Récit de la course : Raid 28 2005, par ufoot

L'auteur : ufoot

La course : Raid 28

Date : 16/1/2005

Lieu : Bures Sur Yvette (Essonne)

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Distance : 80km

Objectif : Terminer

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CR Raid 28

Le Raid 28, "la 3ème dimension de la course à pied" comme ils disent. Mmm, ça c'est de l'épreuve originale. Ca faisait longtemps que j'avais envie de m'y inscrire, Jean-Paul et Dominique ne reformant pas cette année leur équipe des éditions précédentes - pour des motifs vagues et peu convaincants du genre "non c'est trop dur" - je saute sur une opportunité exceptionnelle lorsque sur le Forum UFO l'Electron annonce qu'il cherche "un homme et une femme". J'intègre donc l'équipe des "Ultrafondus du Zoo", en tant que poinçonneur.

Ce que mes coéquipiers ne savent pas, c'est que ce Raid 28 édition 2005 sera aussi pour moi l'occasion d'exorciser un vieux démon, à savoir que j'ai de très mauvais souvenirs des "sports d'équipes". Concrètement j'ai toujours assez mal vécu les "sports co" pratiqués à l'école (foot, basket, hand, volley...). Non pas que je n'aime pas la notion de groupe, sinon je ne ferais autant de fanfare, mais disons que plongé dans un contexte sportif, ça passait assez mal. Donc ce Raid 28 est pour moi une excellente raison de clore le problème. Le Raid 28 c'est normalement assez exigeant, et une bonne équipe soudée c'est, si j'ai bien suivi, souvent déterminant dans la réussite du bidule.

Ce que mes coéquipiers ne savent pas non plus, c'est que j'ai rarement aussi mal préparé une course. Entraînement négligé en forme de "de toutes façons j'ai une caisse du tonnerre je vais faire ça sur une jambe en me curant le nez", ainsi divers problèmes, notemment une super mauvaise nuit de sommeil entre vendredi et samedi, et un état d'énervement avancé toute la journée de samedi, suite à un différent avec un opérateur téléphonique connu qui traîne, m'énerve, m'agace et me faire perdre du temps. Il y a aussi ma cheville droite qui ne s'est toujours pas complètement remise du GRR et la petite chute en moto qui l'a suivi. Hum, il s'agit de ne pas décevoir mes coéquipiers!

La fameuse équipe a donc fait dans un premier temps connaissance sur Internet, s'est rencontré partiellement "en vrai" (l'Electron, Koline et moi-même) à la reconnaissance des 100km de Normandie, et se donne finalement rendez-vous à 19h00 avec d'autres animaux du Zoo dans une pizzeria à Orsay.

Et là, première anecdote mémorable, arrivant en avance au rendez-vous, je cherche un troquet ouvert pour boire un coup en attendant, et dans le bar où j'atteris, je vois certes des clients bien entamés, mais aussi et surtout une rangée de médailles derrière le comptoir dont une, énorme, sur laquelle il me semble bien lire "100km". Intrigué, je demande au patron ce que c'est, et... oui, c'est bien une médaille de "cent bornes". D'ailleurs c'est lui qui l'a ramenée, car il est centbornard le bougre, et il a aussi couru des 24h (marque à 201km) et tout et tout. Je lui explique le concept du Raid 28, et finalement notre belle équipe se retrouve au complet pour boire un godet dans ce qui doit être un des rares bistrots tenus par un coureur d'ultra. Pour les petits curieux c'est le "Café de Paris" 3 rue Verrier à Orsay donc.

Je fais donc connaissance avec le reste de l'équipe. L'Electron donc sera capitaine du navire: si on coule c'est lui qui part en dernier. L'Ecureuil sera responsable de l'orientation, c'est un sacré poids sur les épaules. L'Blueb n'a pas de rôle particulier mais la course montrera qu'il aurait tout aussi bien pu poinçonner à ma place, étant donné qu'il semblait en avoir pas mal sous la pédale et qu'il a montré un dynamisme exemplaire et une efficacité redoutable sur la localisation de balise. Moi je suis chargé de poinçonner, et tant pis s'il faut traverser un marécage. Enfin Koline, bien que n'ayant pas de rôle spécialement attribué, aurait très bien pu être bombardée "responsable allure", étant donné l'hallucinante régularité de sa progression. Un métronome sur pattes, qui fait accessoirement boîte à sourire et bonne humeur.

Tout ce beau petit monde participe donc à un petit AAB avec d'autres z'animos du Zoo. Je revois quelques têtes connues et en découvre bien d'autres. Je parle VMS avec le Papy. N'empêche que coûts réduits ou pas, VMS c'est pas libre, na! Je mange une bonne andouillette frites, plutôt qu'une pizza, car je pense que j'aurai "plus à manger" avec les frites. Gagné 8-) Accessoirement je manque de me vautrer dans les toilettes en loupant une marche, et à cette occasion ma cheville droite me rappelle douloureusement qu'elle est loin d'être à 100% de ses capacités. Il s'agira d'éviter les faux-pas sur le parcours, ça serait fatal.

Rendez-vous ensuite au gymnase. Formalités administratives, photos, habillement, et rien de très surprenant, jusqu'ici tout est conforme à mes attentes. Je me procure un sandwich au pâté dont je mange une moitié, et fourgue l'autre moitié dans mon sac-à-dos, à consommer plus tard. Le sac-à-dos en question est rempli avec mon mélange isotonique de choc "sirop Teisseire citron + 2,5L d'eau + 1 cuillère à café de sel". J'ai aussi une bouteille d'1,5L de coca "en spare", 4 mini-lions, 6 mini-berlingots de lait concentré sucré, un sachet de crackers "Monaco", un mini sachet de "Tweanuts", et le fameux demi-sandwich au pâté. Aucun vêtement de rechange, tout sur moi dès le départ. Moult piles AAA de rechange, une lampe à main de secours, la couverture de survie, un jeu de 421 (inutile, donc indispensable), un alcootest (au cas où je croise la Tortue sur le parcours), un couteau suisse avec l'outil tournevis sorti pour ouvrir les capots lors des changements de piles, un rouleau de PQ dans un sac plastique, bref, l'attirail habituel.

Annonce de l'organisation, le départ de se fera pas à Bures mais "ailleurs", à quelques dizaines de kilomètres. On est transportés en bus RATP sur le lieu de départ, les cartes sont donnés lors de l'entrée dans le bus. Cette nouvelle met en vrac la seule "tactique" que nous avions prévu, qui était de ne reporter que quelques balises sur la carte lors du départ, et de faire la suite des reports de balise en route, lors des inévitables pauses et jardinages divers. Mais bon ça ne change pas l'objectif principal, qui est de finir, dans les temps. Concernant la spéciale "course d'orientation" du départ, nous décidons de ne pas la faire. Elle n'apporte rien qui puisse servir à atteindre notre objectif "finir dans les temps", au contraire elle risquerait de nous le faire manquer...

Dans le bus il fait froid, et il n'y a pas de place assise pour tout le monde. Enfin si tout le monde peut s'asseoir mais certains s'assoient par terre. Confort rustique qui convient à merveille à cette course. Ca convient d'autant plus que nous, nous en avons, des places assices sur des jolis sièges molletonés (confort RATP tout de même). L'Ecureuil et l'Electron font le report des balises. Moi je ne fais pas grand chose. Si, j'essaye de bien ranger et vérifier mon sac, histoire de ne pas être à la masse au départ. Et j'écoute les discussions des autres équipes, parfois c'est bien rigolo.

Et finalement, descente du bus, et récupération, un peu désordonnée, du carton que je vais trouilloter pendant l'épreuve. Top départ donc.

Après quelques centaines de mètres parcouru, je fais un triste constat: les piles de ma frontale sont mortes. Je pourrais me perdre en explications vaseuses sur le pourquoi du comment, ayant moult piles de rechange dans mon sac, plus d'une heure de trajet en bus pour les changer, je n'ai pas pensé à le faire avant. Enfin le bilan est clair, ça n'éclaire plus du tout. On voit à peine les diodes dans la nuit, en regardant la lampe de face à 10cm. Hum. Opération changement de piles donc. L'Electron me demande comment j'ai réussi à partir avec des piles nazes alors que... Bon, bref, n'insistons pas, je me dis que c'est pas grave de faire des conneries, le tout c'est d'assumer et de les réparer. Mon objectif pendant ce tout début de parcours sera donc de changer ces saletés de piles sans retarder le groupe. Par moment je prends de l'avance pour les opérations qui demandent un arrêt complet, et d'autres fois j'essaye de faire le truc en courant en profitant de la lumière des autres. Les deux opérations complexes sont la récupération du matos nécessaire dans le sac et l'ouverture du compartiment à piles avec l'outil tournevis du couteau suisse, qui est accroché dans le sac. Le reste c'est du gateau. N'empêche que pendant de longues minutes je cours sans gants, les mains nues, et qu'une fois l'opération terminée mes mains eh bien elles sont bien froides. Enfin au final ma lampe éclaire du feu de dieu. Il n'empêche que s'entraîner à courir sur un chemin en fouillant dans le sac - je le fais de temps en temps à l'entraînement - peut s'avérer utile, la preuve.

Première balise, je vais trouilloter le bidule. Dilemne en regardant la feuille à trouilloter: y'a plusieurs "1". Je trouillote le "1" qui est le plus proche de la case "départ" mais en fait c'est un mauvais choix car ce "1" est en fait un "M1" qui correspond à la balise "1" de l'épreuve de mémorisation ("M" pour mémorisation donc). Donc je trouillote la mauvaise case quoi. Je trouilloterai par la suite les cases "M2" et "M3" avec les balises "2" et "3", mais ça sera sans grande conséquence, sur les conseils de l'Electron on expliquera notre cas à l'organisation, qui, super sympa, fera preuve de compréhension. Ouf.

Premier virage à gauche, on entre dans un bois, petit chemin en descente, j'ai une banane d'enfer, c'est cool! L'Ecureuil, assisté à l'occasion par l'Electron, nous guide d'une main de maître. On loupe les balises optionnelles 4 et 5. Bof tant pis c'est pas grave, au moins elles ne nous auront pas fait perdre beaucoup de temps. On croise de temps en temps des équipes en sens inverse, ou qui tournent à droite quand on va tout droit, mais on ne s'en soucie guère. Entre les différentes options stratégiques possibles, le fait de décider ou pas de choper certains balises, de privilégier le bitume ou les chemins, certains choix apparemment contradictoires peuvent s'avérer tous bons. Et en plus évidemment il y a toujours la possibilité que les autres se gourrent.

Après un début de parcours dans des bois et croisant quelques villages, on arrive finalement quand-même, enfin, et beaucoup plus rapidement que si on était partis de Bures, au coeur du sujet, à l'escence même de la course, à ce qui fait son âme: la Beauce. Ouééééé, de la bonne Beauce toute plate. C'est simple à décrire: un chemin avec des empreintes de tracteur bien profondes, quelques flaques, à gauche un champ labouré, à droite un champ labouré. Visibilité entre 10 et 50 mètres selon l'intensité du brouillard, température oscillant entre 0° et un peu en dessous. L'Electron fera, à l'occasion d'un grand "tout droit" entre les champs, cette remarque empreinte de vérité: "vous voyez comme la Beauce impose le respect...". Effectivement, on ne fait pas les malins.

Ceci étant, par rapport à tout ce que j'ai pu entendre ou me représenter, c'est assez "soft". Certes il fait froid. Mais pas de pluie, et pas de boue ignoble. Exceptionnellement certains passages seront un peu spongieux, mais rien de catastrophique. Les opérations démoulage de chaussures n'ont pas lieu d'être en ce 16 Janvier 2005. D'un certain point de vue c'est bien parce que l'épreuve est plus facile, d'un autre point de vue c'est chiant parce que je ne vais plus en finir d'entendre "oui mais nous quand on l'a fait c'était aut' chose..." tant que je n'aurais pas fait un "vrai" Raid 28 où une pluie mesquine et glacée ainsi qu'un vent puissant et sournois vous accompagnent tout le long du parcours. Dans tous les cas on se paye du bon temps et on s'amuse bien, c'est l'essentiel.

A partir de cette ligne le compte-rendu est susceptible de comporter des incohérences chronologiques notoires, car j'ai un peu fatigué sur la fin et les souvenirs de début de parcours se sont tous mélangés dans mon esprit embrumé (au moins autant que le parcours, c'est dire).

Donc j'ai beau dire que le parcours me paraît facile, à un moment, un tantinet distrait, je "butte" sur un monticule pourtant relativement visible d'1m50 de côté et 20cm de haut et blam boum badablang je m'étale de tout mon long par terre. Heureusement c'est bien sec. Je m'égratigne un peu la cuisse et déchire un peu mon collant mais sans plus. Certains membres de l'équipe ont pu admirer la figure.

Petit topo sur la balise 9: cette balise était indiqué comme étant à l'angle du bois de "machin-truc", "machin-truc" étant un patelin sur le parcours. Donc en arrivant à "machin-truc" on cherche la balise à l'angle du bois. Ou plutôt à l'angle d'un bois (là on aurait pu se douter d'un truc). On jardine on jardine, et on n'est pas les seuls. Enfin on prend (déçus mais pragmatiques) la décision de faire l'impasse. Puis un peu plus loin, alors que l'Ecureuil et l'Electron parlent du parcours, se pose la question "et le point d'arrêt là il est où?". "Au niveau du bois de machin-truc". Ventrenouille! C'est là! On trouve la balise 9 sans soucis. Hé hé hé, ouf.

Balise 10. Là c'est mesquin, elle est planquée dans un point d'eau, mais le point d'eau n'est pas très visible, et placé à 40m d'une cabane en béton qui pourrait tout aussi bien être le point d'eau, et qui est apparemment l'élément repéré sur la carte. Hum.

Pour la balise 11, c'est différent. Etant "mélangés" à d'autres équipes sur le parcours, il m'avait bien semblé que L'Blueb avait plus ou moins disparu, mais je me disais qu'il devait être devant. Sachant qu'il avait l'air d'avoir la patate, je ne me faisais pas de soucis pour lui. En général je m'intéresse en priorité à ceux qui semblent en baver, et risquent de se retrouver à la ramasse sans oser ni pouvoir prévenir. Donc bon. Toujours est-il qu'au niveau de la balise 11, notre équipe n'a plus que 4 membres. Je décide de faire péter le téléphone portable. J'ai pas le numéro du Blueb dedans mais j'ai un bristol sur lequel est écrit ledit numéro. Dring dring dring. "Allo L'Blueb c'est ufoot t'es où nous on est à la balise 11?". De fait notre lieutenant préféré a fait demi-tour s'apercevant qu'il était seul et pensant qu'il était devant alors qu'en fait... ...il était derrière. Ca nous fait perdre un peu de temps car il doit rebrousser chemin et repartir dans le bon sens pour nous rejoindre mais cette nouvelle est un soulagement, car je redoutais qu'il se soit fait mal ou qu'il y ait un soucis vraiment grave. Cette anecdote nous permettra de vérifier que le Gore-tex ou le MP+ sont des tissus qui tiennent chaud pendant l'effort mais immobile au milieu de la Beauce ça ne vaut pas un pet de lapin, c'est nul. On caille dur.

D'ailleurs à ce sujet je me dis que s'il avait plu mon équipement n'était pas très adapté. Ceci étant j'aurais prévu différemment c'est sûr, mais là la météo annonçait vraiment du sec. Et puis pour ce qui est des gants mes gants de VTT Décathlon ne suffisent pas, c'est un fait. J'ai les mains glacées, je dois les réchauffer régulièrement. Ce qui n'aide pas non plus c'est que comme le rythme du groupe est finalement assez "cool" pour moi, je dépense peu d'énergie, en témoigne mon rythme cardiaque qui est plus proche en général des 100 à 110 pulsations par minute, à comparer aux 120 à 130 pendant le GRR, qui était pourtant plus long. Du coup je ne me réchauffe pas. Les quelques accélérations que je fais pour rattraper le groupe lors des pauses pipi sont vraiment salutaires car elles me réchauffent bien. Pour autant j'évite de faire exprès de forcer pour me réchauffer, car je risque aussi de me cramer complètement et de retarder tout le monde en fin de parcours. En attendant je me réchauffe les mains en soufflant dessus, mais j'en chie. P*tain qu'est-ce que j'ai froid aux mains!

Epreuve d'orientation/mémorisation. 5 balises à mémoriser puis trouver. Brillante idée de l'Electron: chacun mémorise une balise. Ca c'est de l'organisation. Sauf que... L'Electron prend l'initiative et propose de mémoriser la balise 1. J'enchaîne et propose de mémoriser la 3. Et les suivants se partagent les 3 balises restantes. Au final la balise 3 sera excellement mémorisée car l'Electron et moi mémoriserons tous les deux cette même balise. Evidemment si vous demandez à l'Electron de vous raconter cette histoire il vous racontera la même en inversant les rôles 8-) Trop forts les Ultrafondus du Zoo, des vrais stars. Bon, plutôt que de partir dans un mauvais trip du genre "mais non mais si j'ai raison" toujours fatal au bon fonctionnement d'une équipe, on décide que tant pis pour la 1 et basta. De fait on trouvera cette balise simplement en essayant un chemin depuis lequel on voit revenir d'autres concurrents, et aussi et surtout grâce à la perspicacité et à l'initiave du Blueb qui se rappelait l'emplacement de la balise et l'a donc trouvée. Chapeau.

Arrive enfin le moment de prendre le raccourci pour les 55km ou de poursuivre le grand parcours. Notre objectif étant de finir le 75km, on prend très logiquement l'option longue. Nous sommes confortés dans notre choix de ne pas avoir fait la CO de début d'épreuve, car nous avons certes de la marge sur le temps limite, mais pas tant que ça. Faire la CO du début et être obligé de partir sur le 55, ç'aurait vraiment été décevant. Je décide que maintenant commence une "seconde partie" du parcours, et que je vais essayer de "rattraper" mes erreurs, à savoir éviter de trouilloter n'importe quoi n'importe où, éviter les erreurs logistiques genre je pars avec des piles nazes, et éviter les quiproquos stupides sur qui mémorise quelle balise. En clair je décide que je vais assurer comme une bête. Facile à dire 8-)

Donc en route pour de nouvelles aventures dans la Beauce. Woooohoooo! Trop top le parcours. Du chemin au milieu des champs et puis de temps en temps du chemin au milieu des champs et pour changer du chemin au milieu des champs. C'est vraiment la régalade. D'autant qu'il commence vraiment à faire super-archi-méga froid je trouve. Les sac-à-dos sont tous blancs, et Koline a de la glace prise dans les cheveux. Brrrrr. Le lever du jour a pour effet de résoudre quasi-instantanément mon problème de froid aux doigts. Ouf.

L'équipe prend maintenant son rythme de croisière. Ca tourne bien. On empoche les balises sans trop de soucis et on tient notre petit 5 à 6 km/h de moyenne. C'est amusant car on se fait régulièrement doubler par les mêmes équipes, dans des zones où il n'y a pourtant pas beaucoup de balises optionnelles. Eux courent, et nous on marche, mais on reste ensemble. En d'autres termes nos orienteurs assurent comme des bêtes. J'aurai du prendre un sachet de noisettes pour l'offrir à l'Ecureuil 8-)

Ah oui, et au fait, on franchit les 42,2km, c'est bon on score à la CTU!

D'ailleurs à force de marcher et marcher ça en fait beaucoup pour moi, car l'air de rien j'ai beau intégrer de la marche dans mon entraînement, je prévois rarement un ratio 80% de marche pour 20% de course, et là c'est pourtant le cas. Mais me direz-vous Koline elle court elle! Oui ben chacun son style. Elle court à 7km/h mais moi aujourd'hui, en ce 16 Janvier 2005, à 7km/h je préfère marcher, c'est un fait. Du coup parfois cela donne lieu à un comportement assez étrange de l'équipe: Koline court toute seule devant ou derrière, et les 4 hommes sont ensemble en train de marcher de leur côté. De temps en temps on rattrape notre retard par un petit à-coup de course à 8km/h et hop on remarche. Ca nous vaudra quelques remarques de la part des organisateurs "mais vous n'avez pas honte de la laisser ramer toute seule!!!". Alors qu'en fait il n'y a aucun soucis, zéro mauvaise ambiance dans l'équipe, simplement on a trouvé notre petit rythme et ça nous va très bien.

A l'annonce d'une balise qui serait "sous un pont" certains se régalent d'avance de me voir patauger dans la flotte pour aller poinçonner une balise sadiquement placée dans un endroit inaccessible, mais non. D'ailleurs c'est comme pour le climat. Je m'attendais à quelque chose de bien pire, et donc en fait les balises ne sont pas si horribles que ça à atteindre. Enfin en même temps on ne les a pas toutes trouvées, on a zappé la CO de départ, les optionnelles 4 et 5, et celles de la boucle supplémentaire du 95km. Donc bon faudrait voir avec l'avis de tout le monde... Mais bon faire poinçonnneur là c'est assez cool, suffit d'avoir une poche à la bonne taille pour que ce soit pratique de mettre le carton, et je dispose d'une telle poche, pratique et tout et tout.

A la bifurcation entre le grand parcours et le moyen, on apprend qu'on n'est que 10 minutes après le temps limite pour le grand parcours. Ben oui on est bêtes, les temps limites ont tous été décalés car on est partis à minuit et demi et pas minuit pile. Sans regrets de toutes façons on y serait pas allés. Trop risqué, on aurait pu louper la barrière horaire globale, et donc ne pas finir la course. Ca serait trop bête hein...

S'en suit une portion de parcours dans la Beauce qui est, si ça se trouve, assez similaire à la première partie de la course, sauf que maintenant, la Beauce, on la voit. Ouaou. Alors je vais vous dire un truc les gars, la Beauce, c'est grand. Et y'a pas beaucoup d'arbres. Apparemment d'ailleurs les pylones EDF y poussent encore mieux que les arbres. Peut-être pour ça qu'on y accroche les balises, sur les pylones. On trouve aussi des chasseurs en Beauce. Et du gibier. Mais pas au même endroit. J'espère que les chasseurs en ont quand même attrapé une ou deux de ces bestioles car sinon 1) ils sont vraiment trop mauvais et 2) franchement courir sous nos yeux à plusieurs dizaines de km/h et traverser en 30 secondes des étendues qui nous ont pris de longues, pénibles et laborieuses minutes à traverser, ça mérite bien un bon coup de plomb dans le derrière. Non mais!

L'équipe est maintenant bien soudée, faut dire qu'on commence à se connaître maintenant. Mais on fatigue. On fatigue grave. L'Electron n'a pas mal aux genoux - enfin par rapport à ce que ça peut être d'habitude quoi - mais il est quand même bien attaqué. L'Ecureuil a depuis belle lurette dépassé son "record" de distance et il en chie. Néanmoins il reste extrêment lucide concernant la navigation. L'Blueb se porte pas si mal que ça, je pense qu'il est à peu près comme moi. Koline, elle, court invariablement à une vitesse ultra régulière, mais la boue commence à lui taper sur le système il me semble. Elle préfèrerait un bon vieux tronçon de bitume.

Une des balises est positionnée à côté d'une carrière près de laquelle se trouve un énorme tas de sable. La Dune du Pilat locale quoi. Pendant un moment ça fantasme dans l'équipe et certains (y compris moi) me voient monter dans le sable chercher une balise lâchement placée en haut de la dune, et redescendre fourbu avec 3 tonnes de sable dans chaque chaussure, mais non, ce ne sera pas pour cette fois, la balise est tout bêtement placée sur un petit mamelon de 3 mètres, et super facile à voir et à atteindre. Décidément c'est pas fatiguant de poinçonner aujourd'hui.

Arrive le point de contrôle avant le dernier grand "tout droit" du parcours. Pour du "tout droit" c'est du "tout droit", c'est le long de la voie ferrée, ligne TGV. Comme je le fais remarquer, ils ont bien fait de rénover dans la région car la voie de TGV elle a 'achement plus de gueule que l'ancienne voie ferrée qu'on a longée le matin. Enfin bref grand "tout droit" et d'après notre team d'orientation de choc, la balise serait à 4,8km du CP, soit "un peu après le CP suivant", ce qui serait paradoxal car la balise est marquée comme étant avant le CP suivant, mais enfin peut-être Papy Turoom a-t'il prévu un truc spécial pour cette balise 28 à 2*28 minutes de bonif. A toute fin utile, je note le chiffre de l'odomètre sur mon GPS peu après avoir quitté le CP précédent. 66,5. 65,5+4,8=71,3. Tiens j'arrive encore à faire du calcul mental, pas si mort que ça le bonhomme 8-) Donc, après une interminable ligne droite, jalonnée par des événements exceptionnels genre "oh un pont" au bout de 2km ou "attention il y a une chicane" (une seule sur 5km), mon odomètre affiche 71,2. Là je me dis que bon, hum, certes l'Ecureuil et l'Electron ont reporté la balise après le prochain CP, mais quand même... Je fais part de mes doutes à l'Ecureuil, lui explique que j'ai envie de quitter la voie ferrée pour aller sur le chemin de l'autre côté de l'espèce de haie sauvage faites d'arbustes, de mauvaises herbes et de saloperies diverses. Il me répond que bof, que ça serait peut-être utile si la balise avait des chances d'être là, juste posée ici comme ça... ENORME!!! La balise est là. Juste là, à trois mètres. 10 secondes de recherche et 56 minutes de bonif, je savoure cette balise 28 avec délectation. On continue, ragaillardis. Si on calcule qu'on a mis 50 minutes pour parcourir 5km, ça nous fait les 5km à "-6 minutes". On remonte le temps. Yabon.

Maintenant je sais (ça faisait un paquet de kilomètres que je m'en doutais mais là j'en suis sûr) qu'on va le finir ce Raid 28. Le moral de l'équipe est bon, et si certains sont physiquement bien atteints, on sent assez rapidement qu'ils arriveront au bout. D'ailleurs j'avais fait une remarque quelques kilomètres avant, expliquant que quand on est cuit, on avance (en ce qui me concerne) à 3km/h et pas plus. Et de fait là on avance bien plus vite, dans les 6km/h on va dire, donc on n'est pas encore complètement KO, même si ça fait mal, voire très mal pour certains. Concernant l'orientation, l'Ecureuil est toujours aussi lucide, pas de soucis, ça roule.

Deux coureurs nous doublent, un homme et une femme, lui devant, elle derrière, et un bout de corde entre les deux. Damned, elle se fait tirer. Je trouve çà un peu bizarre. Autant pour une équipe de 5 qui jouerait le chrono ça aurait une certaine logique autant à 2, foutu pour foutu, si j'étais la fille je préférerais finir plus lentement, mais finir en autonome, par mes propres moyens. C'est un coup à se gâcher le plaisir de pouvoir se dire "je l'ai fait, toute seule comme une grande!". En plus ce "tractage" est pour moi révélateur d'un certain esprit qui projète la femme comme un être faible et délicat qui a besoin qu'on le soutienne, alors que bon, le Raid 28 est justement typiquement l'épreuve qui montre qu'homme ou femme ça ne change pas grand chose à la question. Il suffit d'être entraîné et bien organisé.

Arrive enfin le moment où ma réserve de do-it-yoursellf-nergy-drink s'épuise, donc plus de Teisseire, on repasse au coca. J'en profite pour en filer un peu à Koline, c'était bien le but d'avoir emmené 4L de boisson: pouvoir en donner à ceux qui en voudraient sur la fin du parcours. Ce coca va me redonner une patate d'enfer! A tel point que je me demande si je n'aurais pas du boire ça dès le début... Je suis gonflé à toc, j'ai envie de courir, de me rentrer dedans un bon coup.

Une des dernières balises nous fait des farces. Elle est censée être au bout d'un fossé. On voit bien une espèce de fossé dont le début est rempli d'ordures - et qui en cela ressemble bien à mon biotope banlieusard habituel - mais bon... Finalement L'Blueb, qui a fait un énorme boulot de recherche de balise depuis le début de l'épreuve, trouve la balise, au fond du fameux fossé. Le problème c'est que le bord est un peu raide. Je décide de descendre dans le fossé à un endroit où il y a moins de pente mais me retrouve embourbé dans les branchailles. B*rdel de Zeus moi qui voulait de la balise pénible à attraper celle-ci, à défaut d'être dans la boue, me donne du fil à retordre, d'autant que je ne l'ai pas attaquée avec le meilleur angle. L'Blueb me guide à la voix vers la balise, je l'attrape et repars par un autre chemin, à peine meilleur. On peut critiquer la méthode, mais bon finalement je l'attrape la balise. Je rate l'objectif qui était de ne pas retarder le groupe avec la recherche de balise - on essaye en général de partir un peu en avance avec L'Blueb - mais au final ils ne sont pas si mécontent que ça de profiter d'une petite pause improvisée.

Hop, on ze road again! On croise un caméraman. Je déballe quelques bonnes conneries. Ca veut dire que j'ai encore du jus, quand je suis vraiment fatigué j'arrête en général assez vite de faire le malin.

On prend la décision de séparer le groupe. L'Blueb et moi d'un côté pour aller chercher une balise, les 3 autres de l'autre pour essayer de faire un max de bitume, car entre les chemins agricoles et Koline, c'est pas la folle histoire d'amour. Le choix est bon, après une mini erreur d'aiguillage de rien du tout, L'Blueb et moi trouvons sans soucis la balise. En plus on a les autres en visuel sur la droite, donc aucune chance de se perdre. Sur la balise suivante, on a du pot car on est très loin du ruisseau au bord duquel elle se trouve, mais on la voit de très loin. Je vais la chercher tout seul, et c'est le seul moment du parcours où j'aurais vraiment les pieds dans l'eau. Et encore j'aurais pu l'éviter mais je décide que je suis pressé, et traverse donc sans me poser de questions. Mais c'est vraiment pas l'horreur, il y a à peine 15cm d'eau, 1m de large, pas de courant, bref, c'est de la rigolade.

C'est sur la toute dernière balise que nous allons perdre du temps. On fatigue. La description parle de coude de lisière, certains pensent coude de rivière, mais non pas de rivière, de li-siè-re! Mais on met un temps fou à s'en apercevoir. Il y a une sombre histoire de ligne de niveau aussi. Bref. Je n'ai moi-même plus les idées trop claires. Dans le doute j'essaye de faire des allers-retours dans un peu toutes les directions histoire de voir si j'aperçois la balise. Je sais c'est con mais la course est bientôt finie et j'ai encore des jambes et de l'énergie donc j'en profite. Rester immobile à attendre serait assez insupportable en fait. On finit par se re-séparer, L'Blueb et moi cherchons pendant que les autres avancent sur la route. A un moment je me retrouve seul dans un champ et là c'est le zap. Je me vois courir tout seul, j'ai 16 ans, je suis dans un pays étranger, et je cours. Un petit peu comme le chien dans la pub pour Royal Canin, avec la musique du Professionnel. Tin tin, tintintin, tin tin, tin tintin tin, tintintin tintintin tintintin tin tin... Hé ho garçon on se réveille! Bigre, j'ai bien failli partir seul n'importe où pour une séance d'entraînement. Warning! Je ne suis pas aussi frais que je le pense... Au final ce sont les autres qui trouvent la balise. Evidemment elle était là où c'était indiqué, mais après 16h00 de course, forcément, on perd en lucidité. Moi le premier. Et hop je trouillote.

Dernier tronçon avant la quille, on aperçoit des baignoires dans un champ, la douche sera-t'elle chaude? Des promeneurs très sympas discutent avec nous. Ils vont ouvertement à la même allure que nous. J'évite par pudeur de regarder notre allure sur le GPS. Petite polémique rigolote entre l'Electron et L'Blueb pour savoir à partir de quel limite nous allons placer notre "sprint final" (comprendre "trottiner calmement jusqu'à l'arche d'arrivée"). Et finalement franchissement de la ligne d'arrivée, main dans la main.

Yo, on l'a fait!

Je suis très content. Alors que L'Blueb et moi s'entre-nettoyons les chaussures à coup de jet d'eau, je constate que Jean-Paul et Dominique sont là! Ca alors, c'est une bonne nouvelle, je ne m'y attendais pas... Dominique voulait même être au départ, mais il s'est pointé à Bures à 23h15, après donc le départ des bus RATP vers le "vrai" départ. C'est dommage. La soupe est la bienvenue, les nouilles aussi. On ne s'attarde pas au gymnase, et je suis ramené par les parents de l'Electron, grand merci à eux. Finalement je suis quand même bien fatigué, je n'ai jamais ressenti d'envie de dormir sur le parcours, mais quand même, une nuit blanche passe rarement inaperçue.

Bilan donc hyper positif pour ce Raid 28. Objectif atteint. Objectif collectif car nous avons fini tous ensemble, et dans les temps. Objectif personnel car j'ai enfin exorcisé le spectre tabou du sport en équipe grace à cette expérience positive et sympa comme tout. En somme je suis fin prêt pour la prochaine édition, gageons que celle-ci sera particulièrement corsée, avec de la neige, des balises planquées dans des endroits gluants à souhait, et un vent à décorner les boeufs.

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