Récit de la course : Ultra Trans Aubrac - 106 km 2023, par Grego On The Run

L'auteur : Grego On The Run

La course : Ultra Trans Aubrac - 106 km

Date : 22/4/2023

Lieu : Bertholene (Aveyron)

Affichage : 799 vues

Distance : 106.5km

Objectif : Pas d'objectif

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Un Ultra bien mouillé : sinon rien !

Avec des photos tout à fait décadentes sur mon blog :

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22 avril 2023 : 50 ans et toutes mes jambes
Je ne pouvais pas manquer l’occasion de marquer le coup en courant un Ultra le jour d’un anniversaire qui marque le passage vers les quinquas. Et c’est donc en famille avec femme et enfants que nous prenons la direction de Rodez en avion (oui je sais c’est mal, mais c’était l’occasion d’un baptême de l’air pour mes enfants).

Arrivés à Saint Geniez d’Olt nous faisons le constat qu’il faudra profiter de ces rayons de soleils lorsque nous pénétrons dans le centre culturel pour le retrait des dossards. Ce seront les seuls du séjour.

Les prévisions météo pour le jour du départ sont de plus en plus mauvaises. Il pleuvra c’est certain, cela sera une édition compliquée sans aucun doute.

Un départ en fanfare ce samedi matin 6 heures au pied du château de Bertholène
Un réveil à 3 heures du matin je sors de la résidence Goélia à 3h30 en laissant femme et enfants qui dorment à poings fermés. Je croise 3 traileurs qui comme moi se rendent au départ du bus sur le parking du gymnase. Je leur demande s’ils peuvent me conduire jusqu’au départ des navettes (situé à 800 mètres). Je m’entends dire « pas possible on n’a que 3 places dans notre voiture ». Pas de problème je ferai les 800 mètres à pieds en passant devant le magnifique château de la Falque.

Départ de la navette à 4h15 comme prévu pour 30 minutes de lacets où je manque de vomir à plusieurs reprises. Arrivé au gymnase de Bertholène pour l’attente finale qui durera moins d’une heure. Finalement je ferai parti des 10 derniers à monter les escaliers qui mènent sur les parvis du château et…c’est une grosse erreur. Il y a un bouchon sur ce single track nous empêchant d’arriver à l’heure dans le sas du départ. Finalement je me faufile, et arrive dans le pack, le départ est retardé de quelques minutes pour permettre à tout le monde de s’entasser. Il ne fait pas vraiment froid. On est bien. La pluie c’est pour plus tard. Je reste en T-shirt sans même avoir besoin de la Gore Tex à la Mickey (c’est pour plus tard). Attention de ne pas dénigrer la Gore Tex Shake Dry à 250 g (et autant en euro) : c’est ce qui va me permettre de terminer cette course qui va en user plus d’un.

Autant le dire tout de suite cette Trans Aubrac 105 kms va connaître un taux d’abandon aussi élevé qu’une course beaucoup plus difficile (l’X-Alpine 2022) avec 44% de coureurs qui ne franchiront pas la ligne finale ! Certes…le niveau des coureurs n’est pas le même sur les deux courses (qualité de l’échantillon différent donc des chiffres non comparables).

Revenons à la course. J’arrive à me faufiler pour partir dans les premières lignes en laissant derrière moi l’embrasement et le feu d’artifice de Bertholène, il fallait faire un choix.

La vitesse de départ n’est pas loin de celle d’un semi marathon, c’est normal, le chemin de 4*4 est très roulant parfois en légère descente. L’aube pointe son nez. J’aime beaucoup cette première partie, belle et plutôt agréable à courir. De magnifiques villages (plutôt des bourgs) sont traversés. Et puis il y a cette très technique descente sur Saint Come d’Olt : village qui est sur le tracé du chemin de St Jacques de Compostelle, quelques coquilles gravées sur la rue sont là pour nous le rappeler. J’ai plutôt le guane, certes cela ne va pas durer, mais ça on le sait tous !

Saint Come d’Olt, km 23, il est 8h33 après 2h26 de course, clt. 88
Ce n’est pas le moment de perdre trop de temps, on fait au plus vite, on sort et puis…on se rend compte que l’on a oublié ses gants après 50 mètres ! Demi-tour, on peste, on cherche ses gants, on les retrouve et c’est reparti dans l’autre sens. Le genre de truc qui vous énerve alors que l’on avait super bien fine tuné la pause ravito à la seconde près, tout est annulé par un oubli de matériel. Je déteste cette montée qui vous casse les pattes à la sortie du ravito de Saint-Côme. Car oui je pense que cette partie entre ce ravito et Laguiole est bien la partie la plus difficile de cet Ultra. Il faut prendre son mal en patience car les montées sont là pour vous démoraliser. C’est « courable mais comme on est fatigué de relancer, on ne court pas, et on est démoralisé ». Au moins quand c’est du D+ à 10/15% pas d’état d’âmes à marcher en revanche quand c’est en léger faux plats et que l’on a du mal à relancer c’est assez éprouvant pour son self estime. Les portions sur bitumes sont les plus terribles, je devrais être capable de courir et bien non. Ce n’est pas un jour avec. Il faudra que je m’y fasse jusqu’à la fin.

L’abbaye de Bonneval, km 32, il est 10h04 après 3h56 de course, clt. 106
La chute dans le classement dit tout. Je me suis bien fait dépasser sur cette partie. A noter que le temps est toujours bien sec, et qu’il n’est pas encore temps de sortir la Gore Tex même si on sent que le ciel commence à être menaçant, au moins le soleil n’est pas brûlant, il est inexistant.

Je me répète mais cette partie jusqu’à la Vitarelle est encore plus dure que la précédente. Je n’ai plus de jus. J’ai soif. Sur la toute dernière partie bitumée jusqu’à la Vitarelle j’ai pour habitude de courir devant les nombreux supporters parce que marcher cela ne se fait pas, et bien autant le dire je marche et si vous n’êtes pas content c’est pareil !

La Vitarelle, km 42, il est 11h41 après 5h33 de course, clt. 115
Encore un glissement au classement général qui en dit long sur l’état de forme de votre serviteur. Merci pour les citernes d’eau qui font du bien. Le reste du chemin (des chemins caillouteux entre des prés protégés de barbelés) est parfois technique avec de gros cailloux et de la boue pour vous fouler les chevilles. J’ai beau connaître par cœur cette Trans Aubrac (7ième participation) j’ai toujours autant de mal à apprécier le temps qu’il faut pour arriver à Laguiole : c’est Lonnnnnnnnnnnnnng.

La pluie commence à tomber : attention c’est la stratégie Gore Tex de la tête aux pieds qu’il faut impérativement mettre en œuvre. Cette pluie qui commence à tomber n’arrêtera plus du tout jusqu’à l’arrivée … dans la résidence Goélia lorsque je rentrerai avec mon sac de change et le cadeau finisher sur le dos à 22 heures.

En quittant le chemin de terre et en mettant le pied sur le bitume de Laguiole ma famille est présente pour m’accompagner jusqu’au gymnase. Nous prenons notre temps d’autant que mes jumeaux ont 5 ans mais ne marchent pas encore à 5kms / heure. Arrivés au gymnase c’est un peu la cour des miracles car beaucoup de coureurs sont trempés, c’est parfois détrempé par terre. Je dois me changer pour mettre un autre T-shirt, manger et manger encore. Il pleut de plus en plus et j’ai de moins en moins envie de sortir de ce ravito pour aller courir.

Laguiole, km 53, il est 13h49 après 7h42 de course, clt. 115

Dans le ravito gymnase, toute la famille est là. Je me change pour un Tshirt. J’enlève mon cuissard pour rester en slip et j’ajoute mon pantalon décathlon imperméabilisé à 80 euros qui demeure mon meilleur achat de course à pied de ces 10 dernières années (il a vu l’UTMB, le Tor, des STL) car il m’a permis de prévenir l’hypothermie lors des toutes ces courses, et ma veste Gore Tex Shake Dry à la Mickey ; vous savez celui qui ressemble à un sac poubelle ! Donc oui pour le haut, seulement un T-shirt et une gore tex. J’ai bien appris la leçon des experts de la Croix Rouge lors de mon hypothermie en 2019 sur la SaintéLyon : ce qu’il faut éviter à tout prix c’est d’être mouillé de l’intérieur ! Ne jamais avoir un textile détrempé à même la peau. Tout faire pour éviter cela !!!! Donc l’idéal cela serait d’être à poil sous une gore tex…sauf que cela frotte sur la peau, donc on met juste un T-shirt. Le piège ? Vouloir être trop protégé par des textiles qui vous feront transpirer et qui feront que vous serez mouillé « de l’intérieur ». Merci la Croix Rouge pour cette leçon qui me permettra durant la TDS, le Tor et la STL de ne jamais plus mettre le clignotant.

A la sortie du ravito mes enfants me suivent à la semelle et si j’accélère un peu trop, ma fille pleure de me voir prendre de la distance. Je dois rester avec eux et mon épouse qui est un peu plus loin derrière nous. Il pleut des cordes. Cela dit au rythme d’escargot de la famille il faut quand même un moment envisager de nous quitter malgré l’insistance de ma fille, 5 ans, qui a pris la ferme décision de terminer l’Ultra en ma compagnie. J’entrevois la coutellerie que nous allons traverser et je me dis que c’est le lieu idoine pour les divertir et leur permettre d’attirer leur attention.

Enfin, mes enfants sont occupés par le forgeron qui forgeronne des couteaux de Laguiole. Je peux prendre mon envol (enfin….euh je peux me remettre à marcher à un rythme de sénateur). Le pluie est plutôt fine mais elle requiert d’être complètement habillé des jambes à la tête d’un revêtement waterproof.

Le paysage est toujours le même, mais même sous la pluie c’est joli. J’ai la chance de revoir mes enfants des heures et kilomètres plus loin à environ une heure du buron des Buals à l’intersection d’une route. Ma fille veut encore me courir après ! Ce sont des pleurs qui s’ajoutent à la pluie. Heureusement qu’une bénévole est là pour l’intercepter car ma fille traverse la route alors que des voitures sont en train de passer : petit moment de frayeur.

Buron des Bouals, km 73, il est 17h38 après 11h31 de course, clt. 116
C’est le fameux Buron au ravito 3 étoiles sauf qu’arriver à 17h38, il n’y a plus rien de 3 étoiles à se mettre sous la dent. De toute manière avec le temps infernal et cette ambiance de cour des miracles hyper humide il ne faut surtout pas traîner dans ce trou à « abandonners » (à prononcer comme la terminaison de « finisher »). En effet de nombreux coureurs sont en train de se dépoiler complètement mouillés pour ne plus jamais repartir. Vite, vite, je dois déguerpir et affronter les bourrasque de flottes. Et évidemment alors même que je ne suis pas resté plus de 10 minutes, je sens le coup de froid en sortant. Vite il faut courir dans cette descente boueuse et caillouteuse pour me réchauffer, et surtout essayer de sécher sous ma Gore Tex. Au niveau d’Aubrac là où le sentier remonte légèrement pour aller sur la route mon fils qui est derrière la vitre du restaurant/salon de thé me fait signe, quel bonheur de voir sa bouille. La famille est bien à l’abris en train, j’imagine, de siroter quelque chose de chaud. Je leur fais un signe mais continue mon chemin. Je ne les reverrai que tard dans la soirée en rentrant à la Résidence Goélia une fois l’épreuve terminée. Cela me donne un élan incroyable pour continuer cette lutte contre les éléments.

On remonte une dernière fois sur les hauts plateaux pour dire au revoir à l’Aubrac et amorcer la descente sur Saint Geniez d’Olt non sans avoir traversé au préalable une descente singulière dont tous les coureurs se rappellent : à savoir une descente le long d’un fil barbelé dans les tourbières. La technique de course à adopter : surtout ne pas vouloir faire le funambule, tant pis, il faut aller tout droit même si on a de l’eau jusqu’au genou.

Enfin je quitte les plateaux pour une longue descente sur une piste bitumée ou gravillonnée (je ne sais plus) pour laisser définitivement l’Aubrac derrière soi. La pluie est toujours là, incessante : parfois très drue parfois légère. On quitte la piste pour piquer vers la forêt sur la droite.

Cascade de Lacessat, km 87, il est 19h10 après 13h03 de course, clt. 105
Juste après cette cascade c’est un décor de marécage sur quelques mètres. J’alterne petit trot (parfois), et marche à pied (surtout). On va traverser ce passage tellement inoubliable des rizières du Mékong après avoir traversé la rivière avec l’aide d’une corde qui ne me sert à rien, je glisse et me retrouve avec de l’eau jusqu’à mi cuisse. Un vrai bonheur. C’est la partie la plus héroïque de cet Ultra qui se transforme l’espace de quelques dizaines de minutes en aventure extrême dans les marécages. Je me souviens d’un changement de parcours puisque nous suivons une piste de 4*4 plutôt carrossable que nous n’avions jamais emprunté dans aucune des autres éditions.

Je trouve le temps très long, comme si des kms avaient été rajoutés à la suite de ce nouveau parcours.

C’est la nuit lorsque j’arrive au magnifique village de St Martin de Montbon, j’ai trop tardé à mettre la frontale, je ressens une fatigue oculaire. J’aime beaucoup cet endroit qui marque un point d’inflexion de cet Ultra. Il reste juste une petit côte très ardue et ensuite c’est presque fini.

Saint Martin de Montbon, km 98, il est 21h07 après 14h59 de course, clt. 103
Juste cette petit côte de la mort qui tue, toute petite et ensuite c’est un chemin de plateau qui est très courable, de jour. La nuit c’est quand même toujours assez compliqué. Je sens vraiment sur cette partie du parcours que je ne suis pas en jambe. D’habitude je cours toute la portion. Cette fois-ci je n’ai pas l’énergie (pas le guane). Je me fais dépasser même par des minettes (des relayeuses… certes). Mais j’en ai un peu marre de devoir faire attention à ne pas glisser sur ce terrain miné. Et cette pluie qui n’en finit plus … J’essaie de manger pour me requinquer, mais rien n’y fait. C’est plus long que d’habitude cette portion.

Enfin la descente ultime, puis le sentier le long du Lot. C’est bientôt la délivrance, c’est bientôt plié. La fameuse bâtisse sur notre gauche avec cette énorme cheminée, c’est l’entrée dans Saint Geniez d’Olt. On ne peut pas dire que les derniers hectomètres avec cette traversée du camping bungalow soit la plus glamour du parcours, on va même l’avouer maintenant, c’est la portion la plus moche de tout cet Ultra et ce sont les derniers 300 mètres.

J’attends juste à l’entrée du gymnase que mes enfants/épouse me fassent signe. Or je vais apprendre que finalement ils m’attendent à la résidence. Je me fais dépasser par un autre coureur alors que je suis à l’arrêt devant l’entrée du gymnase surchauffé. Zut, cela va me coûter la 101ièm place ! Je rate le « one ô one » pour avoir attendu mes enfants qui n’étaient finalement pas là.

Remarquez j’ai 50 ans aujourd’hui même, ce 22 avril 2023, et finisher d’un 105 kms, j’ai un peu plus d’expérience que celle d’un coureur d’Ultra « one ô one ». Cela n’aurait pas eu de sens.

Les chiffres :
Finisher en 16 heures 13 minutes

Classement : 102ièm vs 241 finishers (soit 42%) vs 426 partants (soit 24%)

Taux d’abandon au scratch : 43% (taux d’abandon record pour la Trans Aubrac 105)

Catégorie V2H : 10ièm vs 48 finishers vs 101 partants (taux d’abandon de 52%)

1 commentaire

Commentaire de caro.s91 posté le 08-07-2023 à 12:00:58

Bravo , tu es allé au bout !
De mon côté j'ai fait partie des abandonners du Buron. J'étais gelée, trempée et pas de change ni d'assistance alors que les bénévoles voulaient que je reparte. J'ai bâché !

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