L'auteur : poucet
La course : Ultra Trail di Corsica - 110 km
Date : 5/7/2018
Lieu : Corte (Haute-Corse)
Affichage : 3108 vues
Distance : 110km
Objectif : Se défoncer
Partager : Tweet
22 autres récits :
Je l'avais pourtant préparé sérieusement cette Restonica, à étudier le parcours, tester le matériel, les chaussures, à enchainer les séances de bosses avec bâtons, à aller gouter la caillasse sur l'Ultra de Haute Provence, multiplier les massages de mes pieds à la crème NOK . Dans la tête j'avais accepté l'idée de ne pas courir beaucoup, de subir la technicité du terrain, de prendre le temps. Finalement rien de s'est déroulé comme j'aurais souhaité ... J'ai vécu un petit moment d'enfer et pour la première fois j'ai dû me résoudre à bâcher. Je suis bien sur un peu déçu de ne pas être allé au bout. Mais pas trop finalement parce qu'au-delà de la course j'aurai passé de super moments en Corse, en compagnie de Thierry ... Nous avons été bichonnés tout au long du WE par Hélène et Damien puis accueillis bars ouverts par la joyeuse équipe du THK UTHK, Charly, Véro, Yannick, Nathalie et Morgane qui ont eu la gentillesse de nous faire une petite place tout confort dans leur camp de base ...
C'était chaud bouillant Jeudi soir sur le cours Paoli. Il y avait beaucoup de monde sur les terrasses, beaucoup de monde sur la place de la Mairie pour assister au départ de l’Ultra Trail di Corsica … Dans la foule j’ai pourtant eu l’improbable surprise de retrouver le père Didier, jeune retraité postier, en vacances dans le secteur avec son épouse Emmanuelle. Le monde est petit, FB fait le reste … Le cliquetis des bâtons et la mélopée des souffles saccades aura vite fait de nous éloigner de l'effervescence de Corté pour nous plonger au cœur de la nuit ...
1200m de positif pour se mettre dans le rythme, sur un sentier étroit, raide et technique. Je me débrouille vraiment comme un manche avec les bâtons et plusieurs fois j'ai failli embrocher le pauvre Snoopy qui était callé juste derrière moi ... Thierry a embrayé a un rythme plus soutenu après le premier ravito d'El Padule. Je suis reparti sur un tempo tranquille, jouant au yoyo suivant l’inclinaison de la pente avec l'inséparable duo Charly - Yannick ...
La nuit s'est plutôt bien passé, les conditions météo étaient impeccables et le parcours très agréable ... Beaucoup de caillasse déjà, des passages techniques bien sur, mais rien d'insurmontable. Je menais mon petit train train lorsque j'ai eu la désagréable sensation d'être accroché par des épines en frôlant un buisson, deux aiguillons violents au niveau du poignet ... Rien d'anormal lorsqu’on gambade dans le maquis Corse, je n'y ai pas prêté plus d'attention que cela. Puis alors que nous arrivions au bout de la nuit, sur une section facile au milieu des vaches, ma cheville droite est à nouveau parti en vrille ... Là j'ai enragé, je m’en suis voulu d’être parti sans strapper, trop confiant après le sans faute du Mont d’Or deux semaines plus tôt. Il a fallu que je stoppe quelques minutes le temps que la douleur s'estompe avant de poursuivre cahin caha dans la longue plongée sur Calacuccia.
Charly et Yannick m'ont retrouvé en bas et nous avons trottinés ensemble sur le bitume autour du lac pour rejoindre le 3ème ravito ...
Il était temps de se poser un instant, de se délester de la frontale, faire un peu de ménage dans le sac et profiter d'une table bien garnie, notamment avec du fromage et de la charcuterie locale ... excellent. Nous sommes repartis ensemble à l'attaque du gros morceau de la journée, le fameux Monté Cinto. J'avais mis en route une petite foulée pour entamer l'ascension sur un gentil bitume. Mais les copains m'ont rapidement rappelés ... C'est sur la gauche qu'il fallait prendre, et là changement de rythme instantané, marche obligatoire pour tous ...
En attrapant mes bâtons j'ai compris qu'il y avait un bug. Mes doigts et l’avant-bras droit étaient gonflés, c'était douloureux de serrer les poignées et plus encore d'appuyer ... Bizarre. La dessus, alors que je lambinais à deux à l'heure, j'ai chopé un point de coté sur la gauche. Lié ou pas ??? Je me suis appliqué a bien respirer, j'ai bien tenté de m'arrêter, rien à faire ... ce foutu point de côté m'aura accompagné toute le reste de la journée, en montée comme en descente. A ce moment, même si je peinais déjà pour suivre Yannick et Charly le moral était encore au top, le cadre magnifique, la compagnie des copains réjouissante et je ne doutais pas un instant de terminer la balade.
L'affaire ne s'est pas arrangée au refuge d'Ercu ... A partir de là les bâtons deviennent globalement inutiles. On dit souvent que pour performer il faut courir avec la tête et les jambes. Sur la Restonica ça ne suffit pas ... il faut les mains aussi !!! La fin de l'ascension du Cinto c'est purement de l'escalade, il faut lever très haut les yeux pour repérer les quelques balises ...Et donc c'était vraiment compliqué puisque je devais toujours anticiper afin de trouver des prises côté gauche ...
Sacré chantier pour arriver en haut ou je n'ai pas voulu déranger les bénévoles lourdement occupés par ailleurs ... Des gars allongés en vrac, un hélico qui devait arriver, une gamelle de soupe a surveiller sur un petit réchaud en plein vent, du saucisson à couper, des gobelet a remplir … Nous sommes allés profiter du spectacle tout en haut avant de basculer dans l'infernale descente de l'autre côté. Je n'étais vraiment pas vaillant et j'ai dit aux copains de ne pas m'attendre. Mais j'avais l'espoir de pouvoir me faire soigner en bas, je me disais que la route était encore longue et que j’allais forcement retrouver quelques sensations.
Cette interminable et parfois dangereuse descente du Cinto aura été un enfer. Je ne sais pas si c'est le fait d'être toujours sur la défensive, mais mes pieds ont dérouillés comme jamais ... J'avais fait le choix de partir avec les Raidlight en raison de leur solidité et leur excellent carénage. Si les chaussures ont parfaitement résistées, on ne peut pas en dire autant des petons dedans et j'avais déjà de grosses ampoules en bas. Hormis les paroles réconfortantes des gentils bénévoles Il n’y avait malheureusement aucune possibilité de soin à Ballone, ni possibilité de rapatriement … Bref, je n’avais guère d’autre choix que de repartir pour 13 km réputés "plus faciles" en direction de la station de Verghju ou nous avions la possibilité de retrouver un sac relais.
Certes nous sommes monté qu’a 2000m cette mais le final de l’ascension du "modeste" Ciottulu di i morri n’avait pas grand-chose à envier au "grand" Cinto. Au pointage du refuge j’ai appris que la France en avait mis deux aux uruguayens … un peu de baume au cœur mais les pieds toujours en triste état. Je m’étais un peu repris à y croire, imaginant me refaire la cerise a la table du ravito en bas et pouvoir compter sur la paire d’Adidas Riot dans mon sac relais pour terminer. Las, la descente a terminé de m’achever … plus de pied, plus de jus, plus de mental. J’ai dû m’assoir plusieurs fois sur des rochers (ça ne manque pas) pour retrouver mes esprits. A force de traîner j’étais même à sec de vivre, dépanné en pâte de fruit par un coureur sympa … Tous les gars qui me passaient étaient bien plus fringuant que moi. Danièle m’appelait toutes les 10’ pour savoir où j’e étais. Je marchais sur des braises, j’ai mis une éternité pour faire les deux derniers kilomètres … Ce fut un soulagement d’annoncer mon abandon au contrôleur.
L'infirmier présent sur ce point m'a donner deux Doliprane, ce qui a rapidement soulagé la douleur au poignet. Je ne sais pas ce qui m'a réellement piqué durant la nuit, un frelon, une araignée ??? En tous cas cette foutue bestiole a probablement contribué a ma piètre performance du jour ... Nous étions une bonne dizaine dans le même état d’esprit sous la tente du ravito, épuisés et découragés par la tournure des événements, a nous questionner si ce parcours c'était encore réellement du trail ??? Mais j’ai vu également des gars arrivés après moi se restaurer et repartir courageusement dans la nuit. Chapeau.
Pendant ce temps nous étions rapatriés sur Corté ou j’ai pu a nouveau trouver refuge chez les filles du THK qui avaient courus la veille sur le U Giru di Tombone, profiter d’une douche chaude réconfortante et de quelques heures de sommeil avant d’aller accueillir les courageux copains Thierry, Yannick et Charly, extraordinaires finishers de cette course démente, unanimes pour dire qu’ils n’avaient jamais rien fait d’aussi difficile !!!! Grand bonheur dans leurs yeux, grand bonheur de partager un peu de ces moments avec eux !!!
Nous avons profité de cette fin de WE au bord de la Restonica , puis dans les ruelles typiques de Corté avant de nous retrouver à la terrasse de la Rivière des Vins pour une belle soirée gourmande et conviviale !!!! Comme quoi on peut se louper sur une course et prendre quand même beaucoup de plaisir simplement a vivre ces moments peu banals avec les copains …
Merci à tous pour ces bons moments partagés ...
Hélène ma p'tite dernière et son chéri Damien ...
La joyeuse équipe de l’UTHK Charly et Véro, Yannick, Nathalie et Morgane
L’imprévu Didier et sa douce Emmanuelle ...
Et bien sur mon champion de compagnon Thierry …
Reste maintenant à rebondir. L’été n’est pas fini, avec encore un joli programme en perspective ...
A pied et à vélo. A suivre …
Accueil - Haut de page - Aide
- Contact
- Mentions légales
- Version mobile
- 0.11 sec
Kikouroù est un site de course à pied, trail, marathon. Vous trouvez des récits, résultats, photos, vidéos de course, un calendrier, un forum... Bonne visite !
8 commentaires
Commentaire de robin posté le 19-07-2018 à 11:31:57
Merci pour ce compte rendu. J'ai eu le plaisir de courir la Restonica il y a quelques années .En te lisant, j'ai "revécu" les sensations de cette course. Un grand bonheur d'être là tout en bavant un max au contact de ce terrain corse qui est sans pitié pour le coureur peu habitué au relief montagnard. Et encore la Restonica n'affiche que 65km. Alors je suppose qu'avec le 110km la barre doit être bien haute !
Bravo pour avoir oser l'affronter !
Commentaire de poucet posté le 19-07-2018 à 21:15:38
Merci Robin ... après cette expérience je m'étais dit "plus jamais", mais bon ... Pourquoi pas "juste" une Restonica !!!
Commentaire de Arclusaz posté le 20-07-2018 à 17:19:13
Magnifique parcours et magnifique récit même si la fin n'est pas celle qu'on aurait aimé pour toi.
Et je te pique pour recyclage le superbe "accueillis à bars ouverts" !
Commentaire de poucet posté le 21-07-2018 à 09:02:46
Ah ah ah ... tu as l’œil Laurent, ce n'était pas volontaire le bars ouverts !!! Sinon, on a bien RV au Flore début Décembre ???
Commentaire de Arclusaz posté le 21-07-2018 à 09:12:30
oui bien sur RDV au Flore ! c'est un parcours "un peu" différent malheureusement...
Commentaire de poucet posté le 21-07-2018 à 22:24:34
Tu parles du parcours Saintelyon allonge ? Plutot sympa non ???
Commentaire de Arclusaz posté le 21-07-2018 à 22:29:41
oui mais je voulais dire moins sympa que la Core !
Commentaire de poucet posté le 24-07-2018 à 07:53:10
Bah c'est sur que les Monts du Lyonnais ce n'est pas la Corse, surtout l'hiver et la nuit !!! Mais bon, je me sens plus a l'aise sur les chemins de la Sainté et je me réjouis déjà de ce parcours un poil rallongé !!! J'ai bien l'intention de préparer ça sérieusement ...
Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.