L'auteur : yann38
La course : Embrunman
Date : 15/8/2009
Lieu : Embrun (Hautes-Alpes)
Affichage : 2817 vues
Distance : 233km
Objectif : Terminer
Partager : Tweet
58 autres récits :
"Finir, alors que le doute s'installe et que le corps souffre, tu n'en ressors que grandit et fort d'une nouvelle expérience..."
Bizarrement au lendemain d'un tel effort je ne ressens pas particulièrement de fatigue physique, mais plutôt une fatigue mentale, un épuisement, un grand vide aussi, signifiant la fin d'une longue préparation sportive en vue d'un objectif majeur, qui aura commencé fin 2008 / début 2009...
Retour en arrière : 2008, je termine ma 3ème saison de triathlon, quasi blanche, après une belle déchirure aux quadris et une tendinite rotulienne (et ce sur la même jambe !) en début d'année et qui me tiendra éloigné de toute pratique sportive jusqu'au mois d'août. Lors de mon dernier triathlon sprint fin septembre (nat 750 m / vélo 20 kms et cap 5 kms), en discutant avec des gars de mon club, il nous vient l'idée de faire le marathon de Rome fin mars 2009 ; 1ère expérience pour ma part, non sans quelques inquiétudes après réflexion le lendemain... Mais, au délà de l'aspect sportif, ce voyage sera l'occasion de découvrir une ville magnifique (cf. compte rendu marathon de Rome).
Cet objectif, majeur au moment où je décide de m'inscrire en octobre, va entraîner toute une réflexion sur l'après marathon, et mes objectifs sur la suite de ma saison 2009. Je me prends à rêver à des IRONMAN, des cyclos interminables, pensant que la préparation d'un marathon développe chez l'athlète un foncier inépuisable... Après coup je me rend compte que cela ne se fait pas du jour au lendemain, et qu'à 27 ans, j'ai encore beaucoup de progrès à faire...
Au fond de moi, mon objectif n°1 sera l'EMBRUNMAN. Mais chut !!! j'attends un peu avant de m'avancer à le dire haut et fort, il ne faudrait pas se blesser ou se désister par peur du défi...
La préparation pour le marathon se déroulera dans son ensemble plutôt bien, le marathon lui-même sera une réussite (3h17 pour un objectif inavoué de 3h15-3h30), la découverte de Rome encore plus magnifique que je l'imaginais.
Début de la préparation pour l'EMBRUNMAN : au lendemain du marathon, et jusqu'à 1 mois après, je vais connaître une grande fatigue physique, des courbatures aux mollets et aux cuisses assez impressionnantes ! Il faut dire qu'avec mon gabarit (1m89 - 85 kg), mes fibres musculaires ont pris cher !!
Le stage triathlon fin avril avec mon club va me permettre de reprendre sérieusement le vélo et la natation, et malgré la météo capricieuse, j'arriverai à rouler tous les jours, soit 600 kms sur 6 jours, et 1 séance de natation par jour également. En revanche, je ne peux toujours pas courir, la faute à une tendinite au niveau de la cheville suite au marathon...
Suite à ce stage j'enchaîne les entraînements et les courses pour me préparer psychologiquement et physiquement au 15 août... fin mai je ferais un XTERRA en Sardaigne (triathlon "vert" - 1.5 km nat / 40 kms VTT / 10 kms cap), dans un cadre magnifique, une région splendide, une ambiance saine, des athlètes respectueux... Un grand souvenir au delà du résultat.
A mon retour j'enchaîne les courses au mois de juin chaque week end, avec un triathlon CD (même distances que le XTERRA avec un vélo de route) début juin, puis la cyclo la Time Megève (115 kms), le triathlon longue distance de Cublize (3/100/21), la cyclo la Vaujany (175 kms) et le 1er week end de juillet, l'apothéose, le samedi la Marmotte (175 kms) et le dimanche le triathlon CD d'Annecy !!! Que des épreuves magnifiques, dures, en montagne... Egalement mi juillet j'ai eu l'occasion de faire la reconnaissance du parcours vélo de l'Embrunman... sans commentaire... trop dur, chaud, du vent de face sur tout le retour depuis Briançon... ça s'annonce sympa ce 15/8....
J'aurais donc pu, en ce mois de juin, à mon sens, largement préparer mon foncier pour Embrun !!! Peut être trop car par conséquent je vais avoir pas mal de difficultés à récupérer de ces efforts et mi-juillet j'ai dû couper 10 jours pour me reposer.
Je reprends l'entraînement plus légèrement jusqu'à fin juillet - début août et coupe ensuite pour LE grand jour. Ces 5 mois de sport seront passés très très rapidement. Les sensations à la veille d'une telle épreuve sont étranges : un mélange d'appréhension, de crainte, globalement une sous-estimation de ses capacités à terminer, et en parallèle l'envie que cela soit finit le plus vite possible, le sentiment d'être "increvable" après toutes ces étapes franchies les unes après les autres, avec des moments de doute, de facilités, d'épuisement, l'envie de montrer que l'on est capable aux gens qui nous entourrent... bref que des pensées contradictoires.
J-1 : Bizarrement je ne ressens aucune pression, aucune peur, à l'nverse des commentaires d'autres athlètes que j'ai pu lire sur le Web. Je ne ressens pas d'excitation particulière non plus, je suis spectateur de tout ce qu'il se passe autour de moi la veille, lors du retrait des dossards, du dépôt des vélos dans le parc... je suis concentré sur ma course, je m'isole, me renferme sur moi-même, il y a une bulle entre moi et le reste, je suis inatteignable.
Jour de la course : levé à 4h30, un petit déj' à base de gatosport difficilement assimilable vu ma fatigue. J'arrive dans le parc à 5h30, je m'installe, me prépare lentement aux côtés de mes collègues de club qui sont déchaînés, terrifiés, ou tout simplement perdus, comme moi, comme des dizaines d'autres personnes... toujours ce vide autour de moi, cette impression de ne pas faire partie de la même course, d'être extérieur à tous ces va et vient. 5h50, les filles partent 10 min avant nous, toujours pas de réaction de ma part, je réponds par des hochements de tête sans vraiment assimiler ce que l'on me dit. Je suis trop concentré.
Top !!! le départ hommes est donné, je prends le pas de ces hommes tout vétus de "platique noir et bonnets blancs"... Il fait nuit, on voit au loin des points clignoter. ça doit être les bouées à contourner... Puis au bout de quelques longueurs, les sensations reviennent, je réalise que je suis en train de faire LA COURSE de ma saison (de ma vie ?), alors je me concentre, je cherche les appuis, après tout, tous ces entraînenements passés doivent bien servir à quelque chose !?! Le 1er tour passe rapidement. Il commence à faire jour, on voit le soleil qui sort doucement au dessus des montagnes... c'est magnifique. Je prends enfin du plaisir à être parmi toutes ces personnes, pour un projet sportif, une passion, une longue journée...
1h02 après le départ je sors de l'eau, assez bien physiquement et enfin dans la course !!! Il était temps ! Le public nous encourage, donne de la voix et nous dirige vers la sortie du parc à vélo prêt à affronter 186 kms terribles... Dès le départ du parcours vélo le dénivelé est important et le cardio s'emballe. Il monte rapidement aux alentours de 170, alors que lors de mes précédentes cyclo j'arrivais à le maintenir en dessous des 160 même au milieu d'un col ? Pas de panique, j'ai le temps d'y parvenir....
Nous remontons au dessus du lac au lever du jour, c'est magnifique ! On oublie la difficulté et on admire. On voit encore des personnes qui nagent dans le lac... Le retour sur Embrun au km 40 environ est assez splendide ! Une haie d'honneur d'un public dense nous entraîne sur une centaine de mètres vers la suite du parcours, on se croirait sur une étape du tour de France... Difficile de ne pas vouloir appuyer sur la pédale à ce moment là...
Le col de l'Izoard approche rapidement, et c'est au sommet de ce dernier que nous prenons un ravitallement bien mérité. Le col est difficile, mais si atypique que l'on en oublie la difficulté pour mieux admirer les montagnes voisines et la vue magnifique !!!
La descente sur Briançon est rapide, mais très vite au pied de la ville on sent la chaleur étouffante et le vent chaud qui nous colle à la route... la suite ne s'annonce pas très marrante !!! Vient la côte de pallon, pas longue mais attrocément raide !!! La chaleur n'arrange pas bien sûr la compléxité de l'exercice... Heureusement les nombreux bénévoles sans qui la course ne serait pas nous fournissent, avec le sourire et les encouragements, des gourdes d'eau ou d'Isostard fraîches, ce qui est fort agréable compte tenu de la chaleur !!! Le retour sur Embrun arrive à sa fin, il reste encore une côte de 5 kms à monter, le Chalvet. Je croise déjà des athlètes qui sont sur le marathon, l'effet psychologique est assez violent à ce moment là...
La redescente sur Embrun, une fois arrivé au sommet, doit se faire prudement compte tenu de la qualité médiocre de la route et de l'état de fatigue ne permettant pas une vigilance accrue... 8h09 pour faire ce parcours vélo. J'ai mis 10 min de moins que lors de ma reconnaissance du parcours, mais j'ai la sensation d'être plus entamé physiquement.
Je me change en "marathonien" dans le parc, casquette, short court et débardeur seront mes équipements pour ce (long !) périple... Le 1er km se fait en trottinant, puis, arrivant difficilement à faire passer des points de côté, je me résigne à marcher. C'est le début d'un long calvaire.
Je ne pourrai re-trottiner (on ne parle plus de courir à ce stade là de la course !!) qu'à partir du 15ème km, pour finir mon 1er semi-marathon (dans les 2h40 de mémoire...). A ce moment là je m'imaginais abandonner, n'ayant plus la volonté nécessaire, ni le physique pour poursuivre. Je viens de faire ma 1ère hypoglicémie vers le 10ème km... Un gel plus tard, le moral repart, la détermination à reprendre mon chemin aussi. Sûrement grâce aux nombreuses pensées pour mes proches, aux encouragements des concurrents, du public...
J'entame le 2ème tour un peu plus confiant, mais dès le 23ème km je suis à nouveau obligé de marcher, puis de m'assoir car j'ai à nouveau une hypoglicémie. Je me relève quelques instants plus tard avec le moral à zéro, des nausées, et à nouveau l'envie d'abandonner... je marche un moment, me fait rattraper par des collègues du club, et c'est la descente aux enfers....!!! Je suis obligé de m'allonger pour faire passer les vertiges. 20 min plus tard, je réussi à avaler un gel, ce qui me remet en état peu de temps après. J'arrive à reprendre mon chemin en marchant, mais beaucoup de doutes en moi à ce moment là : arrêter pour ne pas finir comme de trop nombreuses personnes, allongées à même la route avec une poche de glucose au bras ? continuer, finir, même en marchant, étant si proche du but (c'était vers le 30ème km).
Finalement toutes ces questions s'effacent rapidement de ma tête, car après le gel et un peu d'eau, je me sens beaucoup mieux, j'arrive à prendre un ravitallement solide salé (pain de mie fromage) ce qui me donne une énergie dingue ! Décidément j'aurai dû essayer plus tôt... mais quand on doute à ce point on n'arrive plus à prendre le recul nécessaire et la panique prend la place au raisonnement !! Bref, j'arrive à nouveau à trottiner à partir du 30ème km, puis à allonger la foulée jusqu'au dernier km (j'ai couri les 15 derniers km à 11km/h !!!). A ce moment là la joie est telle que l'on est euphorique, on ne sent plus son corps, on visualise l'arrivée... un grand moment de bonheur !!! Le passage de la ligne d'arrivée est un grand moment, une émotion intense, que j'intériorise profondément pour en savourer pleinement les bienfaits. Je n'ai pas de douleur particulière, pas de courbature (en même temps j'ai dû marcher 20 kms et trottiner les 20 autres...) mais je sens une grosse fatigue générale se pointer !!
Je m'assoie dans le parc à vélo où je retrouve mes collègues de club qui viennent d'arriver également quelques instants avant moi. Nous partageons un moment notre ressenti de la journée, et commençons déjà à nous fixer les objectifs ultérieurs....
Le marathon aura été long (5h47 !), mais je retiens au final seulement les bons moments, ceux pour lesquels j'ai pris du plaisir. Je pense que le fait de m'être trop rempli d'eau fraîche sur la fin du vélo m'a donné des crampes aux ventres, et m'a empêché de correctement m'alimenter sur le début du marathon, d'où mes baisses de régime... En même temps, la météo n'était pas très clémente avec nos organismes.... L'inexpérience sur ce genre de situation a sûrement joué en ma défaveur.
Après avoir démarré la course à 6h du matin, je boucle cette épreuve en 15h08, soit vers 21h. La journée est passée très rapidement, j'ai pris beaucoup de plaisir malgré les "quelques contretemps" rencontrés sur le marathon. Le mythe d'Embrun n'est plus pour moi !! C'est une épreuve dure, mais qui ne nécessite pas que des qualités physiques. Le mental joue au moins pour la moitié à mon avis !
Au lendemain de la course je n'ai pas de courbature, ni le surlendemain. Je ressens en revanche un grand vide, et c'est pourquoi j'ai besoin de me trouver de nouveaux objectifs très rapidement. Quelques pistes trottent dans ma tête pour 2010, mais je me laisse le temps de la réflexion et de la récupération également. Si vous avez des pistes, je suis preneur : raid, IRONMAN (pourquoi pas à nouveau Embrun avec une meilleure gestion de la course du début à la fin !!), cyclo, marathons... la liste est longue !!!
Sportivement !
Accueil - Haut de page - Aide
- Contact
- Mentions légales
- Version mobile
- 0.08 sec
Kikouroù est un site de course à pied, trail, marathon. Vous trouvez des récits, résultats, photos, vidéos de course, un calendrier, un forum... Bonne visite !
11 commentaires
Commentaire de hérisson posté le 21-08-2009 à 08:29:00
Merci pour ce beau CR à chaud, comme ce 15 août !!
Dommage que tu faiblisses pendant la cap, tu partais sur un très bon chrono ; pour cette caniculaire édition de l'Embrunman l'hydratation était primordiale mais il n'est pas toujours facile de penser à s'alimenter beaucoup et suffisamment quand on est pris dans la course... Tu reviendras à Embrun fort de cette expérience et terminer entre 13 et 13h30 !! Bonne continuation de saison : Embrun ne doit pas être une finalité... et bravo pour ce titre de finisher!
Commentaire de akunamatata posté le 21-08-2009 à 11:27:00
l'Altriman qui est organise par un kikou commence a faire parler de lui comme le plus dur de France!
Commentaire de regor34 posté le 21-08-2009 à 14:50:00
La gestion de l'effort et les apports calorique sur de longue distance c'est énorme, le moindre écart et c'est la tuile. On a tendance à avaler des kms et des kms à pieds,en vélo ou en piscine mais pour la dietétique de léffort,là,on péche tous un peu.Bravo pour ton endurance . Pense à la récup.
Commentaire de yann38 posté le 21-08-2009 à 14:56:00
Effectivement on y laisse des calories. Sur le vélo j'avais le cardio, et je comprends mieux mes erreurs... 8300 calories dépensées, 157 FC moyenne (pour une FC max de l'ordre de 195) !
A mon avis c'est beaucoup trop pour 186 kms de vélo !!!
A travailler pour les prochaines courses !
Commentaire de bigpeuf posté le 21-08-2009 à 22:30:00
clap clap, chapeau bas, en plus avec ton poids ça pas du etre facile dans les cols (et j'en sait qq choses), franchement, je suis bleuffer par ta perf, c'est cler que l'eau froise c'est un vrai poison, j'en ai fait les frais sur un sprint l'an passé, alors j'imagine pas sur du long !
A+
le BIG 'admirateur'
PS : défi, Altriman en juillet, c'est un petit peu plus dur qu'Embrun, ça sera bientot une réference !
Commentaire de philkikou posté le 22-08-2009 à 18:50:00
R-E-S-P-E-C-T
UN TRUC D'EXTRA TERRESTRE...
bon retour sur terre ;-)
Commentaire de La Tortue posté le 24-08-2009 à 21:49:00
bravo ! l'essentiel est de finir !
leçon à retenir : toujours penser à manger, même quand il fait chaud et qu'on a pas forcément très faim.
pour l'an prochain, qq pistes : l'altriman (superbe première édition en 2009, mon Cr sera en ligne prochainement), les trails (tu as l'embarras du choix, mais je te recommande le raid28 pour la difficulté et pour la dimension humaine d'une course en équipe).
personnellement , je suis comme toi, j'ai besoin de me refixer de nouveaux objecifs rapidement pour me relancer dans l'entrainement. pour 2010, ce sera le mythique Roth, format IM (regarde, mais je ne sais pas si il reste des places) et à nouveau Embrun après une édition 2007 dont je garde aussi un fabuleux souvenir.
en attendant, repose toi bien, Embrun fatigue en profondeur et il faut du temps pour bien recharger les accus !
Commentaire de LtBlueb posté le 01-09-2009 à 22:54:00
tres instructif . chapeau à toi pour le maitrise parfaite de la natation et du vélo , et pour ton courage sur la course à pied ... je t'envoie un mp...
Commentaire de raspoutine 05 posté le 07-10-2009 à 16:19:00
Hello Yann,
Un bien beau récit que le tien et qui sent les tripes ! Nous voilà avertis ! Ton récit sent aussi l'explosif pour les inconscients qui veulent se frotter à l'endroit (je parle de moi...) Mais qu'importe ! On ira parce qu'on veut connaître "LA" course et maintenant, donc, "TA" course ! Félicitations !
Reste à savoir, comme tu dis, quoi faire après un tel moment...
Un ami qui a terminé en même temps que toi l'embrunman connaît aussi ce même sentiment de vide. Tout est devenu fade pour lui. Là aussi, nous voilà avertis...
Merci pour le récit et encore BRAVO !
Commentaire de Francki 07 posté le 31-10-2009 à 19:36:00
bonjour YANN
bravo pour ta réussite bel exploit
pour la combinaison tu as quoi ?
je suis en étude et recherche pour réaliser à mon tour ce bel exploit !!!
à pluche
Commentaire de yann38 posté le 26-11-2009 à 15:49:00
salut Francki 07 l'ardéchois !
j'ai une orca sonar, ça suffit largement pour nager.
A+
Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.