Récit de la course : La Montagn'Hard - 125 km 2018, par Free Wheelin' Nat

L'auteur : Free Wheelin' Nat

La course : La Montagn'Hard - 125 km

Date : 6/7/2018

Lieu : St Nicolas De Veroce (Haute-Savoie)

Affichage : 3752 vues

Distance : 125km

Objectif : Pas d'objectif

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Un facteur sur la 120?

Je ne dis pas que j'avais prévu de ne pas la finir, cette MH, mais je n'avais pas franchement prévu de la finir. Je n'imaginais pas d'ailleurs qu'elle eût une fin ...
Et si , pour la première , j'avais une porte à ouvrir , pour la seconde , je ne m'attendais pas à passer par la Porte des Etoiles , rencontrer Korben Dallas ou passer ans la 4ème dimension en empruntant le LHC du CERN.
D'ailleurs j'ai encore quelques séquelles du voyage puisque par moments j'ai l'impression que le téléporteur du Star Trek me balade en pleine crise de hoquet, hips...
Bon, ça va, au moins je n'ai pas embarqué de mouche dans mon pool génétique, tout va bien. Peut être quelques poussières d'étoiles ?

Arrivée à St Nicolas, la sensation de revenir chez moi s'impose... En plus, je suis ravie d'attaquer le Grand Voyage avec Parap'Gab, de retour lui aussi sur la MH.
Et notre première leçon commune a été : « tu feras pipi dans autre chose que le sac à toilette sèche car s'il est trop rempli, il est trop fragile à la manipulation  ».


Tout cela nous permis de constater que :
1) Ce système est beaucoup moins odorant en cas d'incident qu'une toilette chimique, vive le naturel !
2)Comme il est vrai qu'un départ à minuit rallonge considérablement la journée, (donc l'attente et le stress) du coup le toilettage interne du trafic a utilement occupé une petite partie de la matinée.
Une saine occupation avant un départ permet donc, non seulement une meilleure décontraction face au départ, mais en plus apporte une anecdote sympa à rapporter aux potes durant les longues soirées pré-compétition.
3) La douche à pompe de chez Décat', c'est de la balle. Pour 50 balles , ça sert vraiment à tout.

C'est avec grand plaisir que nous retrouvons la Montagn'Hard Dream Team et son roadbooker fou, avec qui j'entame la traditionnelle danse du bond des retrouvailles inter-forêts (dans laquelle il restera meilleur que moi, il saute plus haut). Le tout sous l'oeil bienveillant mais néanmoins perçant du Poggio sorcier et de son boitier magique.

Une ou deux siestes plus tard , il est temps d'y aller .Perso, partir à minuit ne me fait ni chaud ni froid, c'est juste une nouveauté .
La seule chose qui m'inquiète, c'est juste la gestion du dodo : même en limitant la boisson habituelle enrichie en caféine, je me vois mal dormir au milieu des trolls aux Tappes (voir « la MH épisode 1 « ) .
Le ton est donné dès le départ, et gare à ceux qui seront partis comme des balles ... Avec leurs bâtons ...

Les mains dans le dos, John Doe et sa copine Stoots (nan, pas Groot) vissés sur la tête , je rentre en méditation ascensionnelle , et pense un instant aux moines traileurs japonais du yemple Enryaku-ji.
Moi au moins, je ne risque pas de me faire hara-kiri si j'échoue, je n'ai sur moi qu'un petit Opinel, je risque tout au plus de tout saloper et juste d'avoir très mal au bide.
Ça va ,hein, j'ai donné l'année dernière, je ne vais pas remettre ça maintenant.

Echouer.. Déjà dit, je n'utilise pas ce terme concernant le trail, mais bon, je sais que je m'attaque là à un des fous furieux délires dont Olivier a le secret, mais pour me rassurer :
1) j'ai gobé le 60km de l'UTCAM comme une gourmande 3 semaines avant
3) courir en barefoot sur du bitume m'a fait des pieds nickel, appelez moi Kai Chang Kane, je peux marcher tranquille sur des braises en jouant « la Passion selon St Mathieu » de Bach au flutiau.
3) l'ostéo m'a remis le ménisque droit à sa juste place
2) jamais deux sans trois (cette donnée étant pour moi la plus importante, j'y crois fort fort fort.)

Peu de souvenirs de cette première nuit , je pérégrine, sens, écoute, médite peut-être , même .
Ne jamais oublier que je ne me bats ni contre moi même ni contre quelqu'un d'autre et encore moins contre les éléments , je suis juste là parce que. C'est tout .
Je n'attends rien de qui-quoi que ce soit, je profite de vivre l'instant présent qui risque de durer un petit moment.
De temps en temps une image (et le dialogue interne qui va avec) vient troubler un temps cette méditation bucolique , je me vois passer la ligne d'arrivée. « Pffffmmmouaahhhahaaa, pas partie la meuf qu'elle arrive déjà !!! « 
« Ha ! Mais ça je vous ferai dire, c'est positiver et visualiser mon objectif, et toc ! «  ( et re- « pffffmmmouaahhhahaaa  ».. . ).


A un moment j'entends râler que là où on est c'est moche.
Oui, c'est possible, ce monotrace limite boueux avec à droite ces engins de travaux jaunes énormes avec un renardeau à la queue pelée qui erre au milieu de tout ça ,y'a plus romantique.
D'ailleurs, la bestiole, je m'en approche à moins d'un mètre et elle me calcule même pas .
Je trouve tout ça un instant délicieusement décalé mais glauque, c'est vrai.
La seule chose qui me dérange, c'est de savoir Bubulle DNF . J'ai bien vu en arrivant au ravito son visage fermé, et il me confirmera ce que je craignais . Merde.
Va falloir que je la finisse pour lui cette MH, c'est pas possible autrement.
Ca m'agace et je classe ça rapidement dans les jokers à utiliser en priorité en cas de baisse de forme. VENGEAAAAANCE !
Tiens, c'est moi ou c'est un déco, ça ? Ben mince, comme je le dirai à mon homme plus tard, c'est le genre de déco où on serre les fesses tant qu'on a pas passé les sapins en face...
Puis en dessous, les Toilles.

A la sortie je rejoins brièvement Antoine et Rémi , Raya et Mazouth .
Pia pia pia, plus bavards que des nanas ! Lol
Plus rapides que moi également, et ils s'éloignent vite.

Je ne m'attends pas particulièrement à reconnaître le parcours mais le carillon et sa mototrop sont déjà là, non pas dans le brouillard comme il y a deux ans, mais en plein soleil, comme lors de ma première édition en 2012.
Cette année les couleurs tout au long de la montée nous pètent à la figure, ça brille, ça luit, y'a du contraste, c'est le Prarion dans toute sa splendeur, quoi. Limite psychédélique.
Je commence à voir que ça faiblit ça et là. Ca me conforte dans l'idée que l'allure est bonne puisque , à part ces satanées envie de pisser trop récurrentes à mon goût (merci la St Yorre , quand vais-je comprendre que je ne dois boire que de l'eau plate avant les compètes???), mécaniquement et moralement , RAS. Je me sens juste là où je dois être à ce moment précis.
Arrivée tranquille à Bellevue (tiens , encore un décollage parapente...) où ParapGab' jettera l'éponge peu après, trop ralenti par une vilaine chute . Déçue pour mon homme …

Elle m'étonne cette voie au milieu des montagnes … Je passe derrière le « tramway » (train à crémaillère ) du Mont Blanc , livrée rouge bordeaux , à l'arrêt .
Cette ligne voit quand même des pentes à 25% mine de rien ! (quand on pense qu'un précédent projet non retenu en prévoyait plus de 60 !!) Elle devait aller initialement jusqu'au Mont Blanc et passe donc par Bellevue ,le Mont Lachat, et là où nous aurions dû passer, à savoir le Nid d'Aigle et les Rognes.


Le Mont Lachat est finalement une formalité même s'il commence à faire chaud...

Je rejoins à la Passerelle une concurrente que je retrouverai à Miage, comme notre voisine de camping Belge.
En me retournant va savoir pourquoi sur la montée au Col du Tricot, une concurrente me voit , accélère sûrement car elle me rejoint vite , mais je suis dans mon rythme, pas question de bouger plus vite.
Un détail: elle n'a pas vu que mon dossard n'a pas la même couleur que le sien ;-).

Le col du Tricot, et la descente qui tue derrière, mé, mémémé... pas de bobo nulle part !

Ca c'est chouette!! Elisabeth et Bubulle sont à Miage !
J'ai droit à un ravitaillement en vol de premier ordre, et je suis vraiment contente de voir Christian avec la patate : comme son genou lui fout la paix en montée, ça laisse un bon espoir de se faire plus tard quelques KV de derrière les fagots !

Je repars en laissant au ravito les deux féminines que je pense retrouver rapidement plus tard , je ne pense pas accélérer l'allure pour le moment.

Et zouuuu, ça remonte ! Il me revient en mémoire Jean-Mi, qui, en 2012, me confiait que la chaleur le gênait beaucoup à ce moment là. C'est vrai, il fait chaud, mais cette année, je trouve la montée au Truc relativement gérable à ce niveau...

Téléportation à Tré la Tête !
Sur la portion un peu roulane qui précède, rien à signaler si ce n'est un groupe de trois masculins qu'on double, puis qui nous doublent à donf, puis qu'on redouble, puis qui … enfin bref, la troisième fois je leur demande « Encore vous ! » en rigolant, mais à la prochaine, je serai plus tranchante, parce que là, ils commencent à devenir pénibles,les garçons...
Le sentier n'est pas large , et à chaque fois le bruit qu'ils font en arrivant tient plus d'un groupe de 60 qui déboule que de 140 en goguette, donc tout le monde se jette bien sûr à gauche pour laisser passer.

Les bières du Bagnard (surtout la Despé) me font de l'oeil, mais las, je résiste et redescends sur les Contamines, plutôt le Pontet.

Je reste un bon moment avec une féminine du 60 qui a oublié ses bâtons là haut. Depuis le pseudo 70 de juin chez moi, j'ai trouvé une formule sympa pour lier connaissance, « Ca va comme tu veux ? » Genre Korg dans Ragnarok : «  Hi ! Im Korg ! I want to organize a new revolution. Wann'a come ? »

J'en ai un peu plein les pattes malgré les bâtons mais ça va, jusqu'au moment, où, un ou deux kilomètres avant la seule et unique portion horizontale du trajet , on se fait doubler par une autre féminine, genre ma catégorie... Heu... oui, mais non, ah merde , je ne vais pas rester là comme ça...
Séquence accélération, mais qui va faire long feu , mince, je ralentis un chouille, restons zen.
Au Pontet, elle viendra me voir , nous nous étions rencontrées avant … Ah, effectivement je la reconnais vaguement, mais d'où ??? Très sympa.
Un détail : elle est sur le 60 (Pppppffffrrrrrrrmouaaahahahahahaha!!!!!)
Intérieurement je la remercie de m'avoir un peu réveillée et j'en rigole encore . Elle doit dépoter en général, elle me dira que d'habitude elle fait du long.


Je récupère le sac, et commence à discuter avec un gars qui vient de prendre une douche, le veinard. Pas vu qu'il y avait de quoi en prendre ici, poukram... Il me passe sa serviette avec un grand sourire avec un « Tu vas voir, ça te remet le facteur en selle ! », un autre me passe un flacon de produit douche , désolé qu'il soit entamé. Pas moi, trop contente de pouvoir prendre ma première douche en base vie, je suis une grande ! (enfin peut-être, on verra la suite, hein...)
Je file derechef me mettre sous l'eau , et chaude en plus !

En soutien gorge, meeeeerde, j'ai oublié de l'enlever.
Culotte... Culotte... Rhâââââ,c'est pô vrai, elle est dans l'autre sac !
Je nettoie l'ancienne avec ce qu'il me reste de gel douche,essore ça bien, enfile un nouveau soutif, et zou, je rejoins Bruno, finis tant bien que mal de me refaire le sac, et après brève discussion (ah bon, les BH nous rattrapent ?) , on y va .
Il a raison, la douche m'a fait repartir comme en quatorze. Et le brossage des dents fait trop de bien aussi !

Aucun souvenir de l'heure à laquelle on redémarre, mais une chose est sûre, pour moi la MH 120 va commencer là.
Un détail : je ne fais même pas 1,60, Bruno en fait 1,90 a de grandes jambes et il est pressé.

Je serai arrivée au Pontet en courant, j'en repartirai pareil.

Avec les BH pas loin de nous chauffer les fesses.
Donc, je cours... c'est pas possible, je vais finir par le lâcher, je ne pourrai pas tenir une allure pareille longtemps.

Cataclop, les Contamines passées, nous voilà au pied de la montée à la Bif...
Cest pas possible, je vais finir par le lâcher, je ne pourrai pas tenir une allure pareille longtemps.

Arrivés au début des prés, le rythme se ralentit un peu (rhâââââââ... la montéeeeee...) et revenons sur un couple, Bruno discute mais je me tais , rien à dire

je ne sais pas pourquoi, mais si dans mes prévisions je me voyais bâcher , là, ce n'est plus trop d'actualité. Disons que je ne me vois pas finir, mais qu'à ce moment, je me surprends à avoir envie de vraiment regarder ce qu'il y a derrière la porte que j'ai ouverte ici il y a 6 ans.

Et, puis je dois le reconnaître, cette histoire de JALBHAC donne un petit goût sympa au moment présent.

Si si...

Finisher:fait, Abandon : fait, Podium:fait, Sup100:fait.

Les barrières horaires étaient un élément dont je me suis jamais, ou si peu préoccupée , ça fait tout simplement partie du règlement. Si ça passe, c'est que je peux, si ça ne passe pas, c'est que c'est trop fort pour moi, fin de l'histoire. Et si jusqu'à présent, elle me m'avait jamais chatouillé les fesses, la vilaine BH, la hantise, le kraken , le pacman du traileur, là ça y est.

La dame se retourne , me voit, et bim ! Action-réaction, ça discute devant et wouuuuf, fulgur au poing , les deux nous plantent là, avec une avance de l'autre monde une fois le Chalet et ses gentils occupants passé .
Je ne sais pas ce que le monsieur a mis dans son baume, mais ça fonctionne, les quadriceps se calment, ils commençaient à rougner.
Un inconnu vous offre un pot de baume maison à l'arrière d'un 4x4, c'est ça l'effet magique de la MH !

 

La bifurc passée, le rythme se ralentit pour tout le monde , et , au pied du Joly, les frontales s'allument.

Moment Barbara Gourde pour moi puisque je n'arrive plus à allumer la Stoots. Mé pourquoi elle me dit que la batterie est pleine et qu'elle s'éteinheuuu ???
Au bout de quelques clicclicclicliccliiiicclicclic, je redécouvre l'usage de ma frontale(...) et c'est parti, et avec Bruno , on se retrouve vite seuls.
On perdra le couple au passage, je ne sais pas ce qu'ils sont devenus.
La descente vers les Tappes est interminable comme d'hab ! Mais rapide malgré tout, je dois bénéficier encore de l'effet magique du baume.
Je suis surprise d'y retrouver Rémi et Antoine, moroses, qui vont arrêter là.
Mon Dieu ce salami qu'il est bon !!! Je me retiens d'en prendre encore, je viens de m'en enfiler 4 tranches.
Et pour la première fois, je profite d'un massage qui me remet les guibolles à neuf. Je ne connaissais pas et c'est une découverte sacrément intéressante... Puis dodo.
Enfin, tentative de dodo.
J'appréhendais cette necessité , car je ne suis pas du genre à tomber dans les bras de Morphée sans préliminaires, et là, même si je suis un soupçon fatiguée, cette sa...e de boisson énergétique m'empêche de couper le jus. J'avais bien prévu de l'Aptonia, mais pas assez , j'ai dû repasser au caféiné au précédent ravito.
Je suis d'une humeur de dogue , mais je ne m'en prends qu'à moi même, même si je suis prête à exploser ce p...n de micro onde, savater la gamine qui s'est mis une vidéo, et ces traileurs à la noix qui se permettent d'arriver TIRPOUEEEET juste là maintenant ? ALORS QUE J ESSAIE DE DORMIR !!!
Bon, je me lève. Bruno lui, va se faire l'intégrale des 20mnpasunedemoins commandées aux kinés. Le visage poupin, la couverture au menton et la lèvre pendante, c'est un plomb que je contemple un instant avec envie.
Punaise. Je donnerais cher pour être un plomb...

 

Tout le monde dehors , et rebelote, seconde séquence accélération de mon facteur.
Ah, le con, je vais finir par me vautrer dans la descente à cette allure.
Ou alors c'est moi qui rame.
Apparemment non, on en largue un derrière avant d'arriver à notre Dame des Gorges. C'est un peu après que nous rejoindra Dominique, un V3, avec qui on va yoyoter jusqu'à l'arrivée.
On a du le tracter sur cette portion je pense, je cavalais encore derrière qui on sait.

Je crois que c'est vers Chenalettaz que je lance à l'arrière que si cette portion était faite de jour, elle serait très moche. Contente de faire cette portion en bonne compagnie, je n'aime pas du tout ce coin.
Arrive le Col de la Fenêtre, puis le Bolchu et son dôme magique. Moins encombré qu'il y a deux ans, cet igloo paumé au milieu de rien (on se croirait sur la Lune) dégage toujours autant de chaleur.
D'ailleurs à la sortie, c'est limite le choc thermique rapidement évaporé , on ne traine pas. C'est presque de la lande, et peu après le départ, j'aperçois un barrage. C'est quoi ça ?
Le fameux barrage de la Girotte, jamais vu jusqu'à présent puisque toujours passé de nuit. Cool, le ravito est en dessous.
Sauf que... Sauf que si j'ai bien retenu qu'il y avait quatorze kilomètres, je vais UN PEU pédaler dans la semoule avec ce qui va suivre.
Cette étendue landeuse parsemée de flaques de névés est presque lunaire et triste , bof... Et dans ce silence, on hallucine presque tous les deux en voyant arriver à l'horizon, vers nous … une file de... traileurs ?
Hop deux hop deux hop deux !! C'est un groupe de 6 personnes peut-être ,composé quasiment que d'anciens , hommes et femme, qui nous croise à vive allure en venant de nulle part !!
Hop deux hop deux hop deux …
Hé ben... ? A même pas 7h du mat ? Was ?
En se rappelant qu'à un croisement de deux véhicules les deux vitesses s'additionnent, je ne vous dis pas le courant d'air qu'on s'est pris...

Quand même , un truc me tracasse, on part à l'opposé du barrage de la Girotte, non ? Bon Ok, on ne va pas tarder à faire demi-tour.
Ah ben non...
Ca descend vers le fameux Plan Patis, et Bruno et moi râlons, pas cool, cette descente...
Et le passage des Cristaux...
Ca commence à cogiter grave chez moi, je ne comprends plus le parcours et vraiment, ce passage est pénible, et surtout, à chaque fois que se profile la fin de la montée, il y en une autre...
Rien n'est plus long qu'un parcours qu'on pense plus court...
Marre.

Et on arrive en haut d'un pierrier … Un champ de mines s'étend en contrabas.
Le coin rappelle furieusement à Bruno l'Echappée Belle je crois...
Du coup il s'assied : « je casse la croûte ». D'autres gars sont loin devant, ça veut dire que la traversée de ce machin est possible.
Au Rocher des Enclaves j'appelle Parap'Gab : « ne nous attends pas , on n'est pas arrivés, y'a un pierrier à la con, bla bla beuheuheu, des gros mots...etc »
J'eus été seule que j'aurais réclamé un hélico là de suite, peux pas rester, je veux partir , là maintenant !!!
Crise d'angoisse ?Pas loin. Je ne comprends plus rien.
On glisse sur le p...n de lichen qui couvre les cailloux même pas de la bonne taille (on ne peux pas courir dessus comme chez moi où ils sont plutôt commack). Ca rend la progression lente, à rendre fou.
Mèfi comme on dit chez moi, je sais que je ne suis pas au top, pas envie de me faire une cheville dans ce piège à con.
J'en oublie mon « léger » passage à vide et l'allure s'accélère à nouveau alors que nous traversons le Plan de la Mouille, où bon, j'ai l'impression que mon taux de glycémie fait du yoyo .
Bruno est repassé devant, et à grand pas …
Arrive enfin le ravito de la Girotte sous un beau soleil. De quoi filer la patate, mais nous trouvons un jeune assis, totalement abattu,et qui arrête là. Pour ma part, je suis à deux doigts de craquer, le moral en a pris un coup...
Après un « arrête de te plaindre, on y va » de Grand Pas, on part comme des dératés (enfin, comme on peut après 120 bornes),on a deux heures pour rejoindre le Col du Joly, dernier ravito !!
3ème séquence accélération pour le vieux couple que nous formons désormais, nous aurons plus d'une heure d'avance si je me souviens bien...
Le moral remonte, mais pas la forme, une fois arrivés sur la fameuse route où j'abandonnas une nuit Bubulle à son triste sort pour un fringuant tatoué Belge, je commence à sérieusement m'essouffler... Chaleur, fatigue... ?
Et mon binôme me relance sans cesse , je joue le jeu , et je me rentre dedans comme jamais.
« Allez Nat !! Il reste un poil jusqu'au ravito !! » Et moi «  T'ain !! C'est pas un poil !! C'est une touffe oui !!!
J'ai le cœur qui va péter, mais je continue, haletante, mais très-très déterminée.
J'arrive au col du Joly, totalement hagarde, et là, pauvre Dan, j'ai envie de lui faire avaler son portable... « Tu es en direct live au col du Joly !! »
Je n'aime déjà pas monter sur le podium et encore moins parler au micro, là, c'est le ponpon et surtout pas le bon moment.
« On passe les arrivées sur le site !!! »
« Cool !! » Nan, en fait je fais je fais carrément la gueule et réponds complètement à côté des questions qu'il me pose... « La 4ème est à une heure derrière toi !
« Cool ! »(Je ne sais pas pourquoi, je pensais que c'était notre voisine Belge qui arrivait et j'étais contente pour elle).
Nan, à l'image, ça fait « bweuuuuaaaaaaaarfffff.... »
En fait , je ne dispose plus d'aucune interface cerveau-expressions orale-faciale , enfin, bref, je suis contente, vraiment, mais je suis tellement au bout du bout, que même Chuck Norris sous botox serait plus expressif...
Alice prendra une photo alors que j'attends Bruno qui se ravitaille , le cliché dit tout.

Et puf puf puf, c'est reparti pour l'Aiguille Croche. Des parapentes en l'air détournent mon attention de mon asphyxie , et pendant un moment je m'absente un peu pour me mettre virtuellement en l'air, estimer les ascensions, le dynamique, le thermique, le ciel bas du plafond …

 

La suite sur le Joly va être in ter mi na ble... Pire que l'Archas chez moi ou la montée au Rocher des Enclaves.
C'est pas un jour sans fin, c'est le Joly sans fin. Du plat, un téton, et c'est fini ! Ah ben non, encore un et c'est fini .
Non pluuuuuus !
Et encore un …
Oh nooon...
...

On reprend tout à l'envers et ce que je j'ai monté à quatre pattes la veille, ben faut faut le redescendre, youpi !
Les cuisses et l'orteil gauche qui, à maintes fois, tapé dans le rocher deviennent vraiment bavards, c'est raide !
Le CP de la bifurc en vue, Bruno me fait « regarde bien la tête de la nana quand on va arriver »
Je ne comprends pas. On m'a annoncée quatrième il y a quelques minutes, et ça fait un moment que je demande comment j'ai perdu une place sans avoir vu personne passer. Mon cerveau est en zéro G à l'étage supérieur, je ne cherche pas à en savoir plus.
Bref, on va voir...
Un couple boit un coup, et ,après le HiHanTipouêt !! de rigueur, je vois la dame baisser les yeux vers mon dossard, les ouvrir grands, prendre une expression paniquée, puis s'agiter sérieusement.
J'ai bien cru qu'elle allait jeter la tasse qu'elle avait en main à ce moment là.
Elle est sur la 120 , elle aussi.
Ca ne me fait ni chaud ni froid, je finis , le reste, m'en bati .
Devant son désarroi, je lui dis en rigolant (enfin, peut-être ? ) que bippée troisième, je reste troisième,
N'empêche qu'ils repartent le feu aux fesses, et ça nous fait sourire, Bruno et moi.
Imperturbables, nous sommes . D'ailleurs pas le choix, moi je suis bien douloureuse de l'étage inférieur, Bruno n'est probablement pas mieux et s'en fout tout autant que moi, même avant-dernier ou presque. Comme moi, tiens !

Au parking, c'est Bubulle qui nous accueille et ça me fait vraiment vraiment plaisir. Finalement je la finis avec lui cette édition spéciale !!
En descendant il m'annonce tout fier que j'étais dans son prono … Je m'en doutais vaguement à vrai dire , une petite phrase jetée comme sur le forum m'avait mis la puce à l'oreille.
Moi dans un prono... Et en plus sur cette édition là ...

Comme d'habitude, je regrette vivement ne pas me rappeler tous les gens sympas avec qui j'ai pu échanger...
Mais une fois de plus merci à tous et toutes qui ont donné d'eux même et pas qu'un peu, pour que la MH reste une tu... heu, une épreuve vraiment à part.

Et toute ma gratitude à mon Beaufortain de facteur (qu'il n'est pas) pour m'avoir supportée (dans tous les sens du terme) jusqu'au bout , il doit avoir un mental de malade ce type... Je lui dois un peu beaucoup on statut de finisheuse, sûr.

Sans compter Parap'Gab sans qui la Montagn'Hard ne serait pour moi qu'une vague envie …


Comme quoi, je me répète, on a beau courir un ultra avec ses propres moyens, il y a toujours dans le coin quelqu'un sans qui la réussite de l'épreuve ne serait qu'un projet...

16 commentaires

Commentaire de cloclo posté le 22-07-2018 à 22:39:29

Ca se lit comme on boit du petit lait !
Mais t'as pas honte d'utiliser la 4ème dimension du LHC pour arriver à finir la MH. Je vais te dénoncer comme XT, tiens ;-)
Sans dec, super respect !!!

Commentaire de jpoggio posté le 22-07-2018 à 23:03:20

Excellent, on s'y croirait.
La prochaine fois, je choisirai un meilleur angle pour immortaliser tes retrouvailles avec le timbré des roadbooks !

Commentaire de bubulle posté le 23-07-2018 à 07:10:44

T'sais ce qu'il te dit, le timbré, Jacques? ;-)

Bon, oui, ça se lit comme du petit lait, il a raison le Cloclo. On s'y sent comme si on y était, dans ce Beaufortain. En plus t'as bien visé d'arriver à voir ce barrage de la Girotte qui reste pour moi toujours un mystère insondable.

Entre le Belge et le Facteur, maintenant tu as le choix, finalement.

Allez, M'dame, tirpoueeeet......et à une prochaine pour la danse des retrouvailles inter-forêts....

(ah, en passant, l'épisode des toilettes sèches portables est à se pisser dessus de rire)

Commentaire de Free Wheelin' Nat posté le 23-07-2018 à 18:55:28

Pas trop quand même, les sacs biodégradables de toilettes sèches c'est pas hyper costaud!
La Girotte, pour moi aussi une énigme! Le savoir proche sans le localiser ,c'était avant! Cette fois-ci, de le voir puis de s'en éloigner alors que c'était la destination, après deux nuits blanches, je devenais dingue! lol

Commentaire de Mazouth posté le 23-07-2018 à 09:23:05

Super récit, et bravo championne !! Tous les bookmakers te connaissent maintenant ;)

Commentaire de L'Dingo posté le 23-07-2018 à 14:12:51

Pas de référence chronométrique, pas de trace ni de waypoint à respecter, mais un récit constitué uniquement d'une succession d'émotions, d'images instantanées, et de moments furtifs où surgissent différents kikous.
Bref un grand plaisir de lecture <3.

un conseil: aux clicliclic de la stoots pour blonde , il faut préférer les glouglouglou de la stout brune ( dont le bagnard est grand pourvoyeur) :-)))))

Commentaire de Free Wheelin' Nat posté le 23-07-2018 à 19:05:02

Merci l'Dingo! Connais pas la stout, faudra que je teste !
Pour le côté roadbook, c'est là où je vais totalement à l'encontre de toute logique, à savoir que je pars avec un profil sans même le consulter (pis d'ailleurs si je suis seule, sans lunettes , laisse tomber! lol). Mais là, un peu de plus de rigueur n'aurait pas été de trop, ç'aurait (une fois de plus...) évité un coup de stress...

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 24-07-2018 à 11:01:34

C'est quelque chose que ce récit ! On ne peut que tresser des lauriers à Nat.
Un seul reproche : la police est dure avec les presbytes.

Commentaire de Dan60 posté le 25-07-2018 à 13:46:36

En tous cas, le "chef" a aimé les interventions au col du Joly sur fb &#128521;
C'était un essai, cette année &#128513;

Commentaire de Free Wheelin' Nat posté le 25-07-2018 à 14:06:56

C'est une bonne idée ,je suis carrément pour! Pour moi, c'était juste au pire moment! lol

Commentaire de Dan60 posté le 25-07-2018 à 13:49:59

En tous cas, le "chef" a aimé les interventions au col du Joly sur fb ;)
C'était un essai, cette année :)

Commentaire de Olivier91 posté le 25-07-2018 à 22:38:29

Or donc, elle serait finalement un peu dure, cette coursette? ;-)
Merci pour ce super récit !!

Commentaire de Benman posté le 27-07-2018 à 09:01:31

J'adore...

Commentaire de philtraverses posté le 01-08-2018 à 09:38:21

Super récit dégusté comme tous les récits freewheelingnesques avec plaisir. Une belle aventure intérieure originale, faite d'impressions, de sensations, de réflexions toujours aussi délicieusement incongrues.

Commentaire de Lefacteur posté le 06-08-2018 à 10:56:22

Bonjour Nathalie
Voila un bien beau récit!! Bravo
"Une belle rencontre" voila le souvenir de ma MH 2018
Merci
Le facteur qu'il n'est pas

Commentaire de Jean-Phi posté le 14-09-2018 à 16:31:33

"il y a toujours dans le coin quelqu'un sans qui la réussite de l'épreuve ne serait qu'un projet... "
J'adore !! C'est beau, on dirait du Baudelaire ! Et tout le CR est comme ça, c'est top ! Bravo Nat et pour la course, pour le podium et pour la plume ! Chapeau !

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