L'auteur : Gazel
La course : Les Coursières des Hauts du Lyonnais - 103 km
Date : 12/5/2012
Lieu : St Martin En Haut (Rhône)
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Distance : 103km
Objectif : Terminer
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Depuis ma décision de ne pas participer au marathon de Paris 2012, je me cherchais des courses afin d'avoir un objectif d'entrainement. Et la voie ouverte par mon collègue David d'aller vers le trail moyen-long me convenait (sa participation aux Templiers 2011 m’avait fait envie) : ces balades en montagnes, forêts et campagnes sont pour moi des moyens de se ressourcer et d'équilibrer ma vie en compensant tout le temps passé sur une chaise pour mon travail en bureau....
Aussi, après avoir couru au premier trimestre, un trail de 30 km chaque mois, je voulais choisir une grande épreuve. La proximité de l’épreuve de St Martin en Haut à 40 km de chez moi, et la date en mai (pas trop éloignée de la préparation marathon que j’avais quand même suivie avec mes collègues de la section Casino Running) ont emporté ma décision. Mais il restait à choisir la distance : 47 ou 103 km ?? Mon envie forte de tenter le 103 était freinée par une prudence acquise par l’expérience, renforcée par l’opinion majoritaire des coureurs . J’avais donc indiqué que je participais aux 47 km, jusqu’à la semaine précédente: ma décision a été tardive, j’ai seulement posté mon inscription pour le 103 le lundi pour le samedi, et j’en ai parlé à mes collègues qu’à partir du mercredi….Ainsi pas de stress inutile, mon unique ambition était de finir la course.
La dernière semaine, je ne cours qu’une fois 30 minutes, le mercredi. Les 2 soirs précédents, je prépare toutes mes affaires, soigne mes pieds en appliquant une crème assouplissante (je n’aurai aucune ampoule). Seuls 2 points sont bof : je ne dors pas toujours très bien, et mes jambes sont parfois lourdes dans la journée, mais le moral est au beau fixe.
Ce samedi 12 mai arrive enfin, le réveil sonne à 03h22. Je prends mon petit-déjeuner normalement et pars en voiture. Arrivée à la salle de sports de St Martin en Haut. Je suis surpris d’arriver dans les premiers, je récupère mon dossard, le 942 (comme je viens de la Loire, cela me semble un bon présage J), mes cadeaux (miel et saucisson) et discute avec 2 coureurs : le premier croyait que j’étais du team Running Conseil ( je portais le gilet gagné au Défi Vellave, estampillé Running Conseil), le deuxième venait de l’Isère, avait des bâtons et je lui ai exprimé mon doute quant à leur utilité (la suite me donnera tort…). Après le discours débrief des organisateurs (avec la passation des 2 présidents de l’association ATOS), nous partons vers la ligne de départ. C’est là que je croise enfin Michel, le seul coureur que je connaissais, et qui venait d’arriver (en tant qu’habitué de la course, il peut se le permettre) : on a à peine le temps de d’échanger 3 mots, de prendre une photo et le départ est donné !
Si la pénombre de la nuit prend fin, un léger brouillard retarde la vision au loin ; nous débutons par une côte dans le village de St Martin en Haut, cela m’étonne mais les gens courent, je n’ose pas marcher, c’est vrai que je suis dans le premiers tiers du groupe, alors que je m’étais promis de partir avec les derniers…La suite est à un rythme de 12km/h, je me sens bien et rejoins Michel. Je m’offre le luxe de le dépasser en descente et rester devant lui pendant 5km…Comme tous les luxes, cela me coûtera !
Au bout d’1h30, la pluie fait vraiment son apparition. Et pendant 2h, elle se fera plus ou moins continue et gênante. Le premier ravito, à St Laurent de Vaux, donne le ton pour tous les autres ravitos : variété des aliments solides : sucrés comme des pâtes de fruits, du chocolat noir, quartiers d’orange, ou salés avec des cacahuètes, biscuits TUC. Idem pour les liquides, avec possibilité de prendre du chaud (soupes ou thé). Bref, du ravito adapté à un ultra, à l’image de toute la course (dont le slogan est « une course pour des coureurs, organisée par des coureurs » !). Les organisateurs qu’on croise nous encouragent, et nous disent qu’on est même légèrement en avance ou trop rapide –au choix-. Mais se ralentir quand tout va bien est toujours difficile à faire.
Les montées et descentes s’enchainent, je marche comme tout le monde dans les montées, je me fais doubler par des participants avec des bâtons, et j’en profite pour discuter : on aborde l’expérience des courses longues, les blessures et les trails en général.
Vers le km 25, alors que la pluie s’intensifie et que nous abordons une zone sans protection forestière, je coure à coté de 2 autres coureurs : l’un deux demande si on peut l’aider à prendre son coupe-vent dans son sac à dos. Mon voisin s’arrête et l’aide. Je choisis de ne pas les imiter et de continuer à courir… Mal m’en pris, car c’est frigorifié, les mains gelées, que j’arrive au ravito de Duerne, à 37 km du départ, à un des points le plus haut en altitude. Je n’arrive pas à détacher mon sac à dos, et me réconforte avec une soupe chaude. Je fais des moulinets avec les bras et m’assois 5 minutes sur un banc, à l’abri. Je décide de me couvrir avec tout ce que j’avais dans mon sac, et me réchauffe progressivement. Je repars 15 minutes après, le moral et le physique remis d’aplomb.
Après Duerne, la pluie s’arrête progressivement, et le ciel nuageux, légèrement gris ne nous quittera plus jusqu’à la nuit. Le parcours monte et descend, passe près d’un joli lac de barrage, passe par des hameaux, alterne chemins et courts passages sur des routes.
La mi-course se fait attendre, et nous faisons un long détour autour de St Symphorien sur Coise avant d’arriver à ce ravito tant attendu, à 55km du départ : la moitié de la course !. Nous y voilà enfin, 6h55 après le départ, quelques spectateurs nous accueillent. L’organisation nous a amené un sac d’affaires personnelles, c’est l’occasion de changer de t-shirt, de chaussettes & chaussures et de montre GPS : mon collègue Vivien m’a prêté la sienne, qui avec sa batterie chargée me permettra de finir mon ultra. Rebelote, au ravito, j’alterne sucré et salé, un passage bienvenu au wc et je repars. Les premiers pas me font douter : les semelles de mes chaussures me semblent comme des planches, et je mettrai 1 à 2 km pour m’habituer au changement de chaussures (en plus, le fait d’avoir séché mes pieds et laissé à l’air 5 minutes a dû les faire gonfler).
Là, on va quasiment reprendre 10 km de montée : marche et quand je peux une peu de course. Cette montée en solitaire dure, et le ravito du grand Mazel devient l’objectif. Un petit loupé avec la montre GPS me fait décaler mon décompte de 1,5km, et je ne m’en aperçois pas tout de suite ; aussi je peste contre ce ravito qui n’arrive pas, à 13km depuis St Symphorien, mais qui sera à 14,5km ! Heureusement un coup de téléphone de ma femme et mes enfants me tient compagnie, ils me félicitent, et en même temps, cette conversation me questionne et m’insinue des sentiments mitigés : qu’est-ce que je fais ici, pourquoi je coure depuis si longtemps, combien de temps encore… ? Ces questions disparaitront avec mon arrivée au ravito du grand Mazel. Encore une fois, cela me regonfle, on discute avec les bénévoles, il y en a même un qui croit me reconnaitre depuis l’année dernière. Ma réponse le déçoit, car c’est mon premier trail au-delà de 70km ( 3 fois la saintélyon).
Après cette halte, seulement 10 km me sépare du prochain ravito, à Ste Catherine. A un passage en lisière de forêts, j’avertis deux coureurs qui devisaient gaiement et qui prenaient la mauvaise route. Du coup, pour me remercier, je leur interdis de me dépasser ;).Ce qui ne durera pas longtemps… Un des 2 me conseille de ne pas courir trop vite dans les descentes, afin de garder des cartouches. Mais bon , l’envie de ne pas prendre trop de retard et de profiter du jus tant qu’il y en a, me permettent effectivement de rattraper mon retard en descente par rapport à ce que je perds en montée. Ce qui me permet de courir plus ou moins avec eux jusqu’aux abords de Ste Catherine, ou plutôt deviner Ste Catherine. Car nous y arrivons par le camping et les caravanes, par le même chemin que celui emprunté lors de la saintélyon…Chouette ! je pense, nous y voilà presque. Hélas , les organisateurs nous ont concocté un détour ( eh oui, les 4000m de denivellé, faut les placer) : on part à droite en descente, les 100 premiers mètres, je me lâche et coure, mais mon genou me lance des piques de douleur. Je me fais doubler par deux compagnons, qui s’éloignent progressivement, je ne les reverrai plus…A partir de maintenant, je marcherai aussi dans les descentes…Et là, justement la descente ne se termine pas, elle se prolonge au gré des sentiers, des champs.
Finalement on amorce la remontée vers Ste Catherine, qui s’avère peut-être moins sinueuse, mais bien raide. Le ravito est à a première maison du village, il y a en plus contrôle des sacs et de l’équipement obligatoire. Je m’allonge au sol afin de faire un break et de soulager mes jambes. Le ravito est toujours au top, seul l’eau a un affreux gout. Je n’ai donc rempli qu’un des 2 bidons. Lors de ma pause, 6 à 8 personnes arrivent après moi et repartent avant…
Ste Catherine était la dernière étape où les organisateurs avaient placé une barrière horaire, je repars l’esprit tranquille, et ce, même en comptant les kilomètres qui me restent : 25 ! Car je ne compte pas faire d’exploit, juste finir. Cette course est l’occasion d’obtenir 3 points pour avoir le droit de participer à une fameuse course, L’UTMB, ou le tour du Mont-Blanc. 3 points sur les 7 nécessaires, c’est toujours bon à prendre. Et qui sait me réserve l’avenir ? Aussi je reprends ma marche, sur le tracé commun à la saintélyon, jusqu’à la descente du bois d’arfeuille. C’est la première ou deuxième fois que je fais cette descente de jour. La boue ajoute du piment et on repère bien les endroits humides en permanence. Direction St Genou, je fais route avec un coureur, qui fête son jubilé en s’offrant un dernier 100km… et qui finit par me distancer après la grande montée. On monte, on descend, on recommence, on papote, puis on soliloque : cet enchainement se répète jusqu’au dernier ravito, où un brasero entouré de tapis de sol m’attend : je m’allonge à coté, histoire de reprendre des forces. L’organisateur trailer prend peur en me voyant faire, et me recouvre d’un autre tapis : si je prends froid, je ne repartirai jamais, me dit-il ! mais il se trouve que ces tapis pèsent une tonne, je reste donc 2 3 minutes allongé en sandwich, puis me relève, alterne sucré salé au buffet, puis repars . Ma grande solitude reprend, et durera jusqu’un peu avant l’arrivée. 10 longs kilomètres, au rythme à la fois lent et rapide, d’un coureur qui marche. St Martin se rapproche, se sent, se laisse désirer, on le contourne… J’appelle ma femme et elle cherche avec les enfants à faire les derniers kilomètres avec moi. On essaye de se retrouver au km moins trois, mais on se loupe. L’obscurité naissante ne nous aide pas. Finalement, je marche le dernier kilomètre, difficilement sans allumer ma lampe frontale (- point d’honneur ?), et suite à un dernier appel téléphonique, j’attends ma famille 30 m avant l’arrivée. Enfin tous réunis, je donne mes deux bâtons en bois, récoltés dans la forêt, à 2 de mes 4 enfants, et nous franchissons la ligne dans le gymnase, au bout de 15h49 minutes….
Que de bonheur d’avoir fini mon premier 100km en trail !
Merci à ma femme et mes enfants, aux organisateurs, aux autres coureurs, à mes collègues d’entrainement…
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6 commentaires
Commentaire de lalan posté le 29-05-2012 à 06:39:40
Bravo pour ta course,et beau finish en famille.Je ne savais pas que tu etais kikou!!!
J'espere pour toi un futur finisher UTMB
Commentaire de Arclusaz posté le 29-05-2012 à 09:37:30
très belle course, très beau CR et surtout surtout magnifique photo finale !
bravo pour cette complète réussite.
Commentaire de lulu posté le 29-05-2012 à 09:43:34
Chapeau à toi !!!!!!!
Commentaire de bubulle posté le 29-05-2012 à 19:47:34
Bravo pour ce premier ultra-ultra! Gestion de course plutôt bonne, à ce qu'il semble (même si tu dois sûrement trouver des choses à améliorer). A se croiser un jour où l'autre sur les courses de "notre" région (bon, moi je n'y suis plus dans le 42, mais j'y suis toujours de coeur).
Un petit 70km le 21 novembre, ça ne te tenterait pas (comme tu as déjà fait 3 fois STL, faut varier..:-))?
Commentaire de Gazel posté le 30-05-2012 à 13:32:44
Merci pour vos encouragements !
Lalan, je ne savais pas que les patrons couraient aussi vite que toi ! ;) En tout cas, bravo pour ta première place, et ton récit. Ce n'est pas souvent que le premier mette son récit sur Kikourou, alors on en profite. Moi aussi, il m'arrive de me retourner en course, mais c'est pour voir si je ne suis pas le dernier :)
Commentaire de Romain Guillot posté le 31-05-2012 à 12:11:50
Félicitations !!
On a presque l'impression de lire le récit d'un survivant, de quelqu'un qui a vécu l'enfer et a risqué sa vie :-)
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