Récit de la course : L'Echappée Belle - Intégrale - 152 km 2024, par franck de Brignais

L'auteur : franck de Brignais

La course : L'Echappée Belle - Intégrale - 152 km

Date : 23/8/2024

Lieu : Vizille (Isère)

Affichage : 625 vues

Distance : 152km

Objectif : Pas d'objectif

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Elle est chaude cette aventure !

Quelques mots pour partager avec vous la bambée 2024 en Belledonne !

Une préparation très légère et une grande méconnaissance de moi même (je n'ai que 50 ans !... j'ai encore le temps !) ont bien failli avoir raison de mon finish à Aiguebelle. 

Départ avec Ewi et Raya, nous allons nous suivre à quelques places près jusqu'à la Pra. Il fait bon, frais, le lever du jour est magnifique. Les sentiers jusqu'à la Pra sont très faciles... bref, tout va bien ! 


Un début de course au top jusqu'à la Croix, vraiment de bonnes sensations. Je me rends compte au sommet, après avoir embrassé la Croix, bien sûr, que j'ai 45min d'avance sur 2017... et je fais une grosse bêtise : je me dis que je peux peut être faire mieux qu'en 2017... 
Sans vraiment m'en rendre compte, je vais chercher à accélérer, à aller plus vite (même un tout petit peu !) que la gestion, gestion, gestion obligatoire de cette course. 

Je tombe 2 fois dans la descente de Freydane, ça ne m'arrive jamais de tomber : je veux aller trop vite.
La température grimpe, je m'en rends bien compte, mais je ne ralentis pas comme je devrais le faire. J'arrive au refuge Jean Collet complètement dans le rouge. Au lieu de m'assoir à l'ombre et me poser en me réhydratant, je perds une énergie folle à essayer de m'alimenter dans le désordre (et tenter de me frayer une place au ravito au milieu de certains accompagnateurs...envahissants....) 

L'enchaînement mine de fer/brèche fendue/descente au Habert signe le début de la fin. Je m'écroule complètement en plein cagnard à la montée. Plus possible d'avancer... Pas d'erreur d'hydratation ou de nourriture : je suis en surchauffe complet. Mais je ne m'en rends toujours pas compte, je panique. Je suis tellement déçu pour Caro : elle devait faire le 3ème tiers avec moi et je ne sais même pas si je pourrai atteindre le Pleynet ! Je lui envoie un message : je ne tiendrai pas jusqu'au bout, je lui propose de m'accompagner sur la section Pleynet/Gleyzin. Je préviens aussi Ewi avec qui nous jouons au yoyo : je ne pourrai pas terminer. Il me propose de le suivre et de prendre la décision au Pleynet. 

Les heures qui suivent sont un véritable calvaire : descente exigeante et interminable sous la brèche. Je descends comme une patate, je subis, je subis, je subis... Coup de fil de Xian, il tente de me convaincre de continuer... je raccroche en ne promettant rien : je suis toujours convaincu que ça ne passe pas. Enfin le ravito du Habert. je bois beaucoup, mange pas assez (rien ne passe).... et je garde toujours en tête mon chrono précédent : 30 min d'avance sur 2017 !! 

En route pour l'aigleton et la vache. Le soleil décline puis se couche entre les 2 cols. Ca va mieux, mais je ne fais toujours pas le lien avec la chaleur. Descente du cul de la vieille et interminable chemin de croix vers le Pleynet. Heureusement le binôme avec Ewi permet de s'occuper un peu. Nous prenons la décision, si nous y arrivons, de schunter le Moretan. Je reprends un peu d'énergie. 

Le Pleynet, il est 1h45... j'ai perdu 30 minutes sur le temps de 2017.... (je suis toujours sur cette satanée comparaison.!!) Caro n'est pas en tenue pour courir, je comprends donc qu'elle ne repartira pas avec moi. Je prends la décision de repartir et de voir ce qui se passera aux Gleysins. je me change, mange un vrai repas, tente de fermer les yeux 15 minutes sans succès et nous repartons avec Ewi. La fraîcheur de la nuit fait son oeuvre : je vais bien, je retrouve un bon rythme, de bonnes sensations... même le détour "surprise" par la cascade du pissou (c'est mignon hein...) ne me dérange pas. Nous discutons avec un gars qui parle de son grand raid... c'est au cours de cette discussion que je prends conscience, enfin, de ce qui ne va pas : la chaleur. Ce sont les mêmes symptômes qu'au grand raid : excellente énergie lorsqu'il fait frais, plus rien lorsque la chaleur est présente ! Il n'y a plus qu'à composer avec. 

J'arrête enfin mes comparaisons avec l'intégrale 2017, je vis la course au rythme des pas... et des barrières. Les Gleysins, nous avons 1h15 d'avance sur la barrière, mais je sais que si nous passons par le Moretan, la traversée de Périoule et encore plus la descente infernale en pleine chaleur auront raison de moi. Nous annonçons donc à la bénévole que nous prendrons le schunt. Je relativise et je suis finalement content de découvrir cet autre versant de la montagne, boisé il nous protègeras quasi tout le long du piège des rayons du soleil. La remontée de la pierre du carre est un enfer : chaleur écrasante et soleil. Il est 13h00, c'est le moment de plus chaud de la journée. Brutalement, en quelques minutes, je perds de nouveau toute énergie. Je n'avance plus, le mal de tête revient, mais je sais maintenant pourquoi, je n'ai donc pas d'inquiétude et je passe en mode "éco". 

Arrivée à Super Collet. La formidable team suiveuse est bien là. Caro en tenue pour courir. Bubulle va pacer Ewi, ça sent une fin d'aventure à 4. Madame Bubulle toujours très attentive et prévenante. Je croise Jano qui semble en bonne forme mais subit évidemment la chaleur lui aussi. 45 minutes d'arrêt, j'en profite pour faire descendre la température à l'ombre. Super Collet est très bruyant, je n'arrive pas à dormir, mais j'ai fait une croix sur une quelconque sieste. Un diot/frites fini de remonter le bonhomme. Nous repartons, montée sous un soleil de plomb puis redescente à la passerelle du Bens. C'est la prochaine remontée que je crains, je la connais par coeur : la montée au refuge des Férices, puis l'enchaînement avec la montée au col d'Arpingon. L'hypothèse se confirme encore et toujours, je monte en chauffe et mon corps se met en mode "sécurité". Je n'avance plus, mal de tête, envie de vomir. Malgré une hydratation très importante, une bonne gestion de l'alimentation, une boisson isotonic efficace. Mais mes camarades de jeu sont à mes côtés... et je sais pourquoi je suis dans cet état. Je prends donc patience et use celle des 3 compères en montant à Arpingon comme une limace asthmatique. Nous mettons la frontale pour la 2ème fois de l'aventure au col. La descente se passe bien, c'est l'ami Ewi qui commence à montrer quelques signes de grande fatigue; lui qui descendait si bien en début de course a maintenant du mal à suivre le rythme dans cette interminable descente vers Val Pelouse. 

Pause rapide (20 min env) pour recharger les 4 fantastiques. Nous continuons l'aventure. J'ai un peu de mal à suivre le rythme à la montée, mais au fur et à mesure la pêche et l'envie reviennent. J'ai hâte de voir les zouaves à la perche ! Ewi accuse de plus en plus la fatigue. il chute en avant en trébuchant sur une racine... j'ai vraiment eu peur : la même chute en descendant les Férices aurait été dramatique. heureusement à cet endroit ce sont de gros buissons (gavés de myrtilles !) qui amortissent sa chute. Pas de gros bobo, même si le genou et la frontale ont pris un coup. La remontée au col de la perche est son chemin de croix. Il doit multiplier les pauses pour reprendre son souffle. Nos pacers sont en or : Bubulle ouvre la voie, Caro veille à ne laisser personne derrière. Il reste une trentaine de mètres avant l'arrivée au col, Ewi a besoin de s'arrêter quelques minutes, nous lui proposons de nous retrouver au col. Mais arrivée en haut le vent se lève rapidement et violemment. Pas de zouaves à l'horizon... grosse déception, en discutant avec Vik le lendemain, j'apprendrai que lui et Magloire étaient bien là !. Je donne mon n° de dossard au bénévole et nous passons le col à 3. Nous nous posons pour attendre Ewi... qui n'arrive pas. Le vent est vraiment violent, nos gore-tex ne suffisent pas : il faut qu'on bouge ! Bubulle propose de retourner chercher Ewi, Caro et moi continuons le chemin. 

Ce passage au sommet du grand chat est long, très long, mais cette année il le sera encore plus : c'est un déchaînement de vent et de pluie. L'endroit est très exposé (c'est un sommet !) et n'offre aucune protection, je rentre en mode "réfléchis pas, avance" et je passe devant pour donner le rythme. Caro peut ainsi, à l'arrière, veiller à ce que je ne m'endorme pas ! Je ne reconnais pas grand chose du passage et encore moins de la descente qui suit. je suis persuadé que nous empruntons un nouveau chemin... alors que ce n'est pas du tout le cas !
Tout ça commence à me gaver et je propose à Caro de descendre en trottinant. La forme est là malgré les 130 km parcourus : il fait, enfin, frais. Je suis tellement content de retrouver cette fraîcheur que j'enlève ma gore tex et cours sous la pluie et le vent en T-shirt. 

Nous arrivons, enfin, au ravito. Nouvel emplacement, 3km avant l'ancien. Plus de structure en dur, Des barnums sont installés. Les bénévoles sont fantastiques, mais la météo rend le site glauque, je pensais attendre Bubulle et Ewi içi, mais pas dans ces conditions. Heureusement ils arrivent moins de 10 min après nous. Nous repartirons donc tous les 4 ! Madame Bubulle nous fait la grande surprise d'être là elle aussi : "ben quoi, c'est l'horaire prévu par Bubulle dans la roadbook !" Cet homme et cette femme sont extraordinaires ! croissants, pains au chocolat...et orangina, rien ne manque dans la besace de bubulette !  Tout ça est le bienvenu pour affronter la dernière partie. 

Bubulle, dès la sortie du ravito, prend les choses en main et sera d'une efficacité redoutable sur les 3 km de ligne droite et plate avant la montée à Montgilbert. Posture marche nordique pour tout le monde, nous allons parcourir les km 137,138 et 139 à très exactement 6 km/h... une machine ! 
La montée sera beaucoup moins "engagée". Ewi est complètement "roti" et de nombreuses pauses sont nécessaires. La pluie s'est arrêtée, nous sommes dans le nuage... heureusement que l'arrivée est proche ! Nous finirons par atteindre le plateau, le contourner et prendre, enfin la descente qui va nous mener à la cloche. J'insiste comme un gros lourdeau auprès d'Ewi pour recommencer à courir et je partage avec lui ma théorie : "à un moment donné de la course, tu as tellement mal de partout que courir ou marcher est aussi douloureux... autant courir ça durera moins longtemps !". Ca marche et il se met à courir ! Nous dévalons (tout est relatif...) la pente. C'est grisant de pouvoir, enfin, avancer normalement. 

Ce trottinage tiendra jusqu'à l'arche d'arrivée que nous franchissons à 4 et je suis heureux de tenir la main de ma femme pour ce moment là ! 

Content d'avoir croisé plein de monde sur ce site d'arrivée, dont les zouaves !! Quelle équipe fantastique ! 

Merci à tous pour la bonne énergie que vous avez largement partagée. Elle m'aura permis de terminer, sans grand émotion, mais sans regrets. L'émotion est par contre bien présente à la pensée de tous ces moments partagés. C'est peut être ça que je viens chercher sur l'échappée belle ! 

 

Franck 

7 commentaires

Commentaire de Mazouth posté le 26-08-2024 à 20:43:42

Encore un grand bravo, tu m'as fait vibrer !! (surtout samedi quand je me couche à plus de 2h du mat' en me disant que de toute façon il faudra bien attendre encore quelques heures pour vous voir pointer au Bourget et que donc vaut mieux aller se coucher)
Merci pour ce récit qui peut-être très utile pour tout le monde : dès que la chaleur fait son travail de sape, pas si facile de mettre le doigt dessus.
Remarques en vrac :
- Pierre du Carre à 13h, OMG c'est dur ça !
- Croiser Mme Bubulle sur l'EB ça porte bonheur (pareil pour Mme Spir, c'est du vécu)
- Se mettre dans les pas de Bubulle après le Bourget ça porte bonheur aussi... c'est du vécu aussi ^^

Commentaire de Benman posté le 27-08-2024 à 11:16:05

Quelle aventure encore une fois. Il n'y a que les ultra pour nous procurer des émotions pareilles, et constituer des binômes mythiques. Progresser en groupe soudé est un énorme plus. Bravo d'avoir su en profiter pour boucler une nouvelle page à mettre à ta notice de machine.
Merci pour ce récit

Commentaire de Dahus69 posté le 27-08-2024 à 11:47:37

Bravo à toi et à toute la famille "Brignais", et je comprends bien que le côté aventure partagée reste dans tes souvenirs le plus important. A+

Commentaire de Cheville de Miel posté le 27-08-2024 à 14:17:26

Bravo Franck et toute ta team ! J'ai suivi ça de près bravo pour la force mental. C'est très fort d'aller au bout! T'as compris pourquoi je ne fais jamais les mêmes courses, la comparaison bouffe trop la tête ! Bravo, bravo, bravo!

Commentaire de xian posté le 27-08-2024 à 14:34:26

mouaich... le surnom de Machine n'est pas usurpé. je t'avoue que je n'étais pas trop rassuré au tel vendredi soir. et puis suivre de loin les adaptations de plans pacing, ce n'était pas forcément bon signe non plus. et puis, ça l'a fait ! avec une très bonne décision stratégique de zapper le Morétan. bon, le trail, c'est définitivement un sport d'équipe, et c'est ça qui est le mieux, non ?

Commentaire de jano posté le 28-08-2024 à 13:38:25

Bravo de n'avoir rien lâché, clair que la chaleur était terrible.
après la pierre du carre, j'ai expérimenté le mouillage intégral dans le torrent et c'est vraiment dingue comment ça fait descendre en température...refait à tous les points d'eau suffisamment fournis ensuite (claran, bens, férices...), ça m'a permis de rester relativement frais.

Commentaire de patrovite69 posté le 05-09-2024 à 14:30:00

Bravo pour avoir fini ce chantier.
Comme tu le sais maintenant j'étais en tenue pour courir avec toi au Pleneyt mais si j'étais partie de là on aurait pas fini ensemble, pas la caisse pour.... Et arriver avec toi c'était vraiment un chouette moment qui aurait manqué!

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