L'auteur : rdumont
La course : Saintélyon
Date : 7/12/2014
Lieu : St étienne (Loire)
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Distance : 72km
Objectif : Pas d'objectif
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« Moi je dis que tu vas faire entre 7h05 et 7h10 ». C’est la prédiction de Thierry, frustré par mon refus répété de me fixer un quelconque objectif la veille de la course (je ne me donne jamais de plan de marche, pour un trail)…
Flashback vendredi, après le travail. Embarqués dans la voiture : Fabienne, Thierry, leurs deux filles, plus un intrus (moi) et ses quelques kilos de matériel (dont une bonne partie inutile, bien sûr). On part la fleur au fusil pour affronter les 72km/1800mD+ de la Saintélyon 2014. Malheureusement, Fabienne a dû déclarer forfait pour cause de TFL récalcitrante. Elle m’a invité à dormir chez ses parents, à Sourbiers, en attendant le départ donné à 0h dans la nuit de samedi à dimanche. J’y ai été accueilli encore mieux qu’un roi. L’attente de la course se fera donc au chaud, à bavarder, à lire (entre autres, le livre des 60 ans de la Saintélyon : passionnant), à manger et à dormir… La belle vie. Du coup, inutile de dire que quitter la maison sous la pluie froide pour nous rendre au départ samedi soir a été particulièrement difficile…
Mais allez, on part quand même. Thierry connaît bien la course. Mal placé au départ l’année dernière, il a beaucoup bouchonné et perdu du temps. On arrive donc avec une bonne marge sur l’horaire. Le chaos règne aux alentours du Zénith de Saint-Etienne : en plus du départ de la Saintélyon, les Verts jouent à domicile et il doit aussi y avoir un spectacle. On se gare donc comme on peut pour nous diriger, toujours sous cette petite pluie, vers le Parc des Expos où il y a déjà bien du monde. On reste un peu au chaud parmi les autres coureurs mais rapidement, on préfère se diriger vers la ligne. Et là, on voit… personne. Enfin, pas grand monde… En fait, on est carrément sur la ligne. Un peu intimidés, on choisit de reculer de quelques mètres pour pouvoir partir à une allure raisonnable. Il fait frais, mais pas trop (autour de 1-2°) et la pluie s’est presque arrêtée. J’ai l’impression d’avoir très froid, mais je suis sûr que c’est juste la petite nervosité du départ qui s’exprime. Et puis, de toute manière, il est trop tard pour vouloir changer de matériel. Alors, autant démarrer tout de suite et qu’on en finisse…
0h00, ça part. Fort. On a 5-6km presque plat sur route. Je me sens bien, avec les jambes en mode automatique autour de 4’15/km. Je me force à ne pas doubler P. Regnerie et S. Jackson, deux bons traileurs que Thierry connaît, et avec qui on a discuté pour faire passer le temps avant le départ. Comme tout semble rouler, je rentre rapidement dans ma bulle et je manque Fabienne et ses parents qui se trouvent sur le bord de la route à Sorbiers pour nous encourager…Le profil se durcit un peu ensuite, et la route laisse la place aux chemins (généralement larges). L’allure reste correcte. Je veille juste à ne jamais me mettre dans le rouge. Il fait assez frais, les chemins sont vraiment très boueux, mais pas gelés. Il y a quelques flocons de neige, du brouillard par endroit et des rafales de vent. Mais mon coupe-vent tout simple suffit à me maintenir à bonne température et de toute manière, on ne vient pas courir la Saintélyon pour ses conditions estivales… J’aime bien courir de nuit, et j’apprécie particulièrement la vue sur les lumières des villes et villages en contrebas des Monts du Lyonnais. Entre les 6000 inscrits sur le 72km solo et les relayeurs, on ne se retrouve jamais seul. Pour autant, je ne bouchonnerai à aucun moment.
Passage au premier ravitaillement (Saint-Christo, km 15) au bout de 1h17’06. Je ne m’arrête pas car on m’a prévenu qu’il y avait souvent énormément de monde à cet endroit. Le fait qu’il y ait peu de coureurs me fait penser que je suis plutôt bien placé (j’apprendrai ensuite que je suis 186ème). Le deuxième ravitaillement (Sainte-Catherine, km 27) arrive vite (2h26’00). Je m’arrête 1’25, le temps de recharger en eau. Je prête à peine attention aux passages de relais et je repars, toujours en mode économique (classé 209ème). Les conditions ne changent pas non plus : fraîcheur, humidité, vent, quelques flocons de neige et beaucoup de boue. Il faut faire attention où on met les pieds pour éviter cailloux et glissades mais mes chaussures légères accrochent parfaitement. Comme tout le monde, j’ai les pieds mouillés, mais pas de souci particulier. Le mieux à faire est donc de continuer… Au troisième ravitaillement, j’ai prévu de refaire mon bidon de boisson à base de poudre glucosée, ce qui prend un peu de temps. Je passerai donc 4’06 à Saint-Genoux (km 38), rejoint au bout de 3h40’33. Je suis classé 162ème. Les jambes se font plus lourdes mais je sais que la portion suivante est globalement descendante. Ravitaillement suivant : Soucieu (km 49) en 4h47’24, classé 127ème. Arrêt pendant 1’03 (recharge d’eau et de sirop : ça va plus vite que re-préparer la boisson glucosée, et je ne suis pas convaincu que c’est beaucoup moins bien). Avec les relayeurs, il est bien difficile de se situer dans la course mais je me suis quand même bien aperçu que je récupérais un bon nombre de participants à la course solo. Ça tourne toujours sans trop rechigner. Je me force à marcher le moins possible et pour ça, je commence à puiser dans les réserves. Peut-être trop à ce moment de la course. Pas évident de dissiper l’euphorie qui guette tout coureur au long court, et qui tend à lui faire croire que c’est « bientôt fini » un peu vite. La course est encore longue et la distance entre les marques « 5km » semble se dilater… Mais l’allure reste correcte (j’essaie de me maintenir autour de 10km/h en moyenne) et je continue à récupérer des gars et des filles qui paraissent marquer le pas (dont des relayeurs, d’ailleurs). Cinquième et dernier ravitaillement, Chaponost (km 60) au bout de 5h49’40. Classé 100ème (je l’ignore, à ce moment-là). Mais je commence à en avoir assez, moi aussi. Je m’attarde donc le moins possible (arrêt de 1’19). On voit Lyon en contrebas mais ça semble encore bien loin. 12km, 1h10… Pour passer sous les 7h, il faudrait donc que j’accélère légèrement. Ça me paraît faisable, si le parcours le permet. Malheureusement, le parcours ne le permettra pas. Les multiples côtes, souvent courtes mais usantes, affectent les jambes et le moral. Cette dernière portion paraît ne jamais devoir finir (mais je ne connais aucune course, quelle que soit la distance, qui échappe à cette règle). Je double encore quelques coureurs du solo, mais je me fais dépasser par au moins un autre. Sur les quais du Rhône, j’essaie de ne pas le laisser filer devant mais je n’ai plus les jambes pour m’accrocher vraiment. Je passerai donc la ligne quelques secondes derrière lui, classé 95ème/6000 inscrits/4938 arrivants (29ème V1M et juste devant la 3ème féminine). Affichés sur l’écran, je lis mon chrono et mon classement. Je sais que ces 7h06’23’’ me donnent la qualification « Saintélyon d’Or » mais ma petite satisfaction personnelle, c’est avant tout le top 100.
Après dissipation de l’habituelle envie de pleurer et la récupération du t-shirt, direction la douche et petit repas. Les jambes sont lourdes mais malgré les courbatures, je n’ai pas le moindre bobo (rien, pas même une ampoule pour prouver que j’ai couru…). Comme on me l’avait annoncé, c’est un parcours assez bien adapté à un mi-routard mi-traileur (ou ni routard-ni traileur, c’est selon…) comme moi. Rien de très technique (même le Bois d’Arfeuille qui m’a paru finalement beaucoup de bruit pour pas grand-chose). J’avais tout de même un peu sous-estimé la difficulté liée au terrain et aux petites bosses qui se succèdent sans cesse du début à la fin.
En tout cas, j’ai bien compris pourquoi la Saintélyon était définitivement une grande classique. Que de chemin parcouru depuis les débuts où une poignée de cyclotouristes avaient décidé d’organiser une bonne marche pour ne pas trop s’empâter pendant les mois d’hiver… Ensuite, ça a été le temps des polémiques sur les faux-marcheurs vrais-coureurs de la fin des années 70, puis l’avènement de la pub et de la communication, le changement d’échelle… Et aujourd’hui, c’est 14000 traileurs, la plupart munis d’un équipement top-gun, qui viennent s’aligner entre Saint-Etienne et Lyon… Mais quelle que soit l’époque, pas de doute, crapahuter la nuit, ça restera toujours un sentiment unique.
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