Récit de la course : Eco-Trail de Paris® Ile de France - 80 km 2018, par Le Plume

L'auteur : Le Plume

La course : Eco-Trail de Paris® Ile de France - 80 km

Date : 17/3/2018

Lieu : St Quentin En Yvelines (Yvelines)

Affichage : 2663 vues

Distance : 80km

Matos : Hoka One One Speedgoat 2
Collant Adidas
T-shirt manches courtes SmartWool
T-shirt manches longues Kiprun MT
gants Craft avec moufle amovible, bonnet en polaire premier prix
Sac Camelbak UltraPro
lampe Petzl Tikka

Objectif : Terminer

4 commentaires

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Dans la bouillasse

Après quelques hésitations, je m'étais inscrit à la version 80km car, après avoir terminé un 50km très montagneux au Texas en novembre, un trail "roulant" de 80km me semblait une progression raisonnable. Il faut dire: je suis un tard-venu de la course à pied, m'y étant mis pour de bon, pour faire comme une copine, à l'âge de 43 ans, motivé notamment par la balance qui avait tendance à me dire des choses désagréables...

Trail roulant disais-je. Hmpf. Si mon 50K avait été dominé par les cailloux, celui-ci était très clairement sous le signe de la boue. Comme tout le monde, je me suis longuement interrogé sur l'équipement. J'avais fait (plus ou moins, j'y reviendrais) la deuxième moitié du trajet il y a quelques semaines, et malgré pas mal de raidillons le terrain était plutôt bon. Par ailleurs compte tenu des 11km finaux sur route, qui m'avaient fait souffrir l'an passé sur le 30km (que j'avais courru avec mes Saucony Peregrine 6), je voulais des chaussures bien amorties. J'ai donc opté pour mes Hoka One One Speedgoat 2, comme à l'entraînement. Pour le reste, je calibre sur des températures de 5° à peu près: colant (avec un short par dessus histoire d'éviter l'effet burnekini, et aussi pour accorcher le dossard), t-shirt manches courtes en mérinos en couche de base, t-shirt technique manches longues, et ma toute nouvelle veste Cimalp Ultrashell Storm, commandée pour l'occasion au vu des prévisions météo. J'ai longuement hésité sur la zone de départ à garder mon petit gilet en doudoune; finalement, il est resté dans le sac. Rétrospectivement, c'était le bon choix, mais un peu frais quand même! Côté hydratation j'ai fait les choses en grand: deux flasques de 500ml de boisson isotonique devant et une poche d'1,5l d'eau derrière. C'est cher payé, mais c'est l'habitude des courses en pays chaud! 

Parti bien en avance de la maison prendre le métro; réalisé dix minutes plus tard que j'ai laissé mon téléphone sur une étagère, retour à la case départ, et re-départ pas en avance du tout! De la compagnie à Montparnasse: pas de doute, ça doit être par là, ou alors la mode vestimentaire a rudement changé. Un train de 10h14 non prévu dans les horaires qu'on nous avait donné nous emmène vers la banlieue ouest, rempli de coureurs d'un bout à l'autre, sous la pluie battante... Heureusement quasiment pas de pluie sur la zone départ, ce qui n'empêche que les concurrents sont agglutinés sous les tentes et qu'il est pratiquement impossible d'attraper quelque chose à manger... Tant pis.

Saint-Quentin - Buc

Départ en douceur, vers la fin du peloton: j'étais parti comme une brute de Meudon l'an passé et je l'avais payé ensuite. Tour du lac un peu long et pas très passionnant; je bataille avec le GPS qui se croit en week-end. Après ça, passage urbain, j'ai rien contre, avant de commencer à enquiller les étangs de la haute vallée de la Bièvre. On commence à faire connaissance pour de bon avec la boue... Du coup ça ne va pas très vite. Je commence à avoir faim et je regrette de n'avoir pas acheté à temps mes Clif Bars habituelles. L'heure du déjeuner, c'est sacré! Quelques descentes assez glissantes, mais on s'éclate; la neige commence à tomber. Patauger dans la boue et courir sous la neige, de vrais plaisirs de gosse! Par contre le dernier kilomètre avant le ravito semble long... Ouf, nous y voilà!

Buc - Meudon

Je reste longtemps au ravito. Trop longtemps même... C'était pareil sur le 50K de Franklin Mountain; il faut que je me chronomètre sur ces pauses sinon ça devient contre-productif. Mais bon, je mange bien... Après ça, il faut un peu de temps pour remonter en température; heureusement la montée vers Satory s'en charge. Petit passage urbain le temps de décrotter les chaussures, et on repart dans la bouillasse... On fait un peu les hamsters sur le bord du plateau; après le passage de la gare de Petit-Jouy-les-Loges (rêve de toute-puissance: "Choisy-le-Roi, Bourg-la-Reine et Jouy-en-Josas"!) on regrimpe, on patouille sur le plateau et on passe l'A86, avec derrière une jolie mare aux canards sur toute la largeur de la route. Les régionaux de l'étape nous préviennent: juqu'ici, c'était la partie sèche du parcours! AH, bon, d'accord... Du coup, je vire ma cuti et je prends un bon bain de pieds rafraichissant. 

Après ça, on commence vraiment à faire les hamsters. Dans les côtes, on remonte des ruisseaux de boue; dans les descentes, on se recommande de notre saint patron. La neige tient, c'est joli... Petit coup de mou dans le passage urbain à Meudon-la-Forêt; ah, si j'avais eu mes Clif Bars! Mon téléphone a faim aussi: pause branchement de baterie externe,  avec comme table une poubelle enneigée. Après ça, descente hyper casse gueule: je vais pratiquement de branche en branche comme le gibon moyen. Les chaussures n'accrochent rien, les tout petits crampons des Speedgoat sont complètement dépassés... "Et ça continue, encore et encore..." Heureusement, on est dans des coins où j'étais passé en reconnaissance, ça aide un peu. Mais les conditions n'ont tellement rien à voir... Dans une descente, la concurrente juste devant moi se gamelle; résultat, on fait connaissance de manière un peu cavalière. Toutes mes excuses encore, si vous me lisez!

La lumière baisse; après avoir manqué de se vautrer vingt fois, on arrive sur la route d'accès aux Orphelins apprentis d'Auteuil, passage que je n'ai pas pu faire en reconnaissance. La traversée du domaine parait vraiment très longue... Mais bon, arrivée en haut 1/2 heure avant le cut: on devrait pouvoir s'en sortir!

Meudon - Chaville

Pause plus réduite à Meudon; de toute façon il n'y a pas à manger (un ventre sur pattes, moi?). Je photographie mes pieds boueux, je mets la frontale, je fais quelques textos pour donner des preuves de vie et ça repart. Des volontaires nous aident à "faire le mur" pour resortir, avec une belle énergie... Et hop, dans le noir, dans la boue; une descente en pente douce avant de traverser Meudon (Val-Fleury) par la route, ouf, ça fait du bien. Une fois arrivés en haut de l'observatoire (autre partie que j'avais dû sauter à l'entrainement), on entame la partie la plus pénible à mon goût: d'abord un long tour de l'esplanade, frustrant et sans le moindre intérêt; puis une longue boucle en quasi plat dans le bois. La fatigue se fait sentir; je suis avec un petit groupe d'italiens qui en sont au même point que moi. Ma lampe est bien trop faiblarde... De toute façon, maintenant, je m'en fiche, je vais tout droit! 

Après être redescendu sur les étangs de Meudon, le jeu de hamster recommence. Dur dur... technique éprouvée: dans un chemin creux embourbé, toujours rester au millieu: il y a plus de boue, mais la pente est dans le sens de la marche; dès qu'on est sur le côté on dérape sur les dévers. Moi qui croyais avoir arrêté les sports de glisse en rentrant du ski... Mention spécial au resto près de l'étang d'Ursine qui avait un projo pile dans l'axe du chemin: bobo les yeux, en prime.  Ensuite on fait rien qu'à attendre le ravito...

Chaville - Saint-Cloud

Un vrai soulagement, ce ravito. J'ai perdu un peu de temps par rapport au cut, mais tant pis, il faut faire le plein. La soupe est un vrai bonheur, mais aussi les abricots secs, les bananes séchées, le fromage, le chocolat... Mais il faut bien repartir: ça commence à cailler sec. Premier obstacle: une patinoire incroyable pour repartir du ravito! Heureusement après quelques mètres à hésiter de le faire sur le derrière, retour à la bouillasse normale. Descente sur la route Chaville-Meudon particulièrement casse-gueule; je l'avais déboulé dans le bonheur à l'entrainement un mois plus tôt! La remontée de l'autre côté est raide, mais je connais, et c'est pas beaucoup plus casse-gueule que d'habitude; idem pour la descente vers le pont du chemin de fer (ma préférée). Après le pont, la partie urbaine fait du bien: ouf, c'est dur sous les pieds! Retour dans les bois après la ligne SNCF rive droite. Ca grimpe, on subit, avec un oeil sur la montre. Etangs de Ville d'Avray, puis le long faux-plat de Fausse-Repose... Discussions avec les autres coureurs: ça commence à être juste au niveau temps... Trotinage, du coup... Enfin, traversée de la route Versailles - Ville-d'Avray et dernière vraie côte du parcours. En haut, heureusement que je sais que c'est beau: de toute façon on n'y voit rien, et je suis pas d'humeur. Enfin, le cimetière de Marnes-la-Coquette marque le début de la fin (du parcours), et on retourne sur route se décrotter... 

Dans Marnes, fléchage très insuffisant; heureusement les automobilistes locaux nous orientent... Entrée dans le parc quelques minutes avant le cut, et celui-là, il est sec: les grilles sont ouvertes ou fermées. Reste un peu plus de 30 minutes pour traverser le domaine de Saint-Cloud, et 2h pour arriver au bout. Sur le moment, ça paraissait difficilement jouable, mais bon, à ce stade, c'est l'idée de la galère que ce serait de récupérer mon sac à la consigne si j'abandonne qui me motive. Il faut dire que lors de l'entrainement j'avais suivi une mauvaise trace, qui faisait un trajet plus long dans le parc que celui qu'on avait réellement à faire... De toute façon, le problème, c'est la boue; et je n'ai plus vraiment de jambes... Passage à vide!

Finalement je réalise qu'on aboutit en bas de la côte du fer à cheval, qu'on avait prise l'an passé avec le 30km. Je hèle des coureurs qui continuaient tout droit et je powerwalke jusqu'au ravito! J'y arrive 10 minutes avant le cut...

Saint-Cloud - Tour Eiffel

Pour le coup, ravito express: je remplis les flasques, je me gave d'abricots secs et de banane séchée, je finis une soupe en marchant. Je repars doucement, histoie de finir de manger une barre de céréale; je descend relativement prudemment, mais par rapport à ce qu'on a connu avant ce n'est pas trop dangereux. Arrivée à la manufacture de Sèvre, sur la terre ferme! D'habitude, on se plaint de quiter les chemins mais ce coup-ci c'était un vrai soulagement.

Par contre le problème c'était le temps: j'arrive à courir un peu, mais pas en continu. Je fais de mon mieux, toujours avec le compte à rebour du temps en tête. Sur l'île Saint-Germain je suis obligé de marcher un peu; une allemande que je suivais depuis Marnes me lâche définitivement. Elle me prends 5 minutes à l'arrivée. Après, c'est la partie la plus moche du parcours, l'entrée dans Paris entre cimenterie et voie express. Vivement qu'on puisse prendre les quais... Alternance marche-course; marquage assez médiocre (on descend pour rien sur les quais, on remonte...). Ensuite, trotinage sans grande conviction, les quais, l'allée des cygnes... Plus que quelques minutes, c'est mort. Mais les volontaires encourragent: "allez, vous y êtes!" - ah, c'est curieux, ils disent pas "stop, c'est fini"; on va tenter le coup alors. Et je suis presque surpris de recevoir mon ticket de tour Eiffel! Finalement, ça le fait!

Comme tout le monde je fantasmais sur la montée des marches; un pote m'avait affirmé que ce n'était pas grand chose mais je ne l'avais pas vraiment cru. Mais c'est vrai: comme côte, c'est pas plus raide que tous les raidillons qu'on a fait avant, et, miracle de la technologie, il n'y a pas de boue! On appuie son pied sur la marche, et ça tient; et les rampes sont plus pratiques pour tirer avec les bras que les arbustes de nos forêts... Je double quelques personnes du coup (tant pis si ça ne se fait pas, j'ai hâte d'en finir).

Je passe l'arrivée à 12:45:06 de course! Si le cut avait été fait à la dure, j'aurais été le premier des mauvais... Mais bon, c'est terminé, je suis finisher. Et il y a encore pas mal de classés derrière: vu les conditions, ils ne se sont pas sentis de barrer les gens qui étaient arrivés jusque là... L'accès à la tour n'a été fermé qu'à 1h15, et quelques concurrents ont même été classés en bas.

Bilan des courses...

Je voulais le faire, je l'ai fait. Le refaire? Sans doute pas. Même avec de meilleures conditions, je ne suis pas très sûr d'en avoir envie. Un parcours un peu trop en hamster, un peu trop de course de nuit... Ca manque de paysages! La verticale de la Tour Eiffel, tient, pourquoi pas. 

Côté matos:  c'était l'équation impossible pour les godasses; des chaussures "de boue" types Saucony Koa ST ou Inov'8 MudClaw ou X-Talon m'auraient donné plus de contrôle (un peu: à un moment donné, quand ça fout le camp, ça fout le camp) mais j'aurais souffert sur les bords de Seine, et les chaussures aussi (et puis il aurait fallu les acheter, je n'ai pas ce genre de chose pour le moment). Des Gore Tex n'auraient servi à rien (ça n'est pas étanche plus haut que le bord) et mes Peregrine  6 auraient bourré dans les parties de boue un peu ferme. Là, j'ai galéré question adhérence mais pas de bobo du tout aux pieds, ce qui n'est pas rien. Pour les vêtements, pas de problème; une couche en plus aurait pu être utile, mais pas indispensable. La veste Cimalp est absolument validée, meme si la neige, c'est moins rude que la pluie question étanchéité. Par contre, il faut absolument que je change de frontale; celle-là, elle est bien pour marcher, pas pour courir. Aktik ou Nao, telle est la question!

Ah, oui, pour l'orga: les camions-consigne à 1km de l'arrivée, c'est lourd! Du coup ça fait des économies sur le repas des coureurs - aucune des personnes avec qui j'étais pour récupérer les sacs n'a eu le courage de retourner au stade après... Pour moi, enfilage de survet sur le colant boueux, changement de chaussettes et de chaussures, un softshell par dessus la veste de pluie, et hop, un taxi vers la maison (je crois qu'il ne m'a pas cru, pour les 80km). Et à la maison, j'ai été prié d'enlever mes fringues sous la douche!

Et après coup: pas de blessure; dur de poser les pieds par terre au saut du lit le mendemain mais sinon pas de problème. Récup sans soucis, avec une petite manif' mardi pour se remettre en jambe! Revenu à la course ce week-end, une heure et demi de footing avec un copain qui prépare le marathon de Paris: ah, si on avait eu la météo de ce samedi le samedi d'avant...

Prochaine étape: m'inscrire pour mon prochain trail. Ah, et puis un jour il faudrait que j'en finisse un sans être deux heure plus long que ce que j'avais estimé...

4 commentaires

Commentaire de Twi posté le 27-03-2018 à 14:20:24

Bravo pour avoir tenu jusqu'au bout !
C'est vrai qu'on a tous un peu vécu les mêmes galères ... mais que de bons souvenirs après coup !

Commentaire de marathon-Yann posté le 27-03-2018 à 17:27:16

Très beau récit, et comme le dit Twi : quelle aventure !
Bravo à toi

Commentaire de catcityrunner posté le 28-03-2018 à 19:27:36

Beau récit pour cet ecotrail qui restera dans les annales ! Bravo pour la gestion des BH aussi.
Reviens le faire avec de meilleures conditions, ça change tout ;-)
Marrant que la descente vers la route du pavé des gardes ait marqué les esprits. En général elle est bien inoffensive !

Commentaire de badgone74 posté le 30-03-2018 à 10:24:50

Très belle description d'une épreuve devenue "hors normes" avec toute cette boue ! Bravo a toi

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