L'auteur : marathon-Yann
La course : Marathon d'Annecy
Date : 14/4/2019
Lieu : Annecy (Haute-Savoie)
Affichage : 1980 vues
Distance : 42.195km
Objectif : Pas d'objectif
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Il fallait que ça arrive. Depuis le temps que je dissèque sous leur aspect le plus intime (moléculaire) drosophiles, souris, rats et autres bestioles plus charmantes encore, il fallait bien que ce soit moi qui, un jour, joue le rôle du cobaye.
Répondant à une annonce de Billatraining, je me retrouve engagé, avec quatre autres volontaires, sur le marathon d’Annecy. Rien que la destination me ravi, je ne connais ni la ville, ni le marathon à l’excellente réputation. Arrivé samedi à 14h30, le temps de récupérer le dossard (mais pas le tee-shirt, non livré par le prestataire), de me poser à l’hôtel (judicieusement choisi près du départ), de faire un petit tour dans la vieille ville (très agréable), et je retrouve mon ami Frédéric pour partager un très oubliable plat de pâtes (vous ne trouvez pas que j’utilise trop de parenthèses ?). Au lit, déjà ! Il faut dire que j’ai reçu un SMS me donnant rendez-vous à 6h du matin, à 2 km de mon hôtel. Argh.
Réveil à 5h dimanche. Le temps d’avaler un petit déjeuner acheté à la hâte la veille chez Paul (l’hôtel ne sert pas de petit-déjeuner à cette heure), et je traverse la ville pour rejoindre le camp de base. Il n’est pas difficile à trouver : c’est la seule fenêtre éclairée du quartier !
Camps de base. Le terme fait un peu « trek », mais c’est exactement ça. Je m’attendais à ce qu’on m’équipe rapidement, mais c’est autant un lieu de vie, où l’on prend le temps de faire connaissance et de discuter, qu’un espace où l’on se prépare. Pendant que l’on échange entre coureurs et expérimentateurs, nous subissons une batterie de tests physiologiques, tandis que des mains expertes nous recouvrent de capteurs divers. Jean-Pierre (Jean-Pierre run run ®) nous filme avec intelligence et discrétion, tandis que Véronique Billat herself prodige conseils et prélèvements sanguins, tout en assurant un Facebook live.
Le camps de base. Photo : page FB de Jean-Pierre run run
Sur l’une des vidéos ainsi diffusées, elle commente le petit-déjeuner de l’un d’entre nous, qui était parfait mais manquait un peu de beurre. Vous me verrez peut-être, je suis le gars un peu stressé qui attend qu’elle ait fini de parler pour subir son prélèvement sanguin. C’est un peu gêné que je lui avoue m’être contenté d’un gâteau au chocolat de chez Paul, mais elle considère que c’est parfait : glucide, lipides, magnésium… Je partage son avis, donné sur la vidéo : tout part de l’entrainement, la diététique vient après, le corps sait de quoi il a besoin s’il n’est pas sur-entrainé.
Le temps passe rapidement et nous rejoignons le départ peu après 8h. Il y a un côté amusant à finir de s’équiper sous le regard intrigué des passants, mais à la façon dont on vérifie trois fois si tout le matériel est bien en place, je me rends compte combien cette expérience est importante pour mes collègues. Après tout, m’ont-ils dit, il s’agit d’une première mondiale, et j’ai pour 35 000 euros de matériel sur le dos !
Le speaker nous lâche rapidement. Après une première boucle en ville pour étirer le peloton, nous nous engageons pour un aller-retour sur la piste cyclable le long du lac. Ce parcours est magnifique, sans aucun doute l’un des plus beaux que je connaisse. Que ce soit la vue sur le lac, où naviguent quelques barques, ou sur les majestueuses montagnes aux sommets recouverts de neige, tout respire l’harmonie et la sérénité.
J’oublie assez facilement les capteurs, mis à part le masque qui me fait entendre ma respiration bruyante. Elément essentiel de l’expérience, je dois donner mon ressenti régulièrement, un petit dictaphone enregistrant mes commentaires. J’attire évidemment beaucoup de regards et de remarques. J’imagine que certains me croient tuberculeux, à la façon compatissante dont ils me disent « Allez Monsieur ». D’autres doivent penser qu’il s’agit d’un nouveau gadget, si j’en crois le ton méprisant dont ils demandent « c’est quoi ce bidule ? ». Un gamin encourage les coureurs par leur prénom, marqué sur leur dossard : « Allez Laurent ! Allez Alex ! Allez, euh, Dark Vador ! » Je me marre sous mon masque. Un spectateur a compris : « Allez la science »
Parcours idéal, expérience déjà très riche et finalement amusante, il ne manque que… les jambes (dommage pour une course !). Très rapidement, je sens que je ne suis pas dans un bon jour, une soif inhabituelle me faisant m’arrêter à chaque ravitaillement, où je dois enlever mon masque pour boire deux gobelets d’eau. Je n’arrive pas à soutenir le rythme que je visais, et peine à me raccrocher à un objectif précis, à part « faire du mieux possible ». Verbaliser régulièrement mon état de (mé)forme ne m’aide pas, loin s'en faut.
Km18, je croise les premiers, sur le retour, et constate que nous ne faisons décidément pas le même sport. Km 19, c’est la première fille que je croise, pas loin des garçons. Une petite boucle à mi-parcours, et nous rentrons sur Annecy. Après avoir plutôt admiré les montagnes à l’aller, je me concentre plus sur le lac au retour. Toujours aussi beau. Les sensations ne reviennent pas, au contraire, et monologuer avec mon dictaphone ne m’aide pas à jouer de mes ressorts mentaux habituels.
Progressivement, cependant, le sentiment de participer à une expérience s’estompe devant celui de courir un marathon. Je retrouve le cher combat habituel, la voix au fond de moi qui m’encourage (« plus que 8 km, ne lâche pas »). Derniers kms, le public est nombreux et enthousiaste, je mets un point d’honneur à rester devant le meneur d’allure 3h30 (même s’il est parti après moi), et fini, sans énergie, en 3h31.
Mon équipe me récupère pour quelques mesures post-course. Je suis légèrement déçu de mon temps (j’espérais courir en 3h15) mais ai quand même le sentiment du devoir accompli. L'important aujourd'hui était que je fasse de mon mieux. Sans me chercher d’excuse, je cherche des explications : sans doute n’est-ce pas une bonne idée de n’avoir mangé qu’un sandwich hier midi, dans le train ; peut-être l’expérience m’a-t-elle plus stressé que ce que je n’imaginais, que sais-je encore ?
L’équipe me reconduit à mon hôtel, où je peux me doucher, et j’ai même le temps de saluer Frédéric (auteur d'un beau negative split) et sa famille avant de prendre mon train. Encore une belle expérience que ce weekend ! Pour paraphraser l’astronaute Bill Anders d’Apollo 8 qui disait « nous sommes venus explorer la Lune mais nous avons découvert la Terre », j’étais venu pour une expérience, mais j’ai découvert de nouvelles choses sur le coureur qui m'anime.
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6 commentaires
Commentaire de Ze Man posté le 19-04-2019 à 18:34:22
Chouette expérience, même si esthétiquement discutable. Ca doit forcément impacter sur ta façon de courir et sur ton ressenti en général. Le CR donne bien envie de découvrir le marathon d'Annecy !
Commentaire de Benman posté le 20-04-2019 à 08:20:20
Le coureur masqué... à mi- chemin entre skyrunner et Skywalker, tu souris dans l'effort, en bon cobaye qui fait le cow-boy au milieu du peloton. Chouette expérience.
Commentaire de Ben737 posté le 21-04-2019 à 08:45:33
Merci, c'était intéressant,et bien écrit
Commentaire de marathon-Yann posté le 30-04-2019 à 17:31:04
Merci à tous les 3 ! je vous tiens au courant des résultats de l'expérience dès que je les connais !
Commentaire de Seabiscuit posté le 12-05-2019 à 12:58:11
Bonjour Yann, je me suis permis de mettre une de tes photos dans mon récit. Si ça te gêne, dis le moi, je la supprimerais.
Sportivement
Commentaire de marathon-Yann posté le 13-05-2019 à 17:32:19
Pas de soucis pour la photo (au contraire), de toute façon je suis méconnaissable dessus !
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