Récit de la course : LyonSaintéLyon 2024, par marathon-Yann

L'auteur : marathon-Yann

La course : LyonSaintéLyon

Date : 30/11/2024

Lieu : Lyon 07 (Rhône)

Affichage : 317 vues

Distance : 164km

Objectif : Pas d'objectif

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Le Sabotage Amoureux

C'est un véritable Sabotage amoureux. Après une semaine de travail intense et une soirée Beaujolais particulièrement conviviale, je fais rapidement mon sac pour Lyon. Résultat : je ne trouve pas mon bonnet fétiche ni mon buff Kikourou qui m'aurait permis de me faire des copains, j'oublie ma brosse à dents, et surtout je constate avec effroi que mes chaussures de trail sont complètement déchirées et hors d'usage, au point de les jeter dans la première poubelle venue et de les remplacer par des chaussures de route déjà bien élimées. Le sabordage se poursuit jusqu'au samedi matin : alors que nous sommes dans le sas de départ de la Lyon Sainté Lyon, je découvre que je n'ai pas chargé mon téléphone, dont les 15% de batterie contiennent l'indispensable trace gpx de l'aller, et le non moins indispensable billet de train retour pour Paris, demain, dont je n'ai que la version numérique. Pourquoi, mais pourquoi ?


Peut-être parce que j'ai intégré que la première partie de la course doit être une simple balade. Ce n'est pas encore le péplum du retour, mais ce n'est définitivement plus un off avec ses 600 participants que je ne connais ni d'Ève ni d'Adam, mis à part mon précieux ami Eddie avec qui je resterai une vingtaine de kilomètres.

Ces kilomètres sont tellement agréables ! Ce que j'aime dans cette course c'est que l'aller n'est pas chronométré : le classement ne tient compte que du retour. Et au retour, je suis tellement fatigué que je me fiche du chrono comme du classement. Résultat : je peux avancer à l'aller comme au retour délivré de toute pression, goûtant juste au plaisir inégalé de courir à mon rythme, et même de marcher quand j'en ai envie. Et d'échanger avec les autres coureurs ! Je fais la connaissance de Simon le kikoureur, de Maud, qui vient de finir une course de 400 km dans le Jura, et de bien d'autres encore, comme Arthur, qui défie la LSL après avoir découvert la SaintExpress il y a deux ans et la Sainté-Lyon l'an dernier.

Et voilà la chute de mon histoire ! Non, mon récit ne s'arrête pas ici, mais c'est moi qui chute à cause d'un imbécile de caillou qui traine au milieu du chemin. Je tombe lourdement sur ma jambe gauche, qui devient rouge sang. Eddie est le premier à me relever et à s'assurer que tout va bien. Je repars en boitillant dans le brouillard, avant de reprendre la course, le muscle s'échauffant.

Brouillard qui, comme la douleur, va bientôt se dissiper. Des promeneurs nous l'assurent, nous allons bientôt passer au dessus, et après nous resterons au soleil jusqu'à Saint-Etienne. Arrivé en haut de la côte, je pense qu'ils se sont moqués de nous car nous sommes toujours dans une brume épaisse. Mais nous enchaînons avec une deuxième montée de plus de 2 km, et cette fois la prophétie se réalise . La vue sur le Mont Blanc au dessus de la mer de nuages est sublime, il fait tellement beau que je cours en short. Quel kif ! Tant pis pour les 15%de batterie, je fais quelques photos.

C'est joli de monter, mais c'est fatiguant ! Pour cette 70eme édition, les traceurs nous font passer par tous les cols emblématiques de la Sainté-Lyon, c'est vraiment chouette mais un peu usant. Je n'ai pas la facilité que je souhaiterais. Je vise toujours 12h à l'aller, mais pour cela je dois m'employer. Il y a peu de moment, à part les montées, où je peux marcher. Mais la vue est magnifique, la météo parfaite, et mes chaussures de route tiennent bien sur les chemins plutôt secs. Heureusement, car avec un peu de boue, ce serait un carnage.

C'est une coquetterie de la Sainté-Lyon, plutôt que de désigner les ravitaillements par leur position kilométrique, ils ne sont appelés que par le nom du village qui les héberge. Si j'ai longtemps cru que cette civilité n'était là que pour désorienter le traileur parisien, j'ai eu cette année une révélation, en regardant le roadbook : personne ne sait exactement à quelle position se trouvent les ravitaillements ! Pour preuve, celui de Saint Christo-en-Jarez est situé à 20 km de Saint Etienne à l'aller, et seulement à 10 au retour ! À moins que les facétieux organisateurs n'aient tenu compte du ressenti : à l'aller, ces derniers kilomètres nous semblent effectivement longs, et la nuit tombée les rendent même interminables, d'autant que le balisage est très léger, voire inexistant. Nous nous regroupons par petits groupes autour d'un coureur ayant une montre plus performante que la notre, mais jardinons parfois, au point de devoir sonner chez l'habitant pour demander quel est le bon chemin !

Je visais 12h à l'aller, mais le parcours était plus difficile que prévu et je mets 12h01. Ce n'est pas grave, il me reste assez de temps pour me refaire une santé de lion. Dans cet immense parc des expositions peuplé de coureurs excités à l'idée d'affronter la nuit, un espace trois étoiles nous est réservé. Je récupère mon sac, profite de l'excellent repas qui nous est proposé, et prends le temps d'aller voir un kiné pour essayer d'effacer les traces de ma chute qui se font plus durement ressentir, le muscle refroidissant.


Et c'est l'heure de l'impossible retour. J'ai longtemps hésité entre partir dans la première vague, comme m'y autorise ma seyante chasuble jaune, ou partir plus loin dans le peloton, pour profiter d'un peu plus de repos et trouver rapidement des coureurs moins pressés, qui partent à mon rythme. C'est finalement la première option que je choisi. Il y a toujours un certain décalage dans le retour, accentué dans ce sas. Les coureurs de la Sainté-Lyon sont frais, excités, rapides. Ils nous dépassent de toute part, et sont nombreux à nous encourager. Mais quelle foule !

Peut-être parce que la météo est plus clémente que pour mes autres participations , je trouve que le public est particulièrement nombreux et bruyant cette année, malgré la nuit et le froid. C'est le cas par exemple de ce groupe de supporters, dont certains déguisés en dinausores, en face de la maison où nous avions demandé notre route il y a quelques heures. Merci, les amis !


Métaphysique des tubes, c'est surtout aux ravitaillements que je vois la différence avec l'aller. Fini les moments tranquilles où je pouvais manger pain frais et rosette de Lyon en discutant avec les aimables bénévoles, là c'est la cohue. J'attrape quelques quartiers de clémentine et me remets en route. C'était l'une des raisons pour partir dans la première vague, arriver au ravitaillement avant le gros du peloton, mais c'est apparemment raté. J'ai du avancer trop lentement et me faire rattraper par la patrouille. Plus loin, je préférerai sauter le ravitaillement plutôt que me frayer un chemin à travers 4 ou 5 rangées de coureurs se disputant les victuailles proposés par les bénévoles toujours admirables tout au long de la nuit. Heureusement, il fait frais et je n'ai pas Soif.

Je ne suis pas dans la forme de ma vie mais j'arrive à courir la plupart du temps, et cela suffit à mon bonheur. Après quelques dizaines de kilomètres, les dépassements sont moins nombreux, j'arrive à trouver des coureurs qui avancent à mon rythme. Annoncée par des supporteurs bruyants au fond d'un bois, la montée du Rampeau est terrible, nous l'abordons avec Stupeur et Tremblements. Elle me laisse le souffle court, un peu, toutes proportions gardées, comme la montagne au Spartathlon. C'est à partir de ce moment que j'ai vraiment l'impression de faire un "ultra", et cela me remplit de joie.

Après le Rampeau, nous remontons sur Signal, le point culminant de la course. La montée est moins difficile que par l'autre versant, gravi à l'aller. Le jour commence à se lever, et la vue est de nouveau magnifique.
Le lever du jour est toujours un moment magique sur une course. Avec la lumière, le sommeil disparaît, même si la fatigue est toujours là. On voit mieux les dénivelés et les aspérités du sentier. Plus de la moitié du retour est passée, et ce qu'il reste est plus facile : plutôt en descente, avec une bonne partie goudronnée, ce que je préfère, il faut bien l'avouer. Je commence à me projeter sur l'arrivée. Et pour le coup, cela ne me rassure pas vraiment : avec un train à 15h, je calcule qu'il faudrait que je sois à Tony Garnier avant 14h. Il me faut avancer à 5km/h ce qui semble facile sur le papier mais après déjà 24h de course, tenant compte des dernières difficultés du chemin à venir et des inévitables pauses, il ne me faut pas trop trainer pour tenter d'avoir mon train.

Je maintiens donc mon effort. Heureusement, le terrain me convient mieux, et j'arrive encore à courir, enfin, trottiner. Je constate avec plaisir que peu de "gilets jaunes" (couleur de la chasuble des coureurs de la Lyon Sainté Lyon) me doublent, au contraire c'est moi qui les rattrape doucement, passant d'une anonyme 182me place à une anonyme 126eme place à Lyon. Mais ça me rassure sur mon allure et ma gestion de course.

J'affine mes projections d'heure d'arrivée. Si j'arrive avant 14h, c'est bon pour le train, avant 13h30, j'aurais le temps de charger mon téléphone, avant 13h, prendre une douche, avant 12h30, manger quelque chose. C'est vraiment dans cet ordre que je priorise les choses. Fort de ces motivations, j'arrive même à 12h15, assez tôt pour rajouter une bière à cette liste réconfortante. Vous connaissez la formule : je voulais mettre 12h00 mais le parcours était plus difficile que prévu et j'ai mis 12h35.  Ce n'est pas grave, il me reste assez de temps pour savourer.

J'ai commencé ce texte en parlant de sabotage amoureux. L'aspect sabotage est évident, je ne sais pas si j'ai bien réussi à rendre le côté Amoureux ! Pourtant, je l'aime, cette course, et j'aime la course à pied ! Ca tombe bien, j'ai encore du chemin à parcourir pour rejoindre le talent d'Amélie Nothomb !

1 commentaire

Commentaire de Simon71 posté le 21-12-2024 à 14:17:10

Bravo pour ta course, tu allais un peu vite pour moi pour qu'on puisse papoter plus longuement.
Joli récit :
le classement ne tient compte que du retour. Et au retour, je suis tellement fatigué que je me fiche du chrono comme du classement. Résultat : je peux avancer à l'aller comme au retour délivré de toute pression, goûtant juste au plaisir inégalé de courir à mon rythme, et même de marcher quand j'en ai envie
C'est exactement ça !

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