L'auteur : bubulle
La course : Ultra Tour du Beaufortain
Date : 22/7/2023
Lieu : Queige (Savoie)
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Distance : 114km
Objectif : Pas d'objectif
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40 autres récits :
"Comment vais-je raconter cette course ?" : c'est la question que je me pose pendant cette immense descente qui me mène vers l'arrivée de mon 3ème UTB....et le premier que je termine. C'est souvent que, pendant une course, je pense un peu fugitivement à ce que je vais pouvoir écrire dans le traditionnel récit.
Est-ce que je ferai un récit précis, caillou par caillou, le type de récit qui peut servir de référence à un autre coureur pour préparer la même course ? Ou bien un récit ou deuxième degré, en me payant un peu la fiole du pauvre coureur que je suis ? Ou encore, un récit décalé avec uniquement les à-côtés de la course ? Ou encore un récit à rebours, qui commence par la fin ? Un guide touristique avec des dizaines de photos ? Ou bien une dramatique émotionnelle qui terminera à coup sûr dans le tome 3 des récits Kikouroù ?
Eh bien, j'ai déjà fait à peu près tout cela, en 118 récits de course, ça devient coton de se renouveler. Alors, en fait, je ne sais pas, je vais me laisser porter, je vais improviser. Cela sera peut-être décousu, cela va peut-être sauter d'un style à l'autre. Alea jacta est, c'est parti.
Il y a une semaine, j'étais très précisément, à l'instant où j'écris cette phrase (samedi 29 juillet 2023, 15h15), ici :
Il y a 1 an et 13 jours, le 16 juillet 2022, j'étais à cette même heure, là :
Il y a 2 ans et 12 jours, le 17 juillet 2021, toujours à la même heure, j'étais là (flèche bleue, je vous ai mis la flèche rouge de cette année) :
Il y a 698 jours, le 30 août 2021, soit 44 jours plus tard, j'étais là :
Ce même jour, j'y ai gagné ça dans l'épaule gauche :
Il y a 34 ans, j'étais là (le personnage replet en slip ridicule, à droite) :
Il y a 42 ans, j'étais là (à droite!) :
(tout ricanement à la vue de la coupe capillaire sera puni d'un bannissement immédiat)
Il y a 56 ans, j'étais là (toujours à droite!) :
Il y a environ 62 ans, j'étais là :
Et, en fait, toutes ces photos (sauf la dernière, mais ça m'amuse de vous la mettre) montrent une grande partie des raisons qui m'ont ramené une troisième fois, à Queige. Ces raisons sont ce qui m'a tourné dans la tête pendant toute cette interminable nuit que je vais vous raconter plus bas, le coup de pied au cul pour sortir du mouroir de La Gittaz, le truc qui fait penser "un pied devant l'autre" quand on pioche pour arriver au Pas d'Outray, les petites ailes qui poussent soudain dans le dos dans la descente sur Hauteluce, le courage déployé pour éteindre ce foutu réveil à 2h du matin dans la chambre 119 de l'Ibis Budget de Gilly-sur-Isère, et au final celles qui affolent l'Edora 8DR-T de Biotronix à 9h33 quand je peux dire "Je l'ai ENFIN fait".
On peut dire ce qu'on veut, j'ai quand même un certain chic, parfois, pour me mettre une pression pas possible sur certaines courses. Je vous laisse relire les 118 récits précédents pour retrouver lesquelles (mots-clé pour aider : cailloux, talons d'argent, nez rouge). Et là, paf, c'est tombé sur cet UTB.
Certes, il est clair qu'après avoir couru l'UTB70 en 2021, terminé au cimetière de La Gittaz hors d'haleine car je n'avais pas encore mon Biotronix Edora 8DR-T, puis avoir couru l'UTB50 en 2022 où le Biotronix avait bien biotroné mais où quelqu'un avait oublié de couper le four dans le Beaufortain, cela donnait déjà quelques raisons de se mettre en mode "ça va chier, dégagez y'a Raoul qui arrive et la coursette au Père François elle va voir ce qu'elle va voir". Mais Raoul, il avait aussi les autres photos dans la tête pour se dire qu'au lieu de sortir les dents et se la jouer guerrier du Mordor, il ferait mieux d'enclencher le mode bonze tibétain, viser de juste passer les terribles barrières horaires du Père François sans chercher à fighter avec les 14 autres V3 (plus un V4). Ce qui serait la façon la plus sûre d'être obligé de repartir pour un quatrième tour.
Et puis il y a une SuperSuiveuse qui se dit que si je pouvais arrêter de passer certain week-end de mi-juillet à Albertville et Queige, ça pourrait être une idée, après tout. D'ailleurs, elle vient superviser tout le bazar, histoire de me secouer le moment venu. Je spoile un peu : elle ne me secouera pas une seconde, mais elle me donnera tout le reste et je crois que tout Queige sait désormais pourquoi.
Bref. Si on la commençait, cette course ? Déjà, bon, l'indispensable roadbook est là :
Trop millimétré, l'objectif est de passer à raz des terribles barrières horaires et, en gros, de finir dernier. Bon, en réalité, le roadbook que j'emporte, c'est ça :
Donc, en gros deux Post-it pliés dans une pochette plastique, avec les seuls points importants à mes yeux : les temps de passage aux points-clé, et le profil de la fin à partir de La Gittaz, que je connais moins bien ou pas du tout. Le début, après deux tentatives, c'est bon, je peux nommer les cailloux.
Et, dans la famille "préparation", je me suis d'ailleurs fait une sortie spécifique UTB pour aller refaire la section Bonhomme-Chemin du Curé-Gittaz-Col de la Gittaz où j'avais vécu une descente aux enfers cardiaques en 2021. Laquelle sortie a bien démontré que, oui, mettre 1h15 pour descendre du Bonhomme à La Gittaz, c'est tout sauf normal.
Par contre, dans la même famille "préparation", la contusion osseuse récoltée au bas du péroné droit et qui a mis 2 mois à se soigner à peu près correctement a réduit mes sorties de préparation à des sorties trail pendant 1 semaine 1/2 en Val Montjoie et Beaufortain. Et, pire, une douleur persistante à cette cheville droite subsiste (inflammation d'un ligament, peut-être) et va, j'en suis sûr, me handicaper fortement en descente. Donc, difficile d'être autre chose qu'en mode JALBHAC et ça va forcément être chaud.
Bref. Si on la commençait, cette course ? Allez, on s'y jette : hop, on éteint le réveil, hop on avale les nouilles chinoises de rigueur, hop on met le Bubulle dans la voiture, hop on récupère le Yienyien sur un rond point albertvillois, hop on monte à Queige, hop on gare la seule voiture qui a un VTT accroché à l'arrière, hop on papote avec les kikoureurs, hop on pose le sac d'allègement en se demandant pourquoi la ligne des dossards 600 (les vieux) est 2 fois plus longue que celle des autres :
Hop, on avale encore 2 ou 3 cafés, on fait le bisou de rigueur et "à tout à l'heure à St-Guérin", hop on rentre dans le sas, hop on part. Finalement c'est pas difficile, non ?
J'ai été un poil plus raisonnable que l'an dernier et ne me suis pas placé à la toute fin du peloton. Mais je suis assez loin à l'arrière, fort logiquement. Donc je suis au moins sûr d'une chose : je ne partirai pas trop vite, même sur les 2km roulants du début. Dès les premières vraies pentes qui vont nous mener de 528m d'altitude à 2066m, la jolie file indienne s'organise. C'est là qu'on voit que le public, sur cet UTB, c'est majoritairement du trailer avec du bagage : pas de dépassements sagouins, pas d'agacement dans le gros bouchon qui se forme en tout début de montée dans le single. Pourtant, je le constaterai petit à petit, un grand nombre de coureurs découvrent cette course, mais il faut croire que beaucoup, aussi, ont bien compris qu'il ne faut pas la prendre à la légère. Bravo, les gars et les filles : que vous ayez fini ou pas, vous êtes un des clés qui font cette course si belle.
Et donc, toute cette montée très longue est quasiment sans événement : un pied devant l'autre, 0,20m de D+ à chaque pas (j'avais calculé ça dans la montée de la Pierre du Carré, je crois) et on recommence cela environ 7500 fois modulo quelques milliers et on va être en haut. Les seules aventures de cette montée initiale seront un pointage (Mollesoulliaz, là où on ne se mouille pas les souliers : 496° sur 589, 5'12" devant le dernier, 25'33" derrière le premier), un autre pointage (Les Chappes, 446° sur 556, 25'41" devant le dernier, 38'11" devant le dernier...à mon avis 43 coureurs sont passés pendant que le pointeur allait pisser), un changement de parcours (chic des carrés en plus) sur quelques centaines de mètres pour cause de patous, un Trimoreo qui me dépasse sans me reconnaître (moi non plus), un poulo qui fait de même en me disant bonjour et en me filmant et un coureur/organisateur de l'Allier avec qui on cause balisage.
Et oui, et puis aussi, on voit mon arrière-cour de la Yaute :
Elle a un petit côté "au loin le Mordor", la crête du Joly, non ?
Que les premiers sommets aperçus au lever du jour soient le Joly et la Croche, si c'est-y pas un signe, ça ! Ils sont trop forts ces savoyards, même ceux de la Basse-Savoie (attention, ceci est du second degré).
Et donc, me voici donc pour la troisième année consécutive pointé par l'ami Gilbert, à Frette Basse. Je fais bien sûr la même vanne pourrie que les deux fois précédentes, en suggérant aux autres bénévoles de vraiment remplacer "le vieux" parce qu'il a du mal à viser avec le téléphone. Sacré Gilbert, personnage de la course à pied de la Basse-Savoie et ami fidèle qui avait encore trouvé, la veille, quelqu'un à qui raconter l'histoire de la chaise que je lui avais empruntée à l'arrivée du Vulcain 2015, sans le reconnaître.
Gilbert doit d'ailleurs viser de travers car mon passage à Frette Basse n'est pas enregistré : j'y suis environ 460° sur 589 en 2h16, environ 46' derrière les premiers et 1h07' devant le dernier (qui était TRES loin : 25 minutes devant l'avant-dernier). J'ai (sans le savoir) 13 minutes d'avance sur le roadbook. Passer dans les temps du roadbook à Frette Basse, c'est une pure lubie. En tout cas, comparé aux 2h18 de 2021 et 2022, je suis pile dans le rythme. Prendre un peu d'avance sur le roadbook faisait partie de l'idée de départ surtout en sachant qu'il y a de bonnes chances que je perde cette avance dans les descentes. Et passer dans les temps de 2021 jusqu'à Roselend, cela fait aussi partie de l'idée de base. Donc, pour l'instant, le plan est respecté....mais je n'en sais strictement rien.
Mais bon, le plan est toujours respecté au début des courses. La question est surtout de savoir jusqu'où il est respecté. D'où l'intérêt de ne pas nécessairement savoir, mais surtout gérer les choses aux sensations, rester concentré sur "faire ma course", ne pas m'occuper des autres vu que, de toute façon, je finirai dans les derniers. C'était justement volontaire, je n'ai pas, sur mon "roadbook post-it" mis de repère avant le Chalet du Soufflet, premier ravito.
Première descente, premier test, mais elle est trop courte pour que ce soit vraiment parlant et on repart assez vite dans la longue traversée montant vers le Col des Lacs, en n'oubliant pas de regarder le jour se lever et les montagnes se dévoiler....ou pas. C'est nuageux et cela va nous donner une jolie ambiance pendant toute la matinée avec des sommets qui se couvrent, se découvrent, émergent au-dessus des nuages, un peu féérique comme cette vue d'Albertville et de la vallée, avec les Bauges et l'Arclusaz qui pointent leur nez :
C'est beau, la montagne. J'aime ça, j'ai ça dans le sang même si je n'y suis pas né. Et je crois qu'il y a quelques gênes qui expliquent cela.
Montée sans histoire vers le Col des Lacs. J'y passe en 3h13, 451°/589, 1h38 derrière le premier et 1h35 devant le dernier (mais le "vrai" dernier est plutôt à 57 minutes). Me voilà...pile dans le roadbook, les 13 minutes d'avance sont parties en fumée. Il y a donc un petit problème de calcul sur cette section!
2-3 minutes de pause "naturelle" qui, en passant me prouve que je bois bien et c'est parti pour les presque 500 mètres de descente un peu technique, qui sera le premier test. Je pars prudemment, je continue prudemment et je me fais dépasser sans surprise par, en apparence, de nombreux coureurs. Mais c'est sans importance puisque, de toute façon, je vais finir dans les derniers (je vous l'ai déjà dit?). Le seul truc qui me préoccupe, en réalité, c'est la cheville. et je dois dire qu'assez rapidement, les nouvelles ne sont pas très bonnes. Je retrouve ce tiraillement ou légère "brûlure" sur l'avant, légèrement au-dessus de l'articulation, qui était apparu dans ma dernière grosse sortie avant course, dans l'immense descente de la Tête de la Combaz sur Colombaz pendant la fin de mon "tour de l'Aiguille Croche". Lors d'une consultation téléphonique avec ma kiné de fille, nous avons émis l'hypothèse que cela doit se situer au niveau du ligament tibio-fibulaire antérieur, celui qui attache la fibula (nouveau nom officiel du péroné) et le tibia, près de l'articulation :
C'est le pied, non ?
Donc, au moins, me voilà prévenu : j'ai donc, devant moi, 27 heures avec cette douleur pas insupportable, mais assez envahissante et qui a tendance à me rendre peu sûr sur le pied droit...et aussi à faire allègrement gonfler la cheville. Bon, on ne panique pas, le tout va être d'être prudent dans les descentes et espérer que cela aura au moins l'avantage de puiser moins dans les réserves sachant que j'ai en pratique, en tout pour tout, 4 grosses sorties longues en terrain montagneux depuis les Citadelles, en avril. Les trois "packées" en 10 jours environ en début de mois de juillet. Et pas du tout de course à pied de fin avril à fin juin. Bref, les conditions idéales pour préparer un des ultras les plus difficiles à terminer, n'est-il pas ?
Et pourtant... Je sais (voir les photos en début de ce récit) que j'ai avec moi toute l'énergie, la motivation, et surtout le soutien qu'amis et famille m'ont exprimé dans le groupe Whatsapp ressuscité pour l'occasion (soutien glissé innocemment dans d'improbables histoire de lunettes de WC low-tech, mais japonaises). Je ressasse tout cela dans cette descente un peu empotée. Si vous n'avez jamais vu un descendeur empoté, c'est par là : https://youtu.be/OA_TykBp5xg?t=229 (merci à Bruno pour avoir documenté ce grand moment de technique) :
Bruno et son ami Jean-Pierre me déposent évidemment dans cette descente, ainsi que Trimoreo et tout un tas d'autres coureurs. Mais, en fait, on s'en fout puisque, soit ils finiront loin devant....soit ils ne finiront pas et me feront gagner des places sans que je ne me fatigue. Forcément puisque je vais finir dernier. Et cela ne me fait d'autant plus rien du tout qu'une fois arrivé à la piste de 4x4 qui amène au Chalet du Soufflet, je peux retrottiner sans problèmes et sans que, finalement, la cheville ne fasse beaucoup plus mal qu'en haut. Je la range donc dans la case "ranafout'" et je trottine tranquillement vers le ravito, en ignorant allègrement ceux qui dépassent à toute vibrure car ils se croient sur un marathon sur cette rare section pas technique. De toute façon, il ne faut pas être derrière moi sinon vous subirez le sort de toute un tas de petits nègres (Search Wikipedia "and then there were none").
Biiiiip, Chalet du Soufflet! Ravito express prévu : remplir les flasques à la Saint-Yorre (j'ai bu environ 3/4l....j'ai déjà fait pire!), boire deux gobelets d'eau avec du sirop de menthe (c'est génial, le sirop de menthe pour avoir du plaisir à boire de grands verres d'eau....bien plus de plaisir que toutes les saloperies isotoniques du monde, que vous vend à prix d'or l'industrie chimique du sport). Quatre rondelles de saucisson, deux tranches de pâté en croute, un bout de Beaufort (vaguement plus goutu, tout ça, que les barres bio aux extraits de courgettes ou de brocolis vendues au prix du foie gras sur Internet par ceux qui ont trouvé le filon du trailer scientifique). Un check à "René du GR73", une bise à sa Marie-Claude, on se voit l'an prochain à Cruet et c'est reparti.
Ravitaillements "express", cela fait partie de la stratégie de gestion : 4 minutes d'arrêt. Le roadbook prévoyait de sortir en 3h45, je sors...en 3h45. Et là, je le sais, j'avais d'ailleurs bien mémorisé ce chiffre. Je suis 463ème sur 586 (trois coureurs seront hors délais), 1h54 derrière le premier, 42' devant le dernier. 3h35 en 2021, 3h42 en 2022. Donc, je gère bien comme prévu, quoi.
Direction les Ardoisières et le Col de la Grande Combe, maintenant. Cette section est à peu près découpée en 4 parties : une montée progressivement de plus en plus raide vers l'Ardoisière de Cevins, autour de 2000m, une traversée assez roulante jusqu'à l'Ardoisière de la Bathie, un chaos de rochers belledonniens dans une grande combe qui donne son nom au col situé au dessus, puis 250D+ bien raides jusqu'à ce col. Les années précédentes, j'avais eu tendance à avoir envie de dépasser sur cette section, dans les parties montantes, histoire de compenser le temps que j'allais perdre dans la combe et son chaos de cailloux où je ne suis jamais bien rapide. Là, surtout pas. Je suis dans le temps du roadbook, je sais que j'ai volontairement calculé des temps longs sur ce secteur pour ne pas me "cramer" avant la section compliquée qui suit. Donc, patience. Ne pas s'occuper des autres coureurs, ne pas s'acharner à trottiner les premiers faux-plats montants, ne pas forcer plus que de raison dans la montée de l'Ardoisière, penser à faire 1 ou 2 photos pour calmer le jeu, être patient dans le chaos de cailloux et, surtout, ne pas chercher à bourriner dans la raide montée du Col de Grande Combe.
Mode "touriste", donc :
Début de la montée aux Ardoisières : on suit gentiment la queue leu-leu, dans une ambiance fantômatique
Regard vers l'arrière et le Col des Lacs joue à cache-cache
La Grande Combe et son chaos de rochers. Le col où nous allons est en face (oui, c'est raide!)
Et, après avoir quand même emmené un petit train de coureurs sur la montée finale (dont Trimoreo, je crois), le touriste passe en haut de Grande Combe en 4h51. Je crois que j'ai regardé la montre et m'être dit que l'an dernier j'étais passé à 9h pile (soit en 5 heures). En fait, non, les deux années précédentes, j'étais passé...en 4h52! J'ai (sans le savoir) 7 minutes d'avance sur le roadbook (3h58). Pour la petite histoire, les pointages en route : Ardoisières de Cevins : 446°/583, 55' devant le dernier. Et juste après la Grande Combe : 456°/586, 1h08 devant le dernier.
C'est assez amusant de comparer les photos prises au même endroit chaque année :
2021
2022
2023 (une Aiguille Croche est présente sur cette photo, saurez-vous la trouver ?)
La photo frappante est celle de 2022. C'est à cet endroit-là que nous avons commencé à nous rendre compte dans quel four nous étions en train de nous engager. Un four qui allait rôtir à petit feu 60% des coureurs de cette année, dont moi.
Alors que, là, tout va bien. Je me sens parfaitement frais. Bien sûr, la petite descente va à nouveau réveiller la cheville. Et la descente qui suit la remontée sur la piste de ski qu'on aperçoit ne va pas arranger les choses (et provoquer mon deuxième dépassement par Bruno qui va me lancer un "je t'ai connu plus intrépide dans les descentes" dont je me souviens bien). Et la section qui suit est, je le sais, toujours usante, en relances permanentes sur un sentier certes superbe dans les hauts alpages sous le Grand Mont, une très belle section du GR de Pays Tour du Beaufortain. Mais finalement difficile car assez longue sur 3,5 km jusqu'au Col des Bonnets Rouges, sans jamais savoir si on monte ou si on descend (scoop : on fait les deux!). Là, c'est un avantage énorme de désormais bien connaître le parcours : je sais qu'il faut être patient, profiter du paysage, ne pas se battre contre le terrain, laisser faire.
Bref, tourisme :
Le Beaufortain dans toute sa splendeur
Le Grand Mont
J'attends avec impatience le Col des Bonnets Rouges (qui n'a de col que le nom) pour connaître le verdict du chrono mais, sinon, je reste assez serein. Je sais d'avance que je vais souffrir dans la descente qui suit vers le Lac de Saint-Guérin mais que, là aussi, j'ai un peu anticipé cela sur le roadbook. Et le pointage des Bonnets Rouges confirme tout cela : 5h47 pour 5h53 écrits sur mon bout de papier, je suis 451°/586, 1h28 devant le dernier. En 2021, c'était 5h50 (juste avant un ravito qui a disparu depuis) et en 2022, c'était 5h53, justement.
J'ai donc, sans forcer, gagné 6 minutes sur des prévisions volontairement pessimistes. Je suis très content de moi! Et j'investis immédiatement ces 6 minutes pour mettre en place l'orthèse de cheville qui, certes, ne soignera pas l'inflammation, mais peut m'apporter une certaine sécurité dans les sections un peu délicates comme la descente à venir. Merci en passant aux quelques coureurs qui ont pris des nouvelles en me voyant assis à terre en train de manipuler ma cheville. C'est naturel, bien sûr, mais toujours réconfortant de savoir que l'entraide est bien là. Entraide qui continue avec le coureur avec qui je descends le début de ce passage et à qui je donne en gros le tableau : un démarrage assez lent de la vraie descente, plutôt en traversée après le téléski, puis une descente vraiment raide et difficile surtout quand c'est humide. Et surtout une sensation de chaleur qui va aller en augmentant même si là, il fait frais. On descend assez bas (moins de 1600m) et on ne redescendra pas si bas avant Hauteluce! L'an dernier, cette descente, je l'avais probablement mal gérée avec la chaleur étouffante qu'il faisait et avais terminé totalement rôti en bas ce qui a conduit à un chemin de croix pour remonter au Lac des Fées.
Pour moi, cette descente est le premier point-clé de la course. Elle n'est pas très difficile ni longue, mais elle sera suivie d'une remontée très exposée au Lac des Fées, à des heures qui commencent à être chaudes pour nous autres, poireaux de la fin de course. La section entre les 2 ravitos fait 17 kilomètres et plus de 4 heures, on attend forcément le ravito avec impatience et, dans cette descente, on en est encore loin (surtout qu'on le voit au loin!).
J'y suis très concentré et attentif. D'ailleurs, aucune photo, bien que le temps se dégage progressivement et que la vue commence à être superbe :
La photo date de l'an dernier!
Je suis donc lent. De toute façon, la cheville me rappelle vite à l'ordre s'il le faut. Pour autant, seuls 3 ou 4 coureurs me dépassent, il me semble. Et j'arrive étonnamment rapidement sur le chemin qui contourne le lac. Chemin sur lequel, après ne pas avoir oublié d'aller mouiller le chabob dans le torrent, j'amorce une course avec bâtons qui me fait bien plaisir et sans même trop forcer. J'ai d'ailleurs décidé d'essayer sur les rares sections roulantes de ce style, un mode de propulsion avec bâtons, en courant, mais sans alterner "1 sur 3" commme je l'ai souvent fait. Je passe en mode "1 pas, 1 bâton". C'est un mode utilisé par quasiment aucun coureur car cela sollicite pas mal les bras, mais cela a le grand avantage de ne pas solliciter trop les jambes. Si on a l'énergie pour le faire, c'est une façon plutôt économique d'avancer vite. Sur les 500 mètres plats en question, j'ai mis 3'30", ce qui nous fait un 8,5km/h de fort bon aloi. En pseudo marche nordique, j'aurais probablement du mal à dépasser les 6,5km/h. A travailler plus souvent, cela, tiens.
Bref, me voilà dont à la passerelle de St-Guérin avec un premier avantage : on voit enfin du monde autre que les bénévoles pointeurs....et surtout je vais voir Elisabeth! Sauf que....bin non, elle n'est pas là, au bout de la passerelle. Pas de panique, ça a du être compliqué : si elle n'est pas là, elle sera sûrement plus haut : je lui ai un peu expliqué que la route monte jusqu'au Lac des Fées et que, sans nécessairement y monter en voiture, on peut y monter à pied.
Bip, me voilà pointé ! Un coup d'oeil à la montre : 6h37. Un coup d'oeil au roadbook : 6h50! Tadaaaaaa! Me voilà désormais avec un matelas de 13 minutes sur le roadbook. Cela confirme surtout que, toute prudente qu'aie été cette descente, c'était parfaitement anticipé et que je n'ai, après tout, pas été si lent que cela, en tout cas par rapport au Plan. Et, pour la postérité, je suis 468°/585, 1h37 devant le dernier. Et, je le découvre maintenant, je suis en avance sur les 2 années précédentes : 6h54 en 2021 (avec un ravito supplémentaire aux Bonnets Rouges) et 6h43 en 2022, dans la fournaise.
Surtout, surtout, au delà de tout cela, je suis totalement optimiste. Je me sens très bien, je vois que la cheville se gère même si je sais que, si elle était en parfait état, j'irais plus vite (mais ce ne serait pas forcément une bonne chose!) et j'aborde cette remontée plein d'entrain. Un peu comme en 2021, d'ailleurs, où je l'avais faite à bonne allure devant Alex Forestieri....alors que l'an dernier, cela avait été un petit calvaire.
Cerise sur le gateau, un peu au-dessus du lac, quand on rejoint la route une première fois, j'entends hurler "vas-y mon bubulle". Et c'est donc avec un sourire jusqu'au oreilles que je retrouve ma SuperSuiveuseUniqueQueJaime :
Ça se voit qu'il est content de lui, le bubulle ?
Tout va bien pour elle (mais quelle galère, le parking du Lac de Saint-Guérin). Tout va bien pour moi, ce que je peux enfin lui dire (mes vaines tentatives pour envoyer un message vocal par Whatsapp se sont soldées par des échecs, le réseau en Beaufortain étant ce qu'il est). Bon, je dis juste que "ça tire un peu", ce qui est quand même un petit euphémisme : la douleur à la cheville est toujours présente, mais finalement pas un si gros mensonge que cela. Elisabeth va passer un superbe début d'après-midi en montant ensuite à pied au Lac des Fées par notre sentier, en encourageant les kikoureurs qu'elle rencontre (même s'il n'y en a pas beaucoup derrière moi!), en allant même nous acheter un morceau énorme de Beaufort d'Alpage au Chalet de la Grange aux Fées. Et, évidemment, c'est juste une tuerie....pour 25 euros le kg.
Justement, le Chalet de la Grange aux Fées, il est là
Voilà. Pendant que je vous raconte mes histoires de frometon, j'arrive tranquillement au Lac des Fées. J'ai fait une plutôt bonne montée et je ne crois pas que grand monde m'ait dépassé alors que, contrairement à 2021 où j'étais en mode bien plus compétitif, je n'ai pas forcé. De toute façon, ça ne sert à rien de forcer pour dépasser puisque je vais finir dernier, n'est-ce pas ?
Et donc, bip Lac des Fées! Là aussi, c'est plan "ravito express". Un poil moins express qu'au Soufflet, mais éviter d'y passer les 20 minutes de 2021 et les 25 de 2022. Faire le plein de St-Yorre dans les flasques, saucisson, pâté en croute, beaufort (ce sera la combo gagnant de la journée), au moins 4 gobelets de menthe à l'eau, trois mots échangés avec Trimoreo et hop, c'est reparti. Je ne m'assieds pas et en moins de 10 minutes, c'est plié. Je bipe donc en 7h17, 457°/582, 1h32 devant le dernier. Et je sors en 7h27 pour 7h48 sur le roadbook. Me voilà doté d'une avance de 21 minutes, avec la barrière horaire plus d'une heure derrière moi. Vade retro, tempus obice ! Et je ne vous dis même pas la claque que les Bubulles précédents ont pris : 7h55 pour le Bubulle2021 et 7h48 pour le Bubulle2022 (qui commençait à se liquéfier).
Et c'est donc d'un pas tout aussi alerte qu'à Saint-Guérin que je repars pour les 500D+ jusqu'au Col du Coin que je sais être un peu longs avec d'abord la montée au Cormet d'Arêches puis une longue crête au-dessus, plutôt irrégulière, puis une longue traversée sous le Mont Coin. L'avantage c'est que, quand on se sent plutôt bien, on peut profiter du paysage qui commence à devenir magnifique. Tout aussi magnifique que l'an dernier, mais avec 8 à 10 degrés de moins (du moins ressentis, voir plus bas!), et ça fait toute la différence!
Me revoilà donc à nouveau essentiellement en mode "touriste" (bon, un touriste qui fatigue quand même un peu, yé né souis pas z'oune machine...mais un touriste qui profite....et, surtout un touriste serein et tranquillement sûr de lui, pour l'instant).
Le Grand Mont (2686m) depuis la route du Cormet d'Arêches
Sommets au-dessus du Cormet d'Arêches (Crêt du Rey - 2633m)
Depuis la crête au-dessus du Cormet d'Arêches. En bas, Plan Pichu (fin de la route qui monte de la Tarentaise). La crête en haut est la Grand Pareï avec Pointe de la Portette (2607m à droite). Le Col du Coin (2398m) où nous allons est le col évasé sur la gauche.
Le Plan de la Marmotte (je ne l'ai pas vue!) et le Col du Coin en face
Vue sur la gauche depuis le Plan de la Marmotte : c'est vert, le Beaufortain!
Bref, tout cela, qui nécessite quand même quelques efforts, m'amène sans trop d'histoires au Col du Coin. La fatigue commence bien sûr à être là, et cela se sent aussi autour de moi, le rythme général s'est bien ralenti d'autant qu'on a passé les 2000m d'altitude juste après le Lac de Fées et qu'on ne va plus y redescendre avant le Cormet de Roselend. Sur mon bout de papier, il y a écrit "Coin (9h00)" et j'y suis en 8h30 ! Ça y est, la 1/2h d'avance espérée est là, petit matelas qui sera sûrement bien précieux au moment d'affronter les barrières horaires dans la nuit. En 2021, j'y étais en 8h57 et en 2022, totalement rôti, en 9h06 et j'avais du y faire une pause de 10 minutes. C'est assez amusant car, en regardant, a posteriori, les enregistrements de ma montre, j'ai, à ce passage une température de 24°C cette année contre....27°C en 2022. Et, à l'heure la plus chaude, à St-Guérin, j'ai 30°C cette année pour 32°C l'an dernier. Donc, soit les enregistrements de la montre sont farfelus, soit le ressenti est très trompeur!
Je suis pointé au Col du Coin 416°/560 (l'arrêt express du ravito a fait son effet!), 1h04 devant le dernier. Eh oui, l'écart se resserre car, sur cette course, l'élimination se fait par l'arrière! Par l'avant, je suis 3h30 derrière le premier, no comment!
On entre là dans la deuxième section-clé de la course, jusqu'au Refuge de Presset. Nous allons être en altitude, à plus de 2200m en permanence, avec des passages compliqués au Col à Tutu et aux heures les plus chaudes de la journée. C'est là qu'on peut passer assez vite d'une belle journée à une descente aux enfers mais c'est quand même un énorme avantage de savoir cela à l'avance, de savoir à l'avance que je vais me sentir lent (car ce sont surtout les descentes qui vont être délicates) et aussi de savoir à l'avance que mon roadbook pessimiste a anticipé cela. L'idée générale est que, si j'arrive à conserver mon petit matelas de 30 minutes sur la zone de sécurité, je peux envisager la suite avec sérénité.
Donc, je ne me mets pas la pression dans la descente sur le Lac d'Amour. Elle n'est pas très difficile (à peine plus de 150D-), plutôt en traversée et lever les yeux est quand même une bonne idée car on entre là dans un endroit magique où on voudrait s'arrêter tous les 50 mètres pour faire une photo :
Traversée sous le Col du Coin. L'Aiguille de Grand Fond (2920m) est dans les nuages, mais pas le symbole du Beaufortain, la Pierra Menta (2714m). On va droit devant, au Col à Tutu, la petite brêche à gauche de la Pierra Menta. Le Lac d'Amour est juste derrière le petit sommet vert, devant.
Cela vaut toutes les souffrances du monde, non? Et quand on n'est même pas en souffrance, c'est encore plus beau. Dans la pente verte en face, il y a du trailer éparpillé et on distingue même les silhouettes au Col à Tutu.
Les 300 mètres de dénivelé vers le Col à Tutu ne sont quand même pas de la tarte!
Le Lac d'Amour, c'est Beaufortain-Plage! Même si, aux cris qu'en entend, l'eau doit quand même être bien fraîche. Je me contente donc d'une humidification de chabob (on a peut-être l'air d'un clown avec ça sur la tête, mais c'est d'une redoutable efficacité). Et je pointe ici 423°/565 en 8h51 (pour 9h19 sur le roadbook, l'avance est légèrement retombée, mais l'objectif n'est plus de l'augmenter mais de la conserver), 1h29 devant le dernier qui continuera (il y aura des abandons et hors délais, ici : l'écrémage par l'arrière va nettement commencer). Et 1h44 devant la barrière horaire.
Toujours en mode gestion dans la montée. J'avais eu un petit coup de mieux l'an dernier, ici et, en 2021, j'avais mis un bon coup de collier. J'ai l'impression que, cette année, j'y suis plus isolé, ce qui a l'avantage de ne pas pousser à avancer plus que de raison. Selon le roadbook, il y en a pour 35 minutes, ce n'est pas non plus une torture. Même si, franchement c'est quand même bien raide. Je commence d'ailleurs à passer des coureurs vraiment mal en point et cela tape bien.
Elles sont vraiment petite, hein, les silhouettes au "Col" à Tutu (qui n'a de col que le nom), écrasées sous la masse rocheuse ?
Juste avant le col, petite échappée vers la suite du programme : l'Aiguille de Presset domine le Col de Grand Fond à sa droite (le plus haut des deux visibles). Le refuge, prochain ravito, est en dessous, si on sait où il est
Et voilà, et de trois Cols à Tutu ! Les bénévoles sont nombreux, c'est un passage-clé où il faut être vigilant, les chutes sont possibles (souvenir de 2021 où un coureur avait chuté sur plusieurs mètres et où il a fallu du temps à l'hélico pour trouver une trouée dans les nuages pour venir le chercher). Les parties les plus difficiles sont toutefois équipées de cordes et il faut juste être vigilant. Bon, je ne suis jamais fana de ce type de passage, donc j'ai hate d'en finir, je ne regarde même pas la montre et le roadbook-post-It. Cela tombe bien car il n'y a pas écrit "Tutu" dessus, je devais savoir que je ne regarderais pas.
Donc j'y pointe 418°/553 en 9h21 avec 34 minutes sur le roadbook, et 1h31 d'avance sur le dernier. Qui a dit "gestion" ?
Allez, on s'y jette, juste une photo avant :
C'est beau, mais....y'a un peu de chantier en dessous !
Ce sera la dernière avant un bon petit moment car je me suis plus concentré sur le terrain que sur le paysage vu que, quand même, la traversée entre le Col à Tutu et le Refuge de Presset qui est certes courte (un peu moins de 2km) n'est franchement pas roulante ! On descend 100m, on en remonte 50, mais surtout, on passe son temps à monter 5 mètres pour en redescendre 5! Là, je suis vraiment lent, à peine plus rapide qu'un groupe de randonneurs et leurs gros sacs. Mais j'ai trop le souvenir d'une arrivée l'an dernier en mode décomposé, au Refuge de Presset, et du temps fou que j'y avais passé pour en repartir avec la certitude que j'arrêterais au Cormet. Pas question de cela, cette année, il faut garder de l'énergie et de l'envie pour la courte montée au Col de Grand Fond, puis l'immense descente de la Combe de la Neuva où il faut pouvoir courir pour conserver cette marge suffisante sur les BH qui vont se resserer violemment au Cormet.
Une seule contrariété sur cette section : une chute sans gravité en descente, sur l'arrière et le cul (zeugme!). Malheureusement, c'est là qu'est mon téléphone, dans la poche arrière du short Evadict, légèrement différents des premiers shorts de trail à poches multiples. Ils permettaient de mettre le téléphone sur le côté, mieux protégé ce que ne permettent plus les nouveaux. J'y laisse dnoc un écran de téléphone, dans cette affaire (je ne le découvrirai qu'en fin de course).
Donc, désolé, mais les photos se raréfient un peu mais, par contre, j'arrive plutôt bien au Col de Bresson puis plutôt facilement au Refuge de Presset. J'y pointe 425°/555 en 9h56 (35 minutes pour ces 2 kilomètres, ce n'est pas de trop!) et 1h53 devant le dernier. Sauf que le dernier à cet endroit là, en 11h49 il est déjà condamné comme une quarantaine de coureurs: mon roadbook JALBHAC autorise d'arriver en 10h35. C'est donc le 503° qui, selon ce calcul, a encore une chance (il n'a pas fini)! En réalité, c'est le 527ème (en 10h50) à ce refuge de Presset qui est le dernier passé à ce point qui finira.
Là aussi, l'objectif : être efficace! Donc, flasques, mais je change : je n'ai plus trop le goût de la St-Yorre et je vois que je bois moins. Je mets donc du sirop de menthe et de l'eau plate dans l'une des deux. Puis, moins de solide et un peu plus de liquide : il y a de la soupe aux légumes, c'est parfait! J'en descends trois gobelets à une vitesse qui surprend le bénévole-soupe! Une petite pause rapide assis aux tables (le ravito est sur la terrasse du refuge, on peut s'attabler et on a tout sous la main), quelques grignotages et je me mets dehors! Bilan : 8 minutes d'arrêt. En 2021, 13 minutes, en 2022, plus de VINGT minutes (mais j'avais alors quasiment déjà abandonné). Et, forcément, ressortant en 10h04, j'en suis désormais à 40 minutes d'avance. Le matelas commence à devenir un King Size.
Et le Col de Grand fond et ses 150D+, qui paraissaient un mur l'an dernier, il est tout de suite moins impressionnant. Il reste que je dois encore et toujours économiser, ne pas m'emballer, ne pas rêver d'aller faire une perf. Je sais que ça va se dérégler, que je vais ralentir à un moment. On va arriver au troisième passage-clé, le plus critique : l'immense descente de la Combe de la Neuva, qui va martyriser ma cheville.
Donc, toujours pareil : monter tranquille (mais dépasser un peu, cette fois-ci, car il y a quand même quelques coureurs plus mal au point....je crois me revoir l'an dernier). Et cette raide mais courte montée est avalée en un petit quart d'heure (600m/h, rien de stratosphérique, mais pas l'agonie non plus). Et je pointe 410°/551 en 10h24, 2h16 devant le dernier, mais surtout 37 minutes devant le roadbook qui devait être un peu optimiste.
Un petit névé de rien du tout nous attend, puis l'habituel chaos de cailloux jusqu'à environ 2400 mètres où je compte bien prendre mon temps....avant d'amorcer la très très longues descente de plus de 5km (pour 600D-), dans la Combe de la Neuva, avant la piste 4x4. Cette descente est donc mon troisième passage-clé : si j'arrive à la gérer en courant, mais sans avoir la cheville qui hurle à la mort, ce sera un grand pas de fait. L'idée globale n'est pas forcément de trop forcer pour courir sans cesse, mais d'avancer régulièrement, y compris en "course avec bâtons" pour arriver au Cormet.
Nous sommes très espacés maintenant, et comme j'avance à une vitesse assez normale, ni trop rapide, ni trop lente, eh bien je ne vois pas grand monde. Globalement cela avance pas mal. Certes, la cheville me rappelle qu'elle est bien là et m'empêche de courir totalement libéré, mais rien de dramatique. C'est long, bien sûr, pas excessivement rapide (6km/h environ), mais le chemin 4x4 arrive finalement assez vite. Là, c'est la 4ème fois que je le pratique, celui-là, et je ne sais que trop bien qu'il est interminable (2,5km, je l'avais mémorisé exprès pour ne pas me désespérer). Je décide rapidement de m'occuper l'esprit avec un Cyrano "200 pas courus, 100 pas marchés". L'avantage de cette méthode est qu'elle permet de penser à autre chose, puisqu'il faut compter ses pas! Et je calcule aussi, vite fait, que cela veut dire 8 alternances à faire.
Aucun coureur rencontré sur cette section finale avant le Cormet. Quelques spectateurs croisés qui adressent bien sûr un petit mot au passage auquel je m'efforce de répondre avec un air pas trop fatigué (parce que, bon, à force ça commence à faire, il y a longtemps que je n'ai pas couru aussi longtemps). Mais, globalement on approche assez vite et......Elisabeth m'aperçoit de loin et, instantanément, les dizaines de personnes autour savent que Bubulle arrive! Et comme elle voit arriver un Bubulle qui court, je crois qu'elle comprend vite qu'il va plutôt pas mal (ce qu'elle sait car elle a évidemment tous les écarts et pointages, malgré le réseau aléatoire). Elle m'encourage à garder le rythme jusqu'à la tente du ravito et on se voit quand je sors (les accompagnants ne sont pas autorisés à l'intérieur, ce qui a l'avantage de nous garder un bon confort).
Là encore, l'objectif est clair : passer le moins de temps possible, dans les limites du raisonnable, en me donnant quand même le temps de me changer ce qui permet de se poser, mais de le faire efficacement. Je ne me suis donné que 30 minutes, déjà, sur le roadbook et il faudra quand même probablement cela. J'ai aussi, pour une fois, fait le programme dans ma tête AVANT le ravito (ce que je ne fais jamais, à tort) : récupérer le sac, me poser, me changer complètement, reposer le sac d'allègement, remplir les flasques, m'alimenter surtout avec du "chaud et salé" et ressortir.
Je me tiens rigoureusement à ce programme. Il y a de la place, c'est facile. J'abandonne définitivement la St-Yorre dans les flasques (le goût devient désagréable pour passer à la menthe à l'eau qui est bien plus agréable). Je reste en mode short+débardeur car il fait encore bien chaud (il est 16h environ), on verra à La Gittaz.
Concentré, le mec...
Et je ressors après avoir échangé quelques mots avant Trimoreo qui repart un peu avant moi, non sans avoir fait la petite photo-souvenir de rigueur :
Qui c'est qui va se prendre de mega-coups de soleil sur les épaules, bientôt ?
En sortant et en retrouvant Elisabeth, me vient....une soudaine envie de Pulco Citron! J'ai pensé à mon Raya à la TDS l'an dernier, où un Pulco magique avait transformé un cadavre sur pattes en Aigle Bondissant. Ma suiveuse de course va me quérir cela à la caravane à nourrir les touristes, sur le parking et, même s'il n'est pas aussi frais que le Pulco-Raya (et que ce n'est pas un Pulco), ça fait du bien.
Une dernière :
Et je me jette sur le chemin sans tarder! Elisabeth m'indique qu'elle ne sera pas à La Gittaz car les 5km de route empierrée ne lui déclenchent pas une grande passion. Je n'aurais donc pas de mauvaise excuse pour arrêter, même si le minibus d'Aquanaut me tend les bras. C'est reparti.
Bilan des courses : je suis pointé 420°/551 en entrée, en 11h41 et je ressors en 12h19, soit 38 minutes. Il a été un peu plus difficile de tenir les 30 minutes prévues, mais je n'ai pas l'impression d'avoir traîné...mais je ne me susi pas non plus pressé, je sais que j'ai un peu le droit d'utiliser une partie de mon matelas. J'ai donc toujours ma 1/2h d'avance (33 minutes exactement). Je suis 1h43 devant le dernier coureur qui passe la BH et je sors de Roselend avec 1h11 d'avance sur celle-ci. Sans surprise, cela se rapproche et je sais que ce n'est pas fini !
Directement Roc du Vent, maintenant. D'abord une montée facile sur chemin 4x4 (la direction du Col de la Sauce), puis descente dans l'alpage sur environ 100D- jusqu'au Plan de la Lai, montée très raide de 300D+ en plein soleil et traversée finale jusqu'au tunnel. Voilà le programme.
Le mode est toujours le même : gestion, gestion, gestion. Et donc le bout de chemin 4x4 en mode tranquille : je me fais même dépasser en marche nordique, ce que je ne supporterais pas en temps normal, gratifiant l'impétrant d'un redépassement en mode "c'est qui Raoul". Petite redescente sur le Plan de la Lai même pas humide et en mode "elle en dit quoi de continuer, la cheville ?". Et la montée raide au rythme des autres coureurs (il n'y en a plus beaucoup).
Et donc, séquence tourisme....il faut dire qu'il y a de quoi :
Plan de la Lai et Aiguille de Grand Fond
La même depuis le haut du raidard avant le Roc du Vent
En direction du Cormet et de la vallée qui redescend sur Bourg Saint-Maurice. Au fond, ce doit être la Vanoise.
Et donc, vaille que vaille, me voilà au Tunnel du Roc du Vent, qui avait été, en 2021, le début de la descente aux enfers pour cause d'un petit coeur qui commençait à sérieusement déconner. Mais surtout, cette année, pas de nuages, donc c'est la fête pour les yeux!
Lac de Roselend depuis le Roc du Vent. Ce matin, nous étions...en face !
Je pointe en 425° position sur 514 (il y a eu du ménage au Cormet !), en 13h23, avec toujours 30 minutes sur le roadbook...et 1h22 d'avance sur le dernier. Le point n'était pas sur mon roadbook-papier, donc je n'en sais rien. Je n'ai pas vraiment l'impression d'avoir avancé bien vite, cela dit.
La suite avait été le début de la fin il y a 2 ans. J'ai entendu autour de moi certains coureurs dire en gros, au Cormet, "1 montée et 1 descente et on est à la Gittaz". J'avais ri intérieusement car c'est tout sauf ça, les gars. Ils ont oublié : le coup de cul du Col de la Lauze après le Roc du Vent, la redescente sur la Sauce, la remontée à plus de 2500 sur la Crête des Gittes, le Refuge de la Croix du Bonhomme, l'infernale traversée vers le Bonhomme avant, enfin, oui, là, vraiment, la "descente avant La Gittaz". Cette section est un émerveillement total pour les yeux mais un désespoir absolu si on est dans le dur. Et encore pire si on est dans le dur et qu'on connaît la carte!
Par exemple, si tu connais la carte et que tu vois ça :
...eh bien tu sais que les petites maisons en bas à gauche, eh bien, c'est le ravito de La Gittaz et que tu y seras....dans environ 3h30....après avoir été visiter le col juste en face sous le gros tas blanc du milieu. Et alors, tu as comme un coup de mou.
Donc, il ne vaut mieux pas savoir. Mais, non, les gars, c'est pas juste "une montée et une descente", c'est juste un truc qui n'en finit pas et que vous allez désespérer d'en venir à bout et que, à La Gittaz, vous risquez d'être bons pour le minibus d'Aquanaut.
Tout cela, le bubulle, il le sait, donc il prend les choses une à une. Déjà faire la traversée après le Roc du Vent, puis le méchant raidard qui remonte au Col de la Lauze sur la crête (d'où est prise la photo ci-dessus). Pointer audit Col de la Lauze (dont la pente est largement supérieure à celle de son homonyme du Tour de France) en étant 427°/515 (rien de changé, quoi), puis au Col de la Sauce (le mouroir annexe du Cormet de Roselend puisqu'il suffit d'y reprendre le chemin 4x4 descendant pour retrouver tranquillement la navette et la civilisation) en étant toujours à la même position. Et continuer, toujours aussi régulièrement, toujours sans autre objectif que d'avancer à la vitesse prévue sans s'occuper de me faire dépasser ou pas. Avancer, avancer, avancer. C'est le seul objectif.
Le spectacle est splendide, j'en prends plein les yeux. Par exemple, sur cette photo où on voit les Aiguilles de la Pennaz à gauche, le Col du Bonhomme (où on va passer un peu plus d'une heure plus tard) avec au fond....notre chère Crête du Joly...et la Tête des Fours (et le Mont Tondu) avec le Mont-Blanc au fond et le refuge de la Croix du Bonhomme devant.
Les perspectives changent sans cesse, c'est une pure merveille et le plus difficile est quasiment de ne pas s'arrêter tous les 50 mètres pour faire une photo.
La dernière photo, c'est celle-là :
Il n'y en aura plus ensuite. Je vais peu à peu rentrer dans une bulle. D'autant plus qu'en arrivant à la Croix du Bonhomme, là ça commence à être franchement plus difficile. Un peu plus de mal à avancer efficacement, un peu plus l'impression de me faire beaucoup dépasser, un peu de lassitude et....le cheville qui commence à faire diablement mal. J'ai franchement l'impression de ralentir d'un coup et la côte après le refuge de la Croix du Bonhomme, jusqu'au pointage, qui est au col, est bien difficile. J'y pointe en 413° position sur 503, en 15h06 et avec 1h34 d'avance sur le dernier. Par contre, je ne regarde rien sur la feuille roadbook...et je ne vous dis pas l'avance sur le roadbook, vous allez comprendre pourquoi.
Gros avantage, toujours, je suis en terrain connu, je sais où je mets les pieds, encore : d'ici à La Gittaz, il reste cette infernale traversée vers le Col du Bonhomme où il est quasiment impossible de courir (du moins à mon niveau et avec mon état actuel de fatigue). Cela devrait prendre une bonne 1/2h. Ensuite, la descente du Bonhomme sur le vallon des Sauces, lente au départ, puis rapide ensuite, qui ne prend que 15-20 minutes. Puis le Chemin du Curé et une fin assez longuette vers La Gittaz.
Je retrouve un peu les sensations de 2021 dans la traversée vers le Bonhomme : cette impression de ne pas avancer, la recherche des balises, pas évidentes à voir, l'impossibilité de courir. Lent, lent, lent. Là, j'ai quand même un coup au moral et une envie fugitive d'arrêter à La Gittaz me traverse l'esprit. J'ai l'impression d'avoir perdu tout mon matelas d'avance et je passe le Col du Bonhomme un peu comme un zombie. Pourtant, là aussi , c'est un peu un jardin à moi : je pense y être déjà passé 7 ou 8 fois, à pied ou en raquettes! Et, pire que tout, juste après être passé, je regarde la montre : 15h35 de course. Je regarde le papier-roadbook : Bonhomme 15h35!!! J'AI PERDU TOUTE MON AVANCE. Cela confirme bien que je me traîne et ça ne va pas s'arranger et donc, les barrières horaires vont se rapprocher et donc je ferais peut-être mieux d'arrêter à La Gittaz avant d'être obligé de le faire à La Girotte ou à Hauteluce, et que je suis fatigué et que la neige elle est trop molle.
Bref, idées noires au Bonhomme. J'y ai pointé 413°/504...donc pile comme à la Croix du Bonhomme. Et je suis 1h48 devant le dernier (ça évidemment, je ne le sais pas!). Mais j'ai des idées noires. M'enfin, de toute façon, hein, il faut bien descendre à La Gittaz, donc eh bien autant descendre en courant, histoire que je n'aie pas reconnu cette descente pour rien il y a 2 semaines. Et....eh bien, ça se passe plutôt bien! J'arrive encore et toujours à trottiner dans cette descente, je n'ai pas encore enclenché le mode "courche" (le truc mixte que tu sais pas trop si c'est de la course ou de la marche, donc c'est de la courche).
Et ça se passe bien. Je ne rattrappe personne, mais je ne suis dépassé par personne (à part les 200 premiers mètres quand je regardais mon roadbook). Et surtout, après le Pas du Curé, un éclair me traverse soudain l'esprit : qu'est-ce que j'avais VRAIMENT écrit sur ce roadbook-postIt ? Je vous laisse aller regarder sur la photo plus haut.....
...et découvrir que j'ai écrit "Cx Bonhomme 15h35". CROIX DU BONHOMME, andouille! C'est à la Croix du Bonhomme que ton roadbook te faisait passer en 15h35, pas au Col du Bonhomme! Et donc, vu qu'il faut à peu près 1/2h à ma vitesse de courche pour aller de l'un à l'autre....(en fait 26 minutes selon les pointages)...eh bien, j'ai encore et toujours ma 1/2h d'avance!
Evidemment, les idées noires s'envolent illico. Je ne PEUX PAS arrêter alors que j'ai 1/2h d'avance sur le roadbook. OK, je suis fatigué, OK j'ai mal à ma cheville, mais...je ne suis pas agonisant, je n'ai pas un coeur qui bat à 30 pendant l'effort. Que dirait ma maman si j'arrêtais là ? Et Elisabeth à qui j'ai dit que j'allais m'auto-bottecuter pour sortir de ce ravito-mouroir de la Gittaz ?
Bref, reboosté à bloc...ou presque...le Bubulle. Et donc, on enclenche le mode ravito-express...enfin, aussi express que je pourrai. En attendant, toute la fin de la descente est faite à la course, encore. Et j'entre dans ce ravito sous les vivats de la foule enthousiaste des suiveurs, béats d'adminration devant la tornade qu'ils ont vu arriver de loin. Enfin, hum, presque. En réalité, bien qu'il y ait un monde fou à ce ravito, tout le monde se contrefiche des coureurs qui arrivent....chacun n'est là que pour son mort-vivant à lui, la lumière commence à tomber, la glauquitude s'installe, tout le monde a froid, les enfants pleurent et les trailers gisent ça et là autour du ravito pendant qu'Aquanaut compte les places dans son minibus.
Pour couronner le tout, pile quand je débouche sur l'espace du ravito, un coureur assis sur le bord du chemin avec sa suiveuse redégobille un mignon mélange rosâtre probablement constitué de potage, de bouts de jambon et de Beaufort. Etonnant comme le Beaufort fait moins envie quand il ressort élégamment de la bouche d'un trailer transformé en gargouille.
Donc, vite, je vais aux tables, je refais le plein (sirop de menthe uniquement), je picore 2 ou 3 trucs, je vais m'asseoir à l'écart (en regardant ce sur quoi je m'assois, cf supra) et j'entreprends juste de regarder l'état de la cheville pour évaluer si je laisse l'orthèse ou pas. Je laisse l'orthèse. Quelques hésitations sur le changement de tenue (la nuit va me prendre dans la montée qui suit, il est 20h30), je prends juste les manchettes finalement, et je déplie le coupe-vent pour le laisser pas loin et le mettre quand il fera plus frais. Me connaissant, cela devrait suffire pour la nuit. Je ressors bien sûr la frontale qui va servir dans environ 1h.
Et hop, ni une ni deux, je repars. Hors de question de rester plus longtemps que possible dans cet antichambre des Pompes Funèbres. 3 glous de sirop de menthe et je me lance à l'assaut des pentes du Col de la Gittaz.
Bilan de cette étape cruciale : pointé 415°/506 en 16h25, je repars 1h08 devant le dernier qui repartira et 1h30 avant la barrière horaire. J'ai passé 15 minutes, tout de même, sur ce ravito, le temps passe vite! C'était ce qui était prévu sur le roadbook. Je devais ressortir en 17h21, je ressors en 16h40 ET J'AI DONC ENCORE AGRANDI MON MATELAS (41 minutes). Cependant, en repartant quand même plutôt lentement, je sens que cela va très probablement être utile....et assez vite utile.
A la sortie, nous ne sommes plus que 420 à être repatis. Je suis repatis le 374ème. On peut donc commencer façon "Les Dix Petits Nègres", il y en a 46 derrière moi : "and then there were 46" !
En effet, il est clair que je repars vraiment lentement. On a désormais largement dépassé la mi-course, même en temps, j'ai dépensé pas mal d'énergie à gérer les descentes (et il en reste encore beaucoup : plus que des montées), on entre en mode nuit. Je suis un peu dépassé de toutes parts (enfin, tout est relatif, bien sûr). Mais je m'en fais une raison, comme depuis le début : ce n'est pas cela l'important. L'important est de rester concentré sur le seul et unique objectif : passer les BH. Les trois BH à venir, les plus difficiles : 20h45 de course à La Girotte (0h45), 24h30 (4h30) à Hauteluce, 26h30 (6h30 aux Saisies)...et 30h à l'arrivée. Il faut encore avoir de la marge à La Girotte (20 minutes prévues...auxquelles je peux mentalement ajouter mon matelas de 40), un peu moins à Hauteluce (10 à 15)...et passer à raz de la BH aux Saisies.
Voilà le challenge de la nuit à venir avec la grosse question : une bonne partie du parcours m'est inconnue : à partir du Col du Sallestet jusqu'à l'arrivée, notamment, plus la partie du Lac Noir à la route de 4x4 qui descend au barrage de la Girotte.
Donc, cette lenteur en montée est assumée. Je sais que la montée au Faux Col de la Gittaz est en deux parties clairement distinctes : une montée raide dans les alpages....puis une longue section sur chemin 4x4 à environ 10-15%. Avantage, j'ai reconnu cette partie et je me rappelle que j'avais mis 30 minutes sur la montée raide et 30 autres sur la partie qui suit. Par contre, à partir de ce moment, vous allez voir que la lucidité du bonhomme va être parfois un peu aléatoire et, par exemple, je ne vais jamais vérifier où j'en suis...et uniquement me fier à mes sensations. Spoil : vous allez voir que c'est une mauvaise idée...:-)
Je ne suis en fait pas mécontent, quand même, d'en finir avec la partie raide en alpages, je déteste quand même me traîner en montée. Pour la petite histoire, mais surtout pour m'en rappeler plus tard, j'ai monté cette partie en 40 minutes, à comparer, donc, aux 30 minutes nécessaires lors d'une sortie "normale". C'est intéressant de connaître ce ratio de 33% de plus sur les parties en montée. Le ratio sera d'ailleurs le même sur la deuxième partie sur le chemin 4x4. Dans l'intervalle, j'ai rajouté le coupe-vent par-dessus le combo débardeur+manchettes : ce sera la tenue de toute la nuit. La nuit est définitivement tombée pendant cette montée et ce sont des frontales qui, maintenant, rejoignent les deux bénévoles postés au Faux Col de la Gittaz. Détail amusant : après m'avoir pointé, l'un d'eux me dit : "ah, mais c'est Bubulle". Mais par contre, je ne sais pas du tout de qui il s'agit !
Me voilà pointé en 381° position sur 420 survivants : "and then there were 39". Le couperet de La Gittaz est passé par là! 41 coureurs y ont abandonné devant moi, et 32 de plus derrière, plus 13 hors délais. Je passe en 18h04, avec 1h19 d'avance sur le dernier.
La suite, c'est un peu la chasse à la balise ! Le moins que l'on puisse dire est que le balisage de l'UTB est minimaliste et il faut quand même bien chercher les balises dans la nuit. Pour avoir déjà navigué dans ce secteur lors de Montagn'hard 2016, en plein brouillard, j'apprécie qu'il n'y en ait pas. Je dirais, sans trop de détours, que le balisage n'est pas la plus grande qualité de l'UTB. Il est à mon sens bien trop léger et pas toujours très cohérent. Mais, pour autant, on ne se perd pas. La section entre le Faux Col de la Gittaz et le "vrai" Col est un peu déroutante, quand on ne connaît pas : ça hésite entre monter et être plat, il y a plein de faux sommets, les sentiers sont parfois peu visibles et le Col de la Gittaz ne ressemble pas vraiment à un col! Et j'y passe avec, devinez quoi? Eh oui : 30 minutes d'avance sur le roadbook (déjà 10 de perdues quand même).
Un coureur vient juste de me dépasser car il monte assez nettement plus vite, mais en amorçant la descente vers le Lac Noir, je repasse devant lui alors que nous cherchons un peu les balises : à cet endroit, il n'y a quasiment aucun chemin, et de nombreuses fausses traces. Il faut donc vraiment guetter les balises (qui sont heureusement plus resserées) et cela a l'air de l'arranger que je sois devant ! Pourtant, je suis bien lent : le terrain est assez cahotique, je reste peu sûr sur mes appuis, donc nous descendons plutôt en marchant qu'en courant.
En levant la tête, le spectacle est étonnant : il y a des frontales un peu partout autour ! Notamment beaucoup plus bas, des frontales relativement serrées qui semblent aller en sens inverse de notre direction. Cela inquiète pas mal mon compagnon qui se demande si nous ne nous trompons pas d'une façon ou d'une autre. Je le rassure : ce sontn simplement les frontales des coureurs qui REMONTENT du barrage de la Girotte vers le Col du Sallestet, et même ceux qui continuent vers le Pas d'Outray. Et, devant nous, plus ou moins dans la direction où nous allons, des frontales éparses des coureurs devant nous. Et même assez loin en bas, une lumiète statique qui n'est autre que....le ravito de La girotte, installée dans le même bâtiment que celui où était le ravito de la Montagn'hard jusqu'en 2018.
Arrivés au Lac Noir où il y a un pointage, cela devient un peu plus civilisé : le chemin est plus marqué....et les balises s'espacent. On est économes à l'UTB ! Pointage 377ème sur 419. Aucune idée de la façon dont j'ai dépassé 4 coureurs! Par contre, 18h47 pour 19h11 prévues, il ne reste plus que 24 minutes sur le matelas : nous avons vraiment été lents!
Mon compagnon (Patrick) et moi continuons rapidement dans le labyrinthe très déroutant de ce grand vide tout noir. Il n'y a pas de lune (le faible croissant est couché), on ne voit pas du tout le lac et le chemin fait de nombreux tours et détours en descente.....mais les frontales devant apparaissent parfois plus haut. Je ne connais pas cette section, jamais courue et j'ai du mal à bien imaginer par où nous passons. Je sais que nous devons retrouver un chemin 4x4 qui nous emmènera ensuite jusqu'au mur du barrage car nous étions descendus à cet endroit depuis le Bolchu, sur la Montagn'hard 2015 (où la boucle des Cols de la Gittaz et du Lac Noir avait été shuntée).
En fait, à force de ne pas sembler avancer, voire même s'éloigner du ravito que l'on voit toujours très bien, cette boucle commence à m'agacer fortement, d'autant plus que j'imaginais retrouver le chemin de 4x4 plus rapidement. Mon compagnon se désespère aussi un petit peu : j'essaie de lui expliquer rapidement où est le barrage et pourquoi on a l'impression de s'éloigner du ravito qu'on voit si bien (logique, on fait le tour du barrage!).
Après ce qui semble être une éternité, nous sommes enfin sur cette route 4x4. Là, je n'hésite pas, je relance en courant bien que la lassitude et la fatigue commencent à rendre cela difficile. Je sens que, derrière, cela suit difficilement, mais c'est efficace et nous rattrapons un coureur devant que nous emmenons avec nous. Le pire est la succession de virages bétonnés très serrés qui permettent de descendre SOUS le mur de barrage : ils sont désespérants et, quand on connaît, on sait qu'on va passer au PIED du mur du barrage et donc devoir remonter ce que nous venons de descendre.
ENFIN, après cette ultime petite remontée, le bâtiment du ravito est là. C'est un ravito en intérieur pas bien grand, mais nous sommes très espacés. J'y pointe en entrée et toujours autant 377° sur 419! Je sais que j'ai prévu un arrêt de 15 minutes, mais je veux tout faire pour le raccourcir. Après tout, j'ai peu bu, donc le plein (toujours sirop de menthe) est rapidement fait, je me force à boire encore 2 ou 3 gobelets, un gobelet de potage....et j'essaie de filer le plus vite possible. Je ne regarde la montre qu'en sortant car je n'ai aucune idée si j'ai gagné ou perdu du temps et où j'en suis par rapport à la BH. Je finis par voir que je ressors en 20h08 après avoir passé 12 minutes (je me demande bien ce que j'ai fait pendant ce temps tellement j'ai l'impression d'être passé vite). Il ne reste plus que 17 minutes à mon matelas d'avance sur le roadbook et je sors seulement 37 minutes avant la BH. Il y a certes encore de la marge, mais c'est en train de maigrir!
Seulement 28 coureurs repartiront derrière moi ("and then there were 28"). La course par élimination continue.....et je continue à y survivre. Même s'il n'y en a plus derrière, je m'en fous!
A nouveau, il faut repartir d'un ravito en montée. Et quand on a quand même la fatigue et la lassitude qui se font sentir, ce n'est pas facile. Patrick, qui a fait la descente avec moi et est arrivé au ravito très peu de temps après, semble être partant pour repartir ensemble. On y va, donc, même si je pense que ça ne durera pas bien longtemps. Je repars au même rythme lent que celui adopté en sortant de La Gittaz. Bon, clairement, Patrick préfère avancer plus vite, je ne peux pas lui en vouloir et je le laisse partir devant. Je ne le reverrai plus! Il a bien fait, finalement, vu qu'il a terminé 42 minutes avant moi. A posteriori, c'est une belle satisfaction pour moi que ce bout de chemin commun et je me dis que cela a peut-être fait partie de ce qui l'a aidé, lui aussi, à terminer.
On est encore sur une partie "que je connais". Du moins dans l'autre sens entre La Girotte et le Col du Sallestet : je l'ai descendue une fois sur la Montagn'hard 2016 et une autre fois lors d'un revival de jour de la même Montagn'hard. Bref, en gros, je sais que c'est un sentier sympa, assez facile et pas très pentu. C'est maintenant nous qui sommes les "frontales qui remontent à l'envers" et que voient les derniers coureurs, que nous voyons nous-mêmes au-dessus de nos têtes sur la gauche.
Le fait d'avoir été dépassé par Patrick, puis une coureuse qui le suivait, me motive quand même un peu et m'instille un peu dans la tête un nouveau mantra : il ne faut pas que je perde toute mon avance sur le roadbook (et les BH) dans cette longue section jusqu'à Hauteluce. Je n'ai en fait aucune idée de la façon dont je vais gérer les descentes (sûrement plutôt mal), surtout les 1000D- du Pas d'Outray à Hauteluce, donc il faudrait éviter de perdre aussi du temps en montée. Je me donne donc comme objectif de m'accrocher le mieux possible à Patrick que je vois encore un peu devant pendant toute cette montée. Au final, elle se passe assez bien et plutôt vite (il n'y a que 350D+). Je pensais y trouver un pointage, mais il est en fait un peu plus haut, au Lac du Bout du Crêt qui marque la fin de la "vraie" montée. J'y passe...avant Patrick! En fait, ce n'est pas mon Patrick de la descente qui était reparti derrière moi. Et donc, en fait, ledit Patrick va me passer plus loin, je ne sais pas quand et j'ai donc pris comme lièvre un autre coureur! Bref, je suis 361°/388, il y a donc 27 coureurs survivants derrière moi ("and then there were 27") et le dernier passera 48 minutes plus tard. Par rapport au roadbook, au Sallestet, je n'ai plus que 14 minutes d'avance. Encore 3 d'envolées....mais, heureusement je l'ignore car le prochain point que j'ai noté sur mon post-It est à Hauteluce. C'est probablement mieux que je ne le sache pas car cela aurait été peut-être un peu déprimant de constater que j'allais moins vite que le roadbook.
Cela étant, il n'en faut pas beaucoup pour que la morosité s'installe, combinée avec l'impression de ne pas avancer. Le profil m'indique une "petite descente" suivie d'une "petite montée" entre le Bout du Crêt et le Pas d'Outray. Le genre de truc qui n'a l'air de rien sur un profil...mais la "petite descente" fait quand même plus de 150D- et la "petite remontée" refait les mêmes à l'envers. Et là, il n'y a plus guère que de la marche, il me semble me rappeler (honnêtement, les souvenirs sont, ici, un peu plus confus). Ce qui me ferait du bien au moral serait de rattraper 1 ou 2 coureurs et surtout ne pas me faire rattraper. En fait, c'est raté. Alors qu'au bas de la "petite descente" je ne voyais absolument aucune frontale devant et derrière, juste de temps en temps des lumières fugitives de temps en temps, "loin" devant.....je finis par voir des frontales derrière moi. Certes encore un peu loin, mais qui se rapprochent inexorablement. Et cette petite remontée n'en finit pas de ne pas finir. Et on n'en finit pas d'obliquer légèrement à droite, sans fin (on coutourne la Montagne d'Outray par la gauche). Je n'ose pas regarder le roadbook et le profil schématique que j'y ai fait pour connaître l'altitude exacte du point appelé "Pas d'Outray", j'ai trop peur d'être déçu (si vous cherchez, c'est 2181m!).
Je les aurai espérées ces frontales fixes, devant, qui m'indiquent les bénévoles postés à cet endroit! Et les voilà enfin, et les frontales derrière ne m'ont pas rattrapé!
Et un bip de plus....et un bip de moins à faire. Me voilà 361°/388, ça n'a finalement pas bougé depuis le Lac du Bout du Crêt. Je n'ai aucune info sur la situation par rapport au roadbook car je n'ai pas relevé le temps de passage prévu, sur mon Post-It (initialement, je voulais éviter d'avoir envie de vérifier tout le temps.....on va voir que c'est un choix qui a aussi des défauts). Bref, je passe en réalité en 21h49 avec 12 minutes d'avance sur le roadbook, et 58 minutes sur le dernier.
Quel chantier, la descente ! Sur le début, on perd 500 mètres en 2,5km (20% en moyenne) sur un chemin plein de cailloux qui roulent, avec des appuis instables (surtout avec cette cheville plus la fatigue). Pour nous tous, il est quasiment impossible de courir, il va me falloir 40 minutes pour DESCENDRE 500 mètres (en pleine forme et frais, je peux mettre ce même temps pour les monter : 750m/h me reste parfois possible).
A la fin de ce calvaire où j'ai l'impression d'avoir été abominablement lent, se situe le pointage de "La Journée". Très utile pour reconstituer l'histoire de cette descente a posteriori : trois coureurs m'ont dépassé et j'en ai dépassé un. Bref, me voilà 363°/387 (ne me demandez pas où est passé le 388ème!) et donc "plus que 24" (toujours ces 10 petits nègres : "and then there were three"...référence qui parlera aussi aux boomers amateurs de musique progressive)...et 1h04 de marge sur le dernier.
Je pointe juste derrière "deux italiens" qui jacassent un peu en permanence et que j'ai très très très progressivement rattrapés dans le chantier de la descente. Cela faisait bien 10 minutes que je piaffais un peu derrière, dans l'impossibilité de dépasser et sans qu'ils ne m'en donnent l'occasion, tout occupés à leur discussion de la plus haute importance. Bref.
Autant dire que je me précipite sur le chemin de 4x4 pour dépasser les deux pies et retrouver du calme. Par contre, le moral n'est pas bon du tout : j'ai franchement l'impression d'avoir été tellement lent que les BH doivent se rapprocher à grande vitesse et que je vais les emplafonner à Hauteluce. Et curieusement, je n'ai pas envie ni de sortir mon Post-It pour vérifier l'heure planifiée, l'heure de la BH (je me rappelle vaguement d'un "4h et quelques du matin, peut-être 4h30" - c'est bien cela!)...et même pas non plus l'envie de regarder ma montre pour vérifier où je peux en être par rapport à ces BH hypothétiques. J'ai surtout l'impression que cette deuxième partie de descente est très très lente. On est autour de 1700m, il faut descendre à 1200 et on n'en finit pas de ne pas descendre. En tout cas, pas aussi vite que je voudrais. Je suis à deux doigts de baisser les bras, c'est dire.
Pendant que je rumine tout cela, j'entends progressivement des voix se rapprocher devant moi...et je reviens finalement sur un petit groupe de 3 coureurs, dans les singles qui coupent les lacets du chemin 4x4. Encore un groupe un peu "bavard" où une fille raconte son immense expérience de bénévole sur la Maxi-Race aux deux coureurs qui l'accompagnent. Ils sont quasiment en mode "rando", pas spécialement lents, mais cela donne l'impression qu'ils ont virtuellement jeté l'éponge, comme des bribes de conversation semblent me le confirmer.
Or, même si je ne suis pas optimiste du tout, avec l'impression de n'avoir aucune chance de passer (je rappelle qu'il me suffirait de sortir un bout de papier de ma poche, de regarder ma montre, faire un rapide calcul...pour confirmer si "ça passe" ou si "zéro chances que ça passe")....je me décide soudainement, fortement encouragé par tout ce verbiage....à passer le petit groupe en trombe et accélérer en ignorant allègrement les hurlements de ma cheville. En gros, cette chère Claire vient de très involontairement me réinjecter une furieuse envie de bagarre, je saisis la première occasion de dépasser (un petit passage sur la piste 4x4) et je me lance "à corps perdu" dans une bataille contre une barrière horaire dont je ne sais rien. L'idée globale est de cesser de me prendre la tête avec ça, mais de tout faire pour passer....et passer si possible avec le plus d'avance possible. Le Bubulle Volant est de retour, ça va chier, z'allez voir Raoul, en avant toute et toute cette sorte de choses.
Bon, franchement, faut relativiser tout ça quand même, le Bubulle Volant ressemble plutôt à l'envol (raté) d'un albatros (ALBATROSSSSS....mais personne ne me demande à quel parfum il est : je vous laisse chercher), mais l'effet est magique. Toute cette fin de descente, dans la forêt, où on voit un peu les lumières de Hauteluce se rapprocher (mais pas vite) se passe assez vite. J'ai (comme toujours) bien fait d'étudier le parcours en détail car je sais quand même qu'on va arriver au fond de la vallée en amont de Hauteluce, remonter de l'autre côté sur quelques dizaines de mètres, retrouver la route du Col du Joly et la descendre sur 2,5 kilomètres pas marrants.
On n'en finit certes pas de ne pas arriver au Pont Salvateur, celui qui va nous faire passer de l'autre côté, mais mon idée fixe de cavaler comme un dingo maintient le cap. Autre avantage, pas une seule seconde je n'ai ce moment un peu inéluctable où le sommeil te tombe dessus et où les secouristes et les bouches d'égoût surgissent sans prévenir du chemin.
Enfin la route....plus que 2,5 kilomètres. Du BITUME! Et....je cours. Aucune idée comment je fais, mais je cours. Enfin, bon, en fait je trottine : Strava, a posteriori, me rabat quand même bien le caquet vu qu'il m'annonce que j'ai mis 19 minutes pour faire 2,2 kilomètres. Donc, l'Albatros des Mers du Sud a quand même un peu des côtés "Marche de l'Empereur". Mais l'essentiel est dans la tête. D'ailleurs, quand même, le fait que je n'aie rattrapé que 2 ou 3 coureurs pendant qu'un autre me rattrapait à la faveur d'un balisage un peu trop léger sur cette section de route, indique bien que la vitesse était toute relative.
Mais c'était quand même la première fois que j'étais en mode "je vais finir l'UTB", avec, juste la réserve que j'ignore toujours autant où j'en suis de cette BH!
C'est LE moment de vérité. L'habituel signaleur et son téléphone me pointe, bip....et je regarde la montre : 23h46! Et BH à....24h30! DANS TA TRONCHE, LA BH! Là, c'est bon, je pense que c'est gagné, ça va le faire.
Je fonce vers les tables de ravito avec dans l'idée de repartir le plus vite possible quand..."ah, mais c'est Christian!". Le bénévole qui vient de me pointer n'est autre que David "Ilgigrad" ! Immédiatement, il refile son poste à un "collègue" et vient avec moi dans la tente. Je n'en reste pas moins sur mon objectif de ne pas planter la tente ici et repartir assez vite....mais les deux gobelets de soupe qu'il m'apporte (dans un gobelet qu'il me prête car le mien est resté quelque part entre la Girotte et ici) sont plus que bienvenus car je me suis un peu totalement dépouillé dans cette cavalcade un peu folle et ce n'est quand même pas encore tout à fait fini. David me rappelle, si besoin était, les non négligeables 500D+ jusqu'à La Légette quivi du "Tour de la Légette" à niveau et 100D- jusqu'au ravito des Saisies.
Je m'efforce donc de repartir le moins lentement possible ("le plus vite" serait exagéré). A l'autre bout, je ne le sais pas, mais Elisabeth qui s'est réveillée en pleine nuit et a vu mon arrivée à Hauteluce, rafraîchit un peu frénétiquement la page du suivi pour voir quand j'en repars. Et comme le "pas longtemps" dans ma tête a quand même duré près de 15 minutes apparemment, j'imagine un peu le stress....et le soulagement de me "voir" ressortir au bout de 24h05 de course, soit avec 11 minutes d'avance sur le roadbook et 25 sur la barrière horaire. J'ai pointé en entrée 354°/386. Seulement 15 coureurs vont repartir après moi : "and then there were fifteen". Le dernier a pointé en entrée à 34 secondes de la BH!. Il commence à être franchement près, le couperet! Mais, bon, c'est comme ça que c'était calculé et vu que c'était bien calculé, ça devrait passer.
Par contre, le "flow" est passé, bien sûr, donc j'enclenche encore le mode "escargot". La cheville fait mal tout le temps, maintenant...enfin, quand j'y pense. Mais ce à quoi je pense surtout, c'est avancer. Et j'avance clairement pas vite car à nouveau plusieurs coureurs me dépassent : des que je connais comme les italiens, d'autres avec qui je fais le yoyo depuis le début et d'autres encore jamais vus, du moins si j'en crois le peu que je vois.
1h14 pour 550D+, me voilà donc à ma vitesse-plancher de 450m/h qui est à peu près celle du bubulle à l'agonie. Le jour se lève doucement pendant cette ascension, un éleveur passe à un moment et appelle ses vaches pour la traite du matin, on commence à sortir de la bulle toute noire où on est depuis 8 heures environ. La nuit est vaincue ! Et bientôt la quasi dernière côte l'est aussi. Pointage en haut, aux Jorets, 342°/349. "And then there were seven".....le dernier 34 minutes après moi. Il est 5h21, j'ai 1h09 pour arriver aux Saisies et en repartir. Ce coup là, c'est bon.
C'est bon....mais c'est long! On fait le tour du sommet de la Légette sur un sentier à niveau et il y en a pour 2,5 kilomètres. C'est long, 2,5 kilomètres quand on ne peut plus que marcher....surtout quand on a noté "1,5km" sur son Post-It. Je peste à chaque chemin que je vois, sur la gauche, descendre sur Les Saisies et qu'on ne prend pas. Et il y en a tous les 200 mètres! Les tentatives de courir pour ne pas y passer la matinée échouent lamentablement. Et, bien qu'il ne restait que 7 coureurs derrière....j'arrive encore à me faire dépasser.
Autant dire que la descente est plus que bienvenue même si la "course" que j'y mets est totalement ridicule. Je ne suis plus qu'un zombie. Mais, il y a toujours un pied devant l'autre et après avoir enfin atteint la station, traversé deux parkings vides dans l'indifférence absolue de 3 moineaux, j'atteins le ravito.
Me voilà pointé, en entrée, 344ème sur 350 en 26h09, soit 9 minutes avant les prévisions du roadbook et 21 avant la BH. C'est fait! Je crois avoir juste, pour la forme, rempli les flasques, bu 1 ou 2 verres, et je me jette littéralement dehors. 4 minutes d'arrêt...cela a l'avantage de me redonner 6 minutes de rab sur le roadbook.
Il faut quand même bien cela car l'ultime (que je crois) côte jusqu'au Mont Bisanne va être très très très longue. Pourtant, la pente moyenne est ridicule : 300 mètres à 10% de moyenne. Il ne reste que 4 coureurs que repartent derrière moi : "and then there were four". Je risque d'arriver à "and then there were three". Si je pouvais par contre éviter de faire "Seconds out", ça serait une idée.
Et donc, pic-poc, pic-poc...en me retournant de temps en temps, surtout après 6h30, afin de surveiller les fermeurs qui doivent démarrer à cette heure là. Je voudrais quand même éviter d'avoir le Gilbert Codet aux fesses. Je ne vois par contre aucun coureur parmi ces trois qui sont repartis, selon les pointages. Et donc je finis par me dire que je suis peut-être bien le dernier des derniers ("and then there were none").
Je crois me rappeler que je regarde la montre et le roadbook au Mont Bisanne : 27h19 pour.....27h24 sur le roadbook, j'ai mangé tout le matelas, là je suis arrivé au sommier. C'est loin d'être gagné pour arriver avant les 30 heures fatidiques et je tiens, par fierté, à terminer dans la BH officielle de fin même si je sais très bien que je serai de toute manière classé. Je veux être un finisher complet et que je "Je l'ai fait" le soit à 150%.
Au pointage du Lata du Vaz, il restera toujours 4 coureurs derrière moi, à 11, 13, 18 et 20 minutes. Les bénévoles m'annoncent qu'il reste 1300D-, 10 kilomètres et....25 mètres de D+. COMMENT ÇA, 25 METRES ? TU TE FOUS DE LOI, FRANÇOIS?
Evidemment, à se balader sur une crête au lieu de descendre pour de vrai toussuite épissétou, c'est ce qu'on risque. Les crêtes, c'est rien que des trucs fourbes qui te font croire qu'elles vont descendre gentiment alors qu'en fait c'est truffé de tas de petites bosses à la con où tu remontes pour rien avant de re-redescendre ce que tu as monté et faire en sorte que là où tu crois avoir 1000 mètres à descendre parce que le haut est à 1500 et le bas à 500, tu finis par en avoir 1100 ou 1200. C'est con, les crêtes. Ils ont la même krètalakon à l'Échappée Belle et le Michel, il a la même à la fin de ses Citadelles. En fait, ça doit être un truc obligé, sur les ultras, d'avoir une krètalakon. Des fois, elle est même tellement talakon qu'après avoir remonté une bossalakon et redescendu la même bossalakon, tu découvres qu'il y a un autre chemin pazalakon qui, lui, fait juste le tour de la bossalakon sans monter. Mais, évidemment, un traceur, tu lui mets une bossalakon, il te fait monter sur la bossalakon.
Donc, là, voilà, y'a une bossalakon où y'a un cheminzalakon pour y monter et voir...une antenne. Et le fait que la bossalakon s'appelle la Croix de Coste ne change rien au fait qu'à cet instant de la course, pour toi, c'est juste une bossalakon.
C'est donc en grommelant toute ma rancoeur anti-bossalakon que je remonte ces fichus 25 derniers mètres de dénivelé qui me donnent l'impression d'être la dernière bossalakon de ma chère Crête du Joly de la Yaute (l'avantage des bossalakon de la Yaute c'est qu'on a le Mont Blanc en face alors que sur celles de la Basse-Savoie, y'a une antenne).
Cela fait (qui prend à tout casser 2 minutes ce qui relativise quand même pas mal la rancoeur antibossalakonienne des 30 lignes qui précèdent), là il n'y a plus qu'à descendre.
Bon, c'est juste que c'est long. "8,5 kilomètres" qu'ils m'ont dit au pointage. "oui, mais aussi 1300 mètre de dénivelés" que j'ai rétorqué. Je ne sais pas lequel des deux est le plus désespérant. J'ai 2h27 pour faire tout ça.
Vu que je n'avance quand même pas bien vite (des fois ça descend beaucoup, des fois ça descend pas beaucoup...mais la constante du bazar, c'est que le bubulle, il descend pas bien vite) je me lance, pour m'occuper, dans de savants calculs de vitesse descensionnelle dont le seul but est de m'occuper l'esprit au lieu de me désespérer à me voir courcher aussi lentement en descente pourtant pas super difficile. Mais, allez diviser de tête 1300 mètres par 147 minutes après 27 heures de course, tiens ! Surtout que, histoire de compliquer la chose, mon esprit légèrement embrumé se met à faire le calcul de manière plus compliquée : je regarde la montre, je "note" l'heure et l'altitude dans ma tête, je descends quelques minutes, je regade la nouvelle heure et la nouvelle altitude, j'essaie de calculer la différence, mais j'ai oublié les deux premiers chiffres, alors je recommence.
Le problème c'est que le résultat est jamais le même : va, de tête, recalculer ta vitesse de descente quand tu vois que tu descends 47 mètres en "à peu près 5 minutes", que tu trouves (au bout de 3 ou 4 minutes et après avoir recommencé 3 fois) 564m/h...puis que le coup d'après, avec 86 mètres en "plus ou moins 8 minutes" (là il faut au moins 10 minutes de CPU pour faire le calcul), tu trouves 645 m/h en étant moyen sûr de pas avoir merdé dans une retenue de la division.
Bref, quelle que soit la valeur finale, l'impression est la même : je vais jamais y arriver, c'est pas possible. Alors que, si, c'est totalement évident, maintenant dans mon canapé : 1300m en 2h27, c'est 530m/h! Je ne dirais pas que, même sur les mains, c'est faisable, mais disons qu'en marchant normalement, ça passe crème. Comme quoi, on peut faire tous les roadbooks du monde et se la jouer "préparation scientifique", quand tu es sur le terrain en mode zombie, c'est pas le roadbook qui fait avancer, c'est la tête.
Bin là, la tête, elle est un peu dans la confusion, mais je pense que le roman-fleuve qui précède vous en a déjà convaincu. Bref, j'avance, c'est le principal. Un coup un bout de sentier 4x4, un coup de single, des fois roulant, des fois moins. Bon, déjà ça descend, c'est déjà ça. Mais on voit aussi que la vallée en bas, elle est encore vachement loin, ce que confirme d'ailleurs l'altimètre : 1400-1300-1200....c'est sûr que ça descend, mais le bas est à 538!
Et surtout, personne. Je ne rattrape personne, donc forcément j'ai l'impression qu'"ils" vont tous plus vite que moi. Et personne ne me rattrappe mais ça c'est normal vu que dans ma tête je suis dernier. Bon, déjà, les fermeurs et Gilbert ne sont toujours pas là, je n'arriverai peut-être pas avec eux.
Tiens, "les italiens", justement. Voilà que je rattrape "les italiens". Ah bin y'en a un qui a l'air pas bien en point, tiens. L'autre est au téléphone et parle à toute vitesse. J'essaie en passant de demander si ça va, plus ou moins par signes, il me fait signe en gros que oui, c'est OK. Bon, bin bon alors, je sais pas comment on dit "bon courage" en italien, je dois le dire en espagnol mais l'idée est là. A posteriori, d'ailleurs je ne comprends pas trop comment ils finiront vu qu'il n'y a qu'un italien après moi et qu'il est arrivé tout seul. Mystère.
Bon, bin je ne serai pas dernier, alors.
Tiens, un pointage. Coucou les bénévoles! "Plan des Maisons" qu'on est. C'est cool, j'en connais une en bas qui doit surveiller ce passage sur le live. "Allez plus que 4,5km" me dit le responsable du poste. Coup d'oeil à l'altimètre : 1200 mètres. Coup d'oeil à la montre : 28h44. Il reste 1h16. Maintenant dans mon canapé, il me faut 3 secondes (et une calculatrice) pour faire (1200-538)/76*60=522m/h pour arriver à l'heure. Mais là, je n'essaie même pas, c'est plutôt "bon, en gros, si je descends à 5km/h ça peut le faire". Intrinsèquement, il suffit donc que je continue à marcher normalement et ça passe : 5 à l'heure en descente, c'est une vitesse de randonneur.
Sauf que, encore une fois, l'esprit cartésien est envolé depuis bien longtemps et, sans raison, je ré-enclenche le "mode Hauteluce" : il faut que j'arrive le plus vite possible, au diable la cheville, le "ça fait mal", je "fonce". On commence à voir des chalets, on est encore bien au-dessus de la vallée, mais ça se rapproche quand même, donc l'effet habituel agit, l'envie d'arriver prend le dessus sur le reste, la lassitude, les douleurs diverses. En plus, le chemin descend franchement, cette fois on a vraiment l'impression d'avancer. Et, curieusement, ça passe beaucoup plus vite, tout ça. Une grande traversée "finale" nous amène en haut du village de Queige, je prends le temps d'envoyer un "j'arrive" vocal dans Whatsapp, mais aucune idée si ça arrive. De toute façon, je suis sûr qu'Elisabeth n'a pas besoin de ça pour guetter!
La traversée du village est l'occasion de remettre les idées en place dans tout ce qui se bouscule dans ma tête, tous les challenges que je m'étais mis, de finir cette course pour moi, bien sûr, pour Elisabeth, tous les amis (dont, pourtant ça ne changera pas la vie...mais qui me montrent leur amitié au milieu d'histoire de lunettes de WC), pour la famille et ma petite maman qui va devoir se lire tout ce récit dans quelques jours. Et puis aussi pour le simple plaisir d'arriver au bout de cette belle course, de cette belle organisation qui prend soin de ses coureurs (même avec les bossalakons). Et juste le plaisir aussi d'avoir passé une belle journée ("et un peu plus") en montagne, comme je l'aime.
"Bravo mon Bubulle", "Vas-y mon Bubulle"....ah bin ça y est, je crois qu'Elisabeth a bien percuté que j'arrive! Un grand sourire traverse la route....et va m'attendre au petit pont pendant que je fais le crochet par le camping, imposé par la traversée sécurisée de la route. Hé hé, le Gilbert ne m'a pas rattrapé, et toc !
Ah, remarquez, c'est normal, il est dans son camping-car, Gilbert! Et, par je ne sais quel miracle, il sort tout pile quand je passe, l'ami. Et hop, un sourire!
Et, enfin, cette traversée de pont tant attendue.....et de l'autre côté, il y a juste quelqu'un qui me dit qu'elle m'aime. Pourtant, ce qu'elle aime à l'instant, ça sent quand même probablement bien le fennec (si ça se trouve, d'ailleurs, les fennec ça sent pas mauvais : pourquoi on leur en veut toujours autant, les pauvres ?).
Et le moment tant attendu est enfin là :
J'aurais envie de faire un long discours au speaker qui accueille les coureurs à l'arrivée, pour pouvoir expliquer toutes les motivations qui m'ont maintenu obstinément dans ce combat difficile, avoir un mot pour le soutien des amis, de ma chérie, un mot spécial pour ma petite maman qui suit tout cela depuis "la chambre aux carrés bleus" où elle vient de rendre son dossard juste le jour où je finis d'écrire ce récit-fleuve commencé il y a 10 jours et continué les matins, les après-midis, un peu les soirs de cette semaine, quand nous n'étions pas nous-même dans "la chambre aux carrés bleus". Ce récit que je voulais que ma petite maman lise, comme elle a lu jusqu'ici une grande partie des 118 précédents, souvent la carte IGN à la main. Remercier aussi cette formidable équipe de bénévoles et le grand ami François qui font que cette course est si unique...et si difficile. Penser aussi à la petite Léonie, que je ne connaissais pas mais qui a un peu été avec tous les coureurs de cette course comme elle était déjà un peu avec ses autres amis de St-Gervais et du Val Montjoie lors de la Montagn'hard qui passait tellement près de là où elle est partie. Mais bon, je ne suis pas tout seul et Olivier qui arrive juste derrière moi a aussi droit à son moment sous cette arche et je me contente enfin du traditionnel "Je l'ai fait" que je transforme bien sûr en "Je l'ai ENFIN fait". Et cela dit tout.
Sur mes courses, j'aime effacer les échecs, je l'ai maintenant fait pour presque tous les abandons : Montagn'hard 2018 effacée en 2021, Échappée Belle Traversée Nord 2021 efacée en 2022, Tontorrez Tontor 2022 effacé en 2023....et enfin ces deux UTB 2021 et 2022 effacés en ce dimanche 23 juillet 2023. Il ne reste que la Danseuse aux Talons d'Argent du Colorado qui ne perd rien pour attendre. On apprend de ces échecs, c'est une banalité classique et pourtant, je crois que ce récit, si vous avez survécu à tous les détails chronométriques, aux calculs d'altitude et aux divagations sur les bossalakons, en est la preuve. En ce dimanche 23/7/2023, j'ai appris à être dernier d'une course, aussi, mais surtout à la gérer de la façon quasi idéale pour pouvoir l'être alors que c'est tout sauf gagné. AU final, j'ai d'ailleurs échoué puisque dans les minutes qui suivent mon arrivée, on voit arriver Olivier, Yoann, Jean-Marie et Henrik.
And then there were four.
Mais Ginette Perrier, 89 ans, 3 mois et 15 jours était avec moi, du début à la fin de cet UTB. Elle ne l'est plus, quand je termine et publie ce récit. Vous savez donc pourquoi je l'ai (enfin) terminé. What else?
Le Puy-Firminy 2012
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16 commentaires
Commentaire de yves_94 posté le 04-08-2023 à 22:45:58
Bravo Bubulle pour ce beau récit. C'est une très belle gestion du début à la fin, et surtout l'envie de finir qui te fait avancer!
Commentaire de cloclo posté le 04-08-2023 à 23:24:49
Bravo, et condoléances, Christian.
Commentaire de Mazouth posté le 05-08-2023 à 00:37:06
Ca c'est une belle épreuve vaincue avec la tête !! (même s'il n'y a plus de cheveux longs sur ladite tête mais c'est pas grave ^^). Et un beau récit écrit avec le coeur.
Commentaire de fred_1_1 posté le 05-08-2023 à 08:37:00
Gros bravo, gros mental !
Pour la prochaine il faudra juste arrêter les bâtons dans les descentes et les T-shirt sans manche :)
Commentaire de fred_1_1 posté le 05-08-2023 à 08:37:01
Gros bravo, gros mental !
Pour la prochaine il faudra juste arrêter les bâtons dans les descentes et les T-shirt sans manche :)
Commentaire de Cheville de Miel posté le 05-08-2023 à 12:41:50
Toujours aussi agrèable de lire tes récits! Merci, merci, merci.
Commentaire de shef posté le 05-08-2023 à 16:07:42
Merci pour le récit, bravo pour la course. Ta maman doit être fière de là haut
Commentaire de Aquanaut posté le 06-08-2023 à 12:17:33
Tu as bien évité mon minibus, d'autant plus que je devais être à La Gittaz à l'heure de ton passage...
Bravo pour avoir esquivé les autres!
Par contre, en me rappelant notre brève conversation du dimanche matin, la fatigue t'avait bien atteint.
Commentaire de bubulle posté le 06-08-2023 à 16:40:19
Ah, on s'est causé, dimanche matin? ;-). Là, je dois dire que plus brumeux ça va être difficile....:-)
Commentaire de Aquanaut posté le 06-08-2023 à 17:24:31
J'ai bien remarqué que tu n'avais pas encore rallumé la lumière à tous les étages. :-)
Commentaire de Benman posté le 07-08-2023 à 00:09:08
On a toutes les facettes du Bubulle dans ce récit: le cartographe, le zouave à manches courtes et chabob zalakon, et surtout l'homme qui fait parler son cœur.
Puisque tu aimes chercher les références, je te laisse avec ça:
"La famille c'est aussi ceux qui sont devenus essentiels
Ceux qui t'connaissent, te révèlent, te soutiennent et te protègent
Ceux qui t'parlent la bouche fermée parce que l'cœur s'en mêle"
Commentaire de Benman posté le 07-08-2023 à 09:17:17
On a toutes les facettes du Bubulle dans ce récit: le cartographe, le zouave à manches courtes et chabob zalakon, et surtout l'homme qui fait parler son cœur.
Puisque tu aimes chercher les références, je te laisse avec ça:
"La famille c'est aussi ceux qui sont devenus essentiels
Ceux qui t'connaissent, te révèlent, te soutiennent et te protègent
Ceux qui t'parlent la bouche fermée parce que l'cœur s'en mêle"
Commentaire de POCox posté le 08-08-2023 à 14:15:52
Il y a un adage qui dit "plus c'est long, plus c'est bon". A en croire la longueur de ton récit, je peux t'assurer que pour le lecteur que je suis, ça l'a été bon, de te lire ! Merci pour ce superbe récit. Ca en dit suffisamment sur la difficulté de la course, mais aussi sur les super pouvoirs de ce qui loge dans notre tête, mais aussi dans notre poitrine, car mental et coeur ont je crois été tes principaux moteurs lors de cet UTB victorieux !
Bravo pour ce chantier de dingo, encore merci pour ce récit de folie, et une pensée sympathique pour Ginette qui a n'en pas douter doit être rudement fière de son "bubulle" !
Commentaire de alexch posté le 09-08-2023 à 11:53:23
Magnifique et plein d’émotions. Bravo
Commentaire de alexch posté le 09-08-2023 à 12:06:22
Magnifique et plein d’émotions. Bravo
Commentaire de PhilippeG-640 posté le 11-08-2023 à 18:39:16
Bravo Christian pour avoir su terminer et ce récit, que dire, très rigolo, c'est tout toi ;-)
Toujours agréable à lire, et une tristesse sur la fin...
A bientôt:
Philippe
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