L'auteur : seapen
La course : Trail des Bosses - 37.5 km
Date : 24/5/2009
Lieu : Champagnole (Jura)
Affichage : 1354 vues
Distance : 37.5km
Objectif : Pas d'objectif
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5 autres récits :
Je récupère de la Baumoise. Superbe course nature dans un bel environnement qui m'a permis de dérouler mes foulées sur un rythme trépidant.
Quatre jours plus tard, la sortie sur chemins et petites routes de campagne de plus d'une heure permet de me situer. J'ai manifestement récupéré, me sens en forme. J'ai du "jus" quoi !
Déjà je m'interresse alors à la prochaine course. A choisir entre deux distance, 16 kms 800+ ou 37.5 kms 1850+.
Je choisis la plus longue. Une série de plusieurs bosses au dénivellés sensiblement équivalents. Je ne suis pas spécialement stressé et envisage même de l'effectuer doucement ce qui me permer de chasser les démons de l'angoisse insidieuse qui me hante lorsque j'en viens à me poser la question de savoir si ce n'est pas trop.
Sur les trois semaines précédentes, quatre courses de 11.300, de 22, de 35 et de 20 kms avec un dénivelé totalisant près de 2500+. Ce n'est pas rien mais je suis sur ma lancée.
Mon inscription est vite envoyée et le temps ne devrait pas se dégrader ; j'ai une appréhension, celle de devoir la courir sous la "flotte". Les prévisions en début de semaine indiquent une stabilisation, beau et orageux.
Le dimanche me voit donc partir tôt le matin puisque le départ est prévu à 08h30. Traversée de tout le vignoble jurassien internationalement connu pour ses vins typiques et uniques puis bifurcation direction côté montagnes et forêts et arrivée à Champagnole. Le départ et l'arrivée sont placés à l'extrémité de la ville.
La température à grimpé depuis le milieu de semaine et comme la veille il va faire chaud. Il faudra profiter du départ matinal. Nous n'avons pas encore conscience des véritables conditions dans lesquelles nous allons courir.
Cinq ravitaillemnts sont prévus dont le premier en eau, bien répartis tout du long du parcours. C'est rassurant et me permettra d'envisager avec sérénité un poids revu à la baisse. 40 cl maximun et la fameuse topette de 12.5 cl de carburant plus les comprimés habituels sans oublier ceux de sodium et le gel mais au mimimun car je veux éviter la saturation en sucre. Je m' appliquerai à bien me ravitailler et profiterai de la diversité des produits proposés (carré de Comté, abricot sec, quartiers d'oranges resteront mon choix parmi d'autres et aussi la boisson brune et pétillante que j'apprécie énormément bue dans ces conditions). Depuis que j'applique cette façon de faire je ne le regrette pas et en constate le bénéfice qui est un meilleur confort de course.
Le vieux gymnase qui nous accueille est pourvu de douches ; déjà je me vois sous celles-ci après la course. En attendant un minimun d'installations mais suffisantes sont gérées par les bénévoles et les organisateurs ; pas pour mon accompagnatrice qui pourra heureusement profiter du centre ville à proximité. Tout de suite nous passons en tenue et un léger mais très léger échauffement s'effectue. Il est là surtout pour constater que le moteur quand il est allumé tourne normalement. J'avoue que je passe plutôt mon temps à discuter avec quelques retouvailles des courses précédentes, notamment Patcap 21 qui me reconnait et que je salue. Il s'aligne aussi sur la longue distance. Le nombre des participants sur ce circuit restera inférieur à la centaine mais sera beaucoup plus conséquent sur le 16 kms.
Je n'ai pas d'idée sur ce trail sinon celle que je peux me faire rapport à la distance et au dénivelé.
Je pars du Trail des forts qui est long de 35 kms 1600+ ; l'idée de la difficulté m'apparaît alors quand il faut y rajouter près de 3 kms et 250+ suplémentaires. Je sais que la tache sera rude mais je me suis engagé ; un nouveau défi mais certainement raisonnable puisque apprécié au plus juste. Quoique il en soit se présente quand même un sacré morceau. Mais "j'en veux" et ce sera bon pour ma progression générale. Faire monter la barre à chaque fois en restant "dans la course" selon mes capacités potentielles sans dépasser les limites au delà desquelles ce ne serait plus bénéfique mais au contraire nuirait à l'amélioration des performances. Ainsi les courses moins longues deviennent alors plus confortables et les bonnes sensations qu'on y éprouve sont multipliées. Je l'ai constaté au ressenti des dernières courses natures effectuées, Le Creux de l'enfer, le Pont du diable et la Baumoise (il faut avoir lu leur compte rendu pour apprécier ces affirmations, ce que je conseille).
J'ai l'impression à bien y faire attention que les engagés sur le 37.500kms ne sont pas des "premiers venus" ; je m'en accomoderai cependant et n'aurai pas de gêne à courir en arrière s'il le faut. Mon but sera d'arriver alors dans mes délais qui resteront je l'espère raisonnables.
Un trail différent des autres dans lequel je vais m'enfoncer. S'éloigner dans la nature et la laisser vous offrir les terrains qu'elle voudra bien. Pour s'en sortir, pas d'autre solution que de se laisser guider sur les sentiers, les chemins, les creux et les bosses quelque soit la pente, raide ou douce.
Tu as seulement l'assurance de parvenir à des postes où tu pourras te rafraîchir et à peine te reposer. Encore faut-il que tu ne te perdes pas par manque de vigilance pour le cas où tu n'aurais pas repérer le balisage. C'est ce que je me dis dans ces instants de préparation et c'est dans cet état d'esprit que je me présente lorque le speaker-orgasiteur donne les dernières consignes ; c'est à peine si j'en capte quelques mots : passages délicats ici ou là, à tels endroits balisage comme ci, comme ça.
Voilà je suis bientôt parti et plutôt dans la bonne humeur. En début d'après-midi je serai de retour, c'est bientôt mais il va falloir vivre ces moments intenses et arriver à bon port et en bon état. Je suis préparé pour ça, enfin je le pense. Et c'est le départ encouragé par les spectateurs qui sont dans leur majorité des accompagnants.
Le départ se fait comme il doit se faire. Chacun compose déjà sa partition. Les premières notes se testent et rapidement se complètent pour obtenir rapidement une régularité qui sied à ce genre de musique. Rapidement trouver un petit rythme entraînant qui vous tire en avant. Sentir tout ce qui s'agite dans le corps, être en éveil pour en capter toutes les sensations et bien les interpréter afin d'assurer dans la continuité ce qui se présente. Et ce qui se présente est vite la pente. progressivement mais elle est déjà là. Le profil est bien dessiné ; première étape composée d'un petit dénivelé que l'on négocie ensuite dans sa descente et rebelotte pour un plus conséquent afin d'atteindre au bout de la descente le point d'eau. Rien alors n'existe d'autre dans ma tête que cette partie. Cinq autres suivront qui seront abordées de la même manière.
Au départ je constate l'état de mon cher chrono que j'utilise depuis de nombreuses années ; écran noir. Plus de pile mais peut-être que sa carrière est terminée. S'il le faut Je tournerai la page de cet objet utile et cependant attachant. J'opte pour sa remplaçante, une simple montre. Je me demande bien s'il elle est étanche. ça ne me gêne pas trop bien que je considère le repère chrono dans cette course comme important. Quand on a retenu le critère du temps comme élément d'appréciation parmi d'autres pour bien se gérer sa course et s'il est impossible d'en être informé celà peut-être perturbant surtout quand les moyens d'appréciation relevant des sensations sont faussés à cause de la fatigue.
Les premières grimpettes se révèlent un long échauffement. Au sommet et lorsqu'elles se transforment en chemins moins éprouvant et où l'organisme peut respirer pour une récupération aléatoire c'est l'occasion de se sentir, de faire le point. Evaluation de début de course. De longues minutes se sont écoulées et à un moment où la course était bien partie un peu plus tard j'ai regardé ma montre et ai été surpris de constater que l'on courait depuis 25 minutes. Dans ma tête je venais à peine de partir. J'ai trouvé que c'était plutôt bon signe. Les coureurs et coureuses positionnés devant et derrière seront ceux et celles que j'accompagnerai pratiquement toute la course. Quelques mots échangés lors de dépassements montrent le bel état d'esprit qui règne et c'est tout bon pour le moral. Bien accompagnés ce sera d'autant mieux.
La chaleur au début ne se fait pas trop sentir d'abord parce que c'est encore tôt le matin mais aussi parce que la trace est souvent sous couvert ; nous bénéficions alors de la fraîcheur de l'humidité bien présente là où le soleil ne fait qu'éclairer l'endroit. Le terrain quel qu'il soit est appréciable et il est agréable d'y dérouler ses foulées.
Au début j'ai entendu une réflexion d'une coureuse qui disait de pas arriver à touver son rythme. celà a "tilter" tout de suite dans mon esprit. J'ai pensé à lui répondre que le problème n'était pas de trouver un rythme mais des rythmes sans cesse changés du fait des terrains qui se présentent. Et que pour celà il vallait mieux rester toujours en deça afin d'avoir la possibilité de s'adapter sans difficulté.
Ces pensées m'étaient venues de réflexions que j'avais eu à l'occasion des mes prestations lors du trail des Forts.
Sur deux de ses prestations c'est le fait d'avoir voulu prendre un rythme certes que l'on peut adapter durant la course mais un et non pas plusieurs qui m'avait valu les déconvenues que l'on sait si l'on m'a bien suivi durant ces périples au cours de mes récits.
Donc rester en deça afin de pouvoir trouver les rythmes adéquats. Tout de suite s'y adapter même si c'est pour en changer rapidement. Rester en deça est la condition qui permet "de carburer" instantanément dans celui que l'on adopte en fonction du terrrain.
D'où le confort qui en découle. J'ai aussitôt pris conscience de cette technique et ai pris de fait la résolution de rester concentré à l'appliquer.
Celà m'a permit quasiment tout du long d'apprécier toutes mes foulées, de bien les sentir et les gérer au mieux. Un confort bien perceptible tout en produisant l'effort dans l'endurance, effort qui s'est fait de plus en plus mordant bien sûr au fil de la progression. Et à chaque moment j'avais cette sensation qui est celle de la maîtrise du terrain.
Curieusement toute la gestion du début de course dans laquelle je me suis progressivement installée a été et est restée celle de toute la course. Comme si j'avais trouvé un équilibre qui convenait à l'ensemble des divers terrains, dénivelés et je n'ai pas eu besoin de me réadapter avec toutes les contraintes de coups et contrecoups ; par exemple, un coup de fatigue, l'encaisser suivi d'une reprise forcément forcée pour se remettre dans la course. Tout s'est déroulé dans une parfaite continuité : pas d'accroc, pas de baisse de régime, pas d'incident mécanique, pas de coup au moral.
A chaque variation de terrain, de pente, trouver le rythme adéquat instantanément a été la condition qui a permis ce déroulement jusqu'à la ligne d'arrivée. La concentration servant à bien sentir l'environnement et à apprécier justement le sol foulé dans toutes ses composantes a été primordiale. Celà a été possible du fait que je suis resté constamment "en deça". Pas question d'être "border line", encore moins d'être sur la "corde raide".
Ainsi j'ai toujours pu encaisser ce qui se présentait et qu'il fallait affronter souvent durement ; par exemple une pente raide à la suite d'une descente technique dans laquelle j'ai du freiner des "quatres fers" à 2 ou 3 reprises ce qui a eu le don de me "pomper l'énergie". J'ai pu donc éviter de me mettre dans une situation trop critique pour ne pas "en bouffer" trop et aussi négocier aussitôt calmement la pente qui se présentait. Cette façon de faire respectée depuis le début m'a permis de courir au mieux au fil des kilomètres et ressentir un confort tout relatif mais confort quand même malgré la difficulté normalement grandissante au fur et à mesure de la progression.
Ces explications peuvent être perçues comme du charabia pourtant elles révèlent ce qui a constitué ma course. Le sentiment de ce qu'elles donnent à penser la réflète bien.
En attendant le premier point d'eau a été passé. Un peu perturbant car je n'étais pas sûr qu'il soit officiel. Si c'était pour trouver le vrai point d'eau un peu plus loin inutile de perdre du temps et de l'énergie à se réapprovisionner. C'était le vrai point d'eau.
8kms ont été franchi. prochain objectif le second arrêt : premier ravito complet dans 7 kms.
Déjà le jeu du yoyo avec mes partenaires a commencé et l'on s'est bien repéré.
Sur ma lancée et n'ayant pas été spécialement marqué par ce début je continue et avale cette seconde partie en percevant bien les différents terrains sous mes pieds. Des sentiers au plus hauts caillouteux et pierreux me rappellent les sentiers alpins que je parcourais lors de randonnées pédestres. Des chemins terreux au plus bas souples et amortissants. Les images retenues sur ce trail sont celles captées dans les creux lorsque se présentent un hameau ou maison isolées ou alors un cours d'eau, images rafraîchissantes. C'est toujours agréable d'arriver en bas, comme si on arrivait au terme de l'étape car terminée la descente. Je retiens aussi les moments respirants vécus au dessus du fait de la fin de la montée et la vue qui s'élargit sur le paysage dans des sentiers dégagés mais encombrés de rochers.
Entre ces deux à chaque fois la rudesse et le dureté de l'effort :
dans la montée où souvent l'on cale et alors la marche à pied est de mise et là où c'est particulièrement raide on s'excrime à trouver une technique de montée plus adaptée. Pour mon cas j'en ai appliqué une. Afin de reposer mes cuisses je faisais travailler le bas des mollets qui ne sont pas spécialement sollicités ailleurs dans la course, si c'est le cas je ne le ressens pas. Pour celà je lève nettement le genoux afin de pouvoir avancer le pied le plus haut possible. En le posant bien à plat dans la pente je me repose totalement dessus. Tout l'effort est alors senti dans le bas du mollet et l'on se sent soulagé au niveau des cuisses. Le grand pas effectué permet de progresser plus nettement en avant. Celà diffère totalement de la pose sur l'avant pied seulement dans une foulée plus courte où là ce sont les cuisses qui sont sollicitées différemment et pleinement.
Et dans la descente folle où le souffle parfois est près de s'emballer quand la sueur ruisselle abondamment sur le visage preuve de l'intensité de l'effort.
15 kms de parcouru au niveau du 2ième ravito complet. 2 heures de courses. Elle marche bien cette petite montre, j'espère que je la rendrai en bon état à mon accompagnatrice qui doit en ce moment faire du shopping en ville ou déguster un p'tit café sur une terrasse mi ombragée, la veinarde.
Image idéale mais trompeuse, le bonheur illusoire d'un instant de ce genre ne dure pas et souvent l'on s'attarde en vain à vouloir revivre ce que les premiers instants vous ont fait ressentir exactement. comme lorsque l'on respire le parfum d'une fleur. Il suffit de la première fois. Les fois suivantes ne donnent jamais l'intensité de la première. Tiens et pour la violette ? Il vaut mieux avoir saisi son parfum parce les deuxième et suivantes fois il est là mais on ne peut plus le sentir. Il a agit sur le cerveau et annihiler sa capacité à le capter de nouveau.
Tandis que tout le travail pendant des heures de course et l'effort fourni tous ces kms feront durer la sensation de l'instant d'après course pendant des heures voire pendant des jours comme si l'instant de respiration du parfum d'une fleur au moment où vous captez celui-ci pendant un dizième de seconde durait et durait encore.
Pendant ce temps je cours toujours et juste derrière 2 coureurs dont une féminine. Leur rythme me convient bien et je n'ai pas envie de dépasser afin de rester "en deça" preuve que je respecte le fameux protocole qui me va si bien jusqu'à maintenant.
Puis ce qui arrive quelquefois arrive. A l'instant de la rencontre avec des randonneurs nous nous apercevons que nous nous sommes égarés.
Depuis combien de temps. Questions, palabres, que faire ? D'imaginer de remonter sur le sentier technique ne me plaît pas. Puis la décision est prise par l'un d'entre nous de faire demi-tour plutôt que de rattraper le chemin plus loin. Rapidement nous sommes rassurés, une cinquantaine de mètres nous aura permis de le rejoindre. Ouf ! on s'en est bien tiré.
Et c'est reparti après cette petite erreur qui nous aura quand même fait imaginé une course gâchée
sur les chemins sans cesse renouvellés, changeants de nature, se transformant au gré des configurations de terrain et de la diversité végétale. Tout ce qu'on peut imaginer, nous l'avons traversé ou presque. Après avoir passé le 3ième ravito au bout de quelques kms notre objectif est le quatrième qui marquera la fin du deuxième tiers du circuit et annoncera la partie finale.
Tout se passe au mieux. Certains coureurs commencent à la trouver raide et je me dénombre parmi ceux qui ne ressentent pas encore de difficultés particulières. Pourvu que ça dure. D'autant que les kms défilent, la sensation d'avancement est bien là et c'est le principal.
Une habitude est prise, au ravito quelques-uns passent devant du fait que je prends plus soin de moi et par la suite je suis amené à les remonter. Dans un premier temps c'était la montée pour moi et la descente pour eux. Maintenant j'ai tendance à prendre le dessus dans les deux situations sauf au ravito.
Puis de nouveau un plantage. Personne devant et je poursuis le sentier qui devient de + en + étroit tandis que la pente sur la gauche se transforme en ravin et sur la droite en falaise. Je me revois en randonnée pédestre en montagne. Tout de suite je prend conscience de la situation tandis que le chemin est moins perceptible. Ni une ni deux je fais demi-tour. près de 50 m parcouru et j'aperçois mes poursuivants qui au niveau d'une rubalise plonge dans le sentier que j'avais loupé. Celà ne m'affecte pas car tout celà a été rapide et sans conséquence et le prend même avec amusement. Et nous voilà regroupés et moi derrière.
Ravitaillement 4. Comme je prends mon temps l'ordre est de nouveau inversé. Celà nous donne l'occasion de nous entr'apercevoir régulièrement. Pas assez cependant pour engager des conversations vu que nous sommes quand même bien occupés. 03h 30mn de course.
Maintenant celà se précise. Mais la chaleur est bien là et à midi fait son travail de sape. Le ravitaillement offre cependant un bon moyen d'y compenser. Des verres ingurgités et versés sur la tête font un bien fou. Entre les ravitaillements l'eau transportée reste utile et est utilisée à petites doses bienfaisantes.
Reste 11 kms.
La grande virée continue et nous voit nous enfoncer dans cette nature couvrante. On disparait à l'intérieur pour en ressortir au fil des clairières ou des vaux dégagés. De nouveau on disparait. Quelquefois l'automobiliste parcourant la petite route vicinale sillonnant les lieux peut nous voir traverser la voie tel du gibier surgissant des bosquets pour disparaitre rapidement en face.
Pas de défaillance. Même le long des sentiers exposés où le soleil plombe et l'air manque. Ce n'est jamais bien long heureusement. Même le long de la grande traversée du pierrier qui dure un temps fou, le temps de parcourir 2, 3 centaines de mètres sur des pierres de toute grosseur blanches et chaudes. Passer de l'une à l'autre en gardant un rythme sans trop faire d'écart à ce niveau de la course peut-être très éprouvant. Mais curieusement je me sens léger. Mes jambes répondent bien et négocient ainsi au mieux ce terrain périlleux dont la sente large n'est pas en dévers. Mes acolytes sont derrière et je crois que je commence à faire la différence. Mon avancement est tel qu'il me rapproche d'autres coureurs. Un à un ils m'apparaissent toujours brusquement au loin et je finis par dépasser. J'en ai gardé visiblement sous la semelle et c'en est stimulant. Quelque soit sa position chacun se sert de l'autre s'il le peut. On peut toujours s'accrocher aussi au coureur qui vous passe. Quand on est dans une situation tout est bon pour exploiter le petit événement qui peut vous faire repartir ou vous donner un nouvel élan.
Et c'est la pause, la dernière dans l'enceinte d'une belle demeure. Maintenant il faut regrouper ses forces pour le final de quelques kms. Réajustement de la poche à eau justement remplie, mais pas trop et remotivation. un groupe de niveau s'est fait et repart soudé. Les plus frais embarqueront les autres.
Pour certains celà commence ou a commencé déjà à devenir très difficile mais le but est si proche et si éloigné en même temps... Il y a ceux qui rient et ceux qui font la tronche ? Facile à dire quand on se classe dans la première catégorie. Qu'est-ce que vous voulez ? je ne veux pas bouder mon plaisir. Et puis je suis bon prince j'encourage énergiquement celui ou ceux qui m'accompagnent. Je fais corps avec eux. Tous pour un, un pour tous. Je ressens leur douleur, ils ressentent mon plaisir. Euh... à vrai dire ça n'est pas tout à fait comme celà que cà se passe. Disons que je suis compatissant et que les autres sont remplis d'empathie à mon égard (note de l'éditeur : utiliser ce mot dans ce sens là, fallait le faire)
Bon j'arrête ce jeu "limite pervers" et je continue la course en espérant que rien ne m'arrêtera. Un dénivelé digne de ce nom pour aborder la descente qui finira en pente douce sur chemins quand même un peu piégeux pour finir par la route qui accède au porche d'arrivée.
Deux coureurs dégagés avant moi du ravito ont pris un peu d'avance. La pente est signalée difficile et un bon "coup de cul" annoncé. Peut-être à mi parcours je les aperçois qui font une pause. Assis ils m'observent. Arrivé à leur niveau je me soucie de leur état par un "ça va les gars ?". La réponse n'est pas folichonne. Mon passage les incite à repartir. Ils s'accrochent. Et l'arrivée au sommet des sommets se précise. Pause ravito personnel. Je fais faire demi-tour à ma pochette, une bonne gorgée de gel, une belle rasade de boisson énergétique et une bonne respiration. Les deux ont stoppés juste derrière moi et attendent patiemment et sagement que je termine. Je pense à cet instant qu'ils sont les wagons et que je suis leur loco. J'en suis assez fier finalement.
C'est reparti après quelques formules d'encouragements mutuels du genre "on va la terminer cette course" "allez on y va les gars" "c'est tout bon, on s'accroche" Bref on remplit le bidon de moral avec ce qu'on peut et je pense que ça marche. C'est vrai que lorque que l'on a plus rien à "bouffer" il reste toujours les semelles de ses chaussures... à condition qu'elles soient en cuir bien sûr.
Comme la pente est maintenant descendante sur les deux kms restants et que je me sens bien dans ce profil de course alors je vais de l'avant. Mes jambes fonctionnent correctement sur ce chemin un tiers terreux deux tiers pierreux recouvert souvent de feuilles et dont les traces cabossées dessous ne se laissent pas deviner. Je me décontracte cependant de plus en plus et sentant l'arrivée proche je sens proche aussi le sentiment d'euphorie et bien sûr il s'en suit un relâchement de concentration. Ma cheville droite part en vrille brusquement sans crier gare. J'accuse le coup en pestant. Bien que je l'aie sentie je continue sans conséquence tout en me maudissant. J'étais bel et bien installé dans des pensées qui n'avaient rien à faire là en plein effort, pensées du genre que l'on a allongé sur une chaise longue. Je me promets de faire attention mais comme je suis très bien et suis très content d'être là à savourer mon petit bonheur immanquablement je récidive avec la même cheville. Je m'en tire encore une fois sans mal bien que je sente celle-ci sur quelques mètres. Je ne m'en émeut guère tellement je suis positif mais je ne me le pardonnerai pas une nouvelle fois.
La course est faite. La boucle est bouclée de ce trail qui ressemble à un trail. Un vrai où on est face à soi-même. Tu pars et tu retrouves ceux que tu as quitté que lorsque tu reviens. Phrase pas si anodine que ça parce que tu as décidé de te confronter à ce que te renvoie ton image. T'as pas intérêt de te planter. Peu de courses nature de la dimension d'un trail avec tout ce que ça renferme t'offrent la possibilité de vivre et d'approcher au plus près ce pourquoi ce genre de course existe. Elle me ramène au souvenir de deux courses (non récit.tées) : les trois jours dans le massif du Verdon et la castilingo courue sur près de 60 kms. Les autres ont certes leurs qualités mais celle-ci approche ce qui fait un vrai trail.
Celà relève des sensations que l'on a en la courant et de l'impression globale qui en ressort. La course peut paraître ingrate par son environnement organisationnel mais son authenticité l'emporte.
J'ai trouvé le mot s'il n'en fallait qu'un pour la qualifier : authentique.
D'ailleurs en passant la ligne après avoir taper la main quelques dizaines de mètres avant d'une connaissance qui m'encourageait je n'ai pas pu résister à pousser un cri dans lequel on pouvait y trouver une grande satisfaction et en me retournant du côté de l'arche j'ai dit à ceux présents : "c'est mon plus beau trail". Celà ne s'improvise pas et je crois que c'est venu du plus profond (à moins que je sois assez superficiel et que je dise tout et n'importe quoi, juste pour me faire remarquer) (pour la légende je vous demande de ne pas retenir cette remarque entre parenthèse)
Une belle place de 23ième au général sur 62 arrivants dans un temps que je trouve remarquable (seul moi peut juger)(j'ajoute que je suis exigeant avec moi même)(tout ça reste quand même très subjectif)
Je retrouve patcap 21 qui s'est débrouillé pour rejoindre l'arrivée après ses déboires que lui seul peut relater. Il me félicite en trouvant que j'ai fini fort.
Les 11 derniers kms en 01h 23mn. Je constate ainsi durant toute la course une certaine régularité compte tenu des différents dénivelés.
premier tiers : 15 kms en 02h. 8 mn au mile. 7.500 à l'h.
deuxième tiers : 7 mn 30 au mile. 8 à l'h.
troisième tiers : 7 mn 54 au mile. 7.600 à l'h.
Merci aux organisateurs et bénévoles que j'invite à persévérer dans l'organisation de cette épreuve dans un site et sur un circuit propices à exercer ses talents de traileur.
Si tu as fait le Trail des Bosses alors tu peux te considérer comme un trailleur et seulement si.
Non je n'ai pas dit que les autres, c'était de la gnognotte..... Seulement l'authenticité fait la différence.
L'authenticité ? qu'est-ce que c'est ? Ah non! suffit, vous voulez ma peau ou quoi ?
Allez ! Salut.
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6 commentaires
Commentaire de francois 91410 posté le 27-05-2009 à 11:52:00
récit passionné et passionnant, merci de nous l'avoir fait partager
Commentaire de Mustang posté le 27-05-2009 à 14:09:00
récit passionnant et détaillé!! bravo
Commentaire de Lucien posté le 28-05-2009 à 21:10:00
Très bien seapen, courir cool est un réel plaisir. Si c' est ton plus beau trail alors je le ferai dès que posssible. Salut et merci pour les infos. A la prochaine si l' on se croise, je vois que chacun de nous réalise son propre bonheur.
Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 31-05-2009 à 22:17:00
Quelle précision dans le récit ! Tu fais comme le Mustang, tu enregistres tes commentaires en courant ?
Commentaire de patcap21 posté le 01-06-2009 à 20:18:00
Encore bravo pour ta course Michel et merci pour tes récits toujours aussi passionnant.
Au plaisir de te recroiser sur les chemins.
Pat
Commentaire de bluesboy posté le 07-06-2009 à 21:49:00
Récit passionné d'une course passionnante.Une de tes remarques me fait plaisir (si tu n'as pas fait le trail des bosses tu n'es pas un traileur) donc comme je l'ai fait il y a 3 ans ,je suis un vrai traileur .....
C'est quand mème un trail très dur qui ne fait que monter et descendre (il porte bien son nom )ce qui explique le petit nombre de participant
Est t'il plus costaud que le trail des forts ?
A plus
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