Récit de la course : SaintéLyon 2023, par DavidSMFC

L'auteur : DavidSMFC

La course : SaintéLyon

Date : 2/12/2023

Lieu : St étienne (Loire)

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Distance : 78km

Objectif : Pas d'objectif

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J'avais dit que je ne la referais pas !

Récit illustré disponible sur mon blog : http://www.mesexperiencessportives.com/2023/12/02-03/12/2023-asics-saintelyon-2023.html

 

 

C'est après une semaine de rhume/repos/récupération que je m'attaque à ce récit de ma deuxième SaintéLyon. La première, il y a 2 ans, s'était parfaitement déroulée même si ça n'avait pas pour autant été une promenade de santé. Je m'étais dit que je ne la referais pas afin de rester sur cette très bonne note mais finalement, me revoilà embarqué dans ces fameux 78 kilomètres majoritairement nocturnes pour relier Saint-Etienne et Lyon !

Nous sommes incapables de nous souvenir de qui est vraiment responsable du lancement de cette aventure, le fait est que nous nous sommes inscrits à 4 pour essayer de relever le défi ensemble, 4 gars du club : Martin, Arnaud, Laurent et moi. C'est Arnaud qui a fait la préparation la plus assidue, démarrée tôt en respectant scrupuleusement le plan proposé par le coach. Laurent s'y est ensuite mis puis j'ai rejoint Arnaud sur certaines de ses séances. Martin en a fait un peu moins mais il faut dire qu'il avait encore un semi-marathon moins d'une semaine avant la SaintéLyon !

Nous avons aussi fait quelques grosses sorties de préparation avec le Trail du Soldat de la Marne où Martin, Arnaud et moi étions engagés sur le 30km en octobre, une sortie sur le parcours du MaxiCross de Bouffémont et Tourn'en Nocturne avec Laurent et Arnaud. Quelques séances de côtes, quelques grosses séances sur piste dont un sacré 3x4000, du vélo et sinon, la routine... Mais j'ai aussi été malade pendant près de 3 semaines 1 mois avant la course et encore enrhumé la semaine précédant la course, pas l'idéal pour arriver en super forme le jour J.

Je reste pour autant assez confiant, Martin est très solide, Arnaud et Laurent se sont bien préparés, je l'ai déjà faite il y a 2 ans, ça va le faire et ça va être une sacrée aventure ! En plus, on a envisagé le pire, le fait de prendre la pluie pendant toute la course et finalement, ce sera sec ! Pas de précipitations prévues pendant la nuit et le dimanche non plus ! En revanche, des températures entre -5 et -10°C sont prévues pendant la nuit sur les hauteurs des Monts du Lyonnais, ça risque d'être glacial ! De la neige prévue le samedi matin pourrait bien blanchir le parcours, comme il y a 2 ans où je m'étais régalé à courir sur et sous la neige.

 
Samedi 2 décembre 2023

Comme en 2021, je travaille le samedi matin, je n'ai pas vraiment le choix... Par contre, cette fois, je ne dispute pas une intense rencontre interclub de Badminton la veille au soir, je ne fais qu'assister à la rencontre de mon équipe contre Lognes. Nous nous retrouvons tous les 4 à la Gare de Torcy sur les coups de 13h15 pour prendre le TGV à Marne-la-Vallée peu après 14h. Car nous avons pour objectif de passer la course ensemble mais nous passons aussi tout le reste du week-end en groupe, ce qui est top pour passer le temps et vivre l'ensemble collectivement à 100% !

Tout se déroule parfaitement, nous arrivons à l'heure à la Gare de Lyon, prenons le Métro puis marchons jusqu'à la Halle Tony Garnier où nous récupérons nos tickets pour la navette et nos dossards ! Bonne nouvelle, nos numéros se suivent, ce qui facilite le suivi de nos proches, de 5747 à 5750... Il faut ensuite traverser tout le salon du Running pour récupérer notre lot de participant, une paire de chaussettes bien sympa !

Ensuite, direction un parking à 800 mètres de là pour emprunter la navette qui nous emmène à Saint-Etienne ! Pendant le trajet, je me rends compte que les numéros de dossard de mes 3 compagnons d'aventure sont bien actifs... mais pas le mien ! Arf, ça commence bien ! Le 5750 est introuvable et j'ai toujours un numéro bidon à 8 chiffres associé à mon nom sur l'application LiveTrail.

Après une heure de route, nous arrivons au Parc des Expositions de Saint-Etienne, peu avant 19h. Une fois arrivés dans la grande salle où nous allons pouvoir nous poser, ma priorité est de trouver une solution pour mon problème de dossard. Je file en direction de l'arrivée des concurrents de la LyonSaintéLyon qui en finissent de l'aller de leur périple et je trouve un membre du staff qui règle le problème... ça y est, mon dossard est bien activé et à mon nom, je serai bien classé et on pourra suivre ma progression pendant la course !

Démarre une longue attente où nous essayons de nous reposer un peu, de nous poser tout du moins même si la salle se remplit vite... nous faisons ensuite la queue pour manger puisque nous avons réservé un repas pour la Pasta Party. La file serpente au milieu des affaires et ne cesse de s'agrandir. Nous n'attendons finalement pas trop longtemps avant de pouvoir être servis et de prendre notre dernier repas avant la course, peu après 20h. Un repas important !

Une fois de retour à notre place, le coin s'est bien peuplé et nous sommes limités en espace mais ça reste suffisant pour s'allonger tranquillement. De toute façon, je ne dormirai pas. Juste derrière moi, deux gars parlent de courses que je connais bien donc je finis par me redresser et parler avec eux. Puis, l'heure avance, il est temps de commencer à se préparer tranquillement car il nous faudra être prêts de bonne heure si nous voulons partir dans la vague 2 (la vague 1 est réservée aux élites, coureurs de la LSTL et à ceux du SAS performance dans lequel j'étais en 2021 puis il y a 4 autres vagues pour le reste des coureurs, chaque vague se constituant d'environ 1500 concurrents sur près de 7000 partants).

Pour la tenue, j'ai fait le choix de prendre exactement le même type d'affaires qu'il y a 2 ans car les conditions sont assez semblables. On ne devrait pas avoir de neige qui tombe pendant la course mais il devrait faire un peu plus froid. Je pars donc avec mes chaussures de Trail Evadict Race Ultra, une simple paire de chaussettes, un short (la base !! La SaintéLyon, c'est en short ou rien ! Enfin, pour moi, vu que nous sommes très très peu à partir en short sans collant !), un tee-shirt à manches courtes, un tee-shirt polaire à manches longues et mon sweat fin mais chaud Kikouroù, un buff au cou, une paire de gants, un bonnet, ma lampe frontale GoLum et mon sac !

Dans mon sac, je prends pas mal de choses qui ne me serviront pas (un pantalon quand même, au cas où, ma veste de pluie imperméable, un tee-shirt de rechange, une paire de chaussettes, la couverture de survie, une lampe de secours) mais aussi une deuxième paire de gants, une pile de rechange pour la lampe, du ravitaillement (1 compote, des pâtes de fruit, des pâtes d'amande et 1 litre d'eau) ainsi que mon gobelet pliable très pratique et mon portable en mode avion.

Vers 22h, tout le monde commence à s'agiter, ça bouchonne de partout... On parvient tant bien que mal à atteindre les camions où nous transmettons nos sacs pour qu'ils soient ramenés à Lyon, passer une dernière fois aux toilettes après avoir fait la queue un petit moment (mais ça reste raisonnable pour les toilettes extérieures) et aller nous positionner à proximité des portes d'accès aux SAS dont l'ouverture est prévue vers 22h45. Des milliers de personnes viennent s'entasser ici, debout, en attendant que les portes soient ouvertes. C'est finalement après 23h que nous pouvons enfin sortir pour nous placer vers le départ et là, nous sommes tassés comme jamais, écrasés par la masse. Sortir du Parc des Expositions est déjà une sacrée épreuve ! Nous survivons et parvenons même à nous retrouver tous les 4 ensemble, au coeur de ce qui devrait bel et bien être la deuxième vague dont le départ est prévu à 23h45, 15 minutes après la vague 1.

Bon, ça aussi, il ne fallait pas trop l'espérer, que le départ soit donné à l'heure. C'était pourtant le cas il y a 2 ans mais cette année, il faut être patient. En effet, un très chouette spectacle de drones est donné avant la course, comme introduction avant le départ sauf qu'au lieu de se dérouler à 23h15 comme prévu, il démarre avec bien du retard, ce qui retarde de près de 15 minutes le départ de la première vague. C'est ensuite à nous de nous rapprocher de l'arche de départ et après une franche réaction lorsque le speaker annonce que notre départ sera 10 minutes plus tard, on nous l'avance heureusement un peu. Il commence à faire bien froid et surtout, on a hâte de prendre ce fameux départ, depuis le temps que nous sommes arrivés à Saint-Etienne !
   

Du départ à Saint-Christo-en-Jarez (km 19)

C'est à 23h56 que Laurent, Martin, Arnaud et moi franchissons l'arche de départ de la SaintéLyon 2023 ! Et alors que nous ne pouvions que marcher jusqu'à passer sous l'arche, nous pouvons enfin commencer à trottiner mais pas plus car c'est bien bouché devant nous. C'est alors que va débuter la partie de slalom entre tous les concurrents partis autour de nous mais qui démarrent doucement. Le plus dur, c'est de réussir à rester tous les 4 ensemble dans cet énorme peloton très dense.

Cette année, petite nouveauté, un classement est fait sur les 1,4 premiers kilomètres de la course. Evidemment, étant un coureur qui aime la vitesse (il se peut que j'ai couru mon premier 800m en salle il y a seulement une semaine, à Reims), on m'a immédiatement identifié sur ce défi mais le fait est qu'en partant en milieu de vague, c'est absolument injouable. Seuls ceux qui s'élancent au début d'une vague peuvent véritablement partir vite. Nous, c'est très laborieux pendant 1 kilomètre puis nous réussissons à mettre plus de rythme en doublant du monde sur les 3-4 kilomètres suivants mais en nous déportant un coup sur la droite, un coup à gauche...

Nous passons donc ce fameux kilomètre BV Sport (puisqu'il se termine devant l'enseigne de ce sponsor de l'épreuve) en 7 minutes et 34 secondes (pour 1,4 kilomètres), 1352ème sur 6622 à ce pointage. Avec les relais, les abandons, les éventuels soucis de pointages et autres, ces données sont très symboliques mais donnent un aperçu global du niveau et du nombre de concurrents engagés. Nous sommes pour le moment dans le premier quart des participants, du coup.

Après quelques kilomètres de plat et de bitume, nous arrivons sur les premiers chemins du parcours et dans les premières difficultés de la course. Tout va bien en ce début de course, nous sommes plutôt bien groupés même si nous devons parfois crier nos prénoms pour nous assurer que tout le monde est bien là tant le peloton est dense. C'est assez impressionnant de voir toutes ces frontales qui se suivent dès qu'on se retourne. C'est encore très très groupé même si cela commence à s'étirer gentiment. On avance pas mal, on a du mal à vraiment marcher dans les montées alors que c'est notre stratégie car la course est vraiment longue... Je force les gars à ne pas s'emballer, surtout Martin bien qu'il se modère déjà beaucoup.

Il se peut qu'à un moment, ce soit moi qui abuse à relancer alors que la montée n'est pas vraiment terminée, alors que ça ne bascule pas vraiment, en prétextant que c'est parce que les autres ont trop tendance à attaquer les montées en courant... Bon, il va vite falloir qu'on calme ça parce que sinon, on risque vraiment de se cramer les uns et les autres. L'avantage, c'est que les autres comptent sur moi pour "dicter" le rythme donc si je dis qu'on marche, on marche et ça m'arrange bien même si tout va très bien pour l'instant.

Seul point noir de ce début de course, j'ai vite envie de faire pipi sauf que je ne veux pas qu'on s'arrête trop tôt car sinon, on va galérer à doubler énormément de concurrents vu comme c'est encore hyper regroupé. Un arrêt de 30 secondes et ce sont des dizaines et des dizaines de places de perdues, presque des centaines. On retarde donc cette première pause "besoins naturels" qui finira par être bien nécessaire. Sauf que ce sera très loin d'être la dernière... Au moins 6 ou 7 pendant la totalité de la course, pfff !

Autrement, nous effectuons vraiment un très bon début de course. Laurent ressent très tôt une certaine crispation au niveau de son mollet, après à peine 10 kilomètres de course, rien d'alarmant mais ça tire... Martin ressent lui quelques difficultés respiratoires après avoir passé quelques jours difficiles, malade, cette semaine. Rien à signaler pour Arnaud et moi, on commence à bien ressentir le froid mais nous sommes bien couverts, tout va bien.

Nous atteignons le premier ravitaillement de la course après 19 kilomètres et 646 mètres de dénivelé positif en 1 heure 58 minutes et 05 secondes de course, je suis 1161ème sur 6691 concurrents pointés ici, à Saint-Christo-en-Jarez. Un début de course très réussi, une bonne gestion de ce premier quart de parcours, sans affolement. On profite bien du ravitaillement où je mange surtout du salé (du saucisson et du fromage) et je bois un thé bien chaud (un peu trop même, je m'y brûle un peu la langue). Martin nous fait part de ses doutes sur sa capacité à aller au bout aujourd'hui, Laurent nous exprime aussi ses inquiétudes vis-à-vis de son mollet mais nous ne traînons pas pour repartir, motivés, prêts à attaquer ce qui est probablement la portion la plus dure du parcours.
 

De Saint-Christo à Sainte-Catherine (km 33,7)

Aïe aïe aïe, c'est ici qu'arrivent les premiers problèmes... Après avoir beaucoup transpiré des mains sur les premiers kilomètres où nous courions en plein dans la masse et où j'ai gardé mes gants, nous attaquons désormais la zone la plus froide du parcours, où nous allons atteindre des températures ressenties de -10°C et là, j'ai les mains congelées ! J'essaie de me réchauffer un peu, en vain. Heureusement, mes camarades peuvent me choper ma deuxième paire de gants dans mon sac, que je mets à la place de la première. Ce changement de gants me sauve clairement la course pour l'instant car sans ça, je pense que j'aurais beaucoup souffert.

Ouf, les sensations reviennent petit à petit. On gère cette partie de course difficile où on alterne montées et descentes relativement glissantes même si le pire reste à venir à ce niveau. Nous sommes dans une zone très enneigée, sur un plateau, où on ressent bien le froid. Malheureusement, on ne profite pas de la vue, en pleine nuit, mais c'est tout blanc autour de nous !

C'est la partie de la course où Martin doute le plus, se sentant vraiment à la limite tandis que Laurent est à deux doigts de la crampe au mollet sur un mouvement. Les glissades s'enchaînent, quelques chutes aussi et personne ou presque n'y échappe, moi y compris. Ce n'est clairement pas le moment de se faire mal quelque part, il reste bien trop à parcourir. On commence à serrer les dents même si la forme est encore très correcte pour moi. Je ne doute pas mais je sens bien que la course va être très longue, probablement plus que prévue. Notre seul vrai objectif est de finir mais nous avions plusieurs objectifs de temps en tête si possible : moins de 10 heures voire moins de 9 heures en cas de vraie bonne forme ! J'ai terminé la course en 8h48 il y a 2 ans mais les conditions étaient bien différentes.

Pas grand chose d'autre à signaler sur cette portion, c'est un peu flou dans ma tête... C'est long, c'est glissant, c'est pas facile, il fait froid mais on avance et plutôt bien. Arnaud est archi solide, plus en difficulté dès que ça descend, on doit parfois l'attendre un peu mais à aucun moment je ne douterai de sa capacité à rallier l'arrivée ! Martin m'inquiète davantage mais il tient bon, il relance tout le temps et au final, il est souvent devant, costaud ! Laurent, c'est aussi un guerrier, il ira au bout sauf vrai pépin physique. Allez, la mission, c'est d'y arriver tous les 4 !

On arrive à Sainte-Catherine peu avant 4h du matin, après 3 heures 54 minutes et 59 secondes de course pour 33,7 kilomètres et 1137 mètres de dénivelé positif parcourus. Je suis 1279ème sur 6578 coureurs pointés.

Il y a une grosse densité de concurrents au ravitaillement à cette heure-ci et ça caille sévèrement, il ne va pas falloir traîner. On se ravitaille bien pour autant, toujours en salé de mémoire et un nouveau thé ainsi qu'un très agréable verre de sirop de citron, ça change, j'adore ! On accuse un peu le coup car on subit bien le froid depuis quelques kilomètres et ici y compris mais on ne traîne pas et dès que tout le monde est prêt, on repart en essayant de calculer le moins possible les cars bien chauffés qui sont là, au bord du chemin qu'on emprunte pour ressortir du ravitaillement !
  

De Sainte-Catherine à Saint-Genou (km 47,1)

Le vrai calvaire sur cette SaintéLyon, c'est sur toute cette partie qu'on va vraiment le vivre... C'est sur cette portion qu'on va le plus ralentir, contraints par le terrain ! Le moral est encore bon mais progresser devient de plus en plus pénible avec la fatigue qui commence à arriver à force de se concentrer comme rarement pour ne pas glisser sur tous les passages verglassés. Les descentes sont de vraies patinoires et ça tombe dans tous les sens. C'est assez impressionnant. On entend le bruit des impacts des chutes de partout, ça glisse devant, ça glisse à côté, ça glisse derrière !

Martin et moi faisons quelques chutes et glissades, Laurent nous fait de belles figures en faisant l'exploit de ne pas tomber cette fois tandis qu'Arnaud est un peu à l'arrière et se paie quelques gamelles, semble-t-il. On continue de s'appeler régulièrement pour s'assurer que nous sommes toujours tous les 4 là. J'ai régulièrement les deux bas de pantalon jaunes de Laurent en ligne de mire, un repère assez facile. Martin est en gris et est assez repérable avec son gabarit également. On attend parfois Arnaud que l'on voit revenir avec son buff vert bien visible aussi tandis que je suis vêtu de rouge et un des rares coureurs en short.

Je retiens principalement deux images de ce passage. D'abord, ce moment où on passe tous sur un chemin improvisé en hauteur sur la droite où on court dans la neige, ça ne glisse pas. A un moment, Martin décide de revenir sur le chemin normal sur la gauche, accompagné de trois autres coureurs et je les vois tomber tous les 4 en même temps. Je n'hésite ainsi pas longtemps à finalement rester à droite et ne pas prendre le risque d'une nouvelle gamelle. Ensuite, cet autre passage où pour la deuxième fois, on prend franchement sur le côté pour courir dans une portion pleine de neige et éviter ce qui est véritablement devenu une patinoire à force de passages des concurrents qui sont devant nous et qui ne va cesser d'être de plus en plus glissant au fil des heures vu le froid persistant.

Cependant, à chaque fois, il faut bel et bien revenir sur le chemin au bout d'un moment et redoubler de vigilance pour ne pas chuter. Il y a bien quelques coureurs qui ont chaussé des crampons et qui semblent plus à l'aise. J'ai également des mini-crampons de ce style... que j'ai laissés chez moi ! Je ne suis pour autant pas certain que je les aurais mis si je les avais pris avec la contrainte de les retirer à chaque fois que nous arrivons sur une surface plus dure. Je préfère autant aller moins vite mais me concentrer sur mes appuis pour éviter de tomber lourdement !

Bon, par contre, on n'avance plus beaucoup dans ces descentes là, on va encore moins vite qu'en montée ! On relance dès qu'on quitte le verglas mais c'est souvent de courte durée et dès que ça monte, j'exige que l'on marche et je retarde de plus en plus les relances. Du coup, on ne court plus énormément. En plus, boire du thé aux ravitos me donne à chaque fois envie de faire pipi donc on fait encore une pause... Que le chemin est long ! On passe la mi-course, on se dirige gentiment vers la partie du parcours la plus facile sur le papier, la plus descendante, d'autant qu'il n'y aura plus de neige sur les 30 derniers kilomètres qui mènent vers Lyon.

Heureusement, Martin va mieux. Laurent l'accompagne solidement. On va aller au bout de ce chantier ! La route est encore longue mais il n'y a pas de raison. On oublie tout objectif de temps, le seul but est de terminer, ensemble. Dans une descente un peu plus anodine, j'évite de peu une trace verglassée à un endroit où il y a davantage de pierres au sol et où une chute pourrait faire plus de dégâts... et qu'entends-je ? Une grosse gamelle derrière moi, c'est Arnaud ! Je remonte pour m'assurer que tout va bien, il a fait une belle chute ! Mais on repart sans douleur, ouf !

On finit par arriver au Camp, à Saint-Genou, après 6 heures et 46 secondes d'effort pour 47,1 kilomètres et 1581 mètres de dénivelé positif. L'allure a bien chuté mais c'est logique vu l'état du terrain qui a bien calmé nos ardeurs et nos envies de courir. Je suis 1349ème sur 6131.

De mémoire, c'est le dernier ravitaillement où je prends un thé. Je bois aussi du sirop de citron mais il est sacrément moins bon qu'à Sainte-Catherine. Ce ravito est le plus décevant, je n'y prends vraiment pas de plaisir. J'ai ma poche à eau qui est gelée depuis le début de la course donc je ne peux pas boire entre les ravitaillements et là, je ne savoure pas ce que je bois. Vite, partons d'ici ! Il nous reste 31 kilomètres à parcourir, le plus dur est clairement fait même si je sais que la fin de course va être difficile.

Depuis plusieurs heures, Martin nous fait comprendre qu'il risque de bien nous ralentir sur la fin de course, je m'étais fait à cette idée sans problème mais au final, le bougre est très costaud et c'est probablement moi qui vais ralentir la troupe désormais car leurs relances m'épuisent. C'est hyper motivant d'avancer ensemble tous les 4 mais je n'ai pas la même manière de gérer ma course, j'ai tendance à marcher plus longtemps pour relancer avec plus de détermination alors que là, je subis davantage les relances et me retrouve à la peine, tout le temps dans le sillage de mes camarades d'aventure. 
 

De Saint-Genou à Soucieu-en-Jarrest (km 58,5)

Il reste 31 kilomètres ! Très peu de temps après le ravitaillement, ma lampe frontale clignote, il est temps de changer la pile. Comme pour les gants, je profite de la présence de mes camarades de course pour que Martin chope ma pile de rechange que je mets à la place de celle qui est épuisée. Nul doute que ça tiendra jusqu'à la fin de la nuit, très largement. C'est aussi là un gros avantage d'être ensemble sur cette course, on n'a pas besoin de retirer nos sacs ou de demander de l'aide à des inconnus, on se file très volontiers un coup de main dès que nécessaire s'il y a quelque chose à prendre ou à mettre dans le sac de l'un de nous.

Ce n'est pas la portion de la course dont je me souviens le mieux, c'est un passage assez roulant mais encore majoritairement sur des chemins donc c'est assez agréable, pas trop glissant car on a quitté la partie vraiment enneigée et verglassée du parcours. En revanche, on arrive au lever du jour donc c'est assez joli mais le froid se fait encore bien ressentir pour l'instant.

Je sens que je fatigue de plus en plus, les kilomètres défilent lentement, c'est long. Je sais pourquoi j'ai décidé de me concentrer sur des distances plus courtes pour mettre les longues distances de côté et cette parenthèse SaintéLyon me confirme mon choix. Oui, j'ai envie de montagne, de défis, d'aventures mais courir pendant des heures et des heures, des dizaines et des dizaines de kilomètres dans des conditions telles que celles que l'on a aujourd'hui, c'est vraiment éprouvant et pas ce qui m'attire actuellement. Et pourtant, j'adore courir la nuit mais je l'ai moins apprécié ce coup-ci.

Pour la tenue, je pense avoir fait les bons choix, je ne regrette pas du tout d'être en short, au contraire ! En revanche, le froid m'irrite le nez et je n'ai qu'une hâte, qu'on en finisse pour nous mettre au chaud. Ces conditions glaciales nous ont vraiment mis à rude épreuve cette année ! En fin de course, je commence à tousser un peu, à ressentir mon rhume qui m'avait laissé tranquille jusque-là.

Je ne vais pas épiloguer sur ce passage de la course qui n'est pas des plus joyeux mais j'en profite pour remercier tous les bénévoles et accompagnateurs présents sur le parcours pendant toute la nuit, à nous encourager, à mettre parfois beaucoup d'ambiance, au milieu de nul part. Des instants magiques, tellement riches. Ce n'est pas grand chose sur les 78 kilomètres du parcours mais ça suffit pour nous réchauffer le coeur quand on en a besoin.

Allez, on continue d'avancer vers notre but et désormais, il n'y a plus beaucoup de doutes sur le fait que nous allons aller au bout ! Le chemin restant à parcourir est encore long mais ce n'est pas grand chose par rapport à ce que nous avons déjà fait. Si nous étions en pleine forme, nous pourrions même encore espérer finir en moins de 10 heures mais j'avoue ne pas avoir du tout la motivation de forcer un peu pour atteindre un objectif chronométrique. Je subis trop la course pour accepter de me faire mal, finir sera déjà bien suffisant dans ces conditions. En plus, je suis dans le dur mais Arnaud commence aussi à accuser le coup, on se traîne un peu tous les deux derrière avec Martin et Laurent en promenade devant nous !

On arrive à Soucieu-en-Jarrest après 7 heures 35 minutes et 46 secondes de course pour 58,5 kilomètres et 1844 mètres de dénivelé positif. Je suis 1509ème sur 6031. Nous avons perdu beaucoup de places sur cette portion où ça court encore énormément autour de nous, même quand ça monte !

Je suis bien fatigué quand nous arrivons dans le gymnase de Soucieu. J'ai besoin de souffler un peu. Je bois de l'eau plate cette fois, je me ravitaille un peu mais je n'ai pas envie de grand chose. On s'assoit ensuite quelques instants le temps de vider nos chaussures des cailloux qu'il y a à l'intérieur et là, je galère vraiment beaucoup à défaire mes lacets, enlever les chaussures, les remettre et les relacer, je vais au ralenti. Arnaud nous presse un peu pour ne pas rester trop longtemps à l'intérieur, je fais de mon mieux mais je suis un escargot, c'est dur.
 

De Soucieu à Chaponost (km 65,3)

Il y a à peine 7 kilomètres entre les ravitos de Soucieu et de Chaponost. Pourtant, je vais mettre près de 1 heure entre les deux. C'est vraiment la portion où je suis le plus à la rue vis-à-vis de mes camarades de course. Pourtant, je ne subis pas autant le bitume que la dernière fois, j'ai l'impression. En revanche, je n'avance plus. Il y a pas mal de portions plates qui favorisent la relance mais j'ai mal aux releveurs donc je peine à courir à plus de 10km/h. Sur chaque relance, je perds vachement de terrain sur Laurent et Martin.

Moralement, c'est pas évident parce que je n'ai plus d'envie. Je sais qu'on va finir donc je n'ai pas d'objectif. Du coup, je subis juste. Je n'ai vraiment pas envie de me faire mal plus que ça et en même temps, je souffre quand même mais c'est certainement plus psychologique que physique. Les gars nous attendent régulièrement mais nous ne pouvons plus vraiment rester ensemble à présent car notre rythme de course est différent. Pour autant, tout le monde est fatigué et avec ses douleurs donc même si Martin et Laurent auraient pu courir davantage, ils n'ont pas pour autant spécialement intérêt à trop en mettre sur cette fin de course.

Je l'avoue, le moindre prétexte me permettant de marcher est bon à prendre... même des faux-plats montants à 1% ! J'abuse clairement mais quand l'envie n'est plus là, c'est dur. J'essaie régulièrement d'accrocher Arnaud qui ne va pas beaucoup plus vite que moi, ça me motive un minimum ! On arrive à Chaponost, au fameux endroit où on croise sur quelques centaines de mètres les concurrents qui sont eux déjà repartis du ravitaillement. Pour le coup, ça me semble moins long qu'en 2021 où j'étais au bout de ma vie à ce moment de la course... mais j'y étais arrivé en 7h18...

Là, j'arrive même près de 2 minutes après Laurent et Martin dans le gymnase, au bout de 8 heures 34 minutes et 11 secondes d'effort pour 65,3 kilomètres et 1944 mètres de dénivelé positif. Je suis 1611ème sur 5956.

Je me souviens très bien de l'endroit, que Martin est assis pour soigner son pied mais je ne sais plus du tout ce que j'y ai pris à part un peu de charcuterie et des chips il me semble. Je ne sais même pas si j'ai bu quelque chose, probablement que oui, pas du thé en tout cas. Il reste 13 kilomètres, on va le faire... mais qu'est-ce que c'est long !
 

De Chaponost à Lyon !

C'est la dernière portion de la course ! On repart tranquillement du gymnase puis on attaque une portion de relance sur du plat bitumé donc irrémédiablement, Arnaud et moi sommes distancés par Martin et Laurent. On croise cette fois ceux qui ne sont pas encore arrivés au ravitaillement, pourvu qu'ils ne nous rattrapent pas sur la fin de course même si nous allons là encore perdre bien des places et je n'y suis pas pour rien !

Bon, au moins, on n'est plus congelés ! Il fait presque doux maintenant que le jour est bien levé et que nous ne sommes plus en altitude (relative pour autant puisque le point culminant de la course, le Signal de Saint-André, est à moins de 1000 mètres). Je me force à courir dès que c'est plat mais je vais vraiment au ralenti, c'est terrible. Heureusement, même si ça devient dur physiquement, les descentes me sont plus favorables et les montées se font tranquillement, en gestion.

Je me souviens d'un passage bien particulier, une montée dans la boue bien bien humide qui nous a noyé les pieds et derrière, un peu de souffrance avec le sentiment d'avoir comme une grosse ampoule sous le pied droit alors que je sais que j'ai un trou dans ma chaussette puisque je l'ai vu en retirant les cailloux à Soucieu. Plus de peur que de mal, ce n'est que la sensation laissée par ma peau toute fripée une fois les chaussures bien trempées, histoire de pimenter un peu la fin de course.

On reste un bon moment en hauteur, dans des villages, à alterner entre petites bosses, phases de plat et descentes avant la fameuse descente qui mène vers la grosse montée de la fin du parcours, celle que j'avais bien gardé en mémoire de la SaintéLyon 2021 et dont j'ai parlé plusieurs fois aux gars. Après avoir traversé un pont, on attaque une pente bien raide pour une grimpette d'environ 800 mètres où errent les zombies que nous sommes en cette fin de course. C'est dur pour tout le monde ici. Ah, si seulement on avait de telles montées par chez nous pour nous entraîner... (Bon, la vérité, c'est qu'on n'en a pas des comme ça mais on en a des bien pentues quand même mais pas vraiment le courage d'aller y faire le hamster !)

Allez, c'est la fin de la course, c'est extrêmement long, les kilomètres passent vraiment très lentement, je suis épuisé mais on y arrive ! En descente, je parviens parfois à rejoindre Laurent et Martin qui temporisent puis on attend Arnaud. C'est au moins un élément qui me donne un motif de satisfaction, de ne pas me traîner partout et tout le temps. Je suis même bien dans la descente le long d'un parcours d'accrobranches jusqu'à ce que j'ai besoin de faire une dernière pause "besoin naturel", encore une ! Arnaud est soulagé par cet arrêt, il peut marcher un peu et récupérer.

Un peu plus loin, après avoir relancé, bim, encore une montée ! Et une belle, en plus. Celle-là, je ne m'en souvenais pas. Rien à voir avec la précédente, celle-ci est plus courte, un peu moins raide et sur chemin mais ça calme quand même. On arrive vraiment dans les derniers kilomètres avec des panneaux plus réguliers alors qu'on les trouvait jusqu'alors tous les 10 kilomètres... 5 kilomètres restants... plus que 3 ! Et pleins d'escaliers à descendre et j'y suis plutôt pas trop mal à l'aise. Je double Laurent puis Martin !

Bon, par contre, en bas, je marche tranquillement pour les attendre et une fois sur le plat pour arriver à l'entrée de Lyon et passer sur le pont par-dessus le Rhône, les deux s'échappent à nouveau et je peine à suivre Arnaud. Je suis vraiment bidon sur le plat aujourd'hui ! Ce sont les dernières centaines de mètres, toutes les indications se contredisent, allez, je serre les dents et on se regroupe avant l'entrée dans la Halle Tony Garnier où nous arrivons tous les 4 ensemble, bras levés, main dans la main pour franchir l'arche d'arrivée côte à côte ! On l'a fait ! On se tape dans les mains, on n'en peut plus mais quel soulagement !

Je termine 1787ème sur 5948 en 10 heures 18 minutes et 42 secondes pour 77,25 kilomètres et 2296 mètres de dénivelé positif d'après la montre. 1 heure et demi de plus qu'il y a 2 ans mais des conditions bien différentes avec des descentes où il était bien difficile de courir, beaucoup d'énergie perdue à se concentrer pour ne pas tomber et probablement une moins bonne forme globale aussi à cause des dernières semaines difficiles. Mais l'essentiel est là, nous avons franchi la ligne d'arrivée, tous ensemble, au terme d'une sacrée aventure collective ! Nous ne figurons pas parmi la liste des 519 abandons sur la SaintéLyon 2023 alors qu'on ne saura jamais si nous n'y aurions pas été en se retrouvant seuls sur ce parcours ! Mission accomplie !
 
  
La course est terminée, il est temps de récupérer nos affaires... l'espace des consignes est relativement bien organisé mais j'y connais une mésaventure puisque mes trois camarades retrouvent sans problème leur sac tandis que le mien est introuvable. C'est dur car je suis épuisé et je dois contenir mon agacement... Je finis par le retrouver après 15 bonnes minutes de recherche... Il a basculé dans la zone d'à côté et était caché entre la barrière et la table. Ouf, je l'ai, c'est l'essentiel.

Direction les douches ensuite... quel bien fou cette douche chaude ! Certes, c'est sous un barnum, des douches collectives, un beau bordel organisé mais un vrai bonheur après avoir passé plus de 10 heures dans le froid !

Ensuite, on passe au repas d'arrivée. Ce n'est pas de la folie mais ça se mange et plutôt bien quand même. On est partagés entre la fatigue et le corps bien entamé mais aussi la satisfaction d'avoir réussi et ce bon moment passé ensemble. On reste pas mal de temps à table avant d'aller nous allonger à l'écart, au calme pour ensuite quitter la Halle Tony Garnier pour rejoindre péniblement la station de métro puis la Gare de Lyon et emprunter le TGV vers 16h pour rentrer en région parisienne !

Les jours suivants ne sont pas évidents, nous sommes tous malades mais la récupération se passe bien, le corps n'a finalement pas tant souffert que ça avec cette gestion de course sans forcer. Nul doute qu'on aurait pu faire mieux... mais je m'en fiche pas mal parce que la seule chose importante, c'est qu'on l'ait fait, sans se faire mal et sans finir dans un état pitoyable. C'était dur mais c'est une sacrée expérience encore une fois ! Je le dis, je l'affirme : je ne referai pas la SaintéLyon ! Si je reviens sur cette épreuve, c'est pour une plus courte distance, en relais ou sur une épreuve plus courte.

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