L'auteur : fulgurex
La course : Courmayeur - Champex - Chamonix
Date : 28/8/2009
Lieu : Courmayeur (Italie)
Affichage : 2662 vues
Distance : 98km
Matos : bâtons leki, Salomon XA pro 3D ultra, sac RL 10 litres
Objectif : Faire un temps
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Tout commence en octobre 2008 lorsque Philippe (Le Petit Prince) me propose de tenter l’UTMB en 2010 avec lui. Il me faut donc une CCC en 2009, pour me faire les dents sur l'Ultra. Philippe, lui, fera l'embrunman en aout, et le grand raid des templiers à l'automne.
Et là, tout s’enchaîne :
La Saintélyon (avec lui) pour avoir un premier point et le droit de s’inscrire à la CCC en décembre 2008.
Le Phoebus Gruissan Trail pour faire une demi CCC en distance et une quart CCC en déniv en février 2009. (deuxième point)
Le Trail de la Vallée des lacs à Gérardmer pour faire une (grosse) demi CCC en distance et une demi CCC en déniv fin mai 2009. (troisième point)
Auxquelles je rajoute moult petits trails locaux pour travailler la vitesse et faire du dénivelé.
Tout ça m’amène au poil fin juin au niveau de ma prépa.
Et là, c’est le drame :
Les vacances arrivent, les sorties longues sont difficiles à caser, les copains absents, la chaleur écrasante et la dénivelée inexistante…quant à l’altitude !
Bref, une baisse importante de préparation (que je néglige dans mon objectif temporel).
Début juillet, je fais la reconnaissance du parcours avec mon père et mon fils sur 5 jours. Lourdement chargé pour être en autonomie, la vision du parcours n’est pas la même, mais cela permet tout de même de se repérer pendant la course. Malheureusement, nous nous trompons plusieurs fois de chemin et le trajet n’est pas tout à fait identique…
Après de nombreuses triturations de cerveau et de consultations, je me fait « rodiométriser ». Petit veinard, je profite de ses conseils de Rodio : un temps mini en 18h et un maxi en 19h30.
19h sera mon objectif officiel.
Je m’aide du site http://www.softrun.fr pour peaufiner les temps de passage.
Le tableau est parfait et, en course, je me rends compte qu’il est très utilisé. Merci à son auteur.
Je partagerai une chambre dans l'hôtel du CE de la gendarmerie des Praz avec 2 autres kikous: Canadou, rencontré à Gérardmer, et Pégase, illustre pour la majorité des habitués du forum, mais que je n'ai jamais vu en vrai. Lillois tous les deux, je dois les récupérer en gare de Dijon pour un co-voiturage le jeudi matin. Un retard indépendant de leur volonté, merci de notre compréhension, les fait quitter la Capitale à l'heure où on devrait s'éloigner de celle des Ducs de Bourgogne.
Bon! On fini par arriver à Cham vers 15h.
On jette nos affaires dans la chambre et on file retirer les dossards.
Une trajectoire pour le peu désordonnée nous permet de croiser d'autres kikous et mon beau-frère. Notre errance finit par aboutir dans la salle du retrait des dossards.
L'organisation décide de nous 'pucer': à tout moment nous serons visibles sur Google earth lors de la course. En attendant, ‘informatique et liberté’ est bafoué! Je suis sùr que c'est un coup de Jupette pour me surveiller depuis la maison. Hé oui! Elle n'a pas eu ses congés et ne peut pas être de la fête. Elle qui s'enthousiasmait de revoir Cathy la femme de Blob. Partie remise pour le OFF Dijonnais d'octobre?
Dossard en poche, on se retrouve à une terrasse ensoleillée avec la majorité des kikous présents. Personne n’est stressé, l’ambiance est chaleureuse.
Je fais un petit détour par la crêperie avec un de mes fils qui est justement sur Chamonix, et je me file au pot Raidlight avec le Team éponyme. Je fais enfin la connaissance de Philpask, un autre dijonnais avec lequel je n'ai jamais réussi à caser ni un entraînement ni une course malgré tous nos efforts.
Pour finir cet après midi très dynamique, Canadou, Pégase et moi allons manger quelques pâtes en ville. A 21h00 les sacs sont prêts. A 21h02, je dors. L’excitation ressentie depuis lundi soir est retombée en arrivant dans la vallée. On y est, y’a plus qu’à !
Le lever se fera à 5h30 pour prendre les premiers bus et squatter une bonne place au départ.
Canadou semble un peu nerveux, il est déjà sous la douche que le réveil n'a pas encore sonné.
On déjeune les cochonneries qu'on a sous la main et hop direction la ville pour prendre le bus.
Le tunnel est traversé sans encombre et tout le monde se dirige vers la patinoire. Un pipi, un remplissage de gourde et on ressort pour chercher un café. On a le temps de déguster cette spécialité italienne avant de monter tranquillement au départ. Finalement, peu de monde se précipite devant l'arche et notre arrivée de bonne heure est un peu superflue. Nous posons nos affaires en trop dans le sac en plastique que nous récupérerons à Cham et nous allons nous asseoir sur la zone de départ.
Courmayeur 10:00 objectif Bertone entre 1h41 et 1h50
Après les hymnes nationaux des 3 pays accueillants (Suisse, France et Italie) et un tohu-bohu purgatoire, le calme revient pour égrainer le décompte final.
C'est marrant, j'avais l'impression d'être bien placé à moins de 10m derrière l'arche du départ, mais à peine 50m de 'couru' j'aperçois les premiers déjà très loin. C'est vraiment parti au sprint devant.
Respectant les recommandations, Canadou et moi, nous trottinons tranquillement dans la ville. L'ambiance est chaleureuse et bruyante – c'est l'Italie!
La montée commence sur une route goudronnée. Ce n’est pas plus mal pour l'échauffement. On est dans le rythme du troupeau lorsqu'on atteint le premier sentier. Mon but est atteint, je n'aime pas être obligé de doubler ou de laisser passer à longueur de temps. C'est ce qui m'empêche d'apprécier la Saintélyon.
La grimpette se fait sur un sentier que je n'ai pas parcouru en juillet. La pente est moins raide. Seul et partant sur moins long, je me vois très bien le courir. Mais là! Prudence, prudence, je reste dans le rythme. Canadou suit, mais son objectif prévu étant d'une heure de plus que moi, il a un peu de rab sur son heure d'arrivée à Bertone. Sur la fin, il décroche un peu; Je me retourne plusieurs fois, mais vois qu'il préfère assurer.
Soudain, je me retrouve le nez sur un badge Kikourou: il s'agit de Mogwaï.
On échange et j'apprends qu'il travaille à Singapour. Il est en vacances en France et repart immédiatement après la course. Je pressens que sa récup va être difficile, mais je ne lui en parle pas.
Jusqu'au refuge de Bertone nous montons ensemble, puis je le perds pendant le ravitaillement.
J'ai mis 1h51 pour arriver au lieu des 1h45 visés; difficile d'aller plus vite dans cette foule. Ce n'est pas grave, on a qu'à dire que je m'économise, je pourrai mieux accélérer ensuite.
Bertone 11h55 objectif Tête de la Tronche entre 1h01 et 1h06
Je repars et j'aperçois Canadou qui arrive. Je lui fais coucou et rentre dans le rythme de cette montée ardue. L'hélicoptère décolle du refuge et un caméraman nous filme. J'agite mes bâtons pour faire original.
La montée est rude, je m'interroge toujours lorsque je vois de frêles jeunes femmes avec des sacs à dos aussi lourds que le mien me doubler...Est ce que je n'aurais pas trop de muscles?
Un petit plat pour se remettre et libérer les mains des bâtons. Je fais quelques photos. Et ça remonte. La ligne de crête est splendide, on a un beau point de vue plongeant sur la gauche. J’essaye d’apercevoir le sentier où nous passerons.
Enfin le sommet ! Petit contrôle. Il est 12h53. Je suis monté en 1h. Parfait, je tiens le timing.
Tête de la Tronche 12h53 objectif refuge Bonatti entre 42 et 46 minutes
Le début de la descente est magnifique, j’admire. Je descendrais bien plus vite, mais j’ai peur de me cramer ou de prendre trop de risque en étant obligé de courir à coté du sentier. Doubler n’est pas facile et j’enrage un peu de ne pas ‘lâcher les chevaux’… J’essaye bien quelques fois de doubler, mais c’est toujours un peu scabreux. J’ai quand même globalement l’impression de gagner du temps sur mes voisins.
J’arrive au petit pont enjambé en juillet, la suite de la trace est relativement plate jusqu’au refuge, sauf la montée au refuge.
J’y arrive à 13h36, en 43 minutes ; je suis dans le tempo, même si je n’arrive pas à rattraper mon retard, tout va bien. Tout ? Non, j’ai quand même mal aux cuisses dans les descentes… Je sens le défaut d’entraînement…
Il y a du monde. Je rallonge l’eau de la poche et me contente d’eau dans mes petites fioles, j’en ai déjà marre du sucré !
refuge Bonatti 12h53 objectif Arnuva entre 41 et 44 minutes
J'essaye de prendre de la soupe, mais je suis découragé par le temps d'attente. Je repars aussitôt. Je pars bon train. Le parcours est plutôt facile et descendant...mais pour les autres aussi. Difficile de gagner des places, je vais tenter de ne pas en perdre. Je n'ai aucune idée si le rythme que je m'impose est bon ou pas. J'espère ne pas me cramer.
J'arrive à Arnuva sous les applaudissements tonitruants d'une foule en délire à 14h16, soit 57 min après mon dernier contrôle; je pense avoir augmenté mon retard, mais c'était sans compter le temps de pause prévu au refuge. En fait, j'ai 10 minutes d'avance sur ma fourchette basse, mais la fatigue étant là, je crois être en « retard » sur mon objectif.
J'ai eu très chaud dans la descente et du mal de boire autant que je le voulais. Je me jette bêtement sur 3 verres d'eau fraiche (cul sec) et une soupe chaude. Un peu de fromage et une tranche de viande des grisons (ah! Gourmandise) me donnent un peu de solide. Et je repars rapidement pour diminuer mon soit disant retard.
Arnuva 12h53 objectif Grand Col Ferret entre 1h16 et 1h42
Je suis surpris du profil qui suit; Lors de ma « reco » de juillet, nous nous étions permis de monter par la route qui serpente tranquillement jusqu'au refuge. Au retour, j'avais bien remarqué que la course empruntait un sentier, mais je lui voyait moins de pente. Erreur de préparation: rien que pour le refuge d'Elena, on prend 293 m en 2,4 km, soit une pente de plus de 12% de moyenne! Autant dire que mon « repas » m'est resté sur l'estomac, difficile de digérer en plein effort! Mais j'apprendrai plus tard que d'autres ont souffert plus que moi (pauvre Canadou qui fera une course en relais avec Bernard le Pirate).
Enfin le refuge d'Elena, j'ai une pensée gourmande pour le meilleur chocolat chaud que j'ai jamais bu le mois dernier...mais j'ai peur que ce soit trop lourd, je poursuis ma route docilement.
Une bonne centaine de mètre sous le sommet, je suis « obligé » de m'arrêter, pas une douleur, mais une gêne me contraint la cage thoracique. Comme mon cardio est HS, j'hésite entre pulsations trop importantes, digestion difficile et manque d'oxygène. Le seul remède me semble une petite pause face au soleil et à cette magnifique vallée glacière. Une vingtaine de concurrents plus tard, je résiste à la sieste et je repars pour rejoindre le sommet.
J'arrive aux tentes jaunes à 16h02, en 1h25. Je suis dans mon timing, mais je crois le contraire.
Grand Col Ferret 16h02 objectif La Fouly entre 1h08 et 1h14
C'est le début de la grande descente. Ne pas s'emballer me disais je dans mes rêves les plus fous... Aujourd'hui, j'aimerais bien m'emballer un peu. Y'a du mou dans les genous! Je ne sais pas pourquoi, la douleur dans les cuisses? le manque de niak, toujours est il que je n'arrive pas à suivre le rythme général sur ce sentier facile. Je passe devant notre salle à manger de juillet, les fleurs n'y sont plus. Et je continue à me faire doubler jusqu'à la Peule où je m'arrête refaire le plein de mes fioles sous le tuyau. La flemme m'empêche de défaire mon sac pour vidanger ma poche à eau et remettre de l'eau fraiche. Comme beaucoup, je mouille ma casquette dans le seau (ou certains, peu dégoutés, remplissent leur gourde). 5 minutes plus tard, je regrette d'être obligé d'aspirer de l'eau chaude de ma poche; mais quel andouille! J'aurais du 'perdre' 1 minute et avoir de la bonne eau fraiche! Promis, juré, on ne m'y reprendra plus.
Un petit passage sur les ardoises saillantes a ouvert le bras d'un concurrent qui descend doucement vers les soigneurs.
Et je me fais doubler, je me fais doubler...le courage m'abandonne. « Déjà que j'avais du retard, c'est de plus en plus dur, comment le rattraper? »
J'arrive enfin à la Fouly à 17h30, en 1h27. J'ai ½ h de retard sur mon objectif de 19h et plus de jus. Ma décision est rapide, peu importe le flacon pourvu qu'on ait l'ivresse. Tant pis, je laisse tomber mon temps objectif et je me contente de terminer. Bon, si je peux réussir à être dans le 1er tiers, ce sera super.
La Fouly 17h30 objectif Champex – plus d'objectif de temps
Je reste un temps certain pour être sur de commencer la digestion. J'ai renouvelé ma poche à eau et je déguste une soupe de vermicelle assis à table. Je ne regarde plus ma montre, mais les autres qui s'agitent. C'est cool d'être zen. - ou fatigué? Surement fatigué parce qu'il me semble être retombé sur Mogwaï pendant quelques centaines de mètres, mais était ce lui? Ma mémoire me fait défaut.
Je connais bien le chemin qui suit, on l'a pris en juillet et a cherché un point d'eau pour notre bivouac. Je sais qu'un petit footing s'impose. Je pars. Au bout d'un certain temps, je passe devant notre bivouac, « moment nostalgie » comme dirait Nicolas Hulot et je m'imagine dans mon mon duvet chaud. Déjà 8h de course.
On quitte la route forestière pour monter un petit sentier. J'aperçois au bas quelques coureurs en train de faire demi tour et remonter. Je les plains dans ma tête, le type derrière les plaint tout haut. Plus loin, un spectateur nous encourage par nos prénoms écrits sur le dossard; mon poursuivant s'appelle Vincent. On entame la conversation.
Plus loin, on rattrape un couple de coureur; Non, on ne veut pas doubler, oui, on profite du rythme. Nous cheminerons ensemble jusqu'à Champex.
La montée de Champex a été fatale à Vincent l'an passé. Il décide de l'aborder tranquille, je suis d'accord? plutôt d'accord? Tout à fait d'accord! (je ne me rappelle plus bien pourquoi, mais en juillet, j'avais été obligé de faire une pause dans la montée).
On démarre tranquillement. Quand on passe sans s'arrêter devant la jolie fontaine où nous avions déjeuné en juillet, je sais que nous ne sommes plus très loin de Champex.
On arrive à la route et Vincent sent l'odeur de la soupe, il accélère pour rejoindre le couple parti un peu devant, je craque. Il arrivera avant moi sous la tente du ravitaillement...et je le perds. Impossible de le reconnaître, pourtant, il est en short avec un sac à doc et une casquette...
Il est 19h54, et je ne regarde plus mon tableau d'horaires. En fait j'ai gardé ma 1/2h de retard, j'ai donc fait La Fouly – Champex à l'allure prévue. Pour l'instant, seule la descente du col ferret m'a couté du temps.
Je ne regarde pas ma montre, si à l'origine, j'avais prévu ½ h pour me changer (en quoi?) et souper, maintenant, je laisse le temps filer de son coté, je reste du mien.
Je récupère un bol de soupe et un yaourt. Je cherche une place à table et m'assoie. AHHHHHHHHHH! J'appelle Jupette pour la rassurer, mon dernier message l'inquiétait. J'apprends que je suis 568 ème. Je ne pensais pas être si bien placé. D'ailleurs, je ne pense pas, tout court.
Bon, avant d'avoir froid, je range mon tee shirt mouillé à l'extérieur du sac et enfile le même, version sèche et manches longues. Une couche par dessus et je déguste! Oui, un peu des jambes, mais surtout ma soupe.
Cette année, pour faire plus dur, l'organisation a décidé de ne pas transporter de sac de coureur à Champex. Je transporte tout sur le dos depuis le début: gels, affaires de pluie, affaires chaudes, lampes, piles bâtons... Normal! Normal? Le groupe de jurassiens derrière moi ont de l'intendance. Leurs femmes leur amènent les affaires de la nuit, et promettent des bâtons à un autre à la sortie du village. Je ne suis pas jaloux, mais je trouve que ça fait une grosse disparité avec ceux qui doivent supporter un sac de 5 kg comme moi. Ok pour la suppression du sac, mais que les accompagnateurs ne viennent pas ravitailler. Enfin! Ça ne me gâche pas la fête.
Je m'extirpe de ma torpeur grâce à de très nombreux tremblements. J'ai froid et j'ai l'impression que ça vient de profond. Il est temps de repartir. Pendant que je cherche l'eau à mettre dans ma poche, je vois Gilou01 en train de souper. (Gilou était du Off de mamanpat). Je repars avant lui. Il est 20h50, je suis donc resté 56 minutes. Tant que ça?
Champex 20h50 objectif Bovine
Ma décision d'abandonner le chrono me pousse à la sécurité à outrance. Je ne cours pas en sortant de la tente et je marche dans Champex, sur le goudron. Je passe devant ce resto où mon père nous offrit une si bonne polenta bien arrosée. Je n'ai que 10 euros, même pas la peine de penser s'attabler... En attendant, j'appelle mon père pour lui dire. Il m'encourage et promet de me suivre la nuit (chez lui, au chaud, sur l'ordi).
Un autre coup de fil à Jupette et j'enclenche la seconde. Je marche, mais je marche vite . Je pousse sur les bâtons et double énormément de monde. J'ai mis des gants et ne sens plus mon ampoule à la main. Les quelques coureurs qui me doublent le font au ralenti. Je suis content de mon choix. Soudain, c'est Gilou qui veut que je le suive en courant. Que nenni! Il est « convenu » que je le rattraperai dans la célèbre montée de Bovine. Le temps passe et je me retrouve plus vite que dans mes souvenirs dans cette grimpette et aussi rapidement sur Gilou! Je poursuis à mon rythme, enfin, le même que presque tout le monde.
Je sais que la montée se divise en 3 parties. Une première avec de grosses marches en pierre, une deuxième avec des marches en racine et enfin la troisième dans les alpages est facile (petit montée raide d'une centaine de mètres et un grand faux plat).
Je vois passer la partie rocheuse 'rapidement' et trouve la partie en racine interminable. Minable. C'est le mot! J'ai les jambes faibles. Pourtant, j'étais alerte avec mon sac de plus de 20kg le mois dernier, alors pourquoi tant de difficultés maintenant? La nuit est sombre, mon esprit aussi. Un premier 'coureur' s'arrête, puis un deuxième, puis un troisième. J'essaye de tenir bon jusqu'à l'alpage. Un quatrième...et m.....! Je m'arrête 5 minutes sur le coté, lampe éteinte, je prends un gel – depuis combien de temps n'ai je plus pris de gel?- et je bois tranquillement. Je rallume la lampe et « j'allume ». Non, je rigole! Je me traine. On est dans le brouillard. Et je suis seul, puisque je ne vois pas à plus de 10m. Le sentier atteint rapidement l'alpage. Sauvé! Peut être n'aurais je pas du m'arrêter? Je reprends ma marche rapide vers Bovine, sans vraiment doubler, je rattrape. J'arrive à Bovine 625ème à 22h58. 13 concurrents sont déjà arrivés à Chamonix. Ils doivent boire une bière avant de se coucher...
Analyse: J'ai mis 1h58 pour un objectif chrono entre1h45 et1h51. L'objectif est plutôt bien cadré.
Bovine 22h58 objectif Trient
Le temps de remplir mes fioles et prendre une soupe que Gilou arrive. On décide de finir ensemble plutôt que de faire le yoyo.
La sortie de Bovine se fait en traversant un ruisseau. Gaffe de ne pas se mouiller les pieds. La petite grimpette est avalée facilement et en avant pour la descente. Je ne cours pas mais marche assez vite (enfin, j'ai l'impression, faudra lire le CR de Gilou), les grosses marches sont avalées grâce aux bâtons. Je remercie intérieurement mon sponsor (merci papa) quand je vois la peine qu'on les coureurs qui ont fait abstraction. Ça ne doit pas être pareil sur le devant de la course, mais à notre niveau, je travaille les bras!
Le col de la Forclaz nous est indiqué par les voitures. On sent la fin proche, ça encourage. Passé le col, on dévale sur Trient, on finira les (le?) dernier hectos de déniv en courant. De toute façon, je n'ai pas plus mal en courant...
On trouve la tente cachée derrière l'église à minuit 35. On est déjà demain!
On a mis 1h29 depuis bovine quand j'aurais du en mettre 1h05 en suivant mon plan. Je ne le sais pas pendant la course puisque je ne calcule plus rien, mais maintenant, je sais que j'ai fait le bon choix. Il faudra vraiment travailler les descentes si je veux suivre un plan de ce niveau.
Trient 00h35 objectif Catogne
Le temps de prendre une soupe assis et on est reparti.
On attaque cette montée avec ardeur. Je sais qu'elle se monte facilement: la pente n'est pas faible, mais son état de surface est agréable. Contrairement à Bovine, ici, on place les pieds où on a envie, on pourrait monter les yeux fermés. Bizarrement, je n'ai pas sommeil, alors, je garde quand même les yeux ouverts.
De nouveau, la montée me semble interminable, je demande à Gilou de faire une pause, on laisse passer quelques participants et on repars. En juillet, on avait bivouaqué dans cette pente, je l'avais monté de jour et frais, aujourd'hui, je suis incapable de renseigner Gilou sur ce qu'il reste à gravir. Sans altimètre, nous sommes dans l'inconnu. Je ne suis même pas capable de savoir si nous sommes au point haut. Je crois y être plusieurs fois. Mais la nuit dans le brouillard...
Soudain, le vent glacial nous saisi. Les coupe-vents sont vite sortis. Même les Vikings qui nous suivent ne résistent pas. Oui! Des vrais Vikings, grands, costauds et qui parlent une langue qu'on ne comprends pas! Je les laisse passer devant, à eux de chercher le chemin...
Soudain, je reconnais la pancarte où nous devons bifurquer à droite vers Vallorcine, ça descend pour de bon, et Hop! Un point de contrôle, franchit dans l'élan. Il est 2h19, on a mis 1h52 à grimper jusqu'ici.
Temps objectif entre 1h37 et 1h44 au point haut auquel il faut rajouter quelques minutes pour rejoindre Catogne. La fatigue se fait sentir, mais 8 minutes c'est peu, je suis plutôt dans le timing.
Catogne 02h19 objectif Vallorcine
Ça descend, ça descend. Je me rappelle de quelques virages du sentier à ne pas rater sous peine de blessures graves: le torrent est plusieurs mètres en dessous. Je préviens Gilou. Je suis surpris lorsque j'arrive dans cette zone de ne trouver aucune rubalise. Soit quelqu'un l'a embarqué avec lui dans sa chute soit il n'y en avait pas. C'est bien sûr la deuxième solution. Je m'en inquiéterai plus tard, on me répondra que les français n'ont pas voulu placer de rubalise, « sinon, il aurait fallu en mettre tout le long du chemin ». Voilà une attitude légèrement irresponsable. J'espère que personne n'aura fait de sortie de virage à cet endroit...
Mais reprenons le cours de la descente. Je reconnais bien ce sentier, le mois dernier, nous avions poursuivi un arc en ciel, là je poursuis le troupeau.
Tiens! On ne passe pas devant les remontées mécaniques. Mais où a t on bifurqué par rapport à ma reco de juillet? Ah! On se retrouve quand même sur ce chemin forestier qui descend tranquille. Personne ne court, j'avais peur que Gilou ne me le demande, mais j'ai les cuisses qui tirent, peut être que lui aussi. Je ne lui demande pas, à quoi bon.
On bifurque dans le petit sentier qui nous amène rapidement à la gare. Enfin le croyais-je. La fatigue aidant, je ne remarque pas qu'à la reco, j'avais pris un autre sentier. J'avais prévenu Gilou que ce sentier marquait la fin de la descente, faux espoir! Celui ci est affreusement long. Heureusement que j'ai mes bâtons. J'ai mal aux bras, mais moins qu'aux cuisses.
Tout fini par arriver, même Vallorcine.
Je félicite une spectatrice de nous applaudit à la sortie du bois à 3h du mat'. Elle est surprise.
Le contrôle est franchi à 03h26. On a décidé de prendre une soupe rapidement et de repartir avant de se refroidir.
Analyse: On a mis 1h07 pour un temps objectif entre 50 et 55 min. La fatigue se fait sentir et la descente se fait bien plus lentement que prévue. Preuve du manque d'entrainement.
Vallorcine 03h26 objectif la tête aux vents
Au moment de m'assoir, je tombe sur Patrice, un autre Dijonnais. Il me dit en avoir marre et refuse de continuer. Après avoir participé à la Merrel Sky Race,excusez du peu!, il doit avoir le mental un peu usé. Gilou et moi, on tente de le faire changer d'avis. Rien n'y fait. Il prête ses bâtons à son copain et va rejoindre le bus pendant que nous repartons vers le col des Montets.
Le chemin monte très doucement, mais on ne court pas. Je manque de m'endormir plusieurs fois, et me rattrape grâce aux bâtons. Mais une fois la route traversée, la montée démarre pour de bon et cela me réveille pour de bon.
Je n'ai pas reconnu cette partie et je ne sais pas vraiment si on va monter longtemps.
La danse des frontales égaie notre montée. D'un coté c'est très joli, mais d'un autre ça joue sur le moral: que les premières sont hautes et loin!. On se retourne, derrière aussi c'est joli, et ça remonte le moral de voir que d'autres ne sont pas encore dans la bavante. Encore une montée interminable avec des grosses marches difficiles pour mes petits muscles.
Franchement, au col des Montets, j'aurais bien obliqué pour descendre tranquillou sur Chamonix en petit footing. Mais bon! En attendant ça monte. Gilou et moi, on espère plusieurs fois être arrivé en haut. Tant et si bien qu'à la première lumière fixe observée, on se persuade qu'il n'y avait pas de contrôle à la tête au vent, et qu'on arrive à la Flégère. Faux espoir: nous sommes à la tête aux vents (qui mérite bien son nom) à 6h12.
Analyse: .2h46 pour monter pour une fourchette entre 2h07 et 2h17. C'est la débandade! Il est clair qu'il aurait fallu courir jusqu'aux Montets
la tête aux vents 06h12 objectif la Flégère
Il fait froid et j'admire les bénévoles placés ici. Quand je pense que ceux de Vallorcine s'était fait un feu de palettes...
Bon! Il fait jour, j'éteins ma frontale. J'espérais qu'en modifiant mon horaire d'arrivée, je bénéficierais d'un magnifique lever de soleil sur le Mont Blanc. Pas de pot, on est dans le brouillard. Le sol est mouillé et la poussière colle aux chaussures et se dépose sur les rochers, les rendant glissants. Plusieurs coureurs manquent de tomber, je fais gaffe.
Ça monte, ça descend, ça tourne, elle est bien longue cette ½ h de transit promis à la tête aux vents. Nous aurait on abusé? Je suis frustré ne ne pas voir à plus de 50 m, j'aime tant ce panorama sur le massif du mont Blanc. Avis que je partage avec un ami de mon père qui a marché (presque) toutes les montagnes du globe.
Bizarrement, j'ai les jambes dures mais molles... je n'arrive pas à trouver le jus pour accélérer. Rodio m'avait promis des moments de moins bien, finalement, celui ci dure depuis 50 km. En fait, depuis avant la Fouly, j'ai du mal de boire ou de manger. Donc, quasi plus de gel mais je me force à boire régulièrement. Mais à chaque fois c'est la même chose: j'avale de l'eau, j'ai la sensation qu'elle se met en boule dans l'estomac, quelques minutes après j'ai un 'coup de chaud' et quelques minutes après, les jambes molles. Et il est à nouveau temps de boire!
Gilou est comme moi: il se focalise sur la bière qu'on va s'offrir à Cham. On se jure de préférer les trails de 50 à 70 km. Plus courts, on peut vraiment jouer en courant, surveiller sa place... Plus jamais d'ultra!
Enfin la Flégère. 45Minutes! A t on trainé? Peu importe. On rentre dans la tente du ravitaillement: il est 6h57.
Analyse:objectif entre 34' et 37', on a mis 45', à cause des rochers glissants et du manque de jus et de souplesse pour sauter les grosses marches.
La Flégère 06h57 objectif CHAMONIX!!!!!
Comme on se l'était dit, pas de ravitaillement pour les braves, juste un verre d'eau. Il n'y a plus qu'à descendre maintenant.
On sort de la tente en marchant vite sur une piste à 4*4. Gilou veut courir, je n'ai pas plus mal en marchant qu'en courant, j'accepte.
Nous voilà parti à 'dévaler' la pente. On double!?! j'ai mal mais pas plus que depuis 10 heures maintenant. On est doublé par une fille qui nous avait lâché dans la montée, mais qui s'était arrêté au ravito. On la suit. Cette accélération me fait m'apercevoir qu'en déroulant plus, j'ai moins mal. Je me laisse donc aller et j'attends régulièrement Gilou qui suit son train-train. Arrivé en bas de la côte, on court sur le plat et je m'effondre immédiatement! Mais n'ai je donc plus de jus? Heureusement, ce plat est court, ça redescend sur le goudron, ça sent bon la ville, on est presque au bout, heureux de finir.
On sort du bois et on fonce sur l'église, je passe devant ma voiture qui m'attend pour me ramener à l'hotel; Ah! Une douche et des draps propres! Enfin, pour l'instant, il faut encore rejoindre l'église. Au prochain carrefour, on tournera à droite et tout schuss vers le centre ville. NON!!! Un volontaire me fait tourner à gauche pour faire un tour 'd'honneur' le long de l'Arve. Mais à cette heure matinale, les supporters sont rares.
Soudain, le fils de Gilou lui saute dessus. Il est fier de son héros de papa. A l'arrivée, on pose pour la photo avant la ligne. 3 concurrents sprintent pour nous griller des places. Je tire Gilou pour qu'on continue de discuter de l'autre coté du chrono. On ne connaissait pas notre place, alors pour essayer de finir dans les 600 premiers, autant ne plus trainer. On fait les 10 m manquants et nous voilà 574ème!!!
SUPER!
Il est 8h07, on aura mis 22h 05'32'' pour boucler notre demi-tour.
Analyse: descente de la Flégère en 1h09 pour une fourchette de 1h14 à 1h20
Je suis satisfait d'avoir pu finir, mais j'ai déjà eu plus d'émotion à l'arrivée. C'est une 'victoire' en demi teinte.
Les plus:
j'ai fini mon premier vrai ultra (+ de 70 km), qui me rapporte 3 points (qui font six)
j'ai un très beau gilet en polaire (l'inscription finisher est discrète, je pourrai le porter)
j'ai mis un temps honorable et
je suis au premier tiers des arrivants
Les moins:
je savais que je finirais (sauf blessure),
j'ai déjà mis ce temps au brevet de rando du CAF à Dijon (même si la dénivelée n'a rien à voir),
je suis loin des 19 heures 'programmées' et
je suis sur maintenant d'avoir « gâché » ma préparation ces 2 derniers mois
j'ai fait la plus petite course des 4
C'est quand même bien.
Lorsque je regarde mes temps, je vois que la rodiométrie était correcte; Mon manque d'entrainement m'a fait 'craquer' après le 70ème km. Mais avec plus d'entrainement et un poil plus d'envie réelle de faire un temps, l'objectif est tenable.
Finalement, je replongerai surement dans l'ultra, mais avec une vrai préparation.
J'ai discuté avec Philippe, on y mettra les moyens. Pour l'UTMB l'an prochain, on se fera des sorties chocs en aller retour sur Dijon pour se faire des globules et des muscles. Il faut juste qu'il ne se dégoute pas sur le grand ultra des Templiers en octobre.
J'avais mal aux cuisses dès la première descente, mais j'ai réussi à gérer tout le reste du temps. Cette douleur a trainé toute la semaine et samedi matin, je ne pouvais encore que difficilement me mettre accroupi. Puis vint samedi après midi et les 10 km du Bien Public. Course sponsorisée annuellement par ma société, j'y ai accompagné mon grand. Un tour en 56' pour me décrasser. La douleur aux cuisses a été continue mais facile à ignorer. Puis mon petit ayant profité de notre absence pour perdre les clés de la voiture dans le canal, j'ai fait un aller retour à la maison: 7km à 12km/h, mon allure marathon. Je me sentais bien. Et cela m'a été salutaire, dès le soir, j'ai pu de nouveau m'accroupir.
Dimanche, je sens les muscles fatigués mais pas plus. J'aurais peut être du me décrasser plus tôt?
En tout cas, il faudra que je travaille musculairement les cuisses en descente. J'ai bien travaillé la technique cette année, mais à Dijon les descentes sont courtes et je vois que c'est surtout là que ça a pêché.
mes photos sur http://picasaweb.google.com/fulgurex.CAP/20090828CCC#
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11 commentaires
Commentaire de millénium posté le 06-09-2009 à 21:40:00
belle course , beau récit et belle analyse....Vraiment , respect .
Commentaire de shunga posté le 06-09-2009 à 22:12:00
bravo, belle course, bien gerée.
Commentaire de idec59 posté le 06-09-2009 à 23:31:00
Bravo !
Commentaire de intuitiv posté le 07-09-2009 à 07:12:00
sympa ta course , maitrise totale...
a bientot sur nos sentiers dijonnais
Commentaire de gilou01 posté le 07-09-2009 à 17:53:00
bravo pour ton récit et ta course par contre pas terrible la bibine a l arrivée l année prochaine on en prendra avec nous
Commentaire de riri51 posté le 07-09-2009 à 21:41:00
Félicitations...à présent bonne récup!
Commentaire de sarajevo posté le 08-09-2009 à 07:25:00
bravo pour ta course fulgurante ....
a+
pierre
Commentaire de LtBlueb posté le 08-09-2009 à 22:49:00
bravo pour ta course , et un récit millimétré !
pour l'utmb 2010, tu vas repérer une trentaine de fois l'itinéraire du off dijonnais et ca le fera :))
Commentaire de Mame posté le 10-09-2009 à 13:56:00
Bravo pour la performance. Merci pour ce récit et les analyses, celà donne l'envie mais pas pour tout de suite... Un autre dijonnais qui rêve de dénivelées plus importantes
Commentaire de DJ Gombert posté le 06-03-2010 à 17:22:00
Que dire : un récit excellent ! rempli de précieux enseignements et détails, de ceux qui permettent de finir, avec parci par là quelques légéretés et notes himouristiques, comme autant de fleurs dans l'alpage.
Un récit que je vais certainement reparcourir plusieurs fois d'ici ma CCC 2009.
PS : il faudra prendre une bière ensemble à Chamonix
Commentaire de myrtille posté le 07-05-2010 à 19:54:00
Bravo pour cette CCC et ce beau récit que je viens de lire en prévision de fin août! Que d'enseignements et le principal: on n'est jamais assez prêt! Je suis sûre que tu seras tip top pour l'UTMB.
A bientôt peut-être à Cham avant nos départs: nous nous étions déjà rencontrés à l'apéro Raidlight en 2009, cf ta photo.
Bonne préparation.
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