Récit de la course : Mt Fuji Climbing Race 2008, par gatelli

L'auteur : gatelli

La course : Mt Fuji Climbing Race

Date : 25/7/2008

Lieu : Fujiyoshida (Japon)

Affichage : 769 vues

Distance : 21km

Objectif : Pas d'objectif

7 commentaires

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Le Fuji Race Mountain vu par un traileur français

J'attendais qu'Erwan poste son CR pour compléter avec le mien. Après tout c'est sa course!

 

Le Mont Fuji... La plus haute montagne du Japon : 3776m ! Une course, la plus dure du Japon : l’escalader en moins de 4h30 !

Cela s’avérera impossible pour moi. Probablement un manque d’entraînement, il faut dire que trouver une montagne de 3000m dans les Cévennes c’est pas évident. Cela dit je m’étais entraîné plusieurs fois sur le Mont Aigoual (1500m), mais pas par des températures de 30°C. Et pas en partant comme une balle de fusil dès le départ (allure d'un 10km). Eh bien quoi ? Les japonais seraient-ils plus forts que nous? Ceux que j’ai vus étaient du meilleur niveau. C’est la course la plus dure du Japon, c’est pas moi qui le dit. D’où le gratin japonais...

Alors c'est vrai que je suis plutôt un habitué des trails où l'on gère son effort... Je ne suis pas vraiment un spécialiste de vitesse. Et là, je trouve que ça part vraiment vraiment vite, d'autant que la pente atteint rapidement les 10% avec des petits coups de cul.

Bref, au bout de 10km me voilà séché, alors qu’il me reste 2000m à grimper... Et je me dis qu'à ce ryhtme ils vont tous s'effondrer dans l'ascension. Alors je ralentis, je récupère, décidé à gérer mon effort et à les doubler plus tard. Erreur : lorsque la route se transforme en monotrace, plus possible de dépasser. Je suis en forme, mais bloqué dans un gros peloton qui se met à marcher. Or la montée c'est plutôt mon point fort comparé à une allure marathon. Et je ne peux pas en profiter ! Je me rends compte alors que l’objectif de 4h30devient irréalisable. J'aurais dû écouter Erwan : courir à fond jusqu'au sentier. J'ai voulu "gérer" trop tôt... Bon, j’ai des photos à prendre, alors je ne me gêne plus pour m'arrêter. Les barrières horaires qui au départ me paraissaient larges commencent à m'inquiéter car je ne les ai pas mémorisées (je n'avais retenu que les temps moyens pour faire 4h30). Et à ce rythme je ne voudrais pas me faire coincer à un check point ! Mon but c'est quand même de faire le sommet ! 

Une très belle portion dans une forêt ancienne, zébrées de coulées de lave, puis un passage dans le brouillard. Enfin, on sort : le désert, mais en vertical. Et là, on court sur des pentes de scories, de cailloux qui déboulent sous les pieds, autant escalader une dune ! Très très éprouvant. Mais pour varier les plaisirs, quelques murs d’escalade qui vous entament les mollets. Il fallait des gants tellement la pierre de lave est abrasive !

On monte, on monte, on monte. Ca ne s’arrête jamais ? J’ai les yeux rivés sur mon alti. Je compte avec mes repères propres : «encore 1,5 Aigoual», «plus que 8 Lacan», «35 Montagnettes», etc... (les collines de chez moi !)

Et puis, vers 3500m, arrivent les premiers effets d’hypoxie. Enfin sur le moment je les prends pour tels : grosse fatigue, jambes de 25kg, et une envie inexpugnable de me coucher sur le côté et DORMIR ! De pire en pire. Sur la fin, j’étais à la dérive. Après coup, je me suis dit qu’il y avait sûrement des effets de fatigue : une nuit de 5h, puis une nuit blanche en vol plus le décalage horaire, c’est pas très sérieux pour une course comme celle-là (départ à minuit heure française, le coup de barre vers 4h).

En haut, la récompense. Le toit du Japon. LE volcan. Quelques photos, et on redescend, par la route de l’enfer. J’ignorais qu’il y avait un marathon des sables après. Voilà pourquoi les japonais avaient emporté des guêtres et des foulards ! On court dans la cendre ! Le sable rentre dans les chaussures, les yeux, les narines, la gorge, passe même à travers les chaussettes et les mailles du TShirt !

 

La descente était un peu de trop mais bon, pas le choix, les bus ne montent pas encore jusqu’en haut...

Alors pour comparer à un trail ou une course de montagne en France, je dirais que l'organisation est très "japonaise" c'est-à-dire carrée : les horaires sont respectés à la seconde près. Ils enlèvent même le tapis à l'arrivée dès 4h30, comme si la course était finie (ce qui est le cas, remarquez), même si seuls 1000 coureurs sur 2500 sont arrivés.

Au niveau des ravitos, par-contre, ça pêche. Pas grand-chose à manger. J'étais déjà parti en déficit énergétique (je ne suis pas très resto japonais) et je comptais sur les ravitos, mais à part quelques grains de raisin et des quartiers d'orange, rien de solide. Ils distribuent du sel, par-contre, et ça c'est bien contre les crampes. Des prunes macérées au vinaigre, aussi. Je ne connaissais pas. Un peu particulier tout de même. Bon contre les crampes également mais pas contre la faim !

Un côté cérémonial exacerbé aussi : cérémonies d'avant-course, remise des prix, etc... Pas un discours à la française par le maire et l'organisateur, non, tout le staff, tous les notables sont là, impeccablement alignés sur leur estrade avec en face d'eux des coureurs qui viennent dire quelques mots au micro comme s'il s'agissait d'un grand oral ! 


 Bref, en manque d'alimentation, mais surtout de sommeil avec le décalage horaire et une nuit blanche, et peut-être aussi de l'altitude, je n'étais pas du tout préparé à cette course particulière, peut-être à comparer à la 6000D sauf que ça monte plus et plus haut (mais la descente en moins). Je l'ai pris un peu à la légère je pense, et je m'en suis mordu les doigts dans la montée car c'était vraiment dur. Pendant que je galérais dans les scories je me suis dit "plus jamais je ne reviendrai". Mais une fois arrivé en haut... Le Fuji est vraiment particulier. Déjà vu d'en bas il écrase tout. Seul, majestueux, comme un seigneur, il force le respect. Il s'est passé quelque chose là-haut car en redescendant ma décision était prise : je le referai un jour. Je comprends maintenant pourquoi 3000 personnes par jour en font l'ascension. Ce n'est pas pour "l'exploit" mais certainement pour le côté "sacré" qui prévaut là-haut.

 

Voilà ce que j'ai retenu de cette course si particulière. Je crois que j'y pense presque tous les jours depuis le mois dernier. J'ai couru dans beaucoup d'endroits dans le monde, grâce à mon métier, mais le Fuji reste vraiment à part.

Comme dit le dicton : "seuls les imbéciles n'escaladent pas le Mont Fuji, seuls les imbéciles l'escaladent deux fois...

 

Ah, mon temps ? 4h50. Bon, j'ai glandouillé, certes, mais même en m'arrachant je n'aurais sûrement pas fait les 4h30. Peut-être la prochaine fois, avec plus de repos, de sommeil et mieux préparé.

En tous cas, bravo Erwan pour ta performance !

 

Toutes les photos sont sur mon site    www.runtheplanet.fr

 

 

7 commentaires

Commentaire de JLW posté le 17-08-2008 à 22:01:00

Merci Gatelli de nous faire partager tes émotions sur une course bien particulière. La prochaine fois tu sauras gérer le départ, c'est sûr.

Commentaire de Velveteethol posté le 18-08-2008 à 11:37:00

"seuls les imbécilent n'escaladent pas le Mont Fuji, seuls les imbéciles l'escaladent deux fois..."
Ben tu es dans la catégorie du milieu. Tu l'as déjà escaladé, une fois ;).
Merci pour le récit, il donne envie aussi lui (pas de courir mais d'y aller :).

Commentaire de akunamatata posté le 18-08-2008 à 19:31:00

Bravo pour ton récit ça donne envie de se frotter au mythe !

Commentaire de Mustang posté le 18-08-2008 à 23:54:00

Merci pour ce récit en contrepoint de celui d'Erwann
Bravo pour ta perf!! Il faut le faire!

Commentaire de agnès78 posté le 19-08-2008 à 07:29:00

merci pour ce récit poignant! Quelle aventure!
Au plaisir de te lire à nouveau
bises
agnès

Commentaire de Souris posté le 19-08-2008 à 20:46:00

Merci de nous faire voyager!! Ca donne des envies et des idées... Bravo pour cette ascension mythique!

Commentaire de DJ Gombert posté le 11-09-2008 à 19:27:00

Joli récit, contraste des paysages avec les "notres" , une envie de s'évader ..., si loin de la ceuillette des champignons au Mas de la Barque ;-)



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