Récit de la course : Grand Raid 73 2021, par truklimb

L'auteur : truklimb

La course : Grand Raid 73

Date : 22/5/2021

Lieu : Cruet (Savoie)

Affichage : 1525 vues

Distance : 73km

Objectif : Balade

11 commentaires

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Grand raid 73 en off

Le sort (et le covid) s'acharne, je ne parviens toujours pas à participer à ce fameux Grand Raid 73 sur lequel je suis inscrit depuis 2 ans ! Puisqu'il était initialement prévu ce weekend, et que j'ai besoin de prendre l'air en montagne, je me décide un peu à la dernière minute pour le faire en « off » en mode rando avec bivouac vers la mi-course. Avec le confinement (je ne sais plus lequel, j’ai arrêté de compter), ça fait pas loin de deux mois que je n’ai pas mis les pieds en montagne, et boucler l’itinéraire parait ambitieux quoique réalisable.

Niveau matos, je traine une charrette dans mon dos :

  • Pour le couchage, j’opte pour la tente plutôt que mon classique sur-sac car la nuit s’annonce pluvieuse. Avec un duvet et un matelas, c’est presque un hôtel 3 étoiles.
  • Pour me sustenter, je pars plutôt léger avec de quoi picorer la journée et un repas pour le soir. Je me ferai un gros ravito dimanche matin à la célèbre fromagerie de Aillon-le-Jeune. Grâce à Bubulle, qui opère secrètement en tant que « Community manager » du massif des Bauges, je sais que l’établissement susnommé sera ouvert, même le jour du Seigneur.
  • Deux litres d’eau. D’après Bubulle, qui sévit également comme accompagnateur de moyenne montagne en Bauges, la gestion de l’eau peut être ardue sur le parcours, il va falloir compter les gorgées.
  • Quelques fringues pour rester au chaud lors du bivouac.
  • Les bricoles habituelles (cartes, boussole, GPS, couverture de survie, crème solaire, PQ, clé à molette…)

Je n’ai pas pris le temps de poser le tout sur la balance, mais ça pèse bien un âne mort, et j’ai déjà du mal à ne pas tomber à la renverse quand j’arrive enfin à mettre mon sac sur le dos.

Jour 1


Je gare la trukmobile devant l’église de Cruet, et c’est parti les amis ! Ça démarre fort, c’est raide (d’où le nom de la course j’imagine) sur les 800 m+ qui mène au col du Mont. Ensuite, à vue de carte, c’est plus ou moins sur la ligne de crête, ça devrait dérouler. Mais en fait non. Arrivé à la Roche du Guet, le point de vue est top car on peut voir quasiment l’intégralité du parcours. C’est top mais ça fait peur, car je me rends compte que y’a du boulot avant d’atteindre le spot de bivouac.


 Le bivouac est loin, au fond à gauche...

Je poursuis et la trace officielle passe à droite du Tapin alors qu’un panneau indique un passage câblé à gauche qui débouche au sommet. Je ne peux pas m’en empêcher, je prends à gauche pour faire le Tapin… Arrive ensuite le Roc de Tormery, et au lieu de suivre le chemin débonnaire sur la droite, on descend les échelles sur la gauche. C’est brave de la part de l’orga d’envoyer des dizaines de gugus là-dedans, ils ne choisissent pas la facilité ! C’est sympa mais par contre ça rajoute plein de petites montées et descentes, et c’est beaucoup plus long que prévu. En plus avec les seaux d’eau tombés depuis des semaines, le terrain est franchement gadouilleux, ça n’aide pas à avancer dans les montées casse-pattes, et ça ne facilite pas dans les descentes casse-gueule. Bref, je suis rapidement tout cassé. J’arrive enfin au sommet de Montgelas, trois heures après le départ.

J’attaque la descente sur la Thuile, et rapidement la trace bifurque à droite. J’atteins le « chaudron » indiqué quelques hectomètres plus tôt, puis plus rien. Je suis bien sur la trace GPS, mais en plein milieu des bois. Je jardine à droite à gauche, mais je ne trouve pas de chemin visible. Ce sentier n’est pas sur l’IGN, mais il me semblait que Bubulle, qui se trouve être aussi Guide Suprême d’OpenStreetMap, avait tracé le truc. Bon ça me saoule, je suis déjà en retard donc je rejoins le sentier initial, celui de l’IGN, celui des vrais, pas celui des mécréants qui coupent n’importe où à travers bois. Un peu plus tard, je recroise l’itinéraire en pointillé qu’on est censé rejoindre le jour de la course. Je m’aventure à suivre ce pointillé, il y a pas vraiment de passage. Par contre, ce qu’il y a en abondance, ce sont des arbres couchés et des branches dans tous les sens. Bref, ça me resaoule, je reretourne sur le sentier de l’IGN ; tant pis, ça me fera un petit détour, mais au moins je sais où je mets les pieds.

A la Thuile, comme me l’avait annoncé Mombius, la fontaine ne coule pas. Cependant, comme me l’avait également enseigné le même Mombius, il y a bien un robinet dans le renfoncement à côté de l’école. Gloire à toi Mombius pour les siècles des siècles, car il commence à faire chaud et ce ravitaillement liquide tombe à point nommé !

Vient alors la montée vers les barres rocheuses pour gagner le Pic de la Sauge. Ce chemin n’est pas sur l’IGN et vu ma déconvenue matinale sur la descente du Montgélas, je crains le pire. En fait c’est plutôt bien marqué au début, puis je perds le fil et me retrouve à monter tout droit dans les bois boueux en mode gros sanglier. Je retrouve le tracé qui comporte maintenant de belles marques de peinture, et le passage dans les barres se fait finalement très bien. Un peu avant le sommet, le point de vue est superbe jusqu’à la croix du Nivolet.


De la Thuile à la croix du Nivolet

Descente sur le col de la Galoppaz sans encombre, et remontée vers la pointe éponyme, en croisant un petit ruisseau qui me permettra de refaire les niveaux.


Galoppaz en vue !

Vient la descente et la longue traversée vers les chalets de l’Allier, toujours dans les bois, toujours dans la boue. Tiens d’ailleurs je me demande pourquoi on ne prolonge pas la crête par le col de la Buffaz avant de redescendre à bâbord, ça parait plus sympa au 1/25 000. Il faudrait que j’en touche un mot à Bubulle, qui entretient par ailleurs des connexions très étroites avec les plus hautes sphères de l’orga…


Le col des Prés et le mont Margériaz encore très loin à gauche, le mont Colombier à droite pour demain

Quoi qu’il en soit, je commence à en avoir plein les bottes, ça fait plus de sept heures que je marche. Un peu avant les chalets Ballan, j’ai pour diversion de croiser un camp Scout en pleine installation. Ils doivent être au moins 300 en train de monter des grandes tentes. Pas évident de savoir comment ils vont respecter les distanciations sociales, mais bon, passons…

Et là, j’arrive sur « la ligne droite ». Sur le tracé, c’est un petit kilomètre, littéralement tout droit, jusqu’à croiser la route du col des Prés. Evidemment il n’y a pas de chemin, mais je ne suis pas plus surpris que ça, je sais depuis ma TDS que les chemins (ou plutôt leur absence) est un problème récurrent en Savoie… Je m’écarte de la trace et essaie de suivre la bordure d’un champ, puis je dois passer par-dessus des barbelés, au péril de mes attributs. De nouveau je jardine dans les bois, d’autres barbelés, une clôture électrique, deux ruisseaux à traverser comme je peux, pour finalement me retrouver en contrebas de la route et devoir à moitié ramper dans les branches pour regagner le talus. Ça donne une petite ambiance « Barkley » à la sortie mais à ce moment-là, j’en ai vraiment, mais alors vraiment marre. J’aimerais bien savoir par où on passe le jour de la course : chemins privés autorisés juste pour l’occasion, piste bien plus tôt vers les chalets du Molard, hélitreuillage ?

Bref, je suis bien content de pouvoir attaquer la dernière montée du jour vers le mont Margériaz. Joie d’assez courte durée néanmoins, puisque cette fois-ci ce sont les plaques de neiges qui me font perdre la pseudo-sente que je m’échine à suivre. Heureusement, une fois au col de la Verne, tout s’illumine et il suffit de suivre le sentier de crête qui monte jusqu’au sommet de la station. En revanche il ne faut pas trop trainer, le vent se lève, de gros nuages noirs commencent à poindre et j’aimerais bien monter la tente au sec. Je file rapidement vers les chalets du Margériaz pour trouver un joli coin avec vue imprenable sur l’objectif principal de demain : le mont Colombier.


Bien installé

Jour 2


Après une nuit plutôt pourrie à cause des averses et du vent qui m’ont réveillé à maintes reprises, il est temps de plier bagage et de se diriger vers Aillon-le-Jeune. Je suis rapidement sur place, me charge en fromage et en cake aux fruits, qui s’avère être un truc hyper dense, genre pain elfique passé sous une presse. Parfait pour un petit déj de champion. Mes deux litres d’eau sont remplis, je peux attaquer sereinement mais lourdement la longue grimpette vers le col de la Cochette. Inutile de préciser que la pluie de cette nuit n’a rien arrangé, ni l’état des chemins, ni mon humeur. Mais déjà chemin il y a, et ça suffit à mon bonheur. La crête entre le col de la Cochette et le sommet du Colombier est vraiment sympa, mais bien assez raide à mon goût. Surtout que comme je suis un gland et que j’ai déjà perdu toute lucidité, je n’ai pas pensé à laisser mon sac au col alors que je vais y repasser dans deux heures… Comme hier, les panoramas depuis les points hauts du parcours valent leur pesant de tom(m)e des Bauges, et je coche au passage une nouvelle croix parmi la prestigieuse liste des 14 « 2000 » des Bauges.


Sommet du mont Colombier

A partir de là, je sais que c’est majoritairement descendant, donc je suis confiant pour la suite. En revanche, autant hier j’ai croisé beaucoup de ruisseaux, autant aujourd’hui c’est sec, et je suis bien déçu de ne pas trouver le point d’eau aux chalets de la Fullie. Vu mon sens de l’orientation, il est assez probable que je sois passé à côté sans le voir… Toujours est-il que je vais devoir faire la journée complète avec seulement deux litres d’eau, un peu rude sur la fin…

La ligne de crête est longue mais sans grosse difficulté, avec une très belle vue sur la dent d’Arclusaz et même le mont Blanc, c’est comme à la maison. Le chemin est agréable et il a le mérite d’exister, ça déroule à peu près bien jusqu’au col de la Sciaz.


La dent à Laurent

J’ai un peu le dos en vrac à cause du sac, mais ça avance. J’arrive même à suivre la sente infime jusqu’au sommet de l’Epion et redescendre jusqu’au col du Pré du Tour sans me perdre. On dirait qu’après deux jours, j’ai développé un semblant de sixième sens qui me permet de comprendre que ce vague rail d’herbe écrasée sur cinq centimètres de large est en fait l’autoroute que je suis censé suivre.


L'autoroute de l'ail des ours

C’est sûr que ça me change de ma Haute-Savoie où on colle un panneau tous les trente mètres, et où on a la gentillesse d’accueillir les monchus avec forces remontées mécaniques qui leurs permettront de consommer les joies de la montagne en échange des quelques menues piécettes…

La dernière descente, enfin ! Au chalet Ducray, j’hésite : prendre ce beau sentier IGN sur la droite, ou suivre le tracé de la course qui s’aventure sur ce pointillé à gauche. Enorgueilli par ma réussite sur l’Epion, je bascule à gauche. Quelle erreur ! C’est le jardinage ultime, le boss final, là où la boue, les arbres couchés, les branches et les passages en devers se sont donné rendez-vous. Je me maudis, mais j’ai à ce moment-là une grosse pensée pour l’orga qui doit abattre un boulot colossal pour rafraichir et baliser ces passages le jour de la course. Je me demande combien de participants ils perdent à chaque édition… Juste pour ça (et aussi pour voir à quoi ça ressemble quand on passe au bon endroit), je reviendrai l’année prochaine avec un dossard. Ça s’améliore petit à petit jusqu’à tomber sur le col de Marocaz. Nouveau dilemme : la course fait une grosse boucle vers l’est alors qu’il y a une descente à peu près directe sur Cruet. Cette fois-ci point d’emballage, je suis complètement rincé et j’opte pour un retour au plus court. Un peu plus bas, je me fais doubler par deux gars en trail, puis de nouveau les mêmes coureurs me repassent quelques minutes plus tard. Ils se sont trompés à un embranchement et ont dû rebrousser chemin ; mais quelle bande de nazes, c’est pourtant pas bien dur de suivre des chemins imaginaires !

Je retrouve enfin l’église de Cruet ; comme hier, la journée s’achève après une dizaine d’heures de pérégrinations, il était temps que ça se termine.


Cruet, enfin !

Bilan

C’était dur ! Je ne pensais pas que le sac me pénaliserait autant mais j’en ai vraiment bavé. La boue n’a pas rendu la progression plus facile, et mes nombreux errements ont fini par m’achever.

Sinon, le parcours est plutôt sympa, les points de vue superbes, mais il y a aussi beaucoup de sections boisées un peu longuettes et finalement peu de passages « montagnes ».

Dans tous les cas, je viendrai l’an prochain, ne serait-ce que pour gouter à l’ambiance de la course qui parait être aussi incontournable que le Margériaz Vieux acheté à la fromagerie !

11 commentaires

Commentaire de Arclusaz posté le 31-05-2021 à 17:36:38

bravo !!!!!!! et oui les bauges derrière c'est boisé, les espaces dégagés sont plutôt "côté Bauges devant" (et encore, qu'à partir d'une certaine altitude).
Tu as eu la pluie, c'est aussi une spécialité baujue comme la tome et le Margeriaz (qui, c'est vrai est une tuerie bien que venant du mauvais côté du massif).

Commentaire de truklimb posté le 31-05-2021 à 18:31:45

Les Bauges, ce "petit" massif qui a tout d'un grand !! ;)

Commentaire de bubulle posté le 31-05-2021 à 20:05:03

Alors quelques compléments :

- pas de passage acrobatique entre La Roche du Guet et le Montgelas, il est probable que tu aies loupé une mini-bifurcation (c'est compliqué le secteur)
- pour descendre du Montgelas sur Nécuidet, oui, c'est pas simple. La trace bifurque à gauche juste après le chaudron, le passage n'est pas très visible alors qu'ensuite, c'ets plus facile à retrouver (mais à mon avis, l'an prochain, je vais encore hésiter, par là). Et oui il vaut mieux utiliser OSM sur ce parcours vu qu'il y a un givré qui a tout mappé....
- la redescente de la Galoppaz via les Chalets de la Buffaz s'est faite à certaines éditions (le parcours a souvent changé) mais je crois que l'orga aime bien faire le coup de la descente dré dans l'pentu en fait
- impossible de te lever le mystère après la descente de la Galoppaz car cette section de parcours est nouvelle et je ne la connais pas....:-)
- le point d'eau aux chalets de la Fullie est privé, donc il n'est souvent pas accessible en dehors de la course

Bravo pour avoir suivi tout cela car c'est vraiment pas facile (je ne suis pas sûr que la trace officielle soit très bonne en plus). Et rendez-vous l'an prochain pour la faire en vrai (et je serai là, évidemment).

Merci pou rles petits clins d'oeil qui m'ont bien faire sourire : "Community Manager" des Bauges, je n'y avais pas songé et ça va faire un jaloux....

Commentaire de truklimb posté le 31-05-2021 à 22:23:44

Merci à toi pour toutes ces infos supplémentaires, et pour celles déjà fournies sur le forum !
Sinon le Bauju ne peut pas cumuler toutes les étiquettes, il est déjà revendeur officiel de tom(m)e en pays lyonnais, ce qui le classe plus dans la catégorie "happiness manager" ! :) (que c'est beau ces nouveaux noms de métier...)

Commentaire de Arclusaz posté le 31-05-2021 à 22:26:12

Happiness manager, je prends !!!!!!! et avec tout ce que je gagne avec mon commerce de tome, mon banquier aussi est heureux.

Commentaire de Papakipik posté le 03-06-2021 à 12:38:29

Super récit, ça donne envie ! Aurais-tu la possibilité d'additionner tes traces pour qu'on ait une idée de ton parcours sur une carte ?

Commentaire de truklimb posté le 08-06-2021 à 20:31:45

Et voiloù, j'ai rajouté les cartes, désolé pour le délai !

Commentaire de Mazouth posté le 07-06-2021 à 09:34:13

Sacrée rando ! Après ça tu trouveras la course facile ^^

Commentaire de truklimb posté le 08-06-2021 à 20:32:26

Rien n'est moins sûr, je suis capable de partir comme un débile et être cramé au bout de 3 heures !

Commentaire de ironmyth posté le 11-06-2021 à 18:31:02

C'est moi le "givré qui a tout mappé sur OSM", dommage que ça ne t'aie pas servi pour trouver la trace après le chaudron...c'est vrai qu'il faut la voir !
Bravo pour cette ballade, j'avais aussi le projet de faire ça en morceaux; je me posais aussi la question du ravitaillement en flotte, tu ne me rassures pas...des coups ça coule, des coups ça coule pas, pas évident de gérer ça !

Commentaire de truklimb posté le 14-06-2021 à 11:32:28

Merci pour la trace sur OSM, j'ai pas trop le reflexe car j'utilise un GPS avec les cartes IGN, faudrait que j'essaie un peu plus OSM à l'avenir mais j'aime pas utiliser mon téléphone quand je suis en montagne. Sinon oui la flotte est un vrai problème sur la deuxième moitié du parcours...

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