L'auteur : chantrail
La course : L'Echappée Belle - Intégrale - 145 km
Date : 25/8/2017
Lieu : Vizille (Isère)
Affichage : 3192 vues
Distance : 144km
Objectif : Terminer
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Vendredi 6 h à Vizille, ça y est, on se lance dans la course, à un rythme qui sera sûrement le plus soutenu durant la course (environ 8km/h dans le parc du château). Les yeux sont déjà gonflé de sommeil, après un non-réveil à 2h dans une non-nuit sur le parking d'Aiguebelle, à proximité du Carrefour-Contact et de sa station service, derniers écueils de la civilisation avant les prochaines 48h.
Au début, l'EB, c'est roulant, ça monte, mais c'est large, il n'y a pas trop de cailloux, et même quelques épines de pins en guise de tapis confortable. Ouahh, trop facile, pendant les 15 premiers kms. Le ravito de l'Arcelle sonne le glas du confort....Tremble fragile petite cheville et frisonnez petits petons, parce qu'à partir de maintenant et durant une grosse trentaine d'heures, le massif de Belledonne vous mettra à l'épreuve comme jamais !!
Des premiers cols jusqu'au Pleynet, ce ne sont que des sentiers de cailloux, des pierriers, des marches assez hautes pour poser sa bière (sans avoir trop le temps de siroter)....puis des lacs à chaque recoin de montagne. On dirait que la montagne hésite entre charme bucolique et austérité minérale, avec en point d'orgue le sommet de la Croix, à 2926m. Le passage qui suit au col de Freydane est à couper le souffle, avec la vue sur les 3 pics acérés, culmens du massif, et à leur pied un glacier encore bien vivant, bien bleuté, avec encore quelques belles crevasses. A ce moment, la descente est bien raide, plus terreuse, elle offre presque un moment de répit. Pas de quoi améliorer la vitesse moyenne, qui ne doit pas dépasser 3,7 kms/h jusqu'à maintenant (et jusqu'à la fin, en fait)
Pour ce qui est des sensations, ça déroule bien, peut-être même trop bien (quand tu sens que tout va bien, ralentis !!). La suite est du même acabit, col de la Mine de Fer, Brèche Fendue, des caillasses mais ça enchaîne bien, sans trop de flinguer dans des dénivelés de ouf.
La suite après le habert et son ravito express offre un combo parfait pour te dézinguer les quadris, les chevilles, le moral, voire même l'audition et ta coupe de cheveux,...,à savoir le passage coup sur coup des cols de l'Aigleton (pas spécialement technique mais avec un final tellement raide que ton nez touche la montagne !!) puis le col de la Vache (pas spécialement raide mais tellement technique que ton nez touche la montagne,....,puisqu'il y a une probabilité certaine de se casser la gueule dans cet environnement instable). Le tout, pour ma part, à passer dans l'obscurité naissante, à ce moment précis où la frontale est encore inutile mais où tu ne vois rien !!
J'espèrais arriver sur le plateau des 7 Laux au coucher de soleil, mais c'est loupé, à une heure près. Tant pis, si ce n'est qu'une terrible descente nous attend dans la nuit, avec une arrivée terrible au Pleynet : en clair, tu crois toucher les lumières de la station, mais c'est sans compter qu'il faut y parvenir par l'autre côté, et donc emprunter un contournement d'environ 5 kms....effet sur le moral garanti !!
Le Pleynet, base vie, d'ailleurs je ne suis pas trop mort, mais je m'octroie un imposible repos d'1/4 d'heure, dans une salle surchauffée.
On continue les hostilités par un éprouvant KV jusqu'au lac Léat. Il fait nuit, l'orage éclate, avec un coup d'éclair pas très loin, la pluie tombe, les sentiers se mouillent, les rochers glissent....Décidément, l'EB se termine avec la tête, parce que si l'on est pas préparé psychologiquement au chantier, avancer à environ 500m/heure n'est pas moralement acceptable pour un trailer !!
Gleyzin, un p'tit dodo d'1/4 d'heure, et je suis retapé comme si j'avais passé une nuit entière, c'est incroyable cette faculté du corps à récupérer si vite. Direction, le Morétan, col emblématique de l'EB (m'enfin celui de la vache n'est pas mal non plus dans le plus pur style belledonnien). Arrivée sous le pierrier final, une averse !! Vraiment au meilleur moment de la course !! Pour la montée, ce n'est encore pas trop gênant, en faisant bien attention. Arrivé au col, les bénévoles me déclareront : "Mauvais temps au Morétan !!"....je leur répondrai que "le Morétan, chuis mort dedans !!"...et encore, quand j'y pense c'est plutôt "Morétan, voilà ce qu'il t'attends" ou bien "Morétan, mort au temps", parce que la descente dans ces conditions humides relève d'une épreuve d'interville, avec la vache au cul en moins : j'évolue tout simplement de savonnettes en savonnettes, chaque bloc n'est pas toujours bien stable, et dans ce pierrier, se cogner ou se tordre une cheville paraît devenir une éventualité très probable. Une belle chute de pierres dégringolant du versant de la montagne me rappelle que je ne suis pas sur une piste d'athlé. Je profite de mon évolution archi lente pour constater que sous ces blocs on distingue la glace : nous sommes bel et bien sur un glacier, que la masse de rochers a permis de préserver. Finalement, les glaciers de Belledonne se portent pas si mal, grâce à leur couverture pierreuse.
J'arrive enfin au moment ludique de la descente de la moraine. Contrairement à ma traversée Nord d'il y a 2 ans, je suis tout seul dans le coin, et je ne re-commets pas la même erreur de descendre face à la pente, en s'explosant les quadris au passage. Je me tourne, bâtons coincés dans le sac, et je descends un peu comme en rappel. Ça fait un bien fou, les jambes ne travaillent pas de la même façon, et surtout cela me permet de descendre vite.
La suite jusqu'à Super-Collet déroule bien, jusqu'à cette infâme remontée jusqu'au refuge de la Pierre du Carre, la plus raide du parcours, et la moins panoramique aussi, que je passe un peu après midi, soit aux heures bien chaudes. Juste cette montée infernale doit bien peser dans les décisions d'abandon à Super-Collet. D'ailleurs attention, car il peut être très tentant de signer l'échec à la base vie de la station : le plus beau est fait, la fatigue s'accumule, et l'enchaînement Morétan-remontée infernale a pu faire d'énormes dégâts. Quand même dommage si les voyants ne sont pas encore au rouge vif, car ce serait se priver de la magnifique traversée de la crête des Férices, toute en montagne russe, toujours aussi technique jusqu'à Val Pelouse, d'où le milieu de peloton peut profiter d'un splendide coucher de soleil sur la Chartreuse et Chambéry (un peu brumeux cette année). Moment d'émotion peu avant le ravito d'où l'on distingue les 3 pics culminants, très loin, en pensant qu'on est passé là-bas.
A partir de Val Pelouse, la course prend ses airs de montagne à vache, moins de cailloux, c'est presque libérateur....mais c'est moins joli. Encore un point remarquable à la très panoramique crête du Chat, puis s'ensuit l'interminable descente jusqu'au Pontet. Tant bien que mal, j'essaie de courir, mais j'ai les pieds comme des parpaings, ils ne suivent plus le mouvement, alors que les jambes tournent bien. La montée qui suit le Pontet se fait comme si c'était la première de la course, aucun problème aux jambes. Foutus pieds, donc. Il faudra que je trouve une solution anti-échauffement (en plus de la citerne de Nok que j'ai aspergée sur mes puants pinglots).
Dernière incongruité de l'EB, le passage (imprévu bien sûr) au milieu d'une rave-party : pas le moment de tenter un ravito express sous peine de flinguer le contrôle anti-dopage (oh les clichés !!)
Allez, on arrive, le temps de soulager un besoin pressant dans les fourrés et de ramener au passage une belle tique sur le ventre, et c'est l'heure de la cloche, du diot-polent' et enfin du dodo bien mérité à côté de Carrefour-contact et sa station-service : la boucle est bouclée, quel voyage !!
En conclusion, une superbe aventure sans prendre l'avion. Ce que j'en ai ressenti du point de vue de la gestion de course, c'est que le facteur limitant se situe peut-être davantage au niveau de la fatigue nerveuse, plutôt que musculaire (de toute façon, c'est une évidence qu'il faut arriver avec de bonnes jambes). L' usure entraîne des défauts d'équilibre, de proprioception et de vigilance. Il s'agit donc d'arriver pleinement reposer,sans aucune dette de sommeil, d'autant que la course dévore quasiment 3 nuits, si l'on prend la navette à Aiguebelle.
Voilà, bon courage pour les suivants
et chapeau aux 2 grands fous qui auront parcouru l'itinéraire dans les 2 sens !!
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7 commentaires
Commentaire de franck de Brignais posté le 31-08-2017 à 17:06:55
Bravo, cette bambée a l'air d'être passée comme une lettre à la poste !...
Merci pour ton récit ! :)
Commentaire de Shoto posté le 01-09-2017 à 18:39:13
Chouette récit et belle prestation ! Bravo ! Il y a 2 grand malades qui ont fait l EB aller retour .... les limites humaines sont incroyables chez certains ....
Commentaire de Shoto posté le 01-09-2017 à 18:40:06
Chouette récit et belle prestation ! Bravo ! Il y a 2 grand malades qui ont fait l EB aller retour .... les limites humaines sont incroyables chez certains ....
Commentaire de JuCB posté le 01-09-2017 à 22:11:56
Chapeau à toi qui sort une jolie course "en toute simplicité" au milieu de ce bazard !!!
"Décidément, l'EB se termine avec la tête" : vu le récit, on peut dire que tu étais conditionné
"Il faudra que je trouve une solution anti-échauffement" : Nok en masse à chaque ravito
"pas le moment de tenter un ravito express" : whisky-coca, très bon pour la circulation
"chapeau aux 2 grands fous" : JE NE SUIS PAS FOU ;-) mais lui oui 8)
Commentaire de didscott69 posté le 01-09-2017 à 22:22:30
yo sylvain
bravo pour ta course bien gérée et surement très bien préparée. merci pour ton récit! une sacré balade cette échappée!!
Commentaire de Spir posté le 03-09-2017 à 21:50:22
Rondement menée cette traversée ! C'est clair que cette Rave, c'est un peu surréaliste... Il y a deux ans, on avait entendu la musique, mais pas traversé la "fête" !
Commentaire de Vik posté le 09-09-2017 à 22:55:06
héhé, j'aime beaucoup ta description du terrain :-)
par contre j'ai pas vu les mêmes glaciers... les miens sont quasi inexistants :/
well done ! visiblement, tu ne manques ni de jambes, ni de tête ! :-)
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