Récit de la course : 100 km du Périgord Noir 2006, par forrest78
L'auteur : forrest78
La course : 100 km du Périgord Noir
Date : 22/4/2006
Lieu : Belves (Dordogne)
Affichage : 2276 vues
Distance : 100km
Objectif : Pas d'objectif
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100 kms de Belvès 2006
Pour mon 2nd "100 bornes", le choix de Belvès s'impose logiquement fin 2005. La course sert d'ailleurs de support au championnat de France et devrait réunir tous les cadors de la distance. Après Millau en septembre, terminé en 11h51, 2 autres ultras se sont succédés : les 24h de Villepreux et le Raid28. Avec le retour des beaux jours, mon objectif est de m'approcher le plus possible de la barrière des 10 heures. Mon entraînement minimaliste (3 sorties hebdomadaires) ne me permet pas d'envisager beaucoup mieux. Néanmoins, je compte sur mon mental et mon accompagnateur de frangin (Grégory) pour me pousser vers ce temps.
Vendredi 21/04
Parti de Plaisir (78) vers 9h, nous arrivons, ma femme, mes 2 plus petits loups Dylan et Félicia, et donc Grégory, sans encombre à Belvès à 16h30. Un petit détour inopiné suite à une mauvaise direction prise à la sortie de Sarlat nous permet de reconnaître une partie du parcours du lendemain. L'environnement est somptueux, nous sommes totalement dépaysés. Nous décidons de rejoindre directement le mobilhome au camping des Nauves pour y déposer les vélos et de revenir ensuite récupérer les dossards.
Je retrouve avec beaucoup de plaisir quelques forumistes, dont certains déjà croisés à Millau : Sined, Patate (accompagné bien entendu de la 'tite Patate), LTDB, le Pirate, Alain. Je reçois un appel de Philippe, mon pote sarthois peut-être futur ardéchois, rencontré aux 24h de Villepreux début décembre. A 18h, direction Place de la Brèche pour le pot de bienvenue : nous saluons Domi, mon orienteur du Raid28, et Taz. Nous dinons avec Philippe à la Pasta, à la même table que Monsieur Henri Girault, légende du 100 kilomètres puisqu'il est l'homme qui en a couru le plus (plus de 500). Nous retournons à 20h30 au camping pour les derniers préparatifs et le rituel de l'épinglage du dossard.
Samedi 22/04
Une bonne nuit de sommeil plus tard, nous nous levons à 5h45. Petit déjeuner classique (thé au lait, yaourt, fruits et pain sec), un brin de toilette, un bisou à la famille encore endormie, et nous quittons les Nauves. Nous nous garons près du chateau d'eau à Belvès. La température est idéale pour la CAP, le ciel est nuageux mais pas menaçant. Bref, toutes les conditions sont réunies pour une bonne course.
A 7h20, les accompagnateurs partent ensemble vers la Faval, à 7 kms en contre-bas de Belvès. Je retrouve Sined avec qui je discute quelques minutes. Le calme et la sérénité transparaissent sur les visages, aucun signe de nervosité. Je cherche d'autres têtes connues. Je ne verrais avant le départ que celle de mon pote de bureau Eric qui rejoint le sas élite. Il est inquiet pour son genou, puis nous nous souhaitons bonne course. Il finira finalement 16ème au scratch en 8h et quelques secondes. Superbe performance car il n'a pas fait une préparation complète !
Le décompte est lancé et le départ est donné à 8h pile. Un tour rapide dans Belvès, puis le 1er kilomètre est passé en 6'10". Je vois de nouveau Sined que je laisse partir car nos vitesses spécifiques sont différentes : 12 km/h pour lui, 11 pour moi. Nous abordons la grande descente qu'il faudra bien remonter dans quelques heures si tout se passe bien. Le long faux-plat descendant vers Siorac se fait à l'allure prévue, sur laquelle je me suis immédiatement calé. Je passe le 5ème kilomètre en 27'10", tout de même 20 secondes plus vite que mes prévisions. Je ralentis un peu. La jonction avec les accompagnateurs se fait enfin. P'tit coucou à Taz qui attend Domi. Ca y est, la course commence vraiment. Je suis toujours sur le même rythme, celui tant travaillé chaque dimanche matin lors de mes sorties longues.
Passage au 10ème kilomètre en 53'30", encore trop vite. Le 1er arrêt pipi à l'entrée de Saint Cyprien me permet de me recaler sur le bon timing. C'est aussi la 1ère chute de la caisse de ravito perso sur le vélo du frangin... Il y en aura encore 5 ou 6 autres !!! Notre système n'est pas encore très au point... Je continue pendant qu'il remet tout en ordre. Je passe le ravitaillement : 1 verre de coca, 1 quartier d'orange, 1 portion de pain d'épice et 1 pâte de fruit. Greg me rejoint à la sortie de Saint Cyprien.
Nous passons le 20ème kilomètre en 1h50'04", pile dans le tempo cette fois-ci. Les 11 de moyenne sont parfaitement tenus. Je me sens super bien, j'essaie de profiter un peu du paysage. Depuis quelques kilomètres, Anne-Cécile Fontaine, meneuse d'allure de Millau l'an dernier et qui intervient sur le forum de temps en temps avec Emmanuel, est à une centaine de mètres devant moi. Nous dépasserons plusieurs fois pendant la journée avant qu'un problème de hanche vienne ralentir sa fin de course... Nous sommes en petit peloton, même s'il commence à s'étirer. La route étant rectiligne, on aperçoit bien ceux qui nous précèdent. Je rejoins alors Philippe, parti pour 10 heures lui aussi. Nous courons ensemble 3 kilomètres, jusqu'au ravitaillement de Beynac au kilomètre 25. Le quart de la course est passé, c'était aussi la partie la plus facile.
Kilomètre 30 en 2h44' à la Roque Gageac. Nous attaquons une partie plus valonnée pour rejoindre Sarlat. Je suis toujours en pleine forme, un vrai métronome !!! Mes jambes me portent comme je le souhaite, quelques coups de fil à ma petite famille me donne la pêche.
Je passe le 40ème kilomètre en 3h40' puis le marathon en 3h52', dans un fauteuil. Nous courons sur une piste cyclable en faux-plat montant, interminable. C'est la partie du parcours que j'apprécierais le moins. Néanmoins l'allure est régulière. J'arrive à Sarlat, ravitaillement classique.
La route monte toujours et encore. Passage du kilomètre 50 en 4h38', avec 13 minutes d'avance sur le rythme prévu. Je devais courir en fait à 11 jusqu'au kilomètre 31, puis à 10 les 10 suivants et à 9 jusqu'au 52ème, en fonction du dénivelé. Mais j'ai préféré rester sur la même allure initiale. J'espère ne pas le payer plus tard... Bizarre, je ne souffre toujours pas de mes jambes, mon moral est esxellent et j'envisage sereinement la seconde partie, prévue à 10 de moyenne. La longue montée qui s'achève au 52ème kilomètre. Là, petite alerte : le bord extérieur de ma chaussure gauche commence à me faire mal, en appuyant sur la cheville. Je me cale systématiquement sur le côté gauche de la chaussée, pour soulager l'appui, quitte à allonger un peu la distance quand les virages sont à droite. Ca passe comme ça, tant mieux.
L'allure a légèrement diminué, le 60ème kilomètre est avalé en 5h41', après une longue descente. Trois minutes perdues ces 10 dernières bornes par rapport à une vitesse de 10, rien d'inquiétant. Je reste confiant pour terminer sous les 10 heures car mes quilles tiennent bien, même si je me doute que la fin ne sera pas une partie de plaisir. D'ailleurs je ne parle presque plus, sauf pour demander à Greg la Saint-Yorre ou une éponge mouillé (c'est même souvent lui qui anticipe mes désirs). La casquette vissée sur le tête, j'ai les yeux rivés sur la chaussée, concentré dans l'effort. Au ravitaillement de la Roque-Gageac, je vois Patate qui me dit que Jean-Marc n'est pas au mieux. On s'encourage et c'est reparti. Là, ça se corse un peu : le démarrage est difficile malgré un arrêt très rapide, les jambes se raidissent d'un coup. Je reprends progressivement l'allure. Le parcours entre le 65ème et le 70ème kilomètre est une boucle que je n'avais pas vue sur la carte. Je n'aime pas trop ça car j'ai l'impression de ne pas avoir avancé. Je vois Sined qui en fini avec cette boucle et lui lance sur le ton de la rigolade : "Tu te trompes de route !!!". C'est que j'aurais aimé faire quelques kilomètres en sa compagnie. Il a donc environ une demie-heure d'avance sur moi et je suis content car il devrait terminer sous les 10 heures. J'adopte alors la méthode Cyrano : 9 minutes de course pour 1 de marche. On m'annonce que je suis 175ème au scratch, je suis content et ça me donne du baume au coeur.
Kilomètre 70 en 6h44' : encore 3 minutes perdues. Je me rends bien compte que je ne pourrais pas tenir le 10 km/h de moyenne jusqu'à Belvès et donc qu'il faudra se bagarrer pour réaliser mon objectif de départ car la fin de course est en montée. Je ne m'inquiète pas plus que ça, j'essaie de rester dans la course, de me concentrer sur l'allure, enfermé dans ma bulle. Je ne réponds pas aux coups de fil qui me sont destinés, Greg s'en charge. La côte des Milandes est en vue, courte mais dure d'après l'organisation. Ben j'dois pas courir bien vite car elle me semble interminable... Je marche et je soufre intérieurement. Mais le mental est bien là, je veux terminer sous ces 10 heures. Passé la montée, j'en profite pour m'arrêter une minute et desserrer un peu mes lacets, après un nouveau ravitaillement. Nous abordons une descente hyper raide sur une chaussée en mauvais état. Ouahhhh, j'ai les quadriceps en feu !!! Je cours sur des oeufs. Finalement, les grimpettes, c'est pas si mal que ça... Dans ma tête, je chante "L'homme pressé" de Noir Désir, pour m'encourager à garder l'allure. Je préfère ne pas chanter de vive voix car la météo est bonne. Le soleil perce à travers les nuages, la température monte un peu. Je continue de boire beaucoup.
Je passe le 80ème kilomètre en 7h57'. Maintenant, ça sent vraiment le roussi pour les 10 heures. C'est pas grave, ce sera pour la prochaine, mais il faut quand même que je m'en approche le plus possible. Je ne dois pas lâcher maintenant, si près de l'arrivée. Second arrêt pipi de nouveau avant Saint Cyprien : cela prouve que je suis bien hydraté. Repartir est de plus en plus difficile. Ravitos express, je ne m'éternise pas : systématiquement un bonjour et un merci aux bénévoles, je me sers et je file, bon ok en marchant, mais je file quand même !!! Devant le 85ème kilomètre, je suis dans le rouge, on me passe de tous les côtés. Greg m'encourage, me dit de ralentir dans les montées pour m'économiser un peu. A la sortie de Saint Cyprien, il se poste devant moi pour imprimer l'allure. Je reprends du poil de la bête, je recolle ceux qui viennent de me doubler, au train. Ca va, je compte à présent les bornes qui nous séparent de l'arrivée. La route vers Siorac est rectiligne et relativement plate et je ne marche plus.
Passage au kilomètre 90 en 9h06'. Je devrait terminer en 10h20' à allure où je cours. Ce ne serait pas si mal que ça, 1h30' de moins qu'à Millau, lors de mon 1er 100 bornes. Les 10 derniers kilomètres sont en faux plat montant (sauf les 2 derniers où ça grimpe dur...). Je m'arrête une dernière fois au ravitaillement de Siorac, juste avant le 95ème. Je cours au mental, quelques râles de souffrance sortent de ma bouche. Je sers les dents. Comme sur l'ensemble du parcours, les gens nous encouragent sans relâche. L'ambiance est vraiment sympa et je comprends pourquoi cette course a tant de succès. Allez, plus que 5 bornes avant de serrer ma p'tite famille dans mes bras !
On arrive enfin au pied de l'ultime difficulté après avoir zappé le dernier ravito. Un speaker annonce les coureurs. Je lâche alors les chevaux (enfin ceux qui ont bien voulu rester avec moi jusqu'au bout !), j'avale la pente à bloc, à 11 ou 12 !!! Plus qu'un kilomètre me hurle Greg ! Je vois l'arrivée là-haut, ça sent bon l'écurie. Pour que 800 mètres... 600... un tour de piste... les 200 derniers mètres, au sprint puis le passage de la ligne. J'arrête mon chrono : 10h13'34". Ma femme et mes enfants courent vers moi, je les serre fort, heureux que je suis !!! Je m'assois sur une chaise, les jambes vont bien mais bientôt j'ai un peu la tête qui tourne. J'en profite pour remercier le frangin qui m'a bien soutenu, notamment les 2 dernières heures.
Je retrouve alors les malheureux forumistes Domi et Fred Rossignol, dernier vainqueur des 24 heures de Saint Maixent, ma prochaine course, mi-septembre. On s'y donne rendez-vous. Puis j'aperçois Patate, Taz et 20100. Malheureusement, je ne discute pas beaucoup plus car je me dirige vers la salle de massage. C'est un véritable sauna ! Je vois Sined que je félicite et je m'allonge. Que c'est bon, après un tel effort !!! J'enlève mes chaussures et mes chaussettes : mes pieds sont nickel. Une nouvelle fois, le régime "crème NOK" a fait son effet ! Je savoure le repas périgourdin du soir avec la satisfaction du devoir accompli. En rentrant au camping pour une courte nuit de sommeil, je reçois un coup de fil de mon cousin Christophe qu'un souci de santé a empêche de venir m'accompagner, et du Squale. Cette course m'aura aussi permis de retrouver mon pote d'enfance Loïc, que je n'ai pas vu sur le circuit, mais sur le livre d'or du site web de la course. Il a quelques marathons à son actif et accompagnait son frère Yannick sur ce "100 bornes". Je nous verrais bien taquiner ensemble l'ultra !
Bilan
Ce qui a bien marché à Belvès : 1) le mental qui m'a porté jusqu'à l'arrivée, pour terminer au plus près des 10 heures; 2) les liens avec Greg l'accompagnateur, toujours à l'affut de mes demandes; 3) les conditions météo, idéales pour moi; 4) des arrêts aux ravitaillements bien plus courts qu'à Millau. Tout ceci m'a permis de gagner presque 1 heure et 40 minutes sur mon 1er "100 bornes".
Ce qui a moins bien marché : une seconde partie moins rapide qu'espérée (9 km/h au lieu de 10), en partie en raison du dénivelé. Je ne suis pas sûr que j'aurais mieux terminé en partant moins vite. Néanmoins, je finis 153ème au scratch avec donc plus de 20 places gagnées sur les 30 derniers kilomètres. Lors de mes prévisions, je ne me suis pas rendu compte à quel point le parcours est exigeant. Mais il est magnifique, les gens chaleureux et l'organisation sans faille. Je reviendrai.
En attendant, place à Saint-Maixent et ces 24 heures dans moins de 5 mois. Mon prochain "100 bornes" ? Peut-être Chavagne en 2007.
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