pente le permet. Je prend donc mon mal en patience et marche à grandes enjambées. Je n'ai croisé que quelques randonneurs depuis Barèges et je commence à m'ennuyer. La légère douleur au genou droit est revenue, agaçante mais pas bien vilaine. Histoire de passer le temps, je l'affuble d'un sobriquet ridicule : je la prénomme Mauricio. J'aimerais beaucoup que Mauricio fiche le camp.
J'arrive devant le tas de cailloux menant à la Glère. Un habitant du coin m'a confié que « la Glère », ça voulait dire « la pierre ». On comprend vite pourquoi. Je démarre une session de crapahute très manuelle au milieu d'un sentier informel qui ne lésine pas sur la pente. Lors de notre reco, j'avais trouver cette ascension assez difficile, mais après la platitude du passage précédant, je m'y amuse finalement comme un petit fou. Joueur, j'ai enfin des concurrents en ligne de mir pour me motiver, et en plus, alors que je sollicite fortement mes gambettes, Mauricio reste silencieux.
J'ai la pèche et je devais arborer un large sourire lorsque j'ai gravi les dernières marches conduisant au ravitaillement.
Refuge de la Glère – vendredi 18h13 : 84ème
Caméra d'or pour ce ravito : c'est du « claquisme » pur jus. La vue est fabuleuse et je resterais bien ici à admirer le paysage, assis à une des tables en sirotant une bière. Sauf que non, c'est le dernier avant poste avant de pénétrer plus avant dans cette sauvagerie minérale. J'effectue ma routine de ravitaillement promptement. Il faut que je prenne congé rapidement si je veux pouvoir escalader les hourquettes de jour. Au moment de faire le plein, je m'aperçois qu'il me manque ma flasque souple, sûrement tombé dans les gravats plus bas. Tant pis, il me reste mon camel et une gourde, c'est amplement suffisant.
J'embarque deux ou trois autres zigotos dans mon sillage. Première surprise, on descend au bord du lac en contrebas. Lors de notre reco, nous l'avions contourné et étions allé nous paumer ailleurs, improvisant un azimut chaotique jusqu'à Mounicot. La trace dessinée par l'organisation est tout aussi chaotique sauf qu'elle est plus riche en dénivelé.
On ne peut pas vraiment dire que le terrain est âpre, non. Le terrain est pulvérisé. Partout ça n'est qu'amas de roches jeté ça et là en vrac par quelque déité géologique sûrement un peu bourrée. Je crois qu'on a retrouver tous les cailloux balancés négligemment par Sisyphe. D'un coup de filtre Instagram, on pourrait se croire sur Mars ou sur la Lune. En tous cas moi je trouve ça génial et c'est vraiment du miel pour la rétine.
Coté progression par contre, il faut enjamber, faire des pas chassés, de petits bonds, des entrechats... C'est une valse à trois temps en fait : Primo, trouver le balisage. Deuzio, définir parmi les blocs de roches pêle-mêle un moyen efficace d'y aller. Tertio, réussir à coordonner ses bras et ses jambes afin de se hisser jusqu'à l'objectif sans se fracasser la gueule par terre et ainsi de suite.
On atteint le laquet dans lequel trempe la première hourquette. C'est parti pour un nouveau round de bamboula, toujours sur le même rythme. C'est bien raide, et j'entame à peine cette difficulté que je me tape un genre de truc bizarre, l'équivalent d'une hypoglycémie mais de sommeil. Ça sera la seule fois dans la course et ça ne durera qu'une poignée de minutes. Mais purée, pendant ce court laps de temps, je ne comprends vraiment plus rien à la vie. Je suis KO debout. Cette torpeur se dissipe aussi vite qu'elle était née. Mes compagnons à l'arrière ne se sont rendus compte de rien car j'ai continué à avancer, mais j'étais à deux doigts d'aller m'écrouler contre un rocher pour piquer un roupillon.
Pour vous donnez une idée du chantier...
Notre ascension se poursuit au milieu des monolithes. Un coureur propose au groupe des petits bonbons à la menthe forte. Je ne suis pas fan de ce parfum mais vu les quantités faramineuses de sucreries qu'on ingère depuis des heures, le carnage bucco-dentaire est total. J'ai choppé un ou deux aphtes, et surtout j'ai l'impression d'avoir un bon centimètre de tartre autour de chaque dent. Je n'arrête pas de sucer mes gencives et je rêve d'une spatule pour racler tout ça. Je gobe donc le bonbec sans hésitation.
Nous sommes presque en haut lorsque j'aperçois Romain qui semble un peu en chier sur la fin. Nous nous rejoignons sur la crête. C'est dingue à quel point nous aurons fait les pendules pendant toute la course. Dorénavant, nous ne nous séparerons plus jusqu'à la ligne d'arrivée. Et vu qu'un couple c'est bien mais que le triolisme c'est encore mieux, Seb, le gars des bonbons à la menthe, fera office de troisième larrons. Niveau panorama, j'en reste la mâchoire pendante, c'est une tuerie à 360°.
La redescente dans le vallon d'Aubert, c'est n'importe quoi au bon sens du terme. On pique dans le vide comme Thelma et Louise, sans aucun préliminaire, droit dans une pente poussiéreuse archi raide. Par la suite, ce qu'on perd en inclinaison, on le gagne en passages techniques. C'est simple, il n y a plus du tout de chemin. Le balisage, c'est de la bande plastique tirée droit au travers des blocs de pierres. On se met à arpenter un champs de gravats dont les volumes vont de l'enclume à la petite citadine style Twingo. D'ailleurs ça serait trop bien si à Bordeaux toutes les Fiat 500 et autres Mini pouvaient être remplacer pas des caillasses du Néouvielle, on pourrait se bâtir une vraie bugne avec.
Une fois de l'autre coté du vallon, nous devons nous en extirper et rejoindre le chemin au dessus de nos tête qui quitte la vallée. Pas de chichi, aucune fioriture. Le chemin est devant ? So bit, pourquoi s'emmerder à faire un détour quand on peut tracer « dré dans l'pentu ». Je rigole en imaginant le briefing des organisateurs :
Hé les gars on a prévu ce qu'il faut pour obtenir des fractures et des contusions, mais niveau déchirure musculaire on est un peu léger. des idées ?
Ouais moi ! Je connais une super pente improbable, les mollets vont adorer ! »
En tous cas, la totalité de cette section depuis la Glère fut épique, exaltante, et aussi complètement débile. J'ai adoré de bout en bout. En revanche je ne peux m’empêcher d'avoir une pensée émue pour ceux qui passerons par là de nuit. Comment ils vont trop galérer leur mère puissance dix...
Nous arrivons sur la Hourquette d'Aubert alors que la fin du jour se fait sérieusement sentir. La vue est magique. Dans notre dos, le soleil disparaît derrière les sommets voisins, laissant le désert minéral que nous venons de quitter s'enfoncer dans la pénombre. En face, le lac d'Aubert et le Lac d'Aumar guide notre regarde vers la vallée qui nous mènera au lac d'Orédon.
On fait les beaux sur la Hourquette d'Aubert
La descente qui suit ne supporte pas la comparaison avec ce que nous venons de franchir. Elle s’avérera assez chiante et je pense pouvoir dire qu'on a tous les yeux qui lorgne désormais sur Vielle-Aure. D'abord, la première partie que nous avions trouvé joueuse lors de notre reco se révèle impossible à courir lorsqu'on a les jambes entamées par plus de cent cinquante kilomètres de course. C'est beaucoup trop défoncé. Ensuite, le long serpent de bitume qui mène au parking paraît interminable, spécialement lorsqu'il fait nuit et qu'on se traîne en marche rapide. C'est peu pentu et lisse, on a de la cuisse, mais le goudron est tellement dur qu'il fracasse les pieds. Alors à la lueur des frontales, on bavarde cyclisme urbain et écologie pour faire passer le temps.
Parking d'Orédon – Vendredi 22h30
L'écurie se faire sentir. Nous sommes au pied du dernier obstacle, mais avant d'aller lui chercher querelle, on reprend un peu nos forces. On fait évidement le plein, puis notre trio va s'allonger pour une durée totalement arbitraire de douze minutes. Cette fois ci, pas envie d'aller aux gogues, et je reste allongé pendant la totalité de la sieste. Je ne parviens pas à m'endormir, mais je sens que mon cerveau et mes jambes déconnectent pendant un court laps de temps.
Ragaillardi, nous repartons dans la nuit. Cette fois c'est Romain qui ouvre les hostilités en optant pour un rythme mezzo forte très supportable. La grimpette débute plus doucement que dans mes souvenirs. Mais le col d'Estoudou, il est loin d'être tout doux, et on retrouve vite l'amoncellement de roches entrelardées de racines que j'avais gardé en mémoire. On se faufile entre les arbres et des bourrasques de plus en plus fréquentes viennent nous cueillir à mesure que nous touchons au but. Le vent devient carrément méchant lorsque nous traversons l'espace nu qui nous fait basculer vers le lac d'Oule.
Romain est toujours aux manettes. Il court sans s’arrêter, ce que je n'aurais probablement pas fait si j'avais été seul. Cette dégringolade me semble interminable et rébarbative. Sous les sapins, l'obscurité oblitère tout les repères visuels qui auraient pu nous donner l'impression d'avancer. Je prends mon mal en patience et quelques dérapages poussiéreux plus tard, les berges de l'Oule daignent enfin se montrer.
Notre marche à grandes enjambées contournant le lac provoque le retour de Mauricio. Je prend conscience que c'est toute ma carcasse qui commence à couiner, avec la sensation d'avoir du jeu de-ci de-là. Même si globalement ça va, il est temps que ça se termine. On oblique soudainement sur la gauche pour sortir de la vallée. Nous laissons la piste pour couper et tirer droit dans l'herbe le long des poteaux du télésiège. Ça monte brutalement et le vent hurle de plus en plus fort, mais le restaurant de Merlans n'est plus très loin. Je bronche un peu, mais j'avance.
Restaurant Merlans – Samedi 00h15 : 77ème
Pas question de prendre racine ici. La portion finale s'annonce laborieuse, alors autant enchaîner fissa. Une soupe, un passage aux chiottes, et vamos ! Je prend le temps d'envoyer un SMS à ma chérie pour la prévenir de mon arrivée d'ici deux bonnes heures.
À peine mis le nez dehors que nous sommes saisis par de puissantes rafales. Heureusement, celles-ci nous poussent dans le bon sens. Nous franchissons le Portet cerné par des dizaines de rubalises scintillantes et claquant au vent. C'est très étrange, on dirait de petites torches.
Nous nous engageons ensuite sur le GR10 et laissons la piste rouge qui dévale vers Espiaube sur notre droite. Au lieu de descendre sur le flanc de la cluse directement vers la vallée de Saint Lary, nous poursuivons sur les crêtes herbeuses à gauche, surplombant l'itinéraire habituel. J'avoue avoir eu pas mal d'appréhension en abordant ce passage. Les sentiers de prairies érodés ne sont pas mon fort. Je chausse du 47 et avec une belle foulée à 10h10, j'ai tendance à me coincer les pieds dans les ravines. Je nourris aussi quelques craintes quand à l'état de mes cuisses en descente. J'ai proposé aux gars de courtes pauses de marche à la sauce Cyrano pour éviter la surchauffe. De toute façon, je leur demande de foncer sans état d'âme si jamais je fais trop le baltringue.
Tout compte fait ça ne se passe trop mal. Hormis quelques passages étroits, la trace est suffisamment large pour que je puisse courir sans anicroche et on ne marche que lorsque le terrain remonte. En revanche c'est long. Il se passe au moins cinq kilomètres fastidieux pendant lesquels nous ne perdons quasiment pas d'altitude, restant perché sur nos hauteurs à contempler les lumières des différents villages plus bas. C'est chiant et on passe notre temps à se demander quand est ce que nous allons enfin descendre. Sans prévenir, la trace bascule d'un coup et se transforme en toboggan. Comme pour rattraper le temps perdu, elle met les bouchées double et vient nous bastonner les gigots. Plongeant littéralement dans l'obscurité, nous dévalons sans arrêt jusqu'à Soulan. C'est de toute façon trop raide pour marcher.
J'ai des souvenirs précis de ce qui nous attend et je sais que la fin est proche. D'un coup la tête va mieux et le sourire est de retour. Après une traversée bitumineuse et heureusement courte de Soulan, nous enchaînons sur une série de lacets faiblement inclinés qui nous ramène sur la trace classique. Plus question de lever le pied. Nous poursuivons notre galop dans les derniers sentiers caillouteux et humides qui descendent jusqu'à Vignec. Bizarrement, alors que nous n'avons pas vu grand monde depuis Merlans, nous rattrapons une bonne huitaine de coureur en l'espace d'une centaine de mètres. Parmi eux, il y a Florian, le jeune coureur au coté duquel j'avais fini le GRP160 il y a deux ans ! Va t on remettre ça ? Je l'encourage à nous suivre mais alors que nous arrivons dans le village endormi, Romain fait vrombir le moteur et nous filons alors vers Vielle-Aure à plus de quatorze à l'heure. C'est grisant de débouler à cette allure après presque deux jours de course non-stop, mais du coup nous ne formerons pas de quatuor. Déso pas déso, on laisse tout le monde dans le rétro...
Nous bifurquons sur un petit chemin le long de la Neste d'Aure : c'est plutôt chouette comme final, le kilomètre terminale s'écoule ainsi au bord de l'eau. Nous enjambons la rivière par le petit pont à l'entrée du village et puis ça y est, l'arche n'attend plus que nous. C'est extra de finir avec des potes : bras dessus bras dessous nous lançons nos dernières foulées à l’assaut du tapis rouge.
Il est deux heure trente du matin, nous touchons au but après 44h28 de course, je bipes en 69ème position, et non, je ne ferais pas de blague à ce sujet.
Malgré l'heure tardive, il y a encore du monde lorsque nous franchissons la ligne. Je m'attendais à quelque chose d'un peu morne mais on me détrompe lourdement. Les potes sont là pour nous applaudir : L'indéboulonnable Fabien bien sur, mais aussi David, des copains à Romain et aussi des bénévoles... et puis surtout, le pompon :
Ma Yoyo !
Oui ! Cerise sur le spectacle, clou sur le gâteau, elle est venue me cueillir sur la ligne d'arrivée, et ça, ça me fait trop plaisir ! Je n'en escomptais pas tant. C'est qu'il doit en falloir de la motivation pour venir récupérer son copain tout puant au beau milieu de la nuit ! Laissez moi vous dire que je suis aux anges, j'ai encore gagné un moment mémorable à graver au fond de ma petite caboche.
Pfiou...
…
Je suis HS...
Le truc chouette, c'est qu'on est que samedi. Après avoir fait un bon dodo - bon, en réalité je ne réussirai qu'à dormir trois heure - On pourra profiter d'une belle journée de glande sur Vielle-Aure, à regarder les arrivées des autres courses en refaisant la notre, une binouze à la main.
(video de notre arrivée, encore merci à Fabien) : http://plemasson.fr/pictures/Running/GRP220/IMG_3335.m4v
Epilogue :
La satisfaction est grande. Je ne m’en rend pas compte tout de suite mais je viens quand même de battre mon record de distance, de dénivelé et de durée en course. Au surplus, mon chrono de touriste n'est pas si vilain – D'ailleurs en parlant de mode touriste, j'ai fais le calcul de mes différents temps de pause aux ravitos et oohhh putain... 400 minutes cumulées, grosso modo 6h30 d’arrêt ! Mais qu'est ce que j'ai branlé punaise ?!
Je suis aussi le premier surpris d’avoir réussi à boucler cette grosse balade, même dans sa version abrégée. Il faut croire que le repos sportif et l’inertie de l’entraînement auront été suffisant pour que ça passe. Le plus étonnant c’est que mentalement je n’avais pas la niaque pour aller jusqu’au bout. J’avais déjà profité des superbes paysages de Beysselance et de la Glère et j’estimais n’avoir rien à prouver, ni à moi, ni à personne. Les raisons de m’acharner étaient famélique et j’avais franchement prévu de stopper à la moindre alarme.
Coté physique, je termine sensiblement plus rôtis des jambes que sur le GRP160 ou que sur l’UT4M. Elles sont un peu lourdes, ça tire et ça pince de-ci de-là, surtout au niveau du genou droit et des chevilles. Cela dit je n’ai ni blocage ni douleur vive. Le reste de mon corps quand à lui se porte comme un charme. Aucune douleur musculaire au dos ou aux épaules, et je n’ai ni ampoule ni abrasion, les bandes de straps et la Nok m’ayant bien protégés.
Ce qui m'étonne le plus, c'est d'être passé aussi facilement entre les mailles du sommeil. J'étais mal reposé avant la course. Durant l'épreuve, j'ai bu très peu de boissons excitantes. J'ai siroté quelques cafés et à cause de mes maux d'estomac entre Pierrefitte et Estaing, je n'ai quasiment pas bu de coca. Je me suis allongé en tout et pour tout 37 minutes, ne somnolant réellement qu'à Orédon. Et malgré cela, hormis un coup de pompe éclaire dans le Néouvielle, à aucun moment je ne me suis retrouvé somnolant sur les chemins ou tombant de fatigue à un ravitaillement. La gestion du sommeil aura donc été sans objet sur cette épreuve, et suis presque déçu de n'avoir eu aucune hallucination.
Par contre cette dette en sommeil, je la paye cash encore aujourd'hui, dix jours après avoir bouclé ce GRP. Je suis bien crevé et c'est là qu'on se rend compte qu'un ultra ça n'a rien d'anodin pour l'organisme.
Bon sinon c'était top comme d'hab' hein : l'organisation est aux ptits oignons, les bénévoles sont en or, et l'ambiance est festive, surtout pour le buffet du dimanche midi. Le GRP on y est bien décidement.
Truc à retenir pour la prochaine fois :
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17 commentaires
Commentaire de Miche posté le 10-09-2017 à 21:41:38
Excellent ce récit. Avec plein de dessins et d'images rigolotes pour l'agrémenter. Et pour un gars qui n'a pas prévu d'aller au bout, tu t'en sors magnifiquement bien.
Commentaire de float4x4 posté le 11-09-2017 à 18:30:16
Oui, les hasards du trail, même avec un mental en carton, ça peut passer :D
Commentaire de stphane posté le 11-09-2017 à 07:43:18
Très beau récit, et surtout félicitation pour ta course.
Commentaire de --- posté le 11-09-2017 à 14:06:50
Super sympa ton récit !!! Tes illustrations m'ont bien fat marrer :-)
Belle course (et quasiment sans dormir) ; j'arrive 12h après toi : ça me donne l'impression de m'être trainé :-)
Commentaire de float4x4 posté le 11-09-2017 à 18:31:27
L'important c'est d'être arrivé au bout :) Du coup t'es passé à Mounicot de nuit ? C'était comment :D ?
Commentaire de --- posté le 12-09-2017 à 11:33:03
Très sympa !!! éclairé à la frontale & la lune : ça créait une belle atmosphère !!!
On se rendait moins compte de l'étendu du travail à réaliser :-)
Par contre, j'ai bien galéré pour monter au refuge de la Glère avec ma e+lite petzl de secours (soucis de batterie sur ma reactik...) !!
Commentaire de Bruno Kestemont posté le 11-09-2017 à 15:41:22
Merci pour ce récit instructif. Pas certain d'avoir envie de faire un trail aussi long ...
Commentaire de TomTrailRunner posté le 11-09-2017 à 17:51:49
Merci pour ce récit : finalement, ça passe pas si mal :)
Tom_qques_dizaines_de_places_derrière
Commentaire de float4x4 posté le 11-09-2017 à 18:32:37
Oui j'ai vu et lu ta course, à une heure prêt :) Si ça se trouve, avec les 35 bornes de plus, on se serait rejoint sur la fin !
Commentaire de Michel bonnet posté le 11-09-2017 à 19:12:13
En plus de d'une course formidable tu as une plume que beaucoup peuvent enviée.
Bravo à toi
Si tu veux ta photo grand format à la montée du Pic va sur pédibuspyrénées et je te l'enverrai
Commentaire de float4x4 posté le 12-09-2017 à 18:49:26
Merci :), d'ailleurs tes photos sont un régal aussi, notamment celle de la Glère. Je t'enverrais un mail pour la photo
Commentaire de Michel bonnet posté le 13-09-2017 à 15:48:48
Pour ceux qui ont souffert dans le 220 et 120 je vous les offre
https://audiogrp.blogspot.fr/
Commentaire de lolod posté le 11-09-2017 à 20:46:43
Merci pour ce chouette récit.
Commentaire de Bert75 posté le 11-09-2017 à 20:56:25
Un grand merci pour ton long et passionnant récit. Je retiens l'idée de l'élasto sur les épaules.
Bonne fin de récup.
Commentaire de laulau posté le 13-09-2017 à 15:32:32
Un super récit pour une course très bien réussie, un grand bravo à toi !
Commentaire de philou85 posté le 18-09-2017 à 09:03:41
Bravo pour ta course et ce récit super bien écrit et captivant jusqu'au bout.
Commentaire de Pat85 posté le 19-10-2017 à 22:48:50
Une superbe aventure et un récit extraordinaire. Bravo pour les illustrations !!!
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