L'auteur : Toinou_R
La course : SaintéLyon
Date : 27/11/2021
Lieu : St étienne (Loire)
Affichage : 1605 vues
Distance : 78km
Objectif : Terminer
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Si on m'avait dit en 2017, lorsque je me suis mis au running, que je ferais un jour la SaintéLyon, je ne l'aurais pas cru à l'époque !
Après 3 premières années de montée en puissance progressive en course à pied (ayant couru des formats de 35km max jusqu'alors), arrivent 2 évènements dans ma vie qui vont drastiquement freiner ma pratique : le covid et mon 2e enfant ! Je sors alors de l'année 2020 avec une petite frustration et un désir profond de m'y remettre.
Sur un défi euphorique lié aux réouvertures des courses, je décide de rejoindre un pote, Kev, sur la Montagn'hard (format 50km 4000D+). J'ai alors 2 mois pour m'entraîner... et c'est trop peu compte tenu de ma caisse et de mon expérience. Résultat, j'abandonne avant la mi-course sur ce circuit magnifique mais exigent.
Bref, la frustration ne passe pas vraiment en cette mi 2021 et je switche sur des objectifs progressifs plus réfléchis : Trail de la vigne en rose (21km 700D+), 20km de Paris (ma course fétiche), Nuit des Cabornes (21km 1000 D+) puis, pour parachever mon entraînement -dans l'idée de faire la SaintéLyon et exorciser mon abandon sur la Montagn'hard- un we choc LUT by night (18km 600D+) et LUT (37km 1400 D+). Tous les voyants sont au vert... sauf sur le LUT où au km 32, dans une descente d'escaliers, ma cheville vrille et me vaut une entorse bénigne.
Pour autant, mon envie de participer à la SaintéLyon ne faiblit pas du tout. A 3 semaines de l'épreuve, je me dis que tout est possible encore. Séances de kiné, repos (sportivement parlant), exercices de renforcement, quelques runs progressifs sur différents terrains : je mets toutes les chances de mon côté pour prendre le départ de la course malgré les inquiétudes des proches et collègues. D'autant que la vie à 4 ne permet pas d'éviter une belle dette de sommeil à l'approche de la course !
Un dernier entraînement sur la Sarra le mercredi précédent la course instille un gros doute en moi : la cheville réagit mal aux cailloux cachés sous le tapis de feuille et l'entorse est bien présente malgré les bonnes sensations lors des séances de kiné. Je me dis alors que ça va être chaud de finir. J'entends encore mon kiné me dire "bon, si c'est douloureux, vous arrêtez. Evidemment, s'il reste 5kil, vous finissez la course". Je savais déjà au fond de moi que la décision d'arrêter serait très difficile à prendre en cas de douleur... Mais je pensais que ne pas faire la course serait encore plus frustrant.
Minuit 10 environ, me voici donc au départ de la 4e vague de la Doyenne, sous la neige, le 27 novembre 2021. Je suis hyper serein et ne stresse pas du tout. Je me dis que si la cheville doit lâcher, et bien on avisera ! Mais de toute façon, je ne peux plus reculer.
Je pars avec un ami dont je sais pertinemment qu'il est bien meilleur que moi et que notre temps de course commun ne durera pas longtemps. On décide de partir sur un rythme de 10km/h pour ne pas tirer sur les muscles et s'économiser pour la suite de course. On ne sait pratiquement rien de ces grands formats mais ce qu'on sait c'est que les choix faits dans la 1ere partie de course seront payés cash dans la 2nde.
Au premier ravito de St Christo, je découvre l'organisation de la SaintéLyon : les points froids, les points chauds, le solide, le liquide. Je prends mes marques. Je découvre les bienfaits d'une soupe chaude aux ravitos de nuit. Je suis bien. Etant arrivé avant moi, mon pote m'attend quelques minutes. On vient de subir les premières difficultés (verglas surtout) et je sens bien qu'il est plus rapide que moi et que je ne le suivrai pas longtemps. De fait, au km 20 (2km après le 1er ravito), je ne le reverrai plus. Ca va être un peu plus compliqué maintenant car je suis désormais "seul" dans cette nuit glacée.
Je dis glacée mais la température n'aura jamais été un problème. Mon vrai souci, c'est le verglas qui s'obstine à vouloir me faire douter de mes pas et surtout de ma cheville. Je suis très lent en descente sur le 2e tronçon et une partie du 3e. Et surtout je ne me relâche jamais de peur que mon entorse ne me rappelle à l'ordre, ce qu'elle va faire 2 fois lors de 2 twists du pied droit. Mais sans jamais retrouver l'angle de l'entorse et donc la douleur qui me ferait abandonner.
J'égrène les km dans cette alternance de boue, verglas, neige. La campagne est magnifique malgré le peu de visibilité. C'est Noël avant l'heure dans le Pilat. Les supporters sont présents, tout au long du parcours. Mention spéciale aux 2 bretonnes qui nous ont suivi du départ jusqu'à la moitié du parcours au moins. Je suis bien. Au ravito de Sainte Catherine, je donne des nouvelles à ma chère et tendre que j'imagine bien au chaud dans notre lit : "km32, so far so good". Il est 4h30. Je découvre les bienfaits du thé chaud sucré qui vient réchauffer l'eau glacée des gourdes et compléter l'apport de mes gels. Je mange salé aussi et j'ai l'impression de me régaler, de prendre mon pied.
Je repars direction Saint Genou. Même galère, verglas, verglas, verglas. Aux abords du km40, on sent que le moral ambiant des troupes n'est pas vraiment au beau fixe. Dans le noir, le froid, la glace, on se dit tous qu'on a encore la moitié à faire et je pense qu'on est beaucoup à se demander si on aura le jus pour aller au bout. On passe le point culminant sans que je m'en rende vraiment compte et je me dis que c'est dommage de ne pas avoir profité de la vue depuis le Signal. Je n'ai pas bien utilisé ma frontale et elle me lâche. Je sors la 2e en me disant qu'elle tiendra bien jusqu'au lever du soleil. J'arrive au ravito suivant. Petit SMS: "km45. Not bad !" Il est 06h34. Retour instantané : "Ici aussi ! Reveil à l'instant de pucette.Bon courage pour la suite". En parallèle de ma course, ma compagne entame son marathon à elle : la matinée avec les 2 marmousets !! Je remplis les gourdes de thé avec le même plaisir, je me remplis la panse et je repars après quelques étirements.
Let's go, inutile de trop s'attarder. Prochaine étape Soucieu en Jarrest. On descend désormais. Je sais qu'à partir de ce moment, le profil va être plus clément avec ma cheville. Je me convaincs aussi que si elle a tenu jusqu'à maintenant, elle tiendra jusqu'au bout. J'arrive à Soucieu. Petit SMS : "km56 ok. Reste 23". Il est 07h57. Le soleil s'est levé. Avec lui, les langues se sont déliées, on sent que le moral des coureurs est remonté. On m'avait prévenu que la chaleur du gymnase de Soucieu pouvait nous retenir indéfiniment à ce stade de la course. Je fais donc attention de ne pas m'y attarder. Je ne ressens pas le besoin d'y passer ma vie. C'est la première fois de la course que je vois des coureurs en réelle difficulté, posés au sol ou sur des bancs, en proie au doute. Je comprends bien ce sentiment car à ce moment de la course, c'est le mental qui prend le relais sur le corps.
Quand je pense que j'ai fait le tronçon Ste Catherine-Soucieu de jour, en reconnaissance Asics, en 2h20 et que là, après analyse de mes stats de la SaintéLyon, je l'ai fait en plus de 4h40... ça donne une idée des différences de condition...
Je sors d'ailleurs de ce ravito avec des douleurs intenses aux quadri. Je comprends que j'ai été trop obnubilé par ma cheville cette nuit et que mes cuisses ont trop compensé sur les 35 km de verglas. Résultat, l'avant-haut des cuisses me tire énormément. D'un côté, je me dis qu'a priori, ça ne peut pas partir en crampe (n'ayant jamais ressenti de crampe à cet endroit de la cuisse) et d'un autre côté, je me dis aussi que ça va être chaud de finir car ça pique comme jamais ça n'a piqué... La neige a fait place à la pluie mais une pluie fine qui ne dérange pas. Je me dis qu'on aura eu de la chance côté météo tout de même. Il me semble que le pire aurait été qu'il "drache" (comme on dit chez moi) tout du long...
J'arrive à Chaponost à 9h04. Mes cuisses vivent l'enfer. Petit SMS : "14km. J'arrive vers 10h30-10h45". Le ravito annonce 14km restants mais en fait, il en reste 12 d'après ma montre. Sur ce dernier tronçon, les descentes sont un calvaire pour le corps mais un plaisir pour l'esprit, les montées un plaisir pour le corps et un calvaire pour l'esprit. Je me surprends à sangloter quelque fois sur ce tronçon, le corps ayant sans doute atteint ses proches limites. Je me demande comment je vais gérer émotionnellement l'arrivée... A 5km de la fin, ma cheville "lâche". Elle finit par se rappeler à mon bon souvenir. Normal. Mais à ce moment là, plus rien ne peut m'arrêter (et la phrase de mon kiné raisonne avec amusement dans ma tête à ce moment là, comme si ses paroles étaient prémonitoires). Je suis heureux de découvrir qu'un décompte des 5 derniers km a été placé sur le parcours.
Je finis la course dans la magnifique Halle Tony Garnier. J'ai adoré redescendre à Lyon et me rapprocher inexorablement de cette arrivée minérale. Mission complete. Il est 10h45. Je suis arrivé au terme d'une incroyable expérience de 10h30. Avant mon entorse à la cheville, j'avais tablé sur 10h de course (si les conditions météo n'étaient pas trop difficiles). Ravi de l'accomplissement. Heureux de retrouver ma compagne et mes 2 petits monstres ainsi que des copains venus pour l'occasion. A ma grande surprise, pas d'émotion incontrôlée sur la ligne d'arrivée, à croire que j'avais tout lâché en course. Je fais l'erreur de vouloir m'asseoir dans les gradins mais je comprends vite que ça va être un mouvement compliqué ces prochains jours. J'apprends que mon pote avec qui j'ai démarré la course, et qui a attendu mon arrivée, a fini en 9h... Machine de guerre...
Je repars de la Halle sans trop tarder car la vie continue et il faut rentrer pour que les gloutons puissent manger ! La vie continue mais n'est plus vraiment la même. Je repars avec une superbe expérience dans la tête et un sentiment exagéré du devoir accompli.
Vivement la SaintéLyon 2022 !
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1 commentaire
Commentaire de Arclusaz posté le 04-12-2021 à 18:49:19
Bravo, sacrée perf avec une cheville en mauvais état ! n'hésite pas à venir un peu courir avec nous (le groupe kikourou "off à lyon"), on ne te fera peut être pas faire des progrès en CAP mais en géographie surement (la STL dans le Pilat, non mais franchement !!!!).
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