Récit de la course : L'Echappée Belle - Intégrale - 145 km 2016, par Sprolls

L'auteur : Sprolls

La course : L'Echappée Belle - Intégrale - 145 km

Date : 26/8/2016

Lieu : Vizille (Isère)

Affichage : 3316 vues

Distance : 144km

Objectif : Pas d'objectif

1 commentaire

Partager :

130 autres récits :

Echappée Belle 2016: l'estomac, c'est plus fort que toi

Version avec photos sur mon blog

Fin août c'est un peu le grand rendez-vous des ultra-traileurs, l'olympiades des sentiers de montagne interminables ! Il y a bien sûr les courses de l'UTMB qui doivent rassembler autour de 10000 personnes, mais aussi les courses du Grand Raid des Pyrénées et, depuis quelques années seulement et doc un peu moins connues des non spécialistes, de l'UT4M à Grenoble (ça c'était le WE précédent) et de l'Echappée Belle. 2016 était pour moi une année à trail donc comme tout bon ultratraileur, je prends date et fait de l'Echappée Belle mon objectif majeur de l'année: http://www.lechappeebelledonne.com/

Que cache ce joli nom qui évoque une douce promenade en campagne ? Il s'agit d'une traversée intégrale de la chaîne de Belledonne qui longe le Gresivaudan entre Grenoble et la vallée de la Maurienne. Peu de douceur en l'occurrence: c'est une course très technique réputée pour sa caillasse et ses sentiers en assez haute altitude, longue de 144km pour 11000m de dénivelé positif et autant de négatif, le tout dans un massif très sauvage que je connais peu malgré la proximité de Grenoble. Sur le papier elle avait tout pour me plaire et elle m'a fait de l'oeil dès la première édition en 2013 je crois où ma priorité pour l'UTMB l'a rangée dans le casier des trucs à faire dès que possible !

Je me construis un bon gros programme de préparation en vue de cet objectif qui commence dès novembre 2015 avec beaucoup de montées bien sûr pour le parisien que je suis afin de ne pas revivre les difficultés rencontrées en Andorre en 2014 où les montées raides m'avaient détruits mentalement et physiquement. La préparation se passe parfaitement jusqu'aux 80km du Mont-Blanc fin juin. Là je subis un gros coup de canif au moral: je retrouve mes problèmes digestifs récurrents après 10h de course malgré une grande prudence sur mes descentes et une attention à l'alimentation. Je n'arrive donc toujours pas à me débarrasser de ces soucis et je ne me vois pas refaire mon UTMB 2013 et ces longues heures de galères à mi-course (malgré l'euphorie finale)... Du coup je consulte une diététicienne du sport traileuse et teste quelques petites choses pendant ma reconnaissance du mois de juillet, mais sans conclusion probante, faute de temps suffisant. Ce problème est donc ma préoccupation et mon inquiétude principale à l'approche de la course en raison du copieux menu de 144km et 11000m de dénivelé positif qui ne pardonnera pas en cas de défaillance à ce niveau...

Hélas le physique ne semble pas vraiment au top non plus pour me rassurer pendant l'été: j'ai chopé une tendinite du releveur du pied gauche à la fin de ma reconnaissance du parcours qui m'oblige à un arrêt complet pendant près de 2 semaines fin juillet. Heureusement l'essentiel du travail foncier a déjà été fait. A la reprise (tranquille pour l'affûtage d'avant course), les sensations sont très moyennes, jambes lourdes, fréquence cardiaque élevée, des symptômes que j'attribuerais à la fatigue si je n'avais été autant au repos sportif et en vacances à cette période... J'essaie de me rassurer en me disant que c'est ce vers quoi tend la préparation à un ultra: être endurant plutôt que rapide, sans grandes sensations mais in-arrêtable une fois lancé sur mon sentier ;) Je me sens un peu mieux sur ma dernière sortie footing et je m'accroche à l'espoir que l’affûtage fasse bien son effet !

L'avantage c'est que ces sensations moyennes vont me conforter sur le besoin d'une course en-deçà de mes capacités physiques théoriques" et donc en premier lieu d'un départ très prudent: la 1ere moitié de la course sera orientée "gestion de l'estomac" !! En particulier je dois veiller à ne pas trop faire monter la fréquence cardiaque (en fait mon cardio tombe en rade 5 jours avant la course, pas le temps de le remplacer...), ce qui devrait je l'espère épargner l'estomac en début de course. On ne regarde pas la place, d'autant que le plateau semble plus relevé que ce à quoi je m'attendais malgré la concurrence des gros ultras de l'UTMB et du Grand raid des Pyrénées ( l'effet UMNT sans doute). Et si j'évite les soucis digestifs, la place finale devrait quand même être bonne à l'arrivée. Dans cet état d'esprit, j'ai donc beaucoup préparé l'alimentation en course en privilégiant notamment les compotes malgré leur poids dans le sac à dos. Heureusement mon père pourra me faire l'assistance sur quelques ravitaillements et donc m'alléger un peu pour ces compotes en particulier. J'atteins quand même les 700g de bouffe dans le sac au max sans compter la boisson !

La météo est similaire aux 80km du Mont-Blanc avec grand soleil et chaleur ! Un autre défi pour la digestion. Mais au moins je pourrai à nouveau profiter des paysages fabuleux de Belledonne.

 
Paré pour le départ ?

Paré pour le départ ?

3h30 de sommeil seulement la veille de la course, après une semaine peu reposante, tant pis on fera avec. 6h, c'est l'heure du départ dans le parc de Vizille. Je me rends compte que je ne suis pas dans le bon état d'esprit. Je suis plus focalisé par ce que mon estomac va donner en course plutôt que sur le plaisir d'être là et de participer à l'aventure. Tout ça est évacué avec le départ de cette joyeuse bande. On est vite dans la première montée vers le plateau de l'Arselle que j'aborde tranquillou en laissant volontairement partir le paquet de devant. A défaut de ceinture pour prendre ma fréquence cardiaque, je prends régulièrement mon pouls à la main pour vérifier que je reste sous les 150 puls. Il fait encore frais, c'est bien agréable ! Quelques petites descentes permettent de dérouler, tout va bien, je me détends.

Juste avant le premier ravito, j'entend un "Benjamin !". Surprise, c'est Sylvain des Raid Life qui est là pour encourager un pote. Je retrouve Jean au ravito et je prends mon temps. Je suis quand même à 2 doigt d'y oublier ma montre ! On entame un long passage très alpin mais sublime avec lacs, pierres et ciel bleu jusqu'au Pleynet. Mais également très exigeant !

La traversée vers le refuge de la Pra se passe parfaitement bien, toujours en contrôle. Je profite de chaque ruisseau pour me rafraichir les bras, les jambes et la tête avec une éponge. Globalement je n'ai jamais eu le sentiment d'être accablé par la chaleur. Au refuge, je prends à nouveau le temps de m'asseoir, voire de m'allonger et de manger un peu sans trop.

Passage aux lacs Robert et près du lac David, en route vers le refuge de la Pra
Photo organisation

Puis c'est la montée vers la Croix de Belledonne. La partie finale est quasiment entièrement déneigée, ce qui change pas mal la perception des lieux ! Dur avec l'altitude mais j'ai toujours le sentiment de gérer tranquillement mon effort. Descente cool et fluide même si les genoux tirent un peu dans le passage très raide et glissant qui suit le col de Freydane.

Au refuge Jean Collet, je m'allonge dans l'herbe parmi les personnes assez nombreuses installées sur place et déguste mon ravitaillement à nouveau sans précipitation, y restant un bon quart d'heure. L'organisme montre les premiers signes de fatigue en montant vers le col de la Mine de fer, que j'effectue à qqs encablures d'un traileur, Serge, accompagné sur la montée par 2 amis qui tiennent un bon rythme l'ai de rien les bougres ! Je le rejoins dans la petite descente avant la remontée vers la Brêche Fendue et nous papotons jusqu'au Habert d'Aiguebelle. Ce passage est très technique, pas de chemin ou presque, essentiellement un cheminement de pierres en pierres. Il faut être patient, ça n'avance pas bien vite et 2 petites remontées ponctuent la descente. Mais ce terrain me plaît beaucoup !

Arrivé au Habert d'Aiguebelle, je retrouve à nouveau Jean. Je m'allonge mais je me rends compte que l'estomac montre des signes de faiblesse. Pas très envie de manger... Un peu d'écoeurement... J'embarque surtout des compotes pour la suite et évite de trop boire. A nouveau une bonne quinzaine de minutes de pause pour laisser l'estomac se reposer aussi. je dois laisser Serge partir devant.

La montée vers le col de l'Aigleton est difficile. j'ai de bien mauvaises sensations physiques et la fin du col, que je ne connaissais pas, est un calvaire, extrêmement raide ! Et il s'enchaine avec le col de la Vache, autre pierrier fameux, en côte celui-là. Je me traine péniblement en haut me faisant doubler par 2 traileurs, Arthur et Renaud, mais c'est dur pour tout le monde, même le premier, m'assure le signaleur présent au sommet. Sur la montée j'arrive à avaler 2 compotes mais l'écoeurement est toujours bien présent.

Je gère en douceur la descente pour ne pas traumatiser davantage l'estomac. Il faut dire que le début est à nouveau bien technique donc il est difficile d'aller vite à nouveau. Le long des lacs du superbe vallon des 7 Laux j'ai pourtant la surprise de rejoindre Arthur et Renaud et de dépasser un traileur décidé à abandonner au Pleynet que j'essaye d'encourager. Les sensations s'améliorent au fur et à mesure de la descente finale et de la traversée vers le Pleynet, j'ai l'impression que ça va mieux et je prends les devants sur la fin de la descente plus roulante.

Mais je déchante très vite à l'arrivée au Pleynet où la nausée me reprend de plus belle. Peut-être un contre-coup de cette fin de descente où j'ai moins contrôlé... Je suis à 2 doigts de vomir et je ne peux rien avaler. Je m'allonge sur un banc mais ça ne passe pas. Je passe m'allonger dans la voiture de Jean mais pareil. La nuit tombe et l'envie s'envole très brutalement alors que je n'envisageais pourtant absolument pas d'abandonner au Pleynet jusque là. Je sais ce qui m'attend à ce stade du mal au ventre, plusieurs heures de galère à essayer de faire passer le mal au ventre, un vomito en cours en montée au milieu de la pampa... J'ai l'impression en plus d'être dans les choux par rapport à ce que je voulais faire sur cette course. Bref, le mental s'incline face à l'estomac ! :-(

C'est donc l'abandon, décevant quand il s'agit de l'objectif de l'année. Mais je n'étais pas prêt à aller au bout à tout prix. Je m'attendais peut-être un peu trop à cet échec depuis fin juin... Il sera dur de se remotiver pour un ultra tant que je ne saurai pas gérer mon estomac. Mais bon il y a déjà de quoi s'amuser en courant moins de 10 heures ;-)

 

 

1 commentaire

Commentaire de Shoto posté le 07-04-2019 à 10:00:54

Je suis tombé par hasard sur ton récit de la Diag des fous où tu finis presque main dans la main avec Emilie Lecomte. J'ai découvert tes talents de traileur proche de l'élite française ... mais aussi tes dons de conteur de récits kikouresques. Puis depuis 2016 ... plus rien, ... dommage ! car il était appréciable de partager tes aventures trailiques de haut vol. Tes problèmes gastriques auraient-ils eu raison de ta motivation à courir ? Rien n'étant insurmontable, stp trouve la solution ... et reviens nous vite car il est bien agréable de lire tes CR. ;-)

Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.

Votre annonce ici !

Accueil - Haut de page - Aide - Contact - Mentions légales - Version mobile - 0.06 sec
Kikouroù est un site de course à pied, trail, marathon. Vous trouvez des récits, résultats, photos, vidéos de course, un calendrier, un forum... Bonne visite !