Récit de la course : L'Echappée Belle - Intégrale - 149 km 2020, par Yoga

L'auteur : Yoga

La course : L'Echappée Belle - Intégrale - 149 km

Date : 21/8/2020

Lieu : Vizille (Isère)

Affichage : 2993 vues

Distance : 149km

Objectif : Terminer

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Echappée Belle, la revanche

Il faut que je replace le contexte, en 2019 je tente pour la première fois un trail long, ce sera l'EB. Malgré un entrainement qui me semblait important, je me prends un mur. Les jambes qui tirent à partir de la montée à la Croix de Belledonne, suivi d'un long chemin de croix (encore une) jusqu'au Habert d'Aiguebelle puis un col de la Vache qui finira par m'achever. Et je ne parle pas de la descente interminable sur le Pleynet. A peine arrivé sur la base de vie j'ai rendu mon dossard en jurant "plus jamais ça". Un plat de pate et un dodo d'une heure plus tard je commençais déjà à regretter, la barrière horaire ne m'ayant toujours pas rattrapé.
J'ai donc re-signé pour 2020 remotivé comme jamais. Mais cette fois j'avais l'avantage de m'être déjà frotté aux cailloux et pas seulement via des comptes rendus.

L'entrainement

l'Echappée Belle c'est 2 à 3 jours de course mais c'est aussi des mois d'entrainement. Une fois le tirage au sort passé avec succés je me suis fait un plan millimétré pour arriver au top fin août. Je commence donc a recourir sérieusement 1 mois après une Lyon Sainté Lyon qui aura eu comme bénéfice de me montrer qu'une course bien gérée peut se terminer au sprint. C'est mon petit plaisir de finir les courses longues le plus rapidement possible (mes articulations et mes pieds n'apprécient pas vraiment).
L'objectif de cette année sera de faire du dénivelé. J'attaque tranquillement janvier et février avec environ 4000D+ par mois. Le mois de Mars arrive avec la première course de la saison, le Sacré Trail des Collines, j'y vais tranquille mon seul objectif est d'arriver au bout des 37km le plus frais possible, objectif atteint. La semaine suivante c'est le drame, la France est confinée. J'arrive quand même à finir le mois de Mars avec 6000D+ mais mon plan est fortement perturbé, mes courses de préparation seront toutes annulées une par une (Boucle de la Sarra, lac de Paladru, Circuit de la Sure, Montagn'hard).
J'ai quand même la chance d'avoir une boucle à côté de chez moi, elle fait 900m avec une pente de 30% sur 300m et une descente technique sur 600m. Je vais donc faire le hamster et tourner assez pour faire 12000m de D+ en Avril. Je continue de tourner au mois de mai et je profite du déconfinement pour aller faire un tour dans le Vercors, 18000mD+. En juin je fais deux gros bloc, 1000mD+ chaque matin avant le boulot pendant 10 jours et 3 jours entre Belledonne (Maratrail de Chamrousse en Off) et la Chartreuse (Moyen Duc 2019), ce sera mon plus gros mois avec 20000mD+. Le mois de juillet sera plus tranquille avec 3 semaines de vacances. Et enfin 3 semaines avant la course, début Aout, dernier gros week end avec une reco de la partie la Pra / Habert d'Aiguebelle (aller retour), 40km et 3800m D+ pour le premier jour (que j'ai attaqué un peu trop fort), un deuxième jour sur le parcours de Crètes mené par Coco38 vers Val Pelouse avec une montée à la pointe de Rognier et au col de la Perche. Et une ultime sortie en partant du Pleynet, un aller retour au col de la Vache sous une pluie battante pour exorciser mes souvenirs de l'an dernier.
J'ai fait tous les entrainements sans baton, la course se fera sans baton, je prends le risque.

Pour comparaison en 2019 j'avais fait +/-10000mD+ par mois de janvier a Juillet. Sans faire de progression. Après coup je pense que les week-end "chocs" ont fait la différence.

La dernière semaine avant la course

L'objectif était de dormir un maximum. C'est facile sur le papier mais c'est pas évident de faire des longues nuits quand on fait des siestes l'après midi ! J'arrive quand même à accumuler pas mal de sommeil jusqu'à jeudi. Le vendredi j'ai pris une chambre d'hotel pas loin du départ, j'avais un mauvais souvenir d'une très courte nuit à Aiguebelle avant de prendre une navette pour Vizille interminable. Malheureusement le stress a pris le dessus, je me couche avant 22h mais à 1h du matin je suis toujours bien réveillé. Au final j'ai du dormir 3h en me réveillant au moins une fois par heure. Pas l'idéal pour attaquer deux nuits blanches. Réveil vers 4h, j'arrive a 5h sur le départ avec Flo qui va m'accompagner sur plusieurs ravitos après m'avoir supporté (dans tous les sens du terme) pendant plusieurs mois.
Il est 6h, je pars avec la dernière vague. J'ai un objectif de 54h, mon roadbook me donne 15 minutes de marge au Pontet.

Vendredi 6h01, Top départ.

La dernière vague part très vite, trop vite. On doit être à 10km/h voir plus. Au bout de 100m je lève le pied et en quelques minutes je me retrouve avec 2 ou 3 autres coureurs seul dans le noir, les autres sont déjà loin. Tant pis je colle à mon roadbook je ne veux pas me griller comme l'an dernier. La montée est longue, j'ai fait tout mon entrainement à 500m de D+ à l'heure, je retrouve très rapidement mon rythme, je suis bien, très bien même. Il y a un coureur derrière moi, peut être 2. Au bout de 2 heures j'en rattrape un, je le suis quelques minutes, il me dit qu'il va abandonner à l'Arselle.

Arselle
Vendredi 9h31 (15 min d'avance sur roadbook) - 3h30 de course, 514ème

Je suis dans les 5 derniers, le ravito est en train d'être remballé quand j'arrive. Pourtant j'ai 15 min d'avance sur ce que j'avais prévu. Je ne perds pas de temps, je repars rapidement. Sur le chemin de la Pra je remonte doucement des coureurs qui transpirent, il commence à faire chaud. Je me retiens d'accélérer j'essaye de rester sur un rythme de 500m D+/h. A la biffurcation du lac David Matt38 me demande si tout va bien, je répond que ma lenteur est volontaire, mon seul but est d'arriver au bout. Le reste de la montée sur la Pra est tranquille, beaucoup mieux que l'an dernier où j'avais déjà les pieds qui chauffaient.

La Pra
Vendredi 12h31 (heure pile prévue sur le roadbook) - 6h30 de course, 469ème

J'entends qu'il reste une vingtaine de coureurs derrière moi. Autour beaucoup sont déjà dans le dur, la température monte. 10 minutes d'arrêt et je repars direction les lac du Doménon, je sais qu'on attaque la partie difficile. je remplie ma casquette d'eau à chaque point d'eau, j'ai pas de crème solaire, je me protège comme je peux. La montée aux lacs est assez rapide, je continue sur la croix de Belledonne sans aucune pause en gardant une allure pépère, ça va beaucoup mieux que l'an dernier.
Je touche la croix à 14h37 (2 minutes d'avance sur le roadbook), je repars rapidement, l'an dernier j'avais fais une pause de 20 minutes au sommet pour me reposer. La descente sur le lac Blanc puis le refuge Jean Collet se fait bien même sans baton.

Refuge Jean Collet
Vendredi 16h25 (5 min de retard sur roadbook) - 10h25 de course, 459ème

Je reste 10 minutes au refuge, j'avais prévu 20. Je commence à prendre doucement du retard et je sais que j'ai 15 minutes de marge pour finir dans les temps donc je ne traine pas, repartir avec 5 min d'avance pourrait faire la différence. La remontée au col de la mine de fer est la première difficulté. Ca y est, ça tire. Je sais que cette partie est longue, j'étais là il y a 3 semaines en difficulté, obligé de m'arrêter tous les 50m. Cette fois ça passe mieux, je ne suis pas parti comme une brute ! Je passe le col de la mine de fer à 17h31 (15 min d'avance sur le roadbook) puis la brèche de la Roche Fendue à 18h00 (10 minutes d'avance) pour attaquer la longue descente vers le Habert d'Aiguebelle. Au pas de la Coche on est arrété 5 minutes, un hélico est venu prendre un coureur, je suis à la fois jaloux de ne pas faire un petit tour en l'air dans Belledonne et heureux de continuer la course.

Habert d'Aiguebelle
Vendredi 19h31 (7 min d'avance sur le roadbook) - 13h30 de course, 390ème

Je croise Loiseau et Courotaf sans oser les aborder, j'ai jamais été très fort pour faire le premier pas. Première grosse pause avec mon assistanteune soupe, un sandwich, du Nok et c'est reparti après 30 min (contre 20 min prévu). On va attaquer la partie qui m'a fait abandonner l'an dernier. Je suis pas trop mal mais j'ai les pieds qui commencent à piquer sérieusement. On aura la visite surprise de Bouquetins dont un gros qui m'a coupé le chemin à quelques mètres, j'étais pas fier, il m'a bien fait peur cet andouille. Au col de l'Aigleton je me couvre un peu et allume la frontale. Je descend seul puis je me mets dans les pas de ceux qui sont devant moi, la montée sera lente et régulière. On passe le col de la Vache plus facilement que prévu à 22h30 (12 min d'avance). Je ferai la très longue descente sur le Pleynet seul, je m'y ferai décidément pas, elle est interminable.

Le Pleynet
Samedi 01h43 (13 minutes d'avance sur le Roadbook) - 19h43 de course, 350ème

Je prend une douche froide, j'apprends en sortant que les autres douches ont de l'eau chaude. Tant pis pour moi. Ensuite je patiente pour le podologue et le kiné, ça prends longtemps, trop longtemps. direction le restau pour un plat de pates et il est déjà quasi l'heure de partir. J'ai pas beaucoup de marge sur le roadbook, je décide de reprendre la course sans dormir pour garder de l'avance, c'était une erreur. Je repars donc à 3h19 (8 minutes d'avance).
La descente au fond de France se passe très bien, j'arrive même à trotinner sur la route, puis on attaque la montée Valloire. En bas on m'annonce 800m de D+ très raide. Je me dis que j'en ai pour 2 heures, j'y vais donc tranquillement. Après environ 300m D+ de montée je me fais passer par les premiers de la traversée Nord, ce sont des fusées, le premier me passe même en courant dans une pente qui doit avoisiner les 25%. J'ai mon premier coup de mou, je m'arrête souvent, j'ai sommeil. Je cherche un endroit pour me poser, juste avant un ravitaillement non officiel je me pose sur un banc en pierre pour dormir, je ne mets pas de réveil. Je m'endors instantanément et me réveille 10 minutes plus tard, ça va un peu mieux, je reprends la montée jusqu'au sommet, il y a pas mal de monde, les 87km sont en force. Les 4km de descente me semblent reposant, pas trop de cailloux, des sous bois, un sol meuble. L'arrivée au Gleysin est un soulagement, j'ai pas mal douté sur cette section.

Gleysin
Samedi 8h36 (6 minutes de retard sur le roadbook) - 26h36 de course, 290ème

Je suis pas trop mal au niveau du temps mais je décide de faire un grosse pause et un petit dodo de 30min. J'avais prévu de rester 15 minutes, ce sera quasiment une heure. Au passage, un grand merci à la bénévole qui s'occupe du dortoir, c'est une sacrée organisation pour gérer les réveils de tout le monde, et tout ça avec le sourire. Une petite soupe au réveil et j'attaque la montée vers le refuge de l'Oule et le Moretan avec environ 3/4 d'heure de retard. Je décide de commencer à accélérer pour rattraper le retard, je me mets dans ma bulle et je monte à un rythme plus rapide. Les nuages décident de partir lorsque j'attaque le Moretan, superbe paysage mais je vois ce qu'il reste à monter. Heureusement que les chants des bénévoles sont là pour mettre l'ambiance, on serre les dents on monte au Moretan. J'arrive au col à 12h15, 10 minutes de retard sur le roadbook, j'ai re-gagné 35/40 minutes, le moral est au beau fixe. Je n'avais aucune idée de ce qu'il y avait derrière, je savais juste qu'il y avait un névé, la surprise était donc totale. j'ai descendu le névé en mode ski assez rapidement, par contre j'étais bien heureux d'avoir la corde sur l'arrète. Un coureur a glissé sur une pierre qui s'est éclatée sur un rocher à quelques mètres, ça a jeté un froid. La suite jusqu'à Périoule était plus calme dans une ambiance de plus en plus chaude.

Périoule
Samedi 13h20 (10 minutes de retard sur le roadbook) - 31h20 de course, 263ème 

J'avais prévu 15 minutes d'arrêt, j'y resterai 5 minutes, le temps de manger une soupe. Je sors du ravito à l'heure pile de ce que j'avais prévu sur le roadbook. Commence une longue descente un peu technique, les jambes tirent un peu a chaque marche mais j'arrive à avancer d'un pas rapide jusqu'en bas. La montée qui suit jusqu'au refuge Pierre du Carré fut longue mais relativement facile, on oublie les cailloux, il suffit de se mettre en mode tracteur et avancer en regardant droit devant. Un bonjour de la part d'un kikou au niveau du refuge (Yienyien73 ?) ça me surprend et je répond à peine sans vraiment m'arréter puis on m'annonce 10 minutes sur une piste roulante jusqu'à Super Collet, ce sera mon dernier ravito avec assistance alors j'allonge la foulée.

Super Collet
Samedi 16h39 (7 minutes de retard sur le roadbook) - 34h39 de course, 253ème

J'avais l'impression de bien avancer mais j'ai quand même perdu 7 minutes sur la section. Je n'ai pas le droit de trop ralentir. Je prend quand même le temps de m'assoir et discuter un peu, je suis assez en forme (autant qu'on peut l'être), j'avais prévu 1 heure d'arrêt, je ne resterais que 40 minutes, je prend un petit quart d'heure d'avance sur le roadbook. La longue montée vers le col de Claran est très propre, tous les coureurs qui sont là avancent vite, je garde une bonne cadence mais je me fais distancer doucement. Par contre, une fois le col passé c'est l'inverse, le chemin est toujours aussi propre, je me laisse aller sans me freiner et je passe plusieurs groupes. La passerelle du Bens marque la fin de ce qui peut s'apparenter à une pointe de vitesse, le départ d'une longue remontée vers le refuge des Férices et le début de la deuxième nuit. Il y a un ravito non officiel au refuge, j'en profite pour faire le plein d'eau et boire un verre de coca auprès du feu avant d'attaquer la montée vers le col d'Arpingon. Il est 20h50, j'ai 35 minutes (!) d'avance sur le roadbook. A partir de là c'est le drame, j'ai mal lu mon roadbook et je m'attends à atteindre le col d'Arpingon en une trentaine de minute, en fait c'est 1h30. C'est long, très long et dur pour le moral, je ne sais pas où je suis, à chaque replat j'ai l'impression d'être arrivé mais non ça remonte aussi fort derrière. J'ai des hallucinations, je vois plein de papillons luminescents qui apparaissent et disparaissent, parfois je perds l'équilibre sans raison. C'est difficile mais j'ai l'impression que ça l'est pour tout le monde, on est tous dans la même galère. Puis au moment où je ne l'attendais plus, on arrive en haut ! Un sourire pour la photo pour laquelle j'ai failli tomber et c'est le début de la dernière descente bien technique. Je suis fatigué, j'ai des hallucinations et je perds l'équilibre, c'est le meilleur moment pour attaquer un sentier bien étroit a flanc de falaise. Un grand moment de solitude, je m'accroche comme une moule à son rocher et je tente de suivre ceux qui sont devant en me concentrant plus qu'un tube de tomate. Au final ça passe et petit à petit la pente se fait plus douce et les cailloux disparaissent. J'arrive sur Val Pelouse

Val Pelouse
Samedi 23h53 (50 minutes d'avance sur le roadbook) - 41h53 de course, 231ème

J'ai 50 minutes d'avance, dans mon demi sommeil je me rend compte que depuis quelques heures j'ai arrété de ralentir, contrairement à ce que j'avais prévu, j'envoie un SMS pour dire qu'il est peu probable mais pas impossible que j'arrive avant 9h. Si tout va bien je devrais continuer à gagner du temps. Je voulais racourcir cet arrêt mais finalement je vais prendre plus de temps que prévu et mettre à profit mon avance. Je vais me coucher 20 minutes, puis prendre le temps de manger une soupe. Je sors de Val Pelouse le dimanche vers 0h50, une petite demi heure d'avance sur le roadbook mais bien reposé. Ca sent la fin, j'ai l'impression que rien ne peut plus m'arréter. Je monte vers les crètes à un bon rythme puis je me retrouve complètement seul dans la descente vers la source du Gargotton. En bas un gentil bénévole (asmatman974 ?) me guide vers la source pour remplir mes flasks et je pars direct vers le col de la Perche. Je l'atteins vers 2h50, 1h20 d'avance sur le roadbook. Ma théorie se confirme, j'ai moins ralenti que prévu (ou accéléré ?). Mais la suite me dira qu'il ne faut pas vendre la peau du chamois avant de l'avoir attrapé. Quand Col d'Arbaretan fut passé la bise se mis à souffler, bien froide, un petit vent qui peut stopper nette une belle progression. Les 120m de D+ annoncés par asmatman974 en bas s'annoncent comme les pires de toute la course. Je suis obligé de faire 2 pauses de 5 minutes, complètement frigorifié. Je me fais passer plusieurs fois, je m'endors, j'ai de plus en plus d'hallucinations. J'arrive péniblement au sommet du Grand Chat à 3h50, avec 1h10 d'avance sur le roadbook, ça reste confortable mais je recommence à perdre du temps. j'envoie un SMS pour dire que finalement je n'arriverai certainement pas avant 9h. Commence une (extrèmement) longue descente vers le Pontet. pendant 2 ou 3 km je colle aux baskets d'un coureur, je le prends comme pacer jusqu'au moment ou je craque, il va trop vite pour moi. Je dors debout, j'ai mal aux pieds, je vois de plus en plus de gens bizarres qui me regardent fixement sur le bord du chemin. J'ai l'impression d'être perdu. A chaque fois que je regarde ma montre j'ai avancé de 50 mètres, j'ai perdu la notion du temps, je ne vois plus personne ni devant ni derrière, suis-je perdu ? Finalement j'arrive au Pontet complètement HS.

Le Pontet
Dimanche 6h15 (1h10 d'avance sur le roadbook) - 48h13 de course, 223ème

Je n'ai plus gagné de temps depuis le sommet du Grand Chat. Je suis exténué, je mange un peu, je me couche dans l'herbe et je dors 20 minutes. Je sors du ravito vers 6h40, j'ai 1h05 d'avance. Le jour se lève, la forme revient très vite, c'est vraiment du yoyo. Quelques centaines de mètres et je commence à avoir trop chaud, le froid de la nuit est oublié. Je prends le temps de me découvrir. je regarde le roadbook, il annonce 500m de D+ sur les 5 premiers kilomètres puis 10km de descente. Je vais donner tout ce que j'ai. Dans la montée je me colle au coureurs les plus rapides, j'arrive à en dépasser certains, j'ai l'impression d'aller vite, je ne dépasse pas les 400mD+/h. J'ai mal, la plante des pieds me brule. J'arrive en haut, de mieux en mieux. On attaque la descente au petit trot, il reste moins de 10 kilomètres et il n'est pas encore 8h. Je fais un calcul rapide: avec une moyenne de 10km/h j'arriverai à 9h, j'accélère. Je fais les 7 derniers km a 8.2km/h de moyenne, les 4 derniers km à 11km/h de moyenne. J'aime les défis débiles, je veux arriver avant 9h. Après avoir passé 50 heures a 2.9km/h de moyenne j'ai l'impression de voler, je double, je regarde la montre, j'essaye d'accélérer, chaque passage sur le bitume est un calvaire, j'ai les pieds en feu. Je passe la ligne à 8h57, avec 3h03 d'avance sur le roadbook.

J'ai eu ma revanche.

Les leçons que j'en tire :

  • Ne jamais, jamais, abandonner. Au pire se laisser rattraper par la barrière horaire. Si on n'a pas la forme, elle va revenir, parfois très vite.
  • Les batons ne servent pas à grand chose. Les élites savent s'en servir, les autres (comme moi) s'en servent de cannes.
  • Il faut dormir, 20 minutes de dodo peuvent faire gagner plus de 20 minutes sur la section suivante. C'est un investissement rentable
  • Se faire accompagner est un luxe bien agréable, un support moral et une motivation supplémentaire.
  • C'est quand même beau Belledonne

12 commentaires

Commentaire de Arclz73 posté le 25-08-2020 à 20:45:35

Super récit, un plaisir à lire.
Je me reconnais tellement dans ton premier pavé, 1er ultra sur l'EB, les claques, les regrets 1h apres.
Ton expérience sera un exemple pour moi :-)
On ressent que tu as pris quand meme beaucoup de plaisir au milieu des difficultés, sûrement là la clé de la réussite.

Commentaire de Yoga posté le 25-08-2020 à 22:22:27

Je te souhaite d'y retourner et d'aller au bout !

Commentaire de Susan99 posté le 25-08-2020 à 23:36:55

Merci pouf ton partage d'expérience, vraiment très agréable à lire :)

Commentaire de Benman posté le 26-08-2020 à 07:36:17

Un grand bravo pour la course et le récit, tres plaisant à lire.
Je me retrouve pleinement il y a 2 ans dans ta course, sauf que je n'étais pas seul. Tes conclusions sont vraiment les bonnes pour arriver à bout de ce chantier.

Commentaire de Free Wheelin' Nat posté le 26-08-2020 à 09:56:18

Un grand grand bravo et merci pour ce récit . Une magnifique détermination et une grande sagesse en ce qui concerne le départ.

Commentaire de JuCB posté le 27-08-2020 à 07:06:03

Bravo, il fallait oser y retourner !!
Je suis impressionné par ta motivation et ton volume d'entraînement, surtout cette année.
Chapi chapeau
Repose toi bien, personne ne le dit mais le plus dur commence surtout pour éviter la blessure

Commentaire de Spir posté le 27-08-2020 à 08:51:22

Chouette récit. Toi tu as bien écouté la consigne en début de course : gestion, gestion, gestion ! On ne sent jamais de stress vis à vis BH. Un bel exemple !

Commentaire de Yoga posté le 27-08-2020 à 16:48:53

Pourtant il y a eu beaucoup de stress avant la course (et un peu pendant quand même)

Commentaire de alex4356 posté le 27-08-2020 à 16:37:41

Bravo pour la course. Merci pour le récit très inspirant !

Commentaire de coco38 posté le 05-09-2020 à 20:09:13

Apprentissage de l'échec précédent et gestion parfaite ; c'est le secret d'une course réussie. Encore faut-il résister à la tentation d'aller (trop) vite au début.
Bravo ! pour le récit également.
JC

Commentaire de Yoga posté le 05-09-2020 à 22:20:12

Merci!
Effectivement, le plus difficile est de se retenir d'aller trop vite au début... au moins j'ai pu me lacher à la fin :)

Commentaire de Shoto posté le 10-09-2020 à 13:47:25

Très belle gestion de course sur cette magnifique EB l'un des ultras les plus durs du circuit. Bravo pour ta réussite admirable.

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