L'auteur : TomTrailRunner
La course : Challenge Val Drôme - Les Aventuriers du Bout de la Drôme - 123 km
Date : 13/5/2017
Lieu : Crest (Drôme)
Affichage : 5162 vues
Distance : 129km
Objectif : Terminer
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64 autres récits :
13 mai : les Aventuriers du bout de la Drôme
Vendredi 12 mai 18h
Crest, France,
Me voici de retour (pour une 8ème année consécutive) à Crest : autant dire que je connais le coin, l’orga et la logistique ce qui est un plus appréciable. Je pose directe la voiture sur la place la plus proche du parking pour limiter les efforts post course et me dirige vers l’espace Soubeyran, centre névralgique du WE qui verra défiler les inscrits à tout de même 9 courses différentes. Autant dire qu’il y en a pour tout les profils : les enfants, la course féminine, la Dungeon Race (une nouveauté sous forme de vertical race de 5’ pour atteindre le plus haut dongeon d’Europe), les semi et maratrail assez dynamique, le trail du boût du Drôme 38km aux allures de skyrunning sur la 1ère moitié bien sauvage, le trail des maquisards qui propose 67km de toute beauté et les Aventuriers du boût du Drôme qui cumule tout et même plus J
A peine arrivé, voilà Dany (chief benevol) qui m’accueille les bras ouverts à grands cris de « voilà Thomas » avec moults sourires : c’est clair ici, c’est en famille et chacun prend soin de nous. Vite je récupère les clés de ma chambre dans le dortoir du centre scolaire voisin (10€ par nuit pour dormir à 250m c’est grand luxe ; il y a même possibilité de dormir pour 0€ à 20m dans un gymnase). Je m’installe rapidos mais n’ai pas le temps d’aller voir la Dungeon race étant parti un peu tard du boulot…tant pis c’est préparation des sacs et direction la pasta.
Côté météo, après des jours d’orages violents, la journée du samedi devrait se tenir avec un peu de chaleur et des orages dans l’après midi/soirée….par contre, les recos/traceurs annoncent un terrain très gras et après échange avec l’éternel Michel, il me dis que c’est en effet glissant et que le pas des aventuriers est annulé car considéré trop dangereux (c’est une montée directe à 60% tracée entre les buis) et remplacé par le pas de la croix ce qui rajoute un peu de distance… bref on verra bien
Ce nouveau format (127km annoncés avec 7400m D+ annoncé) est d’une autre trempe que l’ancien qui était déjà costaud : la seconde partie du parcours est sauvage, avec peu de ravitos (minimum 3h entre chaque à mon niveau), un niveau d’engagement physique et mental sollicité qui ne pardonne pas les approximations dans la prépa et la forme : c’est du pur et dur. Peut-être trop dur selon certain mais, sur base de l’expérience de 2016, Jack26 et toute l’équipe de l’organisation ont prévu des dérivatifs/portes horaires pour ceux qui ne pourraient s’engager sur toute la boucle. Pour ma part, ce sera une découverte pour la fin après la déconvenue de 2016 puisque ma course avec l’ami JCDuss s’était brutalement interrompue sur une stupide entorse au 12ème km…..
19h30 pile pour la pasta, c’est un peu tôt mais il faut préciser que le départ est à 00h30 cette nuit (3h plus tôt car les barrières horaires de 2016 sur ce nouveau format avait fait beaucoup de dégâts….et de polémique, j’y reviendrai). Conséquence peut être, il n’y a pas grand monde à la pasta et moins de connaissance. Ça m’évite de trop trainer et à 21h00 je suis couché…
Samedi 13 mai minuit réveil : Crest
Après 2h de sommeil, à 30mn du départ : pas le temps de tergiverser : 2mn pour se réveiller, prêt en 5mn, petit encas en 5mn, 3mn pour atteindre l’espace Soubeyran et déjà retrouver quelques têtes connues : Maria, Fred qui repart pour viser une nouvelle victoire, jack qui fait un rapide briefing et direction le pont Mistral. Avec 100 participants au départ, l’ambiance est intime et la mise en place facile ; avec le Grand Samontetro, on décide de faire route commune…
Samedi 13 mai 00h30: Crest
Départ : les premiers (Luca & Frédéric en tête) partent à fond, et nous plus piano même si l’on est un peu devant… On traverse Crest illuminé de fumigènes, quelques encouragements, on monte vers le Donjon pour sortir par le haut du village et enfiler la crête des Roches. La crête, c’est un single parfois technique sur des rochers, par moment sinueux et roulant où un petit train se met en place : on enclenche la 1ère et surtout la discussion avec Patrick pour échanger les nouvelles de l’année.
2km plus loin, une brève descente et un virage à gauche nous ramènent sur une piste et une route de terre assez plate qui va nous emmener jusqu’à Vounaveys-la-Rochette au PK6 : les premiers ont déjà quelques centaines de mètres d’avances, 2-3 concurrents nous double mais nous sommes déjà seuls après 15mn de course : amateurs de la foule, passez votre chemin, ici l’histoire se raconte avec soi-même. Au village, un petit sourire à la caméra de Jack et nous embrayons directement dans les sentiers : 2-3 petites bosses, un petit ruisseau et déjà le terrain glissant même avec des appuis fuyants dans les montées qui commencent un lent travail de sape des muscles…A l’occasion des passages découverts, on aperçoit déjà au loin (devant ou derrière) des frontales ici ou là.
Cette première partie est piégeuse car assez facile et très courable : c’est l’endroit idéal pour partir un peu vite ce que l’on essaye de ne pas faire. Au passage, je passe le point où je m’étais blessé l’année dernière et j’ai une pensée pour Alex : bon c’est déjà mieux qu’en 2016 : reste 115km à faire tout de même :)
Samedi 13 mai 02h23: La Baume Cornillane
1h52 pour venir ici : 23 & 24ème avec Patrick : tout va bien : ravito rapide et hop on met la barre à droite direction la Raye puisque un bon 600D+ nous attend en env 2km d’ici peu. Le début est tranquille et nous conduit sur les ruines de la Baume, une partie un peu vallonnée puis nous attaquons les contreforts de la Raye puis la pente s’accentue peu à peu. Chemin un peu caillouteux, quelques feuilles, pas mal d’humidité qui coule…une bifurcation et on innove donc avec le pas de la Croix : c’est bien moins raide que le pas des Aventuriers mais franchement glissant. Avec des appuis fuyants, il n’est pas très aisé de passer en mode « économie » mais avec la forme du début de course l’altimètre progresse assez vite au milieu des buis (bien attaqués par la pyrale, tout du moins jusque vers l’altitude 800) pour atteindre la ligne de crête.
Un salut à un bénévole, un virage à droite et nous enfilons la crête car il fait bien frais et que je suis parti léger en habillement. Quelques encablures sur la crête : à gauche le début du Vercors, à droite la vallée du Rhône alors que l’on flirt avec les 1000m d’altitude qui ne seront atteints que dans une grosse dizaine d’heures. On bascule côté Vercors donc à gauche dans une trace descendante, sinuante et toute nouvelle tracée à la machette : attention aux racines et aux virages brusques ; serrer les épaules pour slalomer ; ludique et plaisant donc. En fait, c’est le début d’une dizaine de km assez « faciles » : quelques enjambées sur une piste forestière, un petit 150mD+/150mD- pour passer par les rochers de St Sulpice et on atteint une route à Sagnol qu’il faut remonter sans forcer en faux plat sur un km à 7% pour atteindre le ravito.
Samedi 13 mai 04h03: Sagnol
Notre duo s’est transformé en trio (19ème, 20ème & 21ème) depuis qu’un dénommé Stéphane s’est joint à notre discussion depuis le sommet de la Raye : il a compris que l’on connaissait le parcours alors qu’il est néophyte sur celui-ci et même si il a parfois du mal à en glisser une, on chemine ensemble. 4h du mat, pas encore l’aube, c’est le moment où on se refroidit vite : je profite d’une soupe pendant que Patrick préfère avancer tranquillement ; soupe trop chaude, il prend de l’avance le coquin mais je le rattrape tranquillement en 5mn sur la piste forestière qui progresse en sous-bois.
S’en suit quelques km assez roulant et sans difficultés : on essaye de résister à la tentation de courir trop vite (« l’ultra, c’est aller plus loin dans l’opposition à vouloir aller plus vite » dis l’adage). Il fait encore nuit quand nous atteignons rapidement Plan de Baix.
Samedi 13 mai 05h34: Plan de Baix
20ème, 21ème & 23ème pour ma part (mystère des pointages, je suis dernier de notre petit paquet avec 2mn de retard sur les deux autres : bizarre bizarre)… même topo qu’a Sagnol, fatigue + fin de nuit + pause dans le mouvement = j’ai froid et j’en profite pour passer un mini coupe-vent. Ni une ni deux, on repart pour grimper au sommet de la Croix du Veillan dominant le village, vu que l’on grimpe 200mD+ en quelques hectomètres, le coupe-vent est vite replié. La trace fait quelques zigzags et nous voici aux sommets avec les premières lueurs du jour : le temps d’un coup d’œil et nous entamons la descente un peu technique qui traverse un tunnel rocheux pour revenir à Plan de Baix assez rapidement.
C’est l’heure d’éteindre les frontales et de faire une première photo alors que mes camarades de jeux s’éloignent, je loupe une balise en voulant ranger le matos et perd 1mn à me rendre compte, réfléchir et revenir sur la trace…vraiment bête. Ceci dis, la suite, c’est plusieurs km de descente facile pour rejoindre Beaufort sur Gervanne : j’accélère un peu et les rejoins progressivement puis les double en conservant mon rythme jusqu’en bas. Il fait désormais jour quand nous grimpons sous les vieux murs de Beaufort que nous traversons tranquillement. Les km passent sans effort sur ces parties faciles, une petite plongée sur le village de Vaugelas et une remontée progressive plus loin, nous atteignons le ravito de Montclar sur Gervanne.
Samedi 13 mai 07h28: Montclar sur Gervanne
22ème, 23ème & 24ème en 18 secondes (le pointage était bon) : Montclar ; c’est 18km pour aller à Saillans, la première grosse difficulté qui se profile à l’horizon donc tout simplement l’heure de bien se ravitailler. 7h de course et le tiers facile de fait, la route est encore très longue…Elle commence par une remise en route facile puis une descente dans un vallon ou court un ruisseau que nous arrivons à enjamber difficilement sans trop se mouiller les pieds. Nous attaquons une bosse pas trop raide : 300mD+ en 2,2km avec quelques à-coups, on a vu plus dur ! Pas trop dur normalement mais le terrain étant très gras ; c’est laborieux, c’est des baskets qui changent de couleurs, c’est les pieds qui glissent en arrière au moment de prendre appui, c’est de l’énergie dépensée en surplus juste quand il faudrait bien gérer. Tellement glissant que le grand décide de sortir ses bâtons. On le distance un peu et arrivé au point haut, nous faisons une mini pause de récup avec Stéphane pour l’attendre. Nous atteignons juste ensuite le col de Pourcheton où je prends le temps de faire un cliché panoramique puisque le panorama est sublime dans une belle lumière chaude du matin : en plans successifs, on peut voir les difficultés à suivre jusqu’au soir : sublime.
(de gauche à droite au second plan : La montée des Essarts derrière les arbres ; au milieu les Rôchers de Cresta ; à droite le synclinal des 3 becs))
S’en suit une descente que je connais bien, le passage d’un petit col et une plongée pour atteindre un ruisseau qui marquera le début de la montée des Essarts : Le ruisseau de Chaudenage, un nom que j’ai recherché sur une carte que je n’aurais jamais cherché en temps normal. Mais le temps/météo n’était pas normal ces jours précédents et le niveau d’eau est très élevé ; c’est donc de l’eau jusqu’aux chevilles que nous le traversons et les pieds sont trempés : bof …
Samedi 13 mai 09h03: Pointage des Essarts
22ème, 23ème & 24ème en 4 secondes (le pointage était top) : Les Essarts, c’est 400mD+ en trace quasi directe et tracée là aussi directement dans le maquis : un seul moment de répit au quart de la montée, des passages assez proches des falaises, des grosses marches, des racines, des arbustes pour s’accrocher, c’est LA 1ère gros difficulté : Patrick ne sent pas au mieux et nous rend de suite quelques encablures, Stéphane est un peu décroché, moi je pense monter trop vite mais dur de s’économiser au plus fort de la pente. Heureusement la fin est moins dure et je puis ralentir un peu pour me faire rejoindre par Stéphane juste le temps d’une photo. Pas de Patrick derrière, nous repartons de suite dans la descente. C’est une descente assez facile à la pente très régulière et au terrain plaisant (un peu moins aujourd’hui car bien ravinée) où l’on peut dérouler aisément avant un break bien mérité à Saillans où nous attend gros ravito, point de contrôle médical et départ du 38km. Meilleur descendeur que Stéphane, je prends les devants et arrive 1mn devant lui : j’en profite pour piocher dans mon sac de rechange sac à dos et victuailles et y laisser la ceinture porte bidons que j’avais jusque-là.
Samedi 13 mai 10h06 : Saillans
5mn de pause et pas de Patrick : nous décidons de repartir en slalomant dans la foule des concurrents du 38km qui s’échauffe et la foule des badauds & accompagnateurs : comme une envie de se retrouver au calme en fait… Sortie du village, traversée de la Drôme, un chouïa de route et nous voici au pied des rochers de Cresta. 2ème difficulté sérieuse : pente raide mais terrain pas trop gras…mais les pieds sont toujours trempés. Il commence à faire chaud et j’accuse un peu le coup donc je me mets sagement dans le sillage de Stéphane. La montée est assez longue et tout d’un coup les premiers concurrents du 38km partis à 10h30 nous rattrapent : les 2 premiers déconcertant de facilité, les premiers écarts sont déjà fait avec les suivants qui nous doublent les uns après les autres (mais les autres moins vite que les uns). C’est l’occasion d’échanger quelques encouragements même si il faut parfois se décaler sur le côté sur cette monotrace : dans notre progression un peu perturbée, je distance un peu Stéphane sans m’en apercevoir et me retrouve dans la partie sommitale dans un petit groupe qui m’entraine dans sa dynamique. Le temps de m’en rendre compte, j’arrive à une bifurcation/contrôle au col d’Espenel où ils plongent radicalement dans une descente que je ne leur envie pas vu son état glissant en temps normal….
Col d’Espenel : l’orga, à l’écoute des imperfections de l’année passée, a d’ailleurs organisé une « porte horaire » à ce point : tous ceux arrivant après une certaine heure seront aiguillés sur le superbe parcours du 38km pour enchainer Pas de la Motte, Pas des Auberts et le rocher de la Laveuse. Vraiment une bonne solution pour permettre à tous de passer une belle journée en montagne (cela fait les 105km de l’ancien parcours tout de même) sans être mis en danger par la nuit ; possibilité est offerte aussi à ceux qui ne sentent pas dans un bon jour d’opter pour cette dérivation. Pas de Stéphane en vue, je continue en trottinant sur ce chemin monotrace en balcon très agréable tout surpris de retrouver du calme. Après un bref passage sur une piste en plein soleil sur laquelle je pense à bien m’hydrater, on quitte celle-ci pour remonter une petite sente en zigzag qui me permet d’entrapercevoir Stéphane au zig du dessous. Je monte donc tranquillement pour lui permettre de faire la jonction sans forcer.
Nous sommes sur la Serre de L’Aup où un replat d’1,5km permet d’atteindre un petit col, une brêve montée et de nouveau une portion assez aisée sur les contreforts boisés de la Montagne de Faraud. L’air de rien, c’est une section de presque 8km assez courable entrecoupé de 2 petites bosses qu’offre ce nouveau parcours : tout un chacun trottinerait facilement à l’entrainement mais en fait, c’est un vrai piège à entamer l’organisme d’autant plus avec la chaleur, la moiteur des pieds qui commencent péniblement à sécher et le besoin d’hydratation. Pour le coup, pas désagréable d’être 2 pour cheminer de concert ; 2 pour partager un peu d’eau car Stéphane est à sec depuis un petit moment puis 3 avec la compagnie d’un chien qui s’accroche à nos foulées tout du long. Après la montée, la traversée haute, vient logiquement la descente une fois atteint le col de Farraud ; d’abord plaisante avec une petite source sur la trace qui permet de se rafraichir jusqu’à atteindre une chapelle, puis bien plus abrupte et piégeuse pour plonger de 300mD- en longeant la réserve naturelle de la grotte des Sadous et arriver en surplomb d’une rivière (La Coulance).
La Coulance qui comme son nom l’indique coule, et même plutôt bien : à tel point que quand il faut la traverser quelques centaines de mètres plus loin, c’est bien évidemment pour se retremper chaussures, pieds, chevilles et mollets : bof bof.
De là, c’est une portion en remontée fond de vallon qui s’annonce à nous : une portion de piste forestière, le plein soleil, plus de 4h depuis Saillans, une certaine lassitude, des pensées qui me font dire qu’à peine les 2/3 sont faits, une boucle de plusieurs heures à suivre pour passer à 300m du ravito de la ferme des Gauze qui s’annonce : tous les ingrédients pour ne pas avancer sont réunis et c’est le moment où il faut commencer à puiser dans les ressources mentales…. Le chien continue à nous suivre et s’amuse (lui) de la traversée d’un nouveau ruisseau alors que les pieds commencent à sérieusement macérer : bof bof bof. Juste après une petite remontée, on traverse une barrière à animaux et on doit laisser le chien derrière nous avant de le signaler quelques mn plus tard au ravito
Samedi 13 mai 13h30 env : La ferme de Gauze
Bénévoles et accueil au top mais coureurs pas au top : c’est l’image que je garde de la ferme de Gauze : un d’entre nous est sous couverture de survie avec les secours, d’autres attablés et avachis, tout le monde souffre de la chaleur et, pour ma part, je sens que ce ravito peut être un « cimetière » de toutes ambitions si on s’y attarde un peu trop. Assez vite, je convaincs Stéphane de repartir, quitte à prendre des victuailles pour la route.
On repart donc tranquillement et, mentalement, je suis curieux de monter les 600m qui suivent pour atteindre le Grand Delmas d’où je sais que la vue sera superbe. Anciennement, on disait que la course débutait à Saillans, je crois que l’on peut dire que dorénavant c’est à la ferme de Gauze que ça commence vraiment. D’abord assez progressive jusqu’à la côte 1000, la pente s’élève soudainement, raide et assez brutal : on grimpe toutefois d’un rythme régulier et j’attrape des (vrais) bâtons pour m’aider. Même si l’on se fait rattraper, on ne fait pas de pause en arrivant sur le dernier (et premier) replat avant d’atteindre la ligne de crête de la Montagne de Couspeau.
Whaouu effect , la vue à 360° est superbe, la température clémente (on est à 1500m) et le ciel quasi limpide.. Par contre, il faut enfiler les herbages puisque la trace suit la ligne faîtière de la montagne : ce sont donc 2km pas très roulant, un peu descendant, un peu montant qui nous semble au bout du compte un peu long. Nous voici au sommet du Grand Delmas, le temps d’une photo avec vue imprenable sur les 3 becs et on replonge tout de suite dans un pierrier de 200m avant de retrouver un sentier raide en forêt puis une piste forestière qui longent d’ouest en est quasi parallèlement à la ligne de crête que l’on vient de faire d’est en ouest….2, 3 remontées en guise de « coups de cul » qui cassent jambes et rythmes, 1 pointage surprise et nous continuons à descendre avant de quitter la piste par le nord pour dévaler un single qui passe juste au-dessus de la ferme de Gauze. Arrivés sur une piste, on fait l’erreur de suivre un concurrent vers la gauche avant de déboucher 500m plus loin sur un ruisseau. Le temps de se rafraîchir, on lève la tête pour….ne pas apercevoir de balisage. Ni une ni deux, je dis à Stéphane de rebrousser chemin (on n’est pas à un km prêt !) pour rattraper rapidement le balisage, faire une épingle à cheveux et retomber sur le ruisseau quelques dizaines de mètres plus bas. Ce coup-ci le balisage est bien de l’autre côté et il faut donc remettre les pieds dans l’eau : bof bof bof bof…
Quand un ruisseau s’appelle le ruisseau de la Combe, pas de surprise, ça remonte raide juste derrière : 100m, ce n’est pas long ; mais 100m très raide en plein milieu d’une longue descente, cela fait mal aux cuisses, au moral, aux pieds trempée/plissés/échauffés tout à la fois. 100m pour atteindre le col de Bauras et replonger juste après et atteindre un peu plus tard de nouveau la Coulance. La Coulance coule toujours et de nouveau il faut traverser bof bof bof bof bof…
S’en suit un très beau sentier en balcon pas très long pas très raide (200m sur 2km) pour atteindre le ravito de la Chaudière : le coin est superbe mais je n’ai que très modérément apprécié le décor pris entre l’envie d’arriver au ravito, la volonté d’avancer, le manque d’entrain (et un peu de force) : je m’accroche aux baskets de Stéphane puis finalement me laisse tomber sur un banc de pierre pour me faire servir par les bénévoles.
Samedi 13 mai 18h07: La Chaudière
18ème et 19ème, nous avons 2h20 d’avance sur les Barrières Horaires, ce n’est pas si large après 18h d’effort. Cela laisse un peu de marge et nous prenons bien le temps de nous ravitailler : salé, sucré, boisson, coca, cacahouètes, compotes, fruits, café : on goûte un peu à tout et on repart sous quelques applaudissements qui font chaud au cœur. Un peu d’appréhension car on va grimper (au sens propre comme au sens figuré) sur les 3 becs via le raidissime passage de Picourière. Je croise Matthieu, kikou et toujours bénévole depuis des années (au moins depuis 8 ans que je viens) qui descend dans un 4x4 ; juste le temps d’un salut et nous continuons notre approche avec Stéphane. On traverser la route et bim bam boum la pente s’élève et devient raide (parfois même très raide) dans la foret (400mD+ en 1km). Lacet après lacet, progressivement et sans forcer, sans pause et sans énervement, on monte jusqu’à sortir de l’abri des arbres juste en dessous de la falaise ou se cache une trace verticale au milieu des rochers. Une petite friandise, une gorgée d’eau est c’est parti pour cette partie terminale où il ne vaut mieux pas regarder en arrière. Stéphane range ses bâtons, chacun se sert de ses mains pour grimper bloc après bloc : c’est très aérien et on comprend mieux pourquoi l’orga ne veut faire monter personne par ici par mauvais temps ou la nuit venue (explication du pourquoi en 2016 l’orga avait arrêté un nombre certain de participants à la Chaudière et de la mise en place de la porte horaire après Cresta cette année).
(en cherchant bien, on voit un concurrent en rouge dans le passage)
Finalement, ce n‘est pas si long et on débouche sur le synclinal ; encore un effort et nous voici au sommet à 1545 avec une vue sublime magnifiée par les lumières rasantes et chaudes de la fin d’après-midi. Toute les grosses difficultés sont désormais derrière nous…toute sauf la descente de la grande combe que nous rejoignons assez rapidement après un bref passage à la laveuse et une portion en route forestière où il faut se remettre à courir avec un certain rythme. La grande combe ; 5km de descentes techniques et humides où racines et rochers cachent presque tous un piège, où la fatigue s’installe, où les parois minérales se rapprochant laisse une impression d’oppression, où Stéphane (légèrement moins à l’aise) peine un peu et me laisse faire le rythme, où la lumière baisse inexorablement et nous force à ressortir les frontales, où finalement quelques gouttes de pluie nous rafraichissent….
Enfin, la gorge s’élargit peu à peu, un peu de verdure, et nous arrivons sur la piste qui mène en 10/15mn au ravito de l’auberge des Dauphins : Stéphane a les jambes et je suis un peu obligé de le freiner (non pas pour lui dire d’en garder pour la fin, mais juste parce que j’ai la conscience aigüe que le rythme est un tout petit peu trop élevé au niveau du cardio).
Samedi 13 mai 21h05 env: auberge les dauphins
La lumière tombe franchement, la fatigue un peu, la pluie de plus en plus : on prend le temps de s’assoir, de se couvrir avant de repartir dans la nuit et sous les prémices de l’orage. Après l’auberge, il y a une petite montée progressive que nous attaquons d’un bon pied alors que le tonnerre gronde et les éclairs strie le ciel : en comptant régulièrement le temps entre éclair et tonnerre, j’évalue que l’orage est derrière nous à environ 2/3km vraisemblablement en plein sur les 3 becs. J’imagine ceux qui sont derrière nous dans la Grande Combe, ce ne doit pas être joyeux : en fait, jack me dira à l’arrivée qu’ils ont neutralisé la course pour descendre la fin du peloton en 4x4 jusqu’à l’auberge des Dauphins : belle adaptation de l’organisation face aux éléments même si les valeureux ont dû ressentir tout à la fois soulagement et frustration de cette décision.
De notre côté, on arrive vite à avaler cette petite montée qui nous permet de rejoindre une piste forestière descendante sur quelques kilomètres jusqu’au pied du pas du Faucon : on tient un rythme à 9,5km/h de bon aloi qui nous réchauffe vite fait bien fait. On rattrape quelques concurrents au pied de cette dernière difficulté, un petit gel pour tenir la cadence et c’est parti fissa fissa car je sais que la montée n’est pas trop longue. Stéphane me décroche rapidement mais je le rattrape à quelques encablures du sommet alors qu’il me dit « je croyais qu’elle n’était pas trop longue ! ». De fait, le col surgit d’un coup au détour d’un virage et le parcours plonge radicalement dans une sente très glissante ou les appuis délicats. La pluie a cessé mais à chaque pas, on s’accroche aux buis ce qui enclenche un arrosage en règle des gouttes d’eau accrochées aux branches….
S’en suit quelques kilomètres sur des sentiers/pistes détrempés : pas la peine de dire que les pieds n’ont pas eu le temps de sécher depuis la fin de matinée : ça commence à macérer et à s’échauffer : y aurait-il quelques ampoules là-dessous : on verra bien à l’arrivée… On se retrouve assez vite en approche du petit hameau de Louvigne quand il faut quitter la petite route avant de descendre direct vers le centre équestre, lieu du dernier ravito. La descente est juste une patinoire : une pente de terre glaise détrempée, le moindre appui est totalement fuyant, Stéphane se vautre 3 fois, je fais un soleil sans m’en rendre compte, les pieds, les mollets, les mains, les bras, les fesses : tout est couvert de boue et l’on descend même parfois sur les fesses sur un pied accroupi comme sur une pente enneigée : bref c’est laborieux et les muscles n’apprécient que très modérément l’exercice…
Samedi 13 mai 23h49 : centre équestre
Petit nettoyage des mains, petit ravito, trop froid en attendant que la soupe brulante refroidisse, ce n’est pas le top de la forme mais on sait tous les 3 qu’il ne reste « que » du facile. Connaissant le chemin, j’embraye notre petite troupe dans ces longs faux plats herbeux, boueux, terreux…Un n-ième gué à traverser pour se tremper une dernière fois les pieds (et en profiter pour se nettoyer un peu) et voilà la dernière portion de montée. D’abord dans un champ d’herbes hautes trempées, puis sur une petite route, et enfin dans une piste qui finit par s’aplanir alors que l’on a décroché notre compagnon…
Allez hop dernière descente dans la boue, cela sent l’écurie mais Stéphane égare une batterie de sa frontale dans 10cm de boue grr :(( Il veut absolument la récupérer et je l’attends puis m’impatiente à l’attendre car le froid de la fatigue me saisit….mais cela fait presque 20h que nous sommes ensemble (d’abord avec Patrick dont nous n’avons pas de nouvelles puis tous les deux) et je ne nous voyais pas finir l’un sans l’autre. Finalement au bout de 5mn le revoilà alors même qu’un autre duo nous a rattrapés. Le temps de remettre en route, de mettre le turbo et de dévaler la route qui file sur Crest, ce sera donc à 4 que nous franchissons l’arche d’arrivé…
Dimanche 14 mai 00h37 : Crest (125+2 km ; 7000 D+ / 18-19-20-21ème position en 24h07mn)
Ne reste plus qu’à discuter avec Jack qui me félicite pour ce « finisher puissance 6» redescendre du podium, savourer une bierre de Saou et refaire un peu la course.
Direction rapide la piaule au centre scolaire avant de venir savourer la célèbre Chorba. Une douche bien chaude, un check des pieds bien mal en points, je m’assois sur le lit pour me rhabiller….et je me réveille 7h plus tard….
A mon réveil, un passage chez les podos m’enlève toute illusion de repartir : 7 ampoules à gauche, 2 à droites….j’en profite pour rester un moment avec kiné et ostéo pour repartir (presque) tout neuf vers de nouvelles aventures …
Mini-bilan
(à gauche chaussure droite après la course et avant le lavage / à droite chaussure gauche après la course et après le lavage)
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18 commentaires
Commentaire de franck de Brignais posté le 28-05-2017 à 19:03:57
Et bien, quelle course ! Et ce mode challenge, quel piège. Comment repartir après une telle journée ?? Bravo Tom, une belle gestion, de belles images et un joli classement !
Commentaire de TomTrailRunner posté le 28-05-2017 à 21:54:17
En fait, les Aventuriers se font tellement avec un peu de retenue que le maratrail n'est pas si dur, surtout que les kinésithérapeutes sont la le matin pour les challengers. ..le plus dur est le 1er pas...mais quand les pieds sont comme des guirlandes de Noël. ..;)
Tous les classés ont un joli classement ici.
Commentaire de Mamanpat posté le 29-05-2017 à 06:27:43
T'es un grand malade ! Mais tu le savais déjà ! C'es sûr que de tels paysages, ça se mérite mais ce n'est pas donner à tout le monde d'en profiter ! Alors merci de partager ! Et surtout bravo !!!
Pfff ça m'a épuisée...
Commentaire de TomTrailRunner posté le 29-05-2017 à 21:01:05
Je te propose pas de "faire le tour avec toi..." ;)
Commentaire de PhilippeG-641 posté le 29-05-2017 à 09:43:33
Très bien ton récit Tom, on situe bien ton avancée lorsque l'on connait un peu le parcours. C'est marrant car tu notes plein de détails que je n'avais pas relevé mais qui maintenant réapparaissent ;-)
Un récit bien complet et qui j'espère donnera envie à ceux qui ne connaissent.
Bravo pour ta persévérance qui paye cette fois-ci !
Je vois qu'il y a eu encore des changements cette année, c'est bon tout ça :-)
Bonne récupération Tom et à une prochaine...
@+
Philippe
Commentaire de TomTrailRunner posté le 29-05-2017 à 21:01:57
C'est l'avantage d'aller lentement Philippe, on voit mieux les détails...Prends en de la graine
Commentaire de PhilippeG-641 posté le 30-05-2017 à 11:41:22
Ah, ah, c'est noté pour le GRP ;-) @+
Commentaire de Davitw posté le 29-05-2017 à 09:54:54
il est superbe ton CR ! et puis ça donne envie... 2018 je t'accompagne (enfin au moins au début !)
Commentaire de TomTrailRunner posté le 29-05-2017 à 21:03:31
Check : suffit juste de pas se cramer au début, et avec un peu de chance si tu n'es pas cramé par le soleil c'est tout bon.
Quoi que la rumeur sur un 100miles est ressortie ;)
Commentaire de Trixou posté le 29-05-2017 à 16:23:12
Bravo Tom, quelle course !
Commentaire de Jean-Phi posté le 30-05-2017 à 08:31:10
Un Tom des grands jours, il fallait bien ça pour vaincre cette nouvelle aventure des héros du bout de Drôme ! Bravo à toi !!!! On prend le même et on recommence sur un autre massif ce WE ! ;-)
Commentaire de TomTrailRunner posté le 30-05-2017 à 17:38:30
24h07 : tu as raison, c'est un grand jour :)
Commentaire de philkikou posté le 31-05-2017 à 07:11:41
Pause à Saillans pour aller bosser.. à suivre ce soir.. quelle aventure bien géré au début
.. Et du remets çà en Lozère ??? ... Ca va la récup?...
Commentaire de TomTrailRunner posté le 31-05-2017 à 09:05:31
Récup correcte : je teste un enchainement en perspective de la looongue course de l'été : je te dirai après si ça va :)
Commentaire de philkikou posté le 05-06-2017 à 21:40:38
Ca y est, "finisseur"..de ton récit : Pfffiou quelle aventure et gestion il faut avoir pour ce genre d'épreuves !!!! Gestion physique, mental, matériel, ... pour ne pas avoir de grain de sable qui coince ... Bravo respect !!!!
Commentaire de TomTrailRunner posté le 10-06-2017 à 15:47:54
il y a TOUJOURS un grain de sable : le jeu est de le géré :)
Commentaire de jack26 posté le 07-06-2017 à 11:02:59
Un grand plaisir à te lire.
Félicitations !
Un Aventurier avec un grand A !
Tu as vaincu mes sentiers ! Respect.
Rendez-vous en 2018.
Jack
Commentaire de TomTrailRunner posté le 10-06-2017 à 15:49:02
Merci Jack :)
J'ai gagné le 1er set vs tes sentiers : 6-2 pour moi :)
très probable que je revienne pour un 9ème jeu en 2018 en effet
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