L'auteur : defi13
La course : Trail du Ventoux - 46 km
Date : 10/3/2024
Lieu : Bedoin (Vaucluse)
Affichage : 527 vues
Distance : 46km
Objectif : Se défoncer
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Après avoir vécu très belle année sportive en 2024, j’ambitionnais de démarrer l’année 2024 tambour battant et surtout de me reconsacrer aux trails. J’avais en effet participé à de belles courses locales, réalisé un focus pendant quelques semaines sur la distance 10km en raflant notamment un RP et être passé 4 fois sur les 39 minutes. Les 2 seuls créneaux accordés à la pratique du trail étaient finalement 2 épreuves diamétralement opposées : le Sparnatrail (60 km, long et peu dénivelé) et le Trail du Gypaète (long, dénivelé et alpin). J’avais donc décidé de planifier de jolis évènements et collectionner de belles affiches en 2024.
Rapidement après le Sparnatrail, j’ai recherché à lister les plus beaux trails de France afin de vérifier quelles épreuves matcheraient le mieux avec mon agenda. L’idée était de poser une date avant le printemps puis une autre courant mai puis une dernière avant l’été. Le trail du Ventoux s’est imposé par sa place idéale dans le calendrier, sa réputation, son niveau relevé et l’histoire sportive qu’il s’en dégage. J’ai choisi la distance reine, celle qui a fait l’histoire de ce trail, le 46 km.
La préparation exigeante
Avec une bonne expérience sur les trails de 30 à 50 km, j’ai décidé de m’entraîner sérieusement afin de réaliser une performance personnelle dans la lignée de celle du Sparnatrail (5h57 pour 60km et 1400d+). J’ai donc adopté un plan pour « performer » sur un trail de 30 à 50km proposé par Philippe Propage sur une application Décathlon. Ce plan était très ambitieux et je l’ai entamé à peine 2 semaines après le Sparnatrail avec une récupération assez mal gérée. Je me suis donc fait des frayeurs au cours du premier cycle en croisant les doigts pour que ma cuisse droite ne lâche pas. Quand je dis exigeant, j’ai vite réalisé qu’il fallait être en pleine forme et assez expérimenté pour le suivre. Il est composé de 3 cycles de travail (3 semaines de charge puis 1 de régénération) et d’un affûtage. Chaque semaine de charge contient 5 séances dont 2 qui développent les qualités de vitesse à plat et vitesse en côte, une de travail spécifique en côte puis une de récupération et une sortie longue de 1h45 à 5 h. Il m’a donné des sueurs froides au début surtout pour accepter autant de séances de qualité.
Vers le milieu du plan, j’ai pris confiance et je maîtrisais de mieux en mieux les allures et acceptais les défis en termes de vitesse et d’explosivité en côte. Arrivé vers la 10ᵉ semaine je me suis rappelé que j’avais sciemment démarré le plan une semaine trop tôt afin de me ménager une petite fenêtre de récupération en cas de coup dur. J’ai donc lissé les 2 dernières semaines intelligemment afin de travailler et récupérer en prévision de l’épreuve.
Avec ce plan, les résultats sur le trail les années précédentes et la comparaison des cotes individuelles, l’objectif était de réaliser une course pleine avec un chrono compris entre 6h05 et 06h15 et de finir si possible dans le premier quart. Évidemment j’ai lu et relu les CR de course sur Kikourou et vu plusieurs fois les vidéos à disposition sur le net afin de bien me préparer au parcours. De tous, le trail du Ventoux est considéré comme piégeux : un fort dénivelé au début puis un profil en descente globale, mais avec une multitude de raidars qui transforme la deuxième moitié de la course en montagnes russes impitoyables pour le trailer fatigué ou qui a mal dosé son effort. À bon entendeur…
Avec mes collègues, nous avions décidé de louer une petite maison dans Bedoin afin de nous soutenir et de vivre l’évènement en son cœur. On a surveillé la météo et les communications des organisateurs qui annonçaient une édition dantesque. Les informations sur les chutes de neige, rafales de vent, et parcours de repli ont rythmé les 5 jours précédant l’épreuve.
Qui peut imaginer qu’on peut rallier Avignon en TGV en 2h45 ? C’est vraiment agréable de se faire transporter (quand il n’y a pas de grève). À peine le temps de checker 20 fois la météo et d’écouter de la musique et c’était chose faite. Mes collègues ont pu me récupérer sur place et m’acheminer jusqu’à notre location à Bedoin. Le village est minuscule, c’est vraiment mignon avec de petites maisons en pierre et de jolis points de vue sur la nature et la montagne qui nous observe.
Bienvenue à Bedoin, village de cyclistes
Je suis arrivé sous un temps maussade. On est tous partis manger dans une pizzeria qui a accepté d’ouvrir pour notre belle tablée de 19 coureurs. Le village commençant seulement à sortir de sa torpeur hivernale avec des commerces fermés, il est plus prudent de téléphoner pour réserver en avance. Je suis resté sage à table en commandant un plat de pâtes et en évitant l’alcool.
Laurent et Caroline partaient sur le 75 km raccourci à 52 en raison des conditions, dès le matin du samedi. De notre côté, nous avons pris le temps de petit déjeuner tranquillement, faire quelques courses et de filer à la remise des dossards qui s’opérait dans une petite salle de fêtes : le charme d’un village de province avec des organisateurs efficaces et accueillants. On a l’impression d’être choyés et de vivre un évènement très simple alors qu’ils attendent des milliers de participants et visiteurs au cours du week-end. La dotation coureur est assez riche, jugez plutôt : jus de raisin local, bière du Ventoux, superbe tee-shirt, chaussettes commémoratives de l’évènement, et un savon.
Mes magnifiques chaussettes
Alors que j’apprécie beaucoup flâner sur les stands lors des gros évènements, la pluie et la fraîcheur ambiantes ne m’incite guère à traîner, nous repartons sans enthousiasme vers la maison.
Nous prenons des nouvelles de nos amis grâce au live et apprenons qu’ils vivent un enfer avec un vent important de la neige en abondance sur le parcours. Les congères sont impressionnantes. Leurs photos nous effrayent quelque peu. Le vent violent attise la sensation de froid qui atteint – 15°… On croise les doigts pour demain matin…
Un samedi de mars sur le trail du Ventoux
Nous faisons des checks météo incessants, toujours la neige, et un ressenti – 20°. Nous apprenons que le parcours de repli est validé par l’organisation, il fera tout de même 46 km et 2400d+ (soit une légère rallonge de +2 km), hélas ils ont décidé de shunter la montée au phare jugée trop dangereuse en raison des bourrasques dépassant les 100 km/h et de chutes de près de 60 cm de neige au sommet au cours de la nuit ! Je suis évidemment déçu, car ce phare blanc trônant en haut du mont chauve est un monument du sport national et j’avais envie de le tutoyer, mais la raison l’emporte et je reste concentré sur un évènement rendu plus difficile encore.
C’est le froid ressenti qui me préoccupe en ce moment même. Je sais que je me couvrirai avec un tee-shirt technique à manches longues et un supplémentaire à manches courtes par-dessus ainsi qu’une veste étanche, mais j’hésite à remplacer le tee-shirt léger par un autre modèle très chaud voire de porter les 2… dilemme entre 3 et 4 couches. Les gants et le tour de cou seront évidemment de la partie. J’ai volontairement laissé mes bâtons à la maison, en me disant que je m’engageais sur un trail de moyenne distance et que mon objectif me commandait de courir assez vite et non de randonner activement. Aux pieds j’enfile mes Saucony Peregrine 12, légères et dynamiques, mais dont le mesh rend déjà sérieusement l’âme après 350 km. J’ai une ouverture de 4 centimètres au niveau du pied gauche… Je n’ai pas osé changer de baskets la semaine précédant le trail par peur d’ampoules. Ça passe ou ça casse ! Le risque est surtout de ramasser des débris en nombre à cause de l’ouverture et que la neige s’engouffre dans la basket…
On réfléchit à la stratégie de course avec Benjamin, un copain expérimenté sur route, marathonien régulier sous les 3h00. Nous avons choisi le SAS 2 puisque le 1 était ouvert aux coureurs estimant leur temps de course inférieur à 6h00. Toutefois, on ne veut pas être pénalisés par des bouchons, ralentissements ou coureurs plus lents, donc on se promet de rentrer très tôt dans notre sas. Théo qui est un bon trailer sur des distances plus courtes teste pour la première fois la distance maratrail et pense aussi bien se placer dans le sas. Enfin Jérémie qui reprend tout juste après une vilaine entaille au genou sur le Maxicross de Bouffémont partage notre choix, car il entend gérer sereinement sa fin de course qu’il prédit difficile (son footing le plus long depuis 1 mois est de 10 km et remonte à une semaine).
Nous accueillons Laurent qui a souffert malgré un très beau classement. Il nous a répété plusieurs fois de faire attention au froid ressenti et aux glissades dans la neige sur certaines parties techniques. Après la préparation des sacs et un bon repas nous entamons une partie de Trail Up ! Chacun se concentre sur la préparation de son sac. Dans une stratégie d’alimentation « offensive » je décide d’embarquer gels et pâtes de fruits en nombre.
Nous nous couchons relativement tôt et je parviens à faire une bonne nuit (23h00-06h00). Le réveil sonne et je me lève assez rapidement pour enfiler mon équipement. 10 minutes de mouvements articulaires plus tard, je petit-déjeune tranquillement. Je mets le nez dehors 3 minutes pour ressentir l’air ambiant. Il fait frais, mais ce n’est pas trop humide, la chaussée est presque sèche. Je décide de ne pas porter mon tee-shirt très épais et prends par précaution un second tout de cou. Je remarque que l’ouverture importante sur mes baskets me donne l’impression que le pied n’est pas assez serré. Je croise les doigts pour ne pas me faire une cheville ! Puis nous nous mettons en route pour la ligne de départ. Nous réalisons un échauffement d’une dizaine de minutes histoire de ne pas être froids en prévision d’un départ que je souhaite dynamique.
Nous nous rapprochons du départ et nous faufilons entre les coureurs du SAS 1. Lorsqu’ils entrent sur l’aire de départ nous patientons sagement jusqu’à recevoir le feu vert. Cette stratégie s’avère payante puisque nous parvenons à rentrer parmi les tous premiers du SAS 2. Nous patientons quelques minutes le temps que la vague 1 se mette en marche. Les caméras sont là et les micros sont tendus aux meilleurs d’entre eux, leur départ est donné. Malgré la renommée de l’évènement, on assiste à un départ assez classique loin des trompettes et flonflons qu’on peut voir sur certaines courses (et qui ne me déplaisent pas non plus). Bref c’est à l’image de l’évènement : un grand trail, reconnu et qui garde un aspect plutôt humain et ancré dans son territoire.
A l'abordage !
Nous patientons quelques minutes. Nous sommes placés parmi les 20 premiers coureurs, sur la ligne de départ. L’idée est donc de partir vite pour éviter d’être gênés. Dès de coup de feu, nous partons à belle allure. Au bout de 200 mètres nous prenons la tête de la course avec Benjamin et nous maintenons l’effort. L’allure instantanée est aux alentours de 3’45” j’ai l’impression de me lancer sur un trail très court ! Dans mes plans, je pensais tenir un honnête 4’20” ou 4’30” pour ce premier kilomètre, dans le prolongement de ce que j’avais déjà testé aux Templiers 2022 ou au Gypaète 2023 puis de relâcher progressivement la cadence, mais Benjamin en tant que marathonien imprime un train d’enfer ! Je le suis, tout en essayant de rester le plus fluide possible. Premier kilomètre 4’12” !! 2 coureurs nous rattrapent et courent allègrement sous les 4’00” au km. Pas de folies, on reste sage ! Nous arrivons à une petite bosse (40d+) sur une très courte distance, c’est très raide, mais on maintient une belle allure. On repart sur un chemin agricole plutôt descendant et on court encore à 4’20”. On arrive sur des parties sableuses. En raison de la météo, le sable est plutôt ferme et ne se dérobe pas sous les pieds, parfait pour continuer à courir. C’est plutôt agréable à l’œil ces palettes d’ocres, de marron avec des pins clairsemés.
Sable fin mais pas le temps de planter le parasol
13’38” pour faire les 3 premiers kilomètres alors qu’on part sur un format maratrail avec + 2000d+, c’est plutôt costaud ! Je décide maintenant de courir au bon rythme, c’est-à-dire celui qui me permettra de tenir bon.
Nous attaquons cette fois une vraie montée, sur des roches. Le rythme tombe et je remarque qu’il y a de plus en plus de coureurs, j’en conclus que nous avons rattrapé le fond de la première vague. La roche est un peu glissante, la végétation rase et typique des paysages méditerranéens avec du thym et du romarin. Ça sent bon, c’est très joli à voir. Je pense que sous le soleil, ça doit être de toute beauté.
Je maintiens un rythme très correct malgré l’apparition de ces difficultés, je contrôle mon cardio et je parviens à le contrôler en ralentissant légèrement afin de le maintenir dans une zone acceptable. Je ressens à la fois les bénéfices de ma préparation et de la semaine d’affûtage/ régénération dont j’avais besoin. Benjamin n’est plus tout à fait derrière moi, mais cette portion n’est pas propice à courir à 2 de front.
On arrive sur une corniche, un ravin sur notre droite offre une vue sur tout un paysage, malheureusement bouché par un couvercle nuageux particulièrement dense. Nous n’aurons pas la chance d’apercevoir le mont Ventoux.
Pour l’instant, le cardio reste dans la zone idéale, je parviens à me faire obéir en ralentissant ou en accélérant un peu. Je maintiens un travail dynamique en montée (trotinage ou marge rapide, sans bâtons). Le sol est agréable à courir et offre une très bonne accroche : pierres et cailloux, sentiers, quelques racines çà et là. Malgré cela, les singles tournicotent et l’allure générale est cassée. Du 4ᵉ au 8ᵉ kilomètre, la pente est régulière, importante mais pas écrasante.
J’avais bien remarqué une belle descente au kilomètre 8,5 et noté sur mon plan de course de relancer si le terrain s’y prêtait. Nous y arrivons et le sentier technique débouche sur une piste forestière avec une jolie pente. J’enclenche la vitesse supérieure et sans même forcer, je dévale à 4’00” au km sur ce sentier dans difficulté. Je me dis que ça a du bon de préparer les courses (et sans doute de repérer les parcours quand cette opportunité s’offre à nous).
Nous reprenons notre ascension sur un sigle propre et qui offre une bonne accroche. La neige fait son apparition. Par moments, nous sommes à l’abri du vent, mais à l’occasion de virages ou d’arrivée dans des portions dégagées, je ressens la morsure du froid. Je tire le tour de cou que j’ai mis sur la tête afin qu’il me protège encore plus.
Entre le km 10,5 et 11,8 nous croisons, longeons puis traversons une route en lacets qui monte au col. La neige est de plus en plus présente. Un tapis blanc et frais recouvre toutes les parties sauf les endroits que nous piétinons.
12,6km, virage en angle droit à droite, on aperçoit beaucoup de monde, c’est le premier ravitaillement. Je fais remplir mes 2 flasques de St Yorre et je prends un morceau de banane et d’orange, 2 tucs. C’est un ravito sans traîner. 12,7 km, 1h35, 970d+ , la première étape de cette belle épreuve est déjà passée. Je ne l’ai pas vu passer, et je suis resté très concentré sur mon objectif. Je ne vois pas Benjamin arriver, il a dû gérer sa montée. Je remarque que certains concurrents ont choisi de se chaîner les baskets à la sortie de ce ravitaillement.
Immédiatement après, la neige est de plus en plus importante. Nous sommes bien ralentis, mais cela ne glisse pas trop, la neige est fraîche et tassée par endroits. Ce n’est pas de la glace. Le froid nous saisit de plus en plus. J’étire mes deux buffs sur chaque centimètre carré de peau à l’air libre afin de rester suffisamment au chaud.
Nous passons entre des sapins géants qui sont couverts de neige. Machinalement, je cherche à en faire tomber pour profiter de ce spectacle, mais lorsque mon épaule heurte volontairement une branche suffisamment basse je ressens comme un léger coup de poing dans l’épaule ! Le vent et le froid ont tellement façonné cette neige qu’elle s’est transformée en glace et ce sont des amas durs qu’il faut éviter de toucher en courant sous peine de recevoir un coup ! Des grêlons tombent et ils s’amassent sur le haut de mon buff formant une couche froide sur la tête. Je les balaye pour ne pas garder cette masse froide en contact avec ma peau.
La neige c'est mou, la glace c'est dur
Nous parvenons à ce qui sera le point culminant de la course, 1 490 m d’altitude. Je ne le sais pas encore, mais l’organisation a fait le choix de modifier une nouvelle fois le parcours après le départ de la course. En fait, les chutes de neige ont été si abondantes que la déneigeuse n’est pas parvenue à déblayer l’accès au chalet Reyard !
La récompense
Nous poursuivons notre grande ballade et la récompense du jour arrive. Il ne s’agit pas du phare malheureusement, ni d’une vue dégagée sur celui-ci, mais nous arrivons sur une portion plate couverte de neige. Un rayon de soleil balaye cette étendue duveteuse et immaculée. Le single est large d’environ 40 cm, la neige est bien tassée, en revanche les congères atteignent 40 à 50 cm par endroits ! C’est de toute beauté. Nous participons à un trail blanc ! Sur le plan purement sportif, j’ai du mal à maintenir mon cœur dans une tranche élevée. Certes, le parcours ne s’y prête pas il y a du monde devant, je n’arrive pas à faire « mon effort ».
Mon premier trail blanc
On régule l’allure dans cet environnement. Je glisse souvent lorsque le single est en dévers, mais je suis retenu par les monstrueuses congères. Je ralentis à la fois pour ouvrir grands mes yeux sur ce spectacle et parce que le fil de coureurs s’étire. Je tente quelques dépassements hasardeux avec la neige molle qui remonte jusqu’à mi-mollets ! Je glisse à plusieurs reprises, tombe même dans la neige sans gravité. Ce spectacle dure environ 1,5 km et nous amorçons une descente. La neige est encore présente. Il faut être plus vigilant et 3,5 km plus bas, le piétinement, les rochers humides, la neige fondue et la boue aussi rendent cette section très vicieuse. Nous parcourons des sentiers qui avec des alternances de neige, de terre, de pierres et évidemment de neige fondue. À la fin de cette descente, nous arrivons à ce qui me paraît un ravitaillement avec un chalet. Nous sommes au kilomètre 20 ; pas encore au chalet Reynard… curieux… Le parcours des coureurs se croise presque. Je vois des coureurs qui ont de l’avance sur moi et qui descendent une section à environ 200 m de moi.
J’avais remarqué un passage d’environ 1 km qui remontait en pente douce sur le plan, j’avais même annoté « essayer de relancer si la pente n’est pas trop forte » …Bref, j’ai dû me contenter de subir, car il était difficile de courir sur cette section assez différente de ce que nous avions déjà couru. Puis nous avons basculé sur une descente par une piste forestière. Sitôt les appuis repris et les muscles détendus, j’ai relancé et dévalé cette piste non technique à +14 km/h. Je commence à avoir chaud.
Dans le vif du sujet
2 kilomètres plus tard, on regrimpe sec, on me l’avait suffisamment dit : la 2ᵉ partie du Ventoux est beaucoup plus dure que la première ! Je ressens comme une fatigue qui s’est installée malgré une alimentation régulière. J’avale un gel de la marque TA qui contient des BCAA et 33gr de glucides après 3h00 de course. Le chronomètre est à présent à 3h30 de course. Nous remontons pendant 1,5 km pour parvenir au croisement de sentiers que j’avais remarqué il y a 45 minutes. Je recharge en eau rapidement et je pars sans traîner. La montre affiche une distance parcourue de 24,8 km, il en reste donc normalement 20, ce n’est pas une mince affaire.
Mon dernier gel ne passe pas. J’ai l’impression qu’il est bloqué au niveau de l’estomac et que la digestion est bloquée… pas de renvois ni de digestion non plus. Je vais devoir patienter une bonne heure de plus avant de pouvoir avaler quelque chose de plus. Je réessaye une demi-pâte de fruits qui passe, puis la suivante aussi.
Laurent qui cherche à venir sur le parcours pour nous encourager au chalet Reynard est dérouté. Il nous annonce qu’il rentre finalement sur Bedoin pour nous accueillir. La température se radoucit, je suis tenté de retirer mes gants et un des buffs, mais je préfère patienter et bien m’en prend, je ne supporte pas ce froid pénétrant.
Je parviens à relancer correctement sur les parties plates (très rares) ainsi que sur les parties non techniques. Je ne suis toujours pas le dieu de la descente, surtout dans ces conditions rendues difficiles par la météo. De toutes façons mon terrain d’entraînement n’offre pas du tout de descentes pierreuses alors je décide de ne pas forcer plus que cela. La neige se fait rare avant de disparaître définitivement. Nous retrouvons la caillasse.
On rentre dans une section finale qui nous ramènera à Bedoin dans plus de 2 heures, mais avant cela une tranche de 8 km nous attend. Elle est la définition même du trail : difficultés, relances, montées sèches et courtes, descentes glissantes. On est testés en permanence, mentalement et physiquement.
Après 32 km de course, nous entamons une descente raide de 3 km avec près de 500 m de dénivelé négatif. Ça torture les quadriceps.
Nous rejoignons des sentiers qui courent le long de grottes. Ce parcours est vraiment de toute beauté. Nous redescendons de plus en plus et je commence à avoir vraiment chaud, j’ai retiré mes gants, je poursuis avec un buff, puis le second et j’ouvre enfin ma veste.
Nous croisons des vignes. J’ai le sentiment qu’on s’approche de l’arrivée, pourtant à la montre je n’ai que 37 km. Je ne sais toujours pas que le parcours à été raccourci à 40 km. Je me prépare mentalement à courir 44 km. À la fin de cette descente, de plus en plus de coureurs coureuses me dépassent et poussent leur allure. Je reste méfiant et allonge un peu ma foulée, mais sans excès. Mon allure flirte avec les 5’00” au km et même moins lors des descentes, mon cardio remonte ce qui n’était pas arrivé depuis près d’une heure. Nous débouchons en ville et je vois Laurent qui m’annonce l’arrivée très proche. J’accélère un peu, on nous fait gravir une dernière bosse qui surplombait la ligne de départ, on relance en haut sur le plat puis ont serpente pour redescendre cette colline pour enfin déboucher devant l’arrivée à environ 200 mètres. Un dernier coup de rein et l’arrivée est franchie en 5h20.
Je suis ravi de ce chrono, même s’il a été réalisé sur un parcours plus court. Nous avons gravi 2 100 m de dénivelé positif au cours de cette boucle. Finalement mon objectif initial de 6h05-06h15 est largement atteint. En projection sur le parcours d’origine je serais sans doute descendu sous les 6h00. Je termine 267ᵉ sur 1209 arrivants, soit presque dans les 20 %. Je suis très content de ma performance et de ce parcours et la météo nous a fait vivre une aventure condensée et passionnante.
Je me restaure quelque peu même si l’appétit n’est pas là. Je récupère une magnifique affiche qui trônera dans mon bureau dès lundi.
Théo finit en 5h37, suivent Benjamin puis Jérémie et Gaëlle soit 5 finishers du parcours original et Laurent sur le long la veille ! Le moral est au beau fixe dans la maisonnée.
Le parcours est évidemment mémorable. Les organisateurs sont au top niveau, ils ont offert le plus bel exemple de capacité d’adaptation en mettant en place plusieurs alternatives à quelques heures d’intervalle, et même après le départ de l’épreuve.
La plus belle des affiches
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3 commentaires
Commentaire de CAPCAP posté le 01-04-2024 à 13:43:42
Hé béh ! Ce n'est pas du tout le même trail que celui de 2020 !
Commentaire de centori posté le 02-04-2024 à 17:12:37
vraiment génial, la différence de paysage et temps entre les différents secteurs de la course.
Commentaire de Shoto posté le 19-04-2024 à 07:30:26
Bravo. Très belle course bien gérée malgré les conditions climatiques et beau récit agréable à lire.
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