L'auteur : Sandrine74
La course : Le Grand Raid des Pyrénées
Date : 28/8/2009
Lieu : Vielle Aure (Hautes-Pyrénées)
Affichage : 3763 vues
Distance : 150km
Objectif : Pas d'objectif
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Grand Raid des Pyrénées
Vendredi 28 Août au Dimanche 30 Août 2009
Ultra 152 km et 9300m+
Les poumons me brûlent, l'odeur est celle des échappements. Tout ce bruit autour de moi, ces personnes stressées qui klaxonnent pour se défouler.
Mais devant mes yeux défilent un autre paysage, je suis encore à 835 km. J'ai envie de mettre mes baskets et de repartir sur ces sentiers.
Au mois d'août j'ai fait presque tous les massifs de France, de ces 8 jours en Auvergne, de la Haute-Savoie qui ma vue grandir, de la redécouverte du Jura, nous partons dans les Pyrénées.
Il me manquera que les Vosges que je ne connais pas encore !
Photo : Camping le Rioumajou
Photo : Nos presque voisins de tente.
Je sais par avance que ça ne va pas être facile, car prendre le départ d'une course avec juste un minimum de préparation c'est un peu culotté. Mais en même temps je sais que le corps à une mémoire de l'effort.
Vendredi matin je prends le départ de l'Ultra avec un beau dossard 529, après une excellente nuit en camping.
Il fait tellement chaud (19°C), que je pars en maillot manche courte. Pas une étoile de visible dans le ciel, d'ailleurs le plafond est bas.
C'est tout un village qui est mobilisé, le bar / tabac est même ouvert, enfin on se demande s'il a fermé ! J Madame le Maire est là pour nous encourager, la musique résonne entre les murs de pierre des rues étroites de Vielle-Aure. C'est la fête !
Le départ est donné avec quelques minutes de retard à 5h04 et bien sûr j'ai déjà envie de m'arrêter... Bon c'est fait, heureusement je m'y prends avant la montée !
Ce qui nous attend 1425m+ sur 11,7 km, une petite mise en jambe, un hors d'œuvre de qualité qui se digère facilement dans la pénombre de ce petit matin. Le brouillard fait toutefois assez rapidement acte de présence formant un écran devant la frontale.
Même si nous ne sommes que 480 à prendre le départ, il y a de léger bouchon quand le chemin devient plus étroit.
Entre deux échelles de bois pour passer au-dessus des clôtures le terrain devient courable mais pas assez longtemps pour apprécier, cela me permet de dépasser pas mal de coureur.
A l'arrivée au lieu-dit « Espiaube » 1550m mon altimètre qui enregistre une chute de pression m'indique 1450m. La station est déjà là, et je me souviens d'une des nombreuses recommandation des organisateurs « les 400 derniers mètres sont raides ». Le brouillard est un peu moins dense et le jour se lève, nous laissant entrevoir ce mur, ou plutôt piste noire, que nous allons monter. Je ralentie, laissant partir Olivier et Benoît que je ne pense pas revoir.
SURPRISE :
J'ai dit à Emmanuel que je ne serais pas au ravito du Col de Portet avant 3 à 4h de course ! Heureusement qu'il est monté plus tôt car j'arrive en 2h39'56'' et j'ai un gros problème, j'ai très faim.
Après 10min au ravito, pour recharger en eau, manger et boire, Emmanuel me coach pour que je reparte vite.
Je finis par partir avec un sandwich au jambon sur un sentier en balcon entouré de verdure, bientôt en contournant la montagne je découvre le barrage de l'Oule d'un bleu intense, je m'arrête et une coureuse me donne mon appareil photo qui était resté bien au chaud dans mon sac à dos. Même si le ciel est couvert c'est tellement beau. Les montagnes paraissent dure, nu bien souvent, couverte de roche abrasive qui renvoient des couleurs...
Photo : Lac / Barrage de l'Oule.
J'ai bien réfléchit avant d'emmener mon appareil photo, et puis au final suis-je à 400g près ? J'en prends plein les mirettes, et je peux vous dire que je suis bien réveillée.
Maintenant le parcours nous offre une enfilade de lac, tous plus beaux les uns que les autres, tous plus transparent, chacun avec une couleur, et chacun avec son reflet !
Photo : Magnifique lac.
Le brouillard se déchire et revient laissant planer le doute d'une ouverture totale, pour finalement nous rendre un ciel d'un magnifique bleu.
Le soleil transperce ce brouillard se reflétant dans ces eaux limpides et calmes de ces lacs de montagne. Le soleil nous réchauffe, nous prend notre sueur et nous donne soif.
Le peloton de coureur est déchiré, chacun est à sa place. Parfois seule parfois en groupe, mais toujours en admiration.
Une fois encore le brouillard nous fait une surprise en s'estompant devant la montée du Col de Bastanet, dans cette ascension qui sera le point haut de la course, je cherche le rocher le plus sûr, les quelques centimètres de terre tassée qui me permettront de mieux m'élancer et ainsi arriver à un meilleur appui pour le pas suivant.
Photo : Col de Bastanet.
Au Col, c'est magnifique, des lacs à droite et à gauche, la lumière du soleil qui laisse apparaître toutes les belles couleurs de ces montagnes ! Un moment magique !
Derrière nous les lacs inférieurs, du milieu et supérieur, et devant nous les lacs de la Hourquette, Arrédoun, du Campana avec son refuge ; et la laquette et le lac de Gréziolles.
Photo : Derrière nous !
Photo : Devant nous !
Je ne suis pas des plus à l'aise sur ce terrain, toutefois j'ai l'impression de faire une randonnée bien rythmée. Et puis j'en profite, et une photo ici et une autre par là !
Photo : Y'a des lacs de partout !
J'approche du Barrage des Laquets et je revoie ce brouillard que nous avons quitté 2h plus tôt. Ce dernier vient caresser les eaux du barrage, pour petit à petit faire disparaître tout relief et laisser le blanc envahir la montagne.
Arriver au niveau du barrage je profite une dernière fois d'un brouillard un peu déchiré avant de replonger dans cette épaisse purée de petit pois.
Photo : C'est beau !
Je ne peux décrire ce paysage car c'est blanc devant, blanc derrière, blanc dessus, blanc à droite et blanc à gauche. Heureusement je vois encore mes pieds autrement je serais bien vite remontée au soleil.
Photo : Un épais brouillard.
Le brouillard crache son humidité, et moi je courotte entre sentier monotrace, et tapis moelleux d'herbe rase, après environ 5km le grondement d'une cascade, et puis un sentier carrossable avant de rejoindre la route me permettant d'allonger un peu et aussi d'arriver au ravitaillement d'Artigues 29.6km en 6h30.
Photo : Cascade avant Artigues.
Marie est venue m'encourager avec d'autres personnes, toutes sont soit sous des parapluies, soit sous des ponchos...
J'essaye d'optimiser mon ravito en remplissant en premier ma poche à eau, et de manger de tout, malgré que je mange régulièrement, j'ai très faim et j'ai mon ventre qui gargouille : dire que certains coureurs ne peuvent pas manger en course. Il y a aussi de la soupe et tout plein de bonnes choses.
10 min une fois de plus, 10 min passé là-dedans, mais il ne faut pas rester, c'est le piège.
Je pense m'être bien ravitaillé et prends quand même avec moi du pain.
Maintenant c'est parti pour 8km et 950m+, rien de bien méchant sur le papier, logiquement en 2h c'est bon. Seulement, il n'y a plus rien de très logique, j'ai enfilé ma veste à Artigues, j'ai toujours faim, il bruine, et mine de rien malgré un super balisage, je dépense pas mal d'énergie à rester attentive.
A certain moment je suis avec des coureurs, et maintenant un peu plus souvent seule.
La montée est longue, est très longue, je suis obligée de m'arrêter pour enlever la veste : non ça c'est le prétexte, pour me reposer plutôt en plus l'herbe n'est pas très confortable car elle pique !
C'est au bout de 2h30 que je vois enfin les moutons bleus et comme par magie le brouillard se déchire timidement pour nous laisser entrevoir le Pic du Midi de Bigorre.
Photo : Les moutons bleus !
Photo : C'est le Pic du midi... Dans le brouillard !
Quel soulagement d'être là-haut, je m'assoies et décide de faire le plein de tout surtout que nous allons avoir une portion assez longue sans rien.
Photo : Ravito du Col de Sencours.
20 min d'arrêt plus tard, je repars dans le brouillard, encore quelques encouragements avant d'entendre les bâtons gratter les rochers, d'entendre ces voix sans voir personne autour de soi.
Des moments de doutes où il faut aller chercher au fond de soi pour avancer, surtout quand le brouillard devient trop dense et que la balise suivante devient s'efface dans ce blanc continu. C'est dans ces moments où le mental joue avec nos nerfs.
J'ai l'impression de bien avancer pourtant c'est long, il y a juste la couleur du sol pour rompre la monotonie. De temps à autres une ombre se profile à l'horizon et puis celle-ci s'échappe dans cette ouate toujours aussi blanche, toujours aussi clair.
Des panneaux nous laissent espérer et nous font rêver sur les paysages alentours.
La roche est glissante et certains passages peuvent s'avérer délicat mais pour une fois le brouillard joue en notre faveur nous masquant un peu la verticalité de l'endroit.
Il me reste 3km pour Hautacam, trois kilomètres... J'y vais vraiment d'un bon pas, mais rien à faire Olivier et Benoît revu diverses fois me reprennent. Le vent se met à souffler en plus de ce brouillard et de cette humidité.
Je me mets à rire toute seule car ça fait plus de 30 min que ça fait 3km et je vois une ombre se profiler, l'ombre d'un homme vêtu d'un poncho... Serait-ce le ravito ?
Grosse déception ce n'est qu'un rocher fort ressemblant par la forme qui nous joue des tours.
Finalement le ravito est 10min plus loin. Y'a Jacqueline comme bénévole, j'en ai marre et je lui fais part de mon envie de jeter l'éponge à Villelongue. Je reste bien longtemps sur cette chaise dans un coin de la tente, toujours avec cette faim.
Dans ma tête c'est un mélange de vision positive (je visualise l'arrivée, la joie qu'elle me procurera), et cette envie d'arrêter (tout va bien, le temps n'est pas beau, pourquoi continuer, autant passer la nuit au chaud et repartir randonner demain !).
Et puis il y a la Castafiore des coureurs Célestes qui arrive ! Ca me fait vraiment très plaisir de la voir, elle ne s'arrête pas ! Je fais ni une ni deux je repars avec elle, il est 19h06.
11km et 1220m- c'est ce qui nous attend, mais qu'à cela ne tienne nous partons en courant.
Nous dévorons cette descente en 1h40. MERCI Chantal !
Pendant ce temps, les pensées positives ont repris nettement le dessus, et c'est décidé je repartirais avec Chantal. Nous avons tout le temps de discuter de chose et d'autre.
Nous voilà rendu à Villelongue, la première base vie, j'y retrouve Valérie (organisatrice de l'Andorra Ultratrail) à la remise des sacs coureurs.
Tout juste le temps de discuter un peu, je pars me ravitailler. Nous nous donnons 30min avec Chantal. Je prends des pâtes, jambon, fromage... Je m'installe sous la tente kiné où se trouve Akuna.
10min après notre arrivée Valérie revient vers moi en me disant que je porte la pouasse, car la course est neutralisée momentanément. Bon nous attendons, nous avons peu de temps plus tard une info comme quoi la course est totalement neutralisée : mauvaise info, ou personne n'étant pas de l'organisation, nous ne le serons pas. Je me change, Chantal s'accorde un dessert, nous nous rendons à l'évidence...
Photo : La Castafiore qui mange son dessert.
Voici une heure que nous sommes là et on vient nous dire qu'on peut repartir sous certaines conditions.
Au final, les conditions qui suivent sont les mêmes que nous avons vécu toute la journée la nuit en plus ! Malgré tout nous rendons le dossard sur un semi malentendu. FIN : 65.2km, 3850m+ et 4000m-.
Nous regardons partir ceux qui le souhaitent, nous prenons le bus à 22h15. Ce dernier est totalement plein, et il nous faudra pas moins de 2h pour rejoindre Vielle-Aure.
Un chauffeur de bus vraiment sympa qui nous dépose devant la petite route qui mène au camping.
Chantal n'a pas les clefs du fourgon, donc une douche au camping je réveille Emmanuel pour récupérer des affaires propres et le duvet, pour nous engouffrer dans la voiture jusqu'à ce qu'Emmanuel et Marie se réveille.
4h du mat', c'est l'heure d'emmener tout ce beau monde. Nous assistons au départ du « Grand ».
Photo : Départ du « Grand ».
Nous partons dans le bar/tabac pour prendre un petit déjeuner. Y'a rien à redire ils ont vraiment le sens de l'accueil ici !
Juste à côté une tablée avec Mme le Maire et ces administrés ainsi que l'animateur, il est 6h du matin et c'est l'heure du casse croûte, au menu : assiette de charcuterie, omelettes aux cèpes (frais bien entendu), un peu de vin et bien évidemment du fromage !
Photo : Petit déjeuner.
Et toujours de leur gentillesse alors que nous venons de prendre le petit déjeuner, ils partagent leur omelette... Elle était Rudement BONNE ! Merci !
J'assiste à l'arrivée d'Eric « Coureursolitaire », de Philippe « PhV », le bus arrive avec Gandhi. C'est l'heure d'aller se coucher !
Photo : Arrivée de Coureursolitaire (Eric).
Photo : Arrivée de PhV (Philippe).
11h30 je me lève fraîche comme si j'avais fait ma nuit complète, alors que je n'ai que 3h dans ma besace.
Photo : Au PC de course Michel et Clierzou.
En début d'après-midi je décide de monter au Col de Portet (en voiture cette fois-ci) et d'aller en sens inverse des coureurs jusqu'à rejoindre Emmanuel.
C'est flagrant l'allure n'est pas la même. Les visages sont marqués, et je n'éprouve aucun regret. Je sens à peine les cuisses, je descends presque jusqu'au barrage quand je vois Emmanuel. Je prends beaucoup de photos, c'est agréable aujourd'hui !
Revenu au Col de Portet, je laisse partir ma moitié dans la descente. J'ai tout juste le temps de descendre en voiture, discuter 10 min et le voilà qu'il arrive !
Ah là là ! Le bonheur tient parfois à peu de choses !
Un grand merci à l'organisation, aux bénévoles qui ont bien prouvé qu'à 150 ils pouvaient faire un travail extraordinaire et aussi ils étaient spécialement doués, avec ce sourire et ce ton plaisantin.
Merci à Emmanuel, Marie, ma famille et tous les amis sur place et très loin.
Vous avez frappé fort, et je rêve que cette balade garde ce trait bien spécifique à elle. 500 coureurs c'est bien !
J'ai eut l'impression de faire une randonnée (certes un peu active) avec des copains, c'était génial.
Sandrine...74 UFO
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7 commentaires
Commentaire de mic31 posté le 05-09-2009 à 12:28:00
Salut Sandrine,
C est dommage que la balade se soit arrêtée si tôt. Tu vas être "obligée" de revenir en 2010.
A part ça, comme toi et beaucoup je crois, je souhaite que le GRP garde cettte taille humaine qui fait en plus de son parcours tout son charme.
A une prochaine fois.
Michel
Commentaire de akunamatata posté le 05-09-2009 à 13:14:00
ah la la Sandrine,
je regrette un peu de t'avoir embarquée dans notre tente de "looser" a Villelongue, entre Pascal Penot, moi allonges sur un lit de camp et SuperSteph entrain de faire de l'electro, y ' a que des bras cassé.
On a tout fait pour vous remotiver les filles (la casta et toi), mais bon on etait pas trop credible...
belle excuse pour revenir l'an prochain et evite nous a villelongue ;-)
Commentaire de millénium posté le 06-09-2009 à 07:46:00
merci pour ce récit qui te correspond bien. Plein d'humour ciblé , de sourire et d'humilité. Très heureux d'avoir pû échanger avec toi. RV en 2010 à vielle aure (mais aussi avant !)
Commentaire de martinev posté le 06-09-2009 à 19:03:00
Bravo pour ce beau récit et tes photos.
Tu te vengeras en 2010 sur ce GRP. Merci pour ton sourire et ta gentillesse.
Commentaire de VB posté le 07-09-2009 à 10:38:00
Bravo pour ce beau Cr, très agréable avec ces superbes photos qui donnent bien envie. Bravo pour ta course !!
Commentaire de eric41 posté le 07-09-2009 à 12:52:00
Merci Sandrine pour ce CR.
Tu n'as pas l'air trop amère de n'avoir fait qu'un semi grand raid.Bravo pour ta course.
Eric
Commentaire de la panthère posté le 18-05-2010 à 12:49:00
avec quelques mois de retard......un grand merci pour te récit! j'y puise de précieux renseignements et de belles images avant d'attaquer le GRP 2010 (le petit, je ne joue pas dans la cour des ultras ultras....)bises
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