L'auteur : benoitb
La course : Le Grand Raid des Pyrénées - Grand Trail
Date : 25/8/2012
Lieu : Vielle Aure (Hautes-Pyrénées)
Affichage : 4025 vues
Distance : 80km
Objectif : Se dépenser
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Cinq ans après ma première Diagonale des Fous, et comme nous nous l’étions promis avec les copains qui m’avaient déjà accompagné à l’époque, nous retournons à la Réunion pour la 20ème édition. Cette année, le parcours est annoncé comme le plus long et le plus difficile de l’histoire de l’épreuve : 170 km, 10000 mètres de dénivelé positif. Pour espérer avoir une chance d’aller au bout de ce monument de l’ultra trail, il est indispensable de se préparer convenablement. C’est pourquoi nous avions inclus dans notre planning le 80 km du Grand Raid des Pyrénées en guise de validation de la première partie de notre préparation.
Nous sommes donc partis à 4 (sur les 5 qui composeront notre équipe à la Réunion) pour Vielle Aure en « opération commando » : départ le jeudi après le boulot, étape le soir chez le 5ème larron en Vendée (qui participe ainsi à sa façon à la course de prépa), sur la route des Pyrénées, puis fin du trajet le vendredi. On monte la tente, on retire les dossards, on boit une bière, on va au briefing, on fait la course, on boit une autre bière et on rentre dimanche.
La course débute donc réellement par le briefing, lors duquel les consignes de sécurité nous sont rappelées, l’heure de départ (5h) nous est confirmée, tout comme le passage au Pic du Midi. Effectivement, certains coureurs du 160 km ont été empêchés par l’organisation de le gravir, en raison de conditions climatiques un peu limite (trop de vent notamment). Nous voilà rassurés, nous ferons la course dans sa totalité, et non pas un parcours tronqué comme cela aurait pu être le cas sans que nous ne puissions rien y faire.
Il est ensuite temps de vérifier que tout est OK dans le sac (nous avons dû montrer tout notre matériel obligatoire lors du retrait des dossards, mais on n’est jamais trop prudents…), puis après un rapide repas, et un réglage des montres à 3h30, on se couche. Après une nuit courte mais tranquille, nous nous affairons autour de la tente et il est rapidement 4h30, sachant que nous sommes à 1 km du départ, et qu’il faut pointer avant de se mettre sur la ligne, il est grand temps de se mettre en route. C’est donc à 4h48 que nous validons notre présence sur la ligne de départ, sans doute parmi les derniers… J’abandonne là mes camarades après leur avoir souhaité bonne chance, et leur avoir donné mes dernières consignes du « gars qui a déjà fait la course l’année d’avant », je me rapproche « un peu » de l’avant, je partirai cependant d’assez loin. Mes 3 potes comptent rester ensemble le plus longtemps possible, cette course n’étant qu’un entraînement. Le départ est rapidement donné, et nous partons dans la nuit courir quelques hectomètres plats sur la route avant d’attaquer les chemins pentus. Je reste très tranquille, malgré cela, je remonte tranquillement quelques coureurs. Nous arrivons à Vignec, et les choses sérieuses commencent : la route s’élève subitement, puis devient un chemin, et c’est parti pour quelques heures loin de tout dans la montagne. Je ne suis manifestement pas avec les gens de mon niveau, je reste facile et pourtant je ne fais que doubler. Je me méfie de mes sensations, j’ai l’impression que ce n’est pas normal, mais la différence d’allure entre moi et mes voisins est trop importante : je fais ma course et j’attends de rejoindre des coureurs de mon niveau.
Puisque l’organisation de la Diagonale des Fous interdit l’usage des bâtons, nous avons choisi de nous en passer aussi au GRP. Très rapidement, je me rends compte qu’ils ne manquent absolument pas, et ce sera le cas toute la journée. Tant mieux. En revanche, j’ai failli plusieurs fois me faire embrocher ou éborgner par des concurrents ayant des gestes un peu larges avec leurs pointes tendues vers l’arrière ou les côtés…
Je finis par arriver au col de Portet, à 2215 mètres d’altitude, au bout de 12 km de course, il fait bien froid, on ne s’attarde pas, malgré les valeureux supporters présents ici cette heure matinale. Le premier ravitaillement est juste en contrebas, au restaurant Merlans. Je pointe en 2h18’ (et en 150ème position, mais je ne le savais pas sur le moment), l’an dernier j’ai mis 14’ de moins. Je ne suis donc pas parti en surrégime. Je prends le temps de prendre un peu de jambon, d’abricots secs, de remplir mes bidons et c’est reparti. Arrêt aux stands : 3’ chrono. Je me rappelle aussi que l’an dernier j’avais pris un gros coup de moins bien sur la partie nous menant au col de Bastanet, soit immédiatement après le ravito, je repars donc en douceur afin de ne pas brusquer la machine qui a l’air de fonctionner correctement pour le moment, même si je pensais être un peu plus rapide.
Peu après le 1er ravitaillement
Dans la montée vers le col de Bastanet
Le jour est maintenant bien levé, je sais qu’on arrive dans un secteur que je vais moyennement aimer : il y a beaucoup de cailloux… Et il va donc devenir plus difficile de courir, les pieds montagnards seront avantagés par rapport aux pieds Morbihannais. Mais je suis là pour ça. A la Réunion, ce sera pire ! Alors, en avant.
J’ai le plaisir de croiser le chemin de deux lièvres guère émus par ma présence puisqu’ils me laissent le temps de sortir mon appareil photo pour immortaliser notre rencontre :
On traverse des paysages toujours aussi beaux, avec une magnifique mer de nuages à l’horizon (profitez des photos, le temps s’est gâté par la suite, et il n’y en aura plus !) :
Et le col de Bastanet se dévoile au fond de l’image (comme vous pouvez le constater, il y a vraiment beaucoup de cailloux) :
Au passage du col (2507m, 19,2km parcourus) c’est la fête, nous sommes acclamés par des supporters très en forme, merci à eux, ils nous ont donné bien du courage pour la descente qui allait suivre (cliquer sur l'image pour voir la vidéo) :
Après le col, le paysage n’est toujours pas moche, je vous laisse en juger par vous-mêmes :
La seule chose qui me gêne un peu, ce sont ces sempiternels cailloux :
Je suis donc prudent au début de la descente vers Artigues, je m’étais ouvert le genou sur un caillou plus agressif que les autres l’an dernier. Le chemin finit par devenir un peu plus roulant, et j’en profite pour accélérer un peu. Je suis mauvais sur les parties techniques, je n’ai gagné quelques places qu’à la faveur de la dernière partie de la descente que j’ai effectuée quelques mètres derrière une concurrente qui avait l’air de s’y connaître. J’ai donc essayé autant que possible de poser mes pieds aux mêmes endroits qu’elle, et ça n’a pas trop mal fonctionné. Merci Olivia (c’était le prénom inscrit sur son sac à dos en tous les cas). C’est ainsi que j’arrive au ravito d’Artigues, en 5h… Eh bien on ne peut pas me reprocher d’être parti trop vite : je suis 25’ plus lent que l’an dernier. Et j’entends à l’occasion de ce ravitaillement une bénévole annoncer que nous sommes environ 150 à avoir pointé (je suis en fait 135ème à ce moment là). Je suis un peu déçu, je prends conscience du fait que mon départ est vraiment moyen. OK c’est une course de préparation, mais ce n’est pas non plus une promenade. Je prends toutefois le temps de correctement me ravitailler, puisque le programme des festivités est le suivant : nous partons d’Artigues à 1190m d’altitude pour monter d’une traite au col de Sencours, 1200m plus haut, puis au Pic du Midi, qui culmine à 2876m. Et le début de l’ascension, le long des cascades d’Arize, est redoutable, comme vous pouvez le constater (ou pas) sur cette photo :
Je pars donc d’un bon pas à l’assaut du col de Sencours, et je me rends rapidement compte que j’ai des jambes de feu. Je me sens extraordinairement bien, et je dépose immédiatement tous les coureurs que je rattrape. Cela va durer pratiquement toute la montée, je me suis d’ailleurs forcé à tempérer mes ardeurs, et j’ai géré au cardio afin de ne pas trop me cramer sur ce moment d’euphorie. Le chemin est pentu, mais roulant, et ça me convient tout à fait. Je fais quelques rencontres :
Mais rien ne peut me détourner de mon but : le Pic du Midi. Enfin, presque rien. Un ravitaillement parviendra à me distraire quelques instants :
Je suis déjà au col de Sencours. La montée s’est très bien déroulée, il me reste à faire l’aller retour vers le Pic et je pourrai ensuite dévaler vers Tournaboup. Je me ravitaille avec soin, je remercie à cette occasion les chaleureux bénévoles qui se plient en 4 pour nous, malgré les conditions parfois difficiles. Vous avez vu ces sourires ? Ça vous requinque autant qu’un bout de saucisson et un verre de coca.
Allez, il est temps de s’attaquer au Pic du Midi. Je ne le verrai point, perdu qu’il est dans les nuages :
La visibilité s’est considérablement détériorée au fil de la montée vers le Sencours, et même au sommet je ne voyais qu’à quelques mètres (C’est bon, vous avez compris qu’il n’y aura plus beaucoup de photos à partir de maintenant ?). Dommage. Le début de la montée est peu pentu et malgré mon état physique satisfaisant, je n’avance pas très vite. Avec le recul, je pense que j’aurais peut-être dû essayer de courir sur quelques sections, cela devait être possible. Mais mon moral est au top, l’altimètre m’indique précisément combien il me reste à monter, je sais où j’en suis. La fin de l’ascension est plus caillouteuse et surtout beaucoup plus pentue, mais pas de problème. Je pointe en 7h38 et en 78ème position. Ce classement valide ma belle montée : j’ai gagné 57 places entre Artigues et le Pic. Nous sommes maintenant à mi-course, mais le gros du dénivelé est fait. C’est parti pour la descente vers Tournaboup : 10km et 1500m de dénivelé négatif. Le chemin est facile, j’ai couru tout le long. Je me suis juste arrêté un instant pour faire ce que j’ai cru être de la photo d’art (croyant capter la poésie de la brume flottant sur un lac, mais en fait ça ne rend pas grand-chose…) :
Bref. Descente facile, sans histoire, j’arrive à Tournaboup en 8h43 (70ème). Déjà 50 km au compteur. J’ai un petit coup de mou à ce moment, je reste un peu plus longtemps que prévu au ravito. Comme d’habitude, remplissage des bidons, poudre de perlimpinpin, jambon et abricots secs. Une belle satisfaction sur cette course : ma gestion de l’alimentation. Aucun problème de ce côté-là, prévoir à l’avance la quantité à boire entre deux points d’eau, les petites portions de poudre pré dosées dans des sacs de congélation, et respecter ce planning, y’a pas à dire : ça aide. Je suis resté 8 minutes sur ce ravito, et je pars en direction du col de Barèges. Je sais déjà que je ne vais pas aimer cette portion. Je sais que la montée est interminable, caillouteuse et je ne vais pas être déçu. Je pense que pour une fois, l’expérience du parcours m’a été défavorable : j’ai amplifié la difficulté qui m’attendait, et je ne me suis pas « révolté ». J’ai baissé la tête en attendant que ça passe. Tout du moins jusqu’à la cabane d’Aygues Cluses. Je remplis encore mes bidons, et je me décide à jeter un œil sur un plan de route en 13h30 que je m’étais concocté (temps tout à fait irréaliste, mais je savais que si j’étais en avance sur ce plan, c’était forcément que je devais ralentir. C’est bizarre, mais je me comprends), et je me rends compte que je n’ai « que » 25’ de retard. Alors que je me sentais un peu dans le mou, tout est encore possible ! Je suis au pied d’un mur, mais je repars tout revigoré. J’essaie d’avaler un Grany dans la montée qui suit la cabane, mais j’ai tellement besoin d’air (oui, là j’étais à bloc) que je suis incapable de l’avaler, je ne peux pas mâcher, je dois garder la bouche ouverte. Je renonce. J’ai offert mon Grany à mon sac. Il en a bien voulu lui.
Le temps se gâte de plus en plus, je commence à avoir froid, et au passage du col (respect aux bénévoles qui étaient là, les conditions étaient bien pourries…), j’enfile la veste imperméable pour la descente. J’ai bien dû perdre 3’ tellement j’étais malhabile, mais bon. Maintenant je n’ai plus froid et je suis au sec. Col de Barèges : km 58, altitude 2469m. Ça c’est fait.
La descente qui suit est agréable, mais je ne cours pas autant que je voudrais. J’atteins avec grand plaisir le pied de la dernière montée, je le signale d’ailleurs au coureur qui m’accompagne à ce moment là : « c’est la dernière montée de la journée ! ». Et à sa réponse (« ouais, enfin, on monte jusqu’au col de Portet là quand même »), je devine qu’il ne va pas résister à mon rythme infernal dans les pentes. Et c’est le cas. Mais mon rythme, même s’il me va bien, n’a rien d’infernal. Je suis juste régulier, et j’ai la satisfaction de réussir à courir très proprement dès que la pente le permet. J’arrive rapidement au dernier pointage (qui était également le premier ce matin) : le restaurant Merlans. 12h21, 68ème. Je ne m’éternise pas, autant finir vite, et je commence à me demander si je peux encore passer sous les 14 heures… Je passe le col de Portet, et ensuite, c’est la descente à tombeau ouvert vers Vielle Aure. Mes cuisses me font mal, mais je sais que je ne dois rien lâcher si je veux arriver avant 19h et donc les 14 heures de course. Je suis vraiment à fond, je suis à peine distrait dans le bois qui descend vers Vignec par une vache qui vient de ma droite, qui court pendant une centaine de mètres devant moi et qui plonge droit dans la pente sur ma gauche pour rejoindre ses copines en contrebas. J’ai cru rêver… Je regarde ma montre, mon altimètre, et les minutes défilent plus vite que les mètres de dénivelé. Ça va être tendu ! J’arrive enfin auprès de l’église de Vignec, je demande au gens qui m’applaudissent quelle distance il reste : « pas plus d’un kilomètre ! ». J’ai 6 minutes 30 devant moi. J’espère qu’ils ne se trompent pas… J’arrive au rond point, je repose la même question : « encore 500 mètres, ça ne fait que descendre ! ». Encore 4 minutes 15. Normalement c’est bon. Je suis à bloc, j’ai mal partout, mais j’y arrive.
Il reste un dernier obstacle à franchir : le speaker. Il essaie de m’attraper au passage, mais je sais que le chrono ne s’arrête qu’à l’arche verte, 20 mètres plus loin, je le snobe donc magnifiquement (je n’avais rien d’intéressant à lui dire, c’est pour ça) et je vais valider mes 13h57’57’’ qui me satisfont pleinement, tout comme ma 63ème place, inespérée au départ.
Charlie, le coach, est là avec Jean Lou, il est tout épaté de me voir déjà à l’arrivée, et j’arrive à lui extorquer une bière en lui faisant croire que je l’ai bien méritée, ce qu’il fait semblant d’accepter. Merci Charlie et Jean-Lou, la bière m’a fait du bien au corps, et les compliments que vous m’avez faits à ce moment là m’ont fait chaud au cœur !
Rendez-vous en octobre pour la Diagonale des Fous…
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3 commentaires
Commentaire de laulau posté le 12-09-2012 à 21:54:42
Bon, ben, c'est très bien parti pour affronter la Diagonale des Fous dans quelques semaines. Bravo pour ta course très bien maîtrisée.
Commentaire de OF82 posté le 13-09-2012 à 08:56:35
Belle course ! tout est bien en place pour La Réunion :)
Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 13-09-2012 à 19:11:44
Peut-être as-tu passé Béa, une des Ecouviennes qui a mis 5h00 de plus que l'année dernière. Elle m'a dit que c'était très dur et je le crois bien...
Bonne prépa pour la diagonale.
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