Récit de la course : Grand Raid du Golfe du Morbihan - 177 km 2013, par leptitmichel

L'auteur : leptitmichel

La course : Grand Raid du Golfe du Morbihan - 177 km

Date : 28/6/2013

Lieu : Vannes (Morbihan)

Affichage : 4993 vues

Distance : 177km

Objectif : Objectif majeur

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[CR] Ultramarin - Merci Bernard !



Boucle en une seule étape, à allure libre, comportant une traversée en bateau de 10mn, à mi-parcours, entre Port-Navalo et Locmariaquer et se réalisant de jour et de nuit, tout autour du Golfe du Morbihan, sur des terrains variés.

Le temps maximal de l’épreuve est fixé à 42 heures (toutes pauses et traversée en bateau comprises), sous réserve d’être passé aux divers postes de pointage avant les heures de fermeture

Le parcours d'un dénivelé d'environ 1000m+, emprunte 80% environ des chemins du Tour du Golfe du Morbihan.

L'épreuve comporte neuf ravitaillements dont trois avec plats chauds et points de repos. En dehors de ces points, on est en mode autonome sur le plan alimentaire.

Ce grand raid est une course que j'ai en tête depuis plusieurs années, mais jusqu'ici je n'avais jamais réussi à l'intégrer dans mes programmes. Cette année j'en ai fait mon objectif du 1er semestre, donc impossible de ne pas être présent.

 

Le CR de la Course


Merci Bernard !

Pourquoi ce titre ? Et bien en fait, quelques jours avant la course, alors que je disais que puisque je viens en Bretagne, il fallait que je pense à prendre un kWay, un parapluie, un ciré, des bottes..., mon pote Bernard m'a envoyé cette sympathique photo

Mais on en reparlera en fin de CR...

Cela fait plusieurs années que je lorgne sur le grand raid du Morbihan. Simplement le programme de mes dernières saisons ne m'avait pas permis d'y participer jusqu'ici.

Cette année j'ai donc décidé d'en faire mon objectif sur le 1er semestre 2013, comme ça, pas d'excuses pour le louper.

Comme pour ma saison 2011, je décide de planifier quelques courses intermédiaires, mais de ne surtout pas les faire en tant qu'objectif, et j'intègre un volume d'entrainement pas vraiment élevé, mais régulier ce qui, au passage, me fait participer depuis le début de l'année au challenge des "365h de sport" sur Kikourou.

Le début d'année se passe plutôt bien. Raid 28 en janvier, l'Orient'Oise et le Gruchet Trail Orientation en mars ainsi que l'Ecotrail 80 que je vais faire légèrement en dedans, pile dans le temps prévu (10h59 pour 11h00 en objectif)

A partir de là ça va être un peu plus compliqué. Je maintiens l'entrainement en avril (24 séances en 30 jours) et en mai mon planning explose (14 séances seulement dont 4 longues randos urbaines).

Le premier WE de juin est l'occasion de faire une sortie de 110km sur les 24h des Yvelines en mode sortie longue, mais depuis, c'est le néant. 4 semaines avec juste une course par semaine (une CO)... C'est peu...

C'est vrai que mon objectif pour l'Ultramarin est de finir, et que ce dernier mois light, même si c'est loin d'être optimum, n'aura je l'espère qu'un impact mesuré sur le résultat visé.

Il faut dire que le parcours est assez particulier car il essaye de suivre au maximum les sentiers côtiers du tour du golf (le GR en fait) ce qui fait qu'en le regardant sur une carte cela fait beaucoup de virages...


Cliquez sur la vignette pour ouvrir la trace du parcours

Du coup, à la fois pour rester concentré sur le sujet et pour structurer ma course, j'ai ressenti le besoin d'avoir une feuille de route, histoire de savoir comment je me situe par rapport à ma progression

Je ne suis pas reparti de la feuille de route proposée sur le site de la course car elle calcule les temps avec une vitesse moyenne linéaire (la même sur toute la course) ce qui n'est absolument pas mon cas en réel. J'ai donc reconstruit une grille sur la base de l'itinéraire en identifiant les arrivées et les départs de chaque ravito, ainsi que des points particuliers (pointages, point d'eau,...)

Dès mon premier essai, sur la base des vitesses de progression que j'estime viable en réel, je suis arrivé à un temps final de 34h15 pour un objectif visé de 35heures. J'ai donc décidé de ne pas retoucher mes données. Ca me laisse une petite marge de sécurité.

Quelques hypothèses quand même
- Les arrêts aux ravitos ne sont jamais très longs. Normal je n'aime pas m'arrêter.
=>10mn sur les 2 premiers, 15 mn ensuite
=>5mn sur les points d'eau (le temps de recharger la poche)
=>30mn à Locmariaquer (le temps de me changer si nécessaire)

- J'ai prévu un créneau de 30mn pour la traversée (on verra suivant les éventuels temps d'attente, mais normalement ça devrait être moins.)

- La vitesse moyenne est décroissante sur la première moitié, puis stable sur la seconde moitié

Avec ces données ça me donne une feuille de route que j'estime viable. Maintenant on verra la différence entre le papier et le terrain.


Cliquez sur la vignette pour ouvrir la feuille de route

Il faut savoir aussi que cette feuille de route n'a pas vocation à me faire gérer mon allure (sauf peut-être à ralentir si nécessaire). Je l'utilise plutôt comme un élément de motivation pour des objectifs intermédiaires court terme, puis à postériori pour voir si je suis ou non dans les clous. C'est à dire que lorsque je pars d'un ravito, je sais que j'en ai pour 3h00 jusqu'au suivant. Ca me donne une échelle de temps avec en cible un objectif beaucoup plus atteignable que si je devais viser les 130 km restants...
Ensuite, en général, je ne regarde pas le chrono jusqu'au ravito. J'avance, un point c'est tout. Une fois arrivé au ravito suivant, je note l'heure et je compare avec mon planning théorique. Soit je suis dans les clous et tout est OK, soit je suis en retard et là j'essaye de comprendre pourquoi (coup de mou, ...) mais ça s'arrête là.

Côté matériel, j'ai aussi préparé avec beaucoup d'attention mon équipement. Essentiellement des choses que j'ai déjà utilisées maintes et maintes fois. Reste une grande inconnue, la météo qui va avoir un impact sur le matériel que je vais finalement utiliser. De ce point de vue là, les prévisions annoncent globalement du beau temps, couvert samedi, mais avec un risque de pluie pratiquement inexistant et des températures supérieures à 20° en journée et ne descendant pas en dessous des 12-13° pendant la nuit. Presque l'idéal en fait !

Départ de la maison jeudi après midi afin d'arriver à Vannes en fin de journée. L'objectif est de passer une bonne nuit tranquille sur place en prévision des 2 nuits blanches qui m'attendent. Une fois posé à l'hôtel, je file dans le centre de Vannes histoire de me restaurer, et là, comment vous dire... pour ceux qui sont habitués à l'ambiance de Chamonix la veille de l'UTMB, disons que ça fait un petit choc...

Il est 19h30, on est pratiquement le premier WE de Juillet, il fait beau et chaud, mais... non seulement le centre ville est entièrement vide, mais en plus pratiquement tout est fermé... On se serait cru à Vesoul un soir de novembre.

Finalement je trouve en face du port une petite place avec deux brasseries dont les terrasses sont ouvertes. C'est loin d'être complet, mais il y a un peu de vie. Beaucoup de tee-shirt finisher de ceci, terminateur de cela, raider club de machin bidule... on se demande pourquoi ?

Il y a d'ailleurs un détail qui m'attire l'oeil pour le choix du resto, c'est le set de table... Impossible d'aller ailleurs !

Bref je me pose et je décide de profiter un peu de ce petit moment de calme, finalement bien agréable, tout en chargeant mes réserves de féculent pour demain...

22h, il fait encore plus de 21°. Si c'est comme ça tout le WE ça devrait nous donner des conditions de course pratiquement optimales.

Retour à l'hôtel, une bonne nuit, puis un solide petit déjeuner, et me voilà en direction du port de Vannes pour aller poser la voiture. L'organisation a la bonne idée d'ouvrir un grand parking ombragé juste à proximité de la zone de départ/arrivée. Je débarque sur place un peu après 9h30 ce qui me permet d'être stationné au plus près. Parfait, la voiture ne bougera plus d'ici avant dimanche.

Direction le retrait des dossards et le village de la course où on retrouve quelques équipementiers ainsi que des organisateurs de courses locales. De mon côté je retrouve Hervé, qui a un objectif élevé cette année après sa 8ème place de l'an dernier.

La matinée va se passer entre la ballade autour du port, les premières rencontres (désolé de ne pas citer tout le monde, mais je suis certain d'en oublier), le retrait du dossard, le pointage du sac avec le carton de contrôle, et là en voyant les arches je me dis que ce sera cool de passer là dessous dimanche matin...

Retour à la voiture pour commencer à préparer le sac de course, celui pour le rechange à Locmariaquer, et la tenue de course définitive. J'avais fait un premier niveau de préparation, mais en prévoyant large côté météo. Maintenant que les prévisions se fiabilisent, je peux enfin affiner le contenu. Le détail est disponible dans la fiche équipement

Vers midi, je retrouve Hervé pour aller rejoindre le resto qu'il a réservé. Comme c'est un peu le local de notre groupe, on le laisse nous guider... Bon l'avantage c'est que du coup on a bien pu visiter le centre ville... On retrouve Insomniac trailer, Mico et son mari ainsi que Berrurier.


Berrurier, Leptitmichel, Hervé, Insomniac Trailer, Mico

Je sais vous allez finir par croire qu'on en fait que manger... mais pourtant non, et puis, ce ne sont pas quelques moules frites (hein Mico) ou une grosse glace chantilly (hein Hervé) qui vont nous empêcher de courir quand même... (Ok j'aurais mieux fait de la fermer moi !)

Retour à la voiture vers 15h (on a un peu trainé au resto) pour une petite sieste bien méritée.

Pendant ce temps là, les 4 autres Bled Runners (nous étions 5 inscrits) viennent chercher leurs dossards

18h00. Debout, mise en tenue, dépôt du sac de rechange, et direction la zone de départ. Là je croise à nouveau pas mal de gens connus dont, Chantal, Tot, Olaf, Ludo et Etienne avec qui j'étais à Feucherolles le mois dernier, Bruno R une ancienne connaissance, Le raton laveur et la loutre qui en sont à leur 6ème participation, et bien sur Guy et Atef, mes potes de Bled Runner...

Petit détail, on discute, on discute mais sans s'en rendre vraiment compte, on se retrouve plutôt dans l'avant du peloton sur la ligne de départ. Du coup, il va falloir être prudent et ne pas se laisser embarquer.


Beaucoup de monde derrière nous

De toute façon, de ce point de vue là, ça devrait démarrer tranquillement car l'organisation nous a prévu un petit bonus. On part bien des arches situées à côté du village de la course, mais en fait on va faire une première boucle en ville d'environ 1,2 km, à allure réduite (avec des meneurs) histoire d'animer le centre, avant de passer sous une autre arche de l'autre côté du port où se trouve le système de chronométrage. En gros on se fait 1,2km gratos hors chrono (mais qu'on aura quand même dans les pattes).

18h55. Tout le monde piaffe sous la ligne de départ...

19h00, les fauves sont lâchés...

C'est parti pour une petite promenade gratuite en ville. On quitte le port et on remonte dans les rues du centre.

On tourne dans les rues piétonnes du centre, puis on fini par redescendre vers le port

Une fois au port, on va enfin pouvoir passer cette foutue arche, la vraie de vraie cette fois. Du coup il a fallu que je décale tous mes temps de repères de 10mn (mais pas mes temps de passage parce que eux étaient basés sur le temps de la puce) , et toutes mes distances de 1,2km...

Une fois passée l'arche, on se fait tout le quai Moitessier devant un public finalement assez nombreux.

On est parti pour une section d'un peu plus de 18km. J'ai prévu de la faire en 2h20, sachant que ce sera ma section la plus rapide, mais comme je suis frais, ça devrait aller.

En fait très vite, la chaleur va se faire sentir. Il est plus de 19h, mais il fait encore chaud, en tous cas beaucoup plus que ce à quoi on pouvait s'attendre.

Je fais 2 erreurs sur cette section. Celle de ne pas être assez attentif à ce petit coup de chaud, et celle partir un peu trop vite.


Hervé, lancé à plein régime dès les premiers kilomètres

Le parcours commence avec des passages plutôt sympa sur les sentiers côtiers, sentiers qu'on va utiliser énormément dans les heures à venir, mais pas que... hélas !

Cette section permet aussi de se faire une idée du type de terrain, même si ce n'est pas ici en fait qu'on aura le plus de "casse pattes" entre escaliers, anti vélo et rochers.

J'arrive au ravitaillement de la Pointe du Bill à Sene complètement déshydraté.


Les chiffres en noir correspondent aux heures prévues, et ceux en bleu aux heures réelles

Sur les 2h20 initialement prévues, je n'ai mis que 2h05 pour couvrir la section, donc vraiment trop rapide. Je refais le plein de la poche à eau, puis je prends un peu de ravito et je bois un grand verre d'eau gazeuse + un autre de coca. Vu mon état je décide de repartir tranquille et d'attendre l'arrivée de la nuit et d'un peu de fraicheur.

Je ne suis finalement resté que 5mn sur les 10 prévues au ravito.

C'est reparti pour une section de près de 20km. Je repars assez doucement pour prendre le temps de récupérer. Ca ne servait à rien de rester au ravito, autant continuer à avancer, même si c'est plus lent. Il va me falloir une grosse heure pour commencer à me sentir mieux, ce qui correspond d'ailleurs à la tombée progressive de la nuit.

La lumière disparait progressivement et arrivé du côté de St Laurent vers 23h00, un point de contrôle nous oblige à mettre frontale et brassard réfléchissant.

Je continue ma route mais je commence à me sentir mieux. La température a un peu baissé et est devenue très agréable.

J'arrive au second ravitaillement au stade de Noyalo à 23h50, avec une petite quarantaine de minutes d'avance sur ma feuille de route.

Là c'est intéressant car j'ai mis un peu moins de temps que prévu, mais tout en récupérant de mon coup de chaud de la première section, et donc en étant presque en sous régime. Par contre je décide de prendre le temps de mieux me ravitailler qu'au premier ravito et de recharger ma poche en maxim cette fois ci, ce qui fait que je vais rester 15mn au ravito au lieu des 10 prévues, mais ce n'est pas important. En fait pour les ravitos je fais comme pour la course. Je note mon heure d'arrivée, je fais ce que j'ai à faire et je pars quand je suis prêt. Ensuite seulement je regarde si j'ai trainé ou non, et là, franchement, pour 5mn !

Bon c'est pas tout mais j'ai encore de la route à faire.

Je repars sur une section toute de nuit cette fois-ci. On quitte le stade et on fait quelques petites boucles avant de rejoindre à nouveau le bord du Golfe. Avec la nuit, plus possible de profiter du paysage, alors que tout à l'heure c'était vraiment superbe. Vivement que le jour se relève.

Pas grand chose de particulier sur cette section. De temps en temps on croise des jeunes qui font la fête et qui nous proposent un verre de vin ou une canette de bière. Etrangement, sur le moment ça ne me tente pas trop. Plus tard, peut-être...

Les sentiers s'enchainent avec des sections roulantes puis des passages avec des cailloux ou des racines. Les stop vélo nous obligent sans cesse à couper l'allure, mais comme ils sont souvent en haut d'escaliers ou sur des traversées de chemins, de toutes façons ce n'est pas la que je vais le plus vite.

Plus j'avance sur la section et plus je commence à avoir faim. J'ai beau manger mon ravito (nougat, pates de fruits...) ca ne me cale pas assez, mais normalement au prochain ravitaillement on a un plat chaud, donc je ferai une bonne pause là en arrivant là bas.

La fin de la section est un peu plus difficile et j'accuse un petit coup de mou. J'ai en plus des douleurs qui apparaissent et pendant un moment je me demande ce que je fous là... J'ai envie de rentrer, pas de continuer... Puis je me reprends, cette course, c'est l'objectif de la saison, alors on peut lever le pied sur une course intermédiaire, mais pas sur un objectif. Du coup J'essaye de continuer d'avancer vu que je ne dois plus être très loin du ravito, et effectivement les lumières de Sarzeau apparaissent. Arrivée au gymnase Samedi matin à 03h15.

Sur cette section j'ai mis exactement le temps prévu. Non pas que j'ai géré mon allure spécifiquement pour ça, juste que ma prévision était la bonne. J'ai pratiquement 3h30 d'avance sur les barrières horaires au bout de 60km, ce qui retire tout stress de ce côté là.

Je rentre dans le gymnase, je vais poser mon sac et là je vais faire la queue pour le ravitaillement. Je retrouve Bruno R, et on se retrouvera régulièrement pendant encore pas mal de temps. Je choisi l'option pates avec fromage râpé, + fromage, + pain, + jambon et deux ou trois autres bricoles. Contrairement à mon habitude, là je décide d'aller me poser et de prendre le temps de manger assis, calmement. N'oublions pas que j'ai de la marge... Un peu avec ma feuille de route, mais beaucoup avec les barrières horaires. Donc pas question d'essayer de grappiller 2mn comme je le fais d'habitude.

Cette collation me fait beaucoup de bien. Je vais remplir ma poche à eau puis je me prépare pour reprendre la route. En jetant un oeil au gymnase je suis surpris de voir autant de coureurs en train de dormir. Bien sur il est 3h du mat, mais on est parti que depuis un peu plus de 8h, et visiblement, il y a pas mal de casse déjà.

Avant de sortir du ravito j'enfile le coupe vent. Non pas qu'il fasse froid, mais je sais qu'avec l'arrêt je me suis refroidis et je vais en avoir besoin pour redémarrer. Je quitte le ravitaillement à 3h35 soit 20mn après mon arrivée. Je n'avais prévu que 15mn, mais comme il a fallu attendre 5 bonnes minutes pour le plat chaud, ça s'explique !

Je repars tranquillement en marchant le temps de laisser tout ça descendre. Au bout d'une petite quinzaine de minutes je m'arrête pour retirer le coupe vent. Il a rempli son rôle mais maintenant que la machine est relancée, j'ai trop chaud. Il doit faire 14°, avec un ressenti un peu en dessous car il y a un peu de vent, mais rien de méchant.

Là encore, pas beaucoup de souvenir de cette section de nuit. Je me concentre sur le sentier à suivre et sur ma progression. Avec près de 21km, c'est la plus longue section de la course, et comme l'allure a baissé, ça va être assez long.

L'avantage, c'est que je vais profiter du lever du jour, ce qui va me rebooster un peu. Le jour se lève tranquillement mais pas de façon très lumineuse en raison de la couverture nuageuse annoncée, et en fait ça me va bien parce que si il devait faire aussi chaud qu'hier, je crois que ce serait difficile à supporter.

Un peu après le lever du jour rejoins le ravitaillement Port Neze au km 80

Pour la seconde fois, je réalise pratiquement le temps prévu (à 2mn près) alors que la nuit a quand même tendance à ralentir l'allure, parfois sans qu'on s'en rende compte.

Je n'innove pas trop ici. Je commence comme souvent par le plein de la poche à eau, puis je me ravitaille. Tuc, saucisson, fromage, pain... et je bois.

L'arrêt sera de courte durée, moins de 10mn, mais c'est aussi parce que la prochaine étape est un peu plus courte (17km) mais aussi parce que ça correspond à la traversée en bateau et juste derrière au gros ravitaillement de Locmariaquer.

Ca repart donc, la lampe rangée dans le fond du sac (ça fait du bien à la tête), en direction de port Navalo. Cette section utilise vraiment un maximum de sentiers côtiers ce qui ralenti un peu la progression. Ca monte, ça descend... mais ça avance.

Depuis pas mal de temps j'ai un mal de ventre persistant. Je pensais qu'avec le ravitaillement ça allait passer mais non c'est de pire en pire. En fait j'ai un poids sur l'estomac comme si tout ce que j'avais avalé était resté coincé. Ayant déjà eu ce problème en Guyane à cause de la chaleur, je sais que si c'est le cas et que tout reste coincé, je vais le payer physiquement. Aussi, je me décide à utiliser la technique apprise là bas à savoir le "je mets 2 doigts dans la bouche et je me penche en avant pour ne pas en avoir plein le tee-shirt", c'est radical. Sauf que là rien ne sort. Je redéclenche le mécanisme 2 ou 3 fois, ça provoque de gros hoquets, mais visiblement il n'y avait rien de coincé. Je repars en marchant tranquillement et 10mn plus tard, tout va bien. Je ne sais pas d'où vient ce blocage, mais visiblement c'était juste mécanique.

Sur la seconde partie du parcours je fais la route avec un coureur du coin qui m'explique chaque lieu où on passe. Juste après un petit cap, on voit Port Navalo et l'embarcadère juste en face de nous. Cool... Mais mon équipier me dit de ne pas m'enflammer trop vite, on est à quelques centaines de mètres de l'embarcadère mais on a encore une boucle à aller faire de l'autre côté pour revenir par le sentier côtier côté océan... et m.... !

On fait notre boucle. Le ciel est toujours couvert et la température ne monte que très très doucement. 4-5 degrés de plus seraient les bienvenus.

On arrive enfin à l'embarcadère de Port Navallo... Un bateau part un peu avant qu'on arrive mais visiblement il y en a pas mal en attente.

Je pense que psychologiquement cette traversée est un passage important, le point de non retour en quelque sorte, le moment à partir du quel on arrête de compter les kilomètres parcourus, mais où commence le décompte de ceux qu'il restent à faire.

On passe le pointage d'enregistrement à 10h19, et on est pris en charge pour l'embarquement pratiquement aussitôt.

J'enfile le coupe vent en prévision de la traversée, et on nous donne les gilets de sauvetage et les ponchos pour nous protéger. La mer est relativement calme et de toutes façons, j'ai testé... je n'ai rien à vomir !

On monte dans le bateau et je me trouve placé sur un côté avec une consigne stricte... Bien me tenir à la barre en acier... Cool... sinon je vais me baigner.

La traversée se passe bien, et plutôt rapidement. Moins de 15mn plus tard je passe le contrôle de sortie de la traversée. Ca y est je suis sur l'autre rive. On fait quelques zig zag dans le village puis on monte vers le stade situé un peu à l'extérieur. Ca n'a l'air de rien mais il me faut quand même 20mn pour rejoindre le ravitaillement.

Au ravito je retrouve Bruno R. Il y a une grande tente pour le ravitaillement, et la salle du gymnase pour se changer, se reposer, prendre une douche (oui, oui), se faire masser, bref c'est le ravito grand confort.

Je décide de commencer par aller manger voir si mon estomac va réagir. Cette fois c'est presque le même plateau qu'à Sarzeau sauf que j'ai remplacé les pâtes par de la purée au fromage râpé. Je prends mon temps pour bien me ravitailler en solide et en liquide. Une fois que c'est fait je file dans le gymnase. Je récupère mon sac, et je vais me poser pour me changer. Maillot propre et sec, nouveau corsair, recharge en ravito solide, Nok... Tout va bien sauf que je me pose la question qui tue... Est-ce que je change de chaussures ou pas. Je suis parti avec les Hoka, mais comme sur la fin je sais que je vais pas mal marcher, j'ai mis dans le sac les Brooks.

Il faut savoir que si le parcours utilise beaucoup de sentier, il y a un kilométrage très important sur bitume ou sol stabilisé, au minimum 30% de la distance. Donc ça militerait en faveur des Brooks sauf que là, je viens de faire 100 bornes et que je n'ai même pas la moindre ampoule. Visiblement l'amorti des Hoka a parfaitement joué son rôle sur l'alternance chemin et route, donc finalement je décide de ne pas les changer.

Beaucoup de gens dorment, se font soigner, masser, bichonner. Perso, je traine un peu aussi, et lorsque je me décide enfin à repartir je vois que je suis ici depuis 1 heure alors que j'avais prévu un arrêt de 30mn seulement. Zut, je me suis laissé aller, mais bon, c'est que je devais en avoir besoin.

Je dépose mon sac pour qu'il soit rapatrié, je repasse dans la tente ravito boire un dernier verre, et hop je me décide à repartir. Désormais, non seulement les kilomètres vont se décompter (plus que 80, 60, 40...) mais surtout les sections intermédiaires sont plus courtes car il y a des points d'eau et des pointages entre les ravitos. Moralement c'est plus facile à gérer.

En repartant du ravito, on fait un petit bout de chemin commun avec les coureurs qui arrivent ce qui permet de croiser quelques personnes, puis c'est reparti pour 9,5km, d'abord par le bord de mer puis par des chemins et des bouts de route (encore) plutôt à l'intérieur des terres.

je suis reparti avec mon coupe vent sur le dos pour redémarrer, mais je l'enlève au bout de moins d'un km. Même si le ciel est toujours gris, on a gagné les quelques degrés qui nous manquaient, et ça suffit pour être bien. Par contre j'ai une douleur dans le haut de la cuisse droite depuis quelques temps. Je pensais que ça allait se calmer avec la pause, mais non elle est toujours bien présente et commence à me poser des problèmes pour prendre appuis dans certaines montées (dans les escaliers par exemple).

J'avance lentement mais régulièrement. Désormais je dois manger les petites étapes restantes une par une sans me poser de question, et du coup j'arrive sur le point d'eau du Crach non pas s'en m'en rendre compte mais sans avoir trouvé le temps long.

Je mets un peu moins de temps que prévu, mais je pense que c'est surtout parce que le point d'eau était au niveau du tennis, alors que le pointage se faisait quelques centaines de mètres plus loin (???). Je complète la poche à eau. Pas indispensable puisque je n'ai que 10km pour le prochain ravito à Auray, mais par précaution.

L'arrêt n'aura duré que quelques minutes comme prévu et j'ai toujours une petite demi-heure d'avance sur ma feuille de route malgré mon arrêt prolongé à Locmariaquer.

La section qui s'annonce se fait en mode campagne et non bord de mer. Alternance de chemins mais encore une fois beaucoup (trop) de route. Pas mal de coureurs ont des soucis de pieds à cause des chaussures de trail qui souvent chauffent sur le bitume. J'ai le souci habituellement avec les Inov8 qui sont parfaites pour les chemins techniques, mais pas du tout adaptées pour faire plusieurs kilomètres sur route. Là avec les Hoka, je dois dire que j'ai au moins cet avantage d'être plutôt confortable.

Les kilomètres s'enchainent, la température reste agréable, mais mes soucis d'estomac réapparaissent au point que juste avant d'arriver sur Auray, je dois à nouveau utiliser la méthode du "je mets deux doigts dans la bouche..." et une fois encore, rien ne sort, mais mécaniquement tout reprend sa place. Etrange parce que je n'ai rien changé à mon alimentation.

On arrive sur Auray, mais là on nous fait faire quelques zig-zag, toujours sur route et avec une côte qui m'explose les cuisses (enfin ce qu'il en reste). Ma cuisse droite est douloureuse en permanence, et je me pose la question d'arrêter une nouvelle fois pour en arriver à la même conclusion qu'auparavant... Cette course est un objectif, donc j'avance même si ça fait mal... et on gèrera les conséquences après la course.

Une petite descente bien raide et on rejoint les quais qu'on va suivre jusqu'au pont entre Auray et St Goustan. Le ravito est sur le port, et ça fait du bien de voir un peu de monde, même si ce n'est pas la grosse foule.

Malgré mes soucis, mon temps de progression est pile dans le prévisionnel. Ravito classique mais en prenant bien le temps de m'hydrater car depuis une petite heure les nuages fondent et le soleil devient de plus en plus présent ce qui nous laisse présager un après midi comme celui d'hier, et je n'ai pas envie de reprendre un coup de chaud.

118 km au compteur, il ne m'en reste plus qu'une soixantaine. Ca commence à sentir bon, même si je sais que j'ai encore un paquet d'heures devant moi.

Je quitte le ravito en direction du pointage du Pont de Bono à 5 km de là. J'aime ces petites distances, c'est bon pour le moral d'avoir des points de repères courts.

Ce bout de tracé se fait en partie sur le bord des vasières. Franchement ça ne donne pas envie d'aller y mettre les pieds dedans !

La chaleur monte de plus en plus. Des qu'on est sur un sentier un peu ombragé il fait tout de suite bon, mais dès qu'on passe à découvert, ca chauffe vite. Ma douleur à la cuisse m'empêche de recourir, mais dans le même temps ca m'empêche de monter dans les tours ce qui n'est pas plus mal.

On contourne par le sud pour remonter la rivière du Bono et je vois le vieux pont au loin.

Arrivé au Bono pile dans le temps prévu, je vais chercher le pont puis je le traverse à la recherche du pointage mais rien. C'est d'ici que sont parti en début d'après midi les coureurs du 56km dont Cri-Cri et Foued faisaient partie.

Je traverse le pont et je redescends de l'autre côté me disant que le pointage doit être un peu plus loin, mais rien. Bon... Du coup je repars, et en rattrapant un autre concurrent je lui demande si il a vu le pointage, mais il me dit que non. Ok alors on continue.

Cette fois ça repart jusqu'au point d'eau du Dreven à 9km d'ici.

J'ai un peu de mal sur cette section avec deux petits coups de mou. Je dois avouer que dans ces cas là, je me mets dans ma bulle et je me contente d'avancer, du coup je n'ai que peu de souvenirs de cette section. J'ai toujours mal au ventre et depuis mon départ de Locmariaquer, j'ai décidé de ne recharger ma poche à eau qu'en eau sans boisson énergétique. Mais presque tout m'écoeure.

Il fait tellement chaud qu'avec un compagnon de route on se décide, dès qu'on passe dans un village, à faire un stop au premier troquet pour prendre une bière... Je ne sais pas si ce sera considéré comme du ravitaillement sauvage, mais j'ai envie d'une bière pression... Pas de chance, à aucun moment notre route ne va croiser celle d'un estaminet breton. A croire qu'il n'y a plus de bistrot par ici. Mais franchement, pendant plusieurs kilomètres, j'ai couru avec le billet à la main pour me la payer cette bière...

Arrivée au Dreven avec juste quelques minutes de retard par rapport au temps prévu, ce qui est normal vu les coups de mou.

La pause est courte. Ce n'est pas en m'arrêtant que ça ira mieux. Je dois juste continuer d'avancer. Je bois, complète la poche à eau et hop, sans trainer je repars !

Il fait toujours chaud, et le parcours, lorsqu'on est sur les sentiers est juste superbe... Par moment on pourrait se croire sur la côte d'azur avec les pins et le soleil.

Normalement cette section est donnée pour un peu plus de 7,5km, ce qui devrait se faire facilement. J'avais prévu environ 1h35, mais le temps passe et je ne vois toujours aucune trace du ravitaillement. Nouveau problème de ventre, et pour la troisième fois j'applique la méthode... Bon vous avez compris. Je ne sais pas d'où ça vient mais c'est passablement désagréable.

Donc le temps tourne et toujours pas de ravitaillement... Je vois une base nautique au loin, je pense que c'est bon mais au lieu d'y aller on contourne par la gauche. Visiblement ce n'est pas encore ici.

Il va me falloir encore un long bout de chemin, plutôt démoralisant avant de voir enfin arriver le ravitaillement.

J'arrive sur le ravitaillement à 20h50, c'est à dire qu'il m'a fallu 2h05 pour faire les 7,7km annoncés, et aux vues de la régularité de mon allure, c'est juste improbable. En fait, en discutant avec d'autres coureurs, tout le monde arrive au même constat... la distance n'est pas bonne. Ceux qui sont équipés d'un GPS ont entre 9,7 et 9,9km au lieu des 7,7 ce qui semble cohérent avec mon temps puisque j'ai mis presque 30mn de plus que prévu et qu'à une allure de 5km/h cela représente un peu plus de 2km.

Du coup les données dans mon tableau de progression sont en rouge car jugées peu fiables.

Ce ravitaillement est le dernier où on dispose d'un plat chaud. J'ai faim et je me fais un plat de pates, jambon, saucisson, fromage, pain, compote... Tout ça avec de l'eau gazeuse et du coca en excellente compagnie puisque je suis arrivé un peu derrière le premier du 86km qui est parti à 17h de Locmariaquer et qui vient de me rattraper!

Je prends encore le temps de manger tranquillement pour ménager mon estomac, lorsque le second arrive (près de 20mn derrière le premier) directement suivi du troisième. Passage au remplissage de la poche à eau et hop je repars un peu après 21h00 après un arrêt de 20mn ce qui est raisonnable vu la fatigue qui s'installe (j'en suis à 26h de course).

Ceci dit, je viens de me faire 140km, et ça sent encore meilleur que tout à l'heure...

Cette fois je pars pour une quinzaine de kilomètres, soit près de 3 heures en prévisionnel. Un début de parcours qui alterne entre bord de mer et intérieur des terres, mais avec le soleil qui baisse, la température redevient agréable. Ensuite on attaque à nouveau une section de sentiers côtiers. Petite côte, sentier qui serpente, racine, escalier, stop vélo,... pas de repos possible.

Depuis ma sortie du ravito je commence à me faire doubler par les coureurs du 86. De façon très espacée au début, puis un petit peu plus dense sur la seconde partie. Bien sur, à chaque fois que j'entends quelqu'un arriver en courant, et vu que pas mal d'endroits sont étroits, je me pousse pour les laisser passer, ce qui me vaut pratiquement à chaque fois des encouragements de leur part. J'ai trouvé ça plutôt sympa, d'autant que ça va continuer par la suite, pas de façon systématique mais quand même, ca fait du bien au moral d'être encouragé régulièrement de la sorte.

Beaucoup de gens mangent sur les plages. A un moment je croise un couple de jeunes qui remontent le sentier. Comme il leur restait des bananes de leur pique nique, ils les ont coupé en tranches et les proposent aux coureurs qui arrivent... Sympa !

A l'inverse de la section précédente, alors que je ne m'y attends pas du tout, je déboule sur le ravitaillement, non sans avoir du faire une nouvelle pose estomac.

Il me restait encore une petite demi-heure à mon chrono, mais non, je boucle la section en à peine 2h30... 30mn de plus tout à l'heure... 30mn de moins maintenant... Ok je pense que ça confirme le fait que les distances n'étaient pas les bonnes.

154 km de fait. La nuit est bien tombée et j'ai revissé la frontale sur la tête. Je fais ma pause ravito comme les autres mais sans trop trainer. J'ai mal partout et je n'ai qu'une envie c'est d'en finir. Ca fait un moment que je trouve ça long (en fait je me suis dit dès le 30ème kilomètre que ça allait être long, très long...).

Une petite dizaine de minutes suffisent avant que je reparte vers le pointage du parking d'Arradon situé à 4km.

Sur cette partie, à un moment alors qu'on longe la côte, le sentier s'arrête et passe sur la plage au pied d'un mur. Sauf que là c'est marée haute et qu'il faut faire 300m dans la mer avec de l'eau à mi-mollets. Ce n'est pas tellement le fait d'avoir les pieds mouillés qui va me déranger, après tout il ne nous reste que 24km, non c'est surtout le fait qu'en marchant dans l'eau cela remue le sable qui du coup rentre dans les chaussures, et le sable breton ce n'est pas le sable du Sahara. Ici il est un peu gros le sable... Du coup en fin de section je suis obligé de faire une opération rincage des chaussures et des pieds pour pouvoir repartir les pieds propres (mais pas secs).

Encore une fois le pointage ne doit pas être à l'endroit initialement prévu. Au bout de 50mn je passe un parking mais pas de pointage. Par contre, je vais bien trouver le pointage sur un autre parking mais au moins 1km plus loin. Pas grave mais en fin de course c'est parfois démoralisant.

De toute façon il faut continuer... Et je continue. Prochain ravitaillement dans un peu plus de 6 km, soit encore 1h10. La progression est maintenant pénible avec la fatigue. Heureusement le passage régulier de coureurs du 86km permet de maintenir une petite activité cérébrale et de ne pas sombrer dans un début de sommeil.

La douleur de ma cuisse s'est estompée, mais pas l'estomac. Dès que je force un peu, les nausées remontent. Ok on va gérer la fin cool, mais j'en ai un peu marre. Vivement Vannes d'autant qu'on voit déjà bien les lumières de la ville toute proche.

Passage au dernier ravito.

Si je prends le total estimé sur le pointage + cette dernière section (pour éliminer le mauvais positionnement du pointage), je fais 2h11 pour un total prévu de 2h05. Les coups de fatigue et mes soucis de ventre étant toujours là pour me faire consommer quelques minutes supplémentaires.

Petit complément en eau, je mange un peu mais j'ai trop envie d'en finir pour rester ici très longtemps. Il ne reste que 15 km, mais ce seront les kilomètres les plus longs du monde. Prochain ravito... l'arrivée... Je repars à 2h10 du matin, et j'ai encore de l'avance sur ma feuille de route (qui elle même a de l'avance sur mon objectif) donc ça va le faire, ça va le faire...

A partir de là les kilomètres ne vont plus défiler. Je marche tout le temps, mais plus je marche et plus j'ai l'impression de me rapprocher du but et moins j'en suis proche. Alors que j'ai l'impression d'avoir fait une dizaine de kilomètres, voilà qu'on m'annonce encore un peu plus de 10km à faire... "NOOooOOooOOooonnn c'est pas possible".

On enchaine également beaucoup d'allées stabilisées, aussi dures que de la route. C'est juste épuisant (quoi que ce soit peut-être parce que je suis réellement épuisé...). Ca tourne à droite, ça tourne à gauche alors que Vannes est juste là à quelques centaines de mètres. Quand on passe à Campen je crois qu'on va aller sur Vannes, mais non on retourne au bord de l'eau et rapidement on se fait une mega côte pour redescendre de l'autre côté... Pfff quel intérêt de monter pour redescendre. C'est même pas drôle, j'ai mal, je suis fatigué, je veux rentrer.

Alors que j'en bave comme un turc, voilà qu'on nous indique qu'il va y avoir un dernier pointage. Sauf qu'avant ça, on nous fait faire tout le tour de l'ile de Conleau, et qu'en arrivant enfin au pointage je râle comme un bossu sur ces foutus kilomètres de bitume qui n'avancent pas... J'espère que les bénévoles de point de contrôle ne m'en voudront pas trop... je n'étais pas vraiment dans mon état normal...

Pour arrange le tout ils me disent qu'il ne reste QUE 4km... Ben voyons QUE 4km, une paille...

Je suis reparti en mode "off". J'ai tout déconnecté et je marche droit devant moi sans réfléchir. Je suis juste sorti de ma bulle par un coureur qui me double et qui me dit "c'est bon voilà les premiers bateaux". En effet sans m'en rendre compte j'ai quitté le sentier et je suis sur une zone de parking de bateaux qui marque en quelques sortes le début du chenal qui remonte vers l'arrivée. Encore 2 gros kilomètres de ligne droite.

Le premier kilomètre est interminable mais ensuite je retrouve la zone où je suis venu me promener la veille. Le moral se regonfle. On approche du parking et je commence à croiser quelques personnes mais bon, à 5h00 du matin ce n'est pas la foule des grands jours.

Je passe juste devant ma voiture, je traverse le parking et je remonte le long de l'eau où il y a un petit peu de monde.

Il me faut maintenant remonter tout le port sous les encouragements des personnes présentes et des autres coureurs, puis une fois au bout je fais mon demi tour et je commence à passer une à une les fameuses arches gonflables de toutes les couleurs.

Je profite au mieux de ces dernières dizaines de mètres... Tout ça pour ça !

A 5h19, après 34h09 de course, je passe enfin la ligne d'arrivée

En franchissant la ligne, je suis à la fois content et soulagé... Content que ça se termine et d'avoir géré l'objectif que je réduis de près de 50mn et soulagé car c'est toujours mieux d'arrêter sur une réussite. J'ai quand même mis 3h10 au lieu de 2h50 sur cette dernière section. Peut-être en raison du relâchement lié au fait que c'était l'arrivée, mais aussi probablement à cause de la fatigue et d'une gestion d'allure très irrégulière sur ce finish.


Cliquez sur la vignette pour ouvrir la feuille de route complète

C'est vrai que pendant la course je n'ai jamais fait attention à mon classement, simplement parce que cela m'importait peu, jusqu'à ce qu'un concurrent, en quittant un des derniers ravito me dise qu'on est passé en 280ème position. Je dois avouer que sur le moment j'ai été pris d'un doute vue mon allure et les 760 coureurs au départ. Hors il se trouve qu'il avait raison puisque j'arriverai en 258ème position sur 760 partants (et 411 classés). Comme quoi la régularité, ça peut payer !

Le temps de souffler, de récupérer le tee-shirt de finisher, et je file au ravitaillement. J'ai faim ! Pâtes, jambon, tuc, saucisson, compote... comme d'habitude quoi !

J'en profite aussi pour déguster une bière locale. Ca change de l'eau et du coca.

A peine tout ça fini, je file à la voiture, je me change en 3mn, un coup de lingette (je n'ai pas le courage d'aller au gymnase pour aller prendre une douche tout de suite) et voilà que je m'affale dans la voiture (qui était déjà prête pour ça) pour quelques heures de sommeil bien mérité.

Et voilà, fin de l'aventure

Alors avec quelques jours de recul, quel bilan en tirer ?

L'objectif est atteint et pratiquement dans les conditions prévues, donc c'est forcément un point positif. J'ai pu (ou su) réagir correctement à chaque passage difficile, comme quoi l'expérience est quand même très utile.

Il faut aussi noter que sur les 5 Bled Runners au départ (3 sur le grand raid et 2 sur le trail) et bien les 5 sont à l'arrivée. Vu le taux d'abandons, c'est quand même une belle réussite !

Par contre, il faut avoir une motivation à toute épreuve, il faut avoir envie de... Sinon, le risque d'aller dans le mur est grand. Pour moi c'était mon objectif majeur de l'année, donc cette seule idée a suffit à faire le bon choix par moment. Mais sans ça, je pense que l'aventure aurait tourné court bien plus tôt.

C'est une épreuve beaucoup moins facile qu'il n'y parait. Bien sur 180km c'est long, très long, mais on se dit que là, ce sera presque tout plat donc sans difficulté à gérer. Il suffit de regarder les résultats. 760 partants, 410 arrivants... 47% d'abandons... Juste énorme pour une course qui semble "facile".

Plusieurs choses rendent la course compliquée.
- Les coups de cul non stop. Pas difficiles mais usants. Escaliers cailloux, montées dans la terre, et la même chose en descente
- Les nuits blanches. Si pour les premiers ca ne couvre qu'un jour et une nuit, à mon niveau ce sont 2 nuits obligatoires. Pour ma part j'ai fait le choix de ne pas dormir. Je sais que jusqu'à 48h je peux gérer, mais il n'empêche que ça rajoute une couche sur le reste.
- La météo. On n'était pas prêt à avoir chaud (du soleil en Bretagne... Allo, mais allo quoi !) Ca a fait des dégâts au départ, et pas mal sur la journée de samedi.
- Les nombreuses sections de route (ou similaire). Ca explique le temps des premiers (18h!) mais pour les autres, c'est juste chiant ! On est dans une épreuve typée raid. Donc on peut comprendre que certaines liaisons se fassent sur des sections roulantes, mais pas à ce point là. On doit avoir une balance pas loin de 40% de route et stabilisé pour 60% de sentiers. Comme à la Saintélyon. Beaucoup de coureurs ont eu des soucis de pieds à cause de chaussures inadaptées à cette alternance.

Côté organisation, on est dans une grosse machine, mais à mécanique humaine. On est pas dans l'organisation "industrielle" mise en place à l'UTMB (et je ne dis absolument pas ça de façon péjorative, au contraire, je trouve l'organisation de l'UTMB extrêmement pro et bien huilée), mais très franchement je ne peux pas dire qu'il y ait de faille dans ce que j'ai pu vivre.

Dossards, ravitaillement, logistique, tout a fonctionné parfaitement, et je dois souligner la gentillesse de tous les bénévoles rencontrés au cours du WE... On avait vraiment des gens qui faisaient tout leur possible pour nous aider, prendre soins de nous, franchement, ça fait vraiment plaisir.

Alors un grand grand merci a toute l'équipe de nous permettre de passer des moments comme ça, y compris quand on est parfois un peu irritables avec la fatigue et le manque de sommeil.

Pour moi le point d'amélioration serait principalement sur le tracé. Soit on supprime la moitié des sections de route existantes, soit il faut annoncer clairement sur le site que le bitume et le stabilisé représentent x% de la distance.
Sinon peut-être que par endroits un renfort du balisage serait le bienvenue. J'ai hésité deux ou trois fois, mais je ne me suis jamais égaré. Par contre avec la fatigue louper une petite flèche jaune au sol est vite arrivé.

Sur le reste, il faudrait aussi fiabiliser les distances annoncées sur le site (la distance officielle de la course va de 177 à 180 suivant les sources... Le report des documents d'une année à l'autre alors que le parcours bouge c'est pas otimum. Un écart de 2km sur la position d'un ravito, ça semble pas grand chose en tant que tel, mais quand on est en course c'est juste énorme par moment.

Avant de terminer ce CR, il faut que je revienne sur son tire... Souvenez-vous, le Merci Bernard ! du début.

Dès qu'on parle pluie on parle Bretagne, et les bretons ça les agace un poil visiblement, d'où le célèbre "En Bretagne il ne pleut que sur les cons..."

Alors, comme l'a dit Etienne en titre de son CR, finalement, vue la météo qu'on a eu, cela signifie peut-être que je ne suis pas aussi con que ça !

Chapeau si vous avez réussi à tenir jusque là... Et maintenant place à d'autres aventures !

Michel



9 commentaires

Commentaire de vinch64 posté le 05-07-2013 à 08:25:58

Bravo Michel pour ta superbe course bien gérée du début à la fin!
Par contre, je regrette de ne pas t'avoir vu à l'arrivée puisque je suis arrivé à 5h18 à Vannes... Bizarrement, je n'ai pas l'impression de t'avoir doublé sur la fin. Peut être que c'était au niveau des parkings avant d'arriver sur le port. J'ai longé la route et pas le quai. C'est un trailer qui rentrait chez lui qui m'a dit que le parcours longeait le quai (seule "erreur" de parcours de toute la course). Par contre, on aurait pu se croiser à la bière d'arrivée! Dommage, ça sera pour une prochaine fois.
Sinon, récupère bien et encore bravo pour tes 177km.

Commentaire de leptitmichel posté le 05-07-2013 à 14:20:34

J'étais un peu dans le pâté à l'arrivée, et franchement je ne sais même plus à côté de qui j'étais assis.
Je n'ai pas trainé. J'avais faim, mais j'avais surtout envie d'aller dormir !

Commentaire de Insomniac Trailer posté le 05-07-2013 à 08:56:57

Merci Michel, c'est un super compte-rendu (je suis allé jusqu'au bout avec grand plaisir !)
Nous avons eu à peu près le même type de progression, c'est pourquoi je me retrouve dans beaucoup de choses que tu écris ... à part la méthode des 2 doigts dans la bouche que je n'ai pas eu à utiliser !
Je te souhaite une bonne récupération, c'était vraiment cool de se rencontrer.

Commentaire de leptitmichel posté le 05-07-2013 à 14:22:01

La récup se passe bien. Pas de blessures, donc en 48h les courbatures avaient disparues. J'ai trainé encore 2 jours des tensions dans les pieds liées au gonflement mais rien de méchant. J'ai déjà repris le footing mais très cool.

Commentaire de PtitLudo posté le 05-07-2013 à 10:34:52

Bravo pour ton CR. Comme tu me disais, rien ne sert de courir ! J'ai donc tres rapidement suivi ton conseil de toute facon avec ma tendinite ca devenait l'enfer de courir, et meme la marche c'etait en serrant les dents.

Commentaire de leptitmichel posté le 05-07-2013 à 14:23:11

Quand on ne peut plus courir, il ne faut pas pour autant continuer d'avancer. Tant qu'on avance c'est bon... Au pire, il n'y a que la perf qui en souffre au final.
Le plus important c'est d'aller au bout !

Commentaire de ejouvin posté le 05-07-2013 à 11:15:57

Démarrer la lecture de ton CR est un peu comme prendre le départ d'un Ultra. Il faut aller au bout, car ton CR mérite d'aller au bout.

J'ai pris beaucoup de plaisir à le lire et je tiens à te féliciter pour avoir franchi l'arche d'arrivée. Cela t'a demandé beaucoup de volonté et nous pouvons être tous admiratifs.

Bravo à toi et bon repos (bonnes bières)

Commentaire de leptitmichel posté le 05-07-2013 à 14:24:19

Merci Etienne... Le fait de vous voir passer m'a maintenu en éveil la seconde nuit. Donc vous y êtes aussi un peu pour quelque chose... Et puis... On est pas si cons finalement ;-)

Commentaire de robin posté le 09-07-2013 à 18:08:53

Merci pour ton CR. C'est vrai qu'il est long mais à l'image de cette course. Je rajouterai qu'en plus pour tout postulant au départ il est à lire et à relire.Riche en enseignement sur la course en elle-même et la façon de l'aborder. Je le relirai pour l'année prochaine. Avec un succès et un abandon, il sera temps de faire pencher la balance sur un score favorable.
Bravo et bonne récup

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