Communauté des sports d'endurance

Une Backyard est toujours un évènement particulier où la règle du jeu consistant à faire 6,7 km en 1 heure est très simple... et moins simple à tenir dans le temps...

C’est la 3° édition de la BackYard des Terrils, à Lens. Une découverte de la région pour ma part, pour ma 7° Backyard.

J’arrive ici en tant que favori parmi quelqu'autres comparses.

 

Avec ce petit mot «... sera peut-être l’homme à battre. Membre de L’équipe de France, il a un record à 53h ».

Vraiment  pas mon truc ça !
Moi qui voulait venir ici incognito... Il faudra assumer si je reste dans les derniers, donc un bon moyen de booster le bonhomme.

 

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La reco effectuée la veille en mode rando, montre que le parcours laisse peu de répit, entre le terril à grimper, et les longues portions à courir le long du canal. En clair, on ne choisit pas forcément de marcher où l’on veut.

 

Mais c'est motivé, et accompagné de mon assistance de choc avec Annick et mon fils Romain, que je compte bien finir dans les derniers et, pourquoi pas faire le dernier tour... sur un malentendu ?
Honnêtement, je me dis déjà tenter les 48 heures, sans penser à ce que feront les autres, on verra ensuite... En tout cas, je veux me remotiver après les champîonnats du monde par équipe, où je suis sorti un peu trop tôt (et donc pas vraiment aidé l’Equipe de France à mon sens).

 

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L'installation se passe sous le soleil du Nord, dans une ambiance plutôt bon enfant.

 

Nous sommes 250 à nous élancer sur la 1° boucle ce vendredi à 12h.
Je n’avais jamais vu autant de monde sur une BackYard. Les Terrils est le format concentrant le plus de monde du circuit Infinity Trail Backyard visiblement.

Je prend mes marques progressivement sur les premiers tours.
Prendre le temps dans la montée du terril, prendre le temps dans la descente qui suit. Découper cette longue ligne droite longeant le canal.

La nuit qui arrive s’annonce claire et froide.

 
Et en effet, c’est à partir de la 12° heure que je commence à être dans le dur. Les problèmes digestifs rencontrés lors de la BackYard des championnats du monde, semblent revenir : j’ai du mal à m’alimenter !
Et si l’on ne met pas de carburant ? Keskispasse ?... Bref, le mental commence à être érodé : de mauvaises pensées apparaissent, « et si j’arrêtais ces trucs à la con ? », « mais comment j’ai pu arriver en Equipe de France » (le syndrome de l’imposteur), ...

J’en suis presque à renoncer me lancer sur la BackYard de Monteux en Octobre (un gros objectif).

Bref, passé le palier 15h (100km), c’est très compliqué de 3h à 6h, là où les températures sont les plus froides (-3 °C).
J’ai du mal à trouver la motivation qui pourrait faire remonter ce mental. Et les boucles paraissent plus longues.
Pourtant une belle Pleine Lune nous accompagne sur le circuit.

Pourtant, avec le recul, je tourne quand même en 55'.

 

Le salut viendra du jour naissant, précédent le lever du Soleil, alors que se couche la Lune.

 

Je retrouve mes temps de passage de départ. Et de nouvelles jambes.
Ce soleil semble faire un bien fou !

Mon assistance a su se relayer pour se reposer dans la voiture chauffée. C'est bien pour eux.

 

Nous ne sommes alors plus qu’une trentaine à tourner.
Une belle journée ensoleillée commence et les températures vont remonter.
Yapluka additionner des boucles.

Je reste sur mon protocole spécifique Terrils : ne pas marcher dans les escaliers mais sur le sentier à côté, afin de choisir ma longueur de pas.
Et les descentes d’escaliers ? Pas à pas en tenant la rampe pour soulager. Le cassage de fibre sera ainsi limité. Quand je vois certains avions « dérouler » dans la descente...

Le palier 24h est passé. Il est midi ce samedi. Les choses sérieuses vont commencer.
Comme pour les 100km, beaucoup s’arrêtent là, leur objectif atteint. Nous nous retrouvons alors à 15 en ce début d’après-midi.

J’arrive à rester sur mes temps de passage initiaux, les jambes sont bien là et la nuit compliquée est derrière moi : il va falloir commencer à me préparer mentalement pour la 2° nuit, afin qu’elle se passe au mieux.

Mais avant, il faut passer le palier 30h en cette fin d’après-midi.

 

Nous nous retrouvons alors à 8, puis 7, puis - d'un coup ! - 3 au départ de la 33° boucle. Surprenant !

Cet écrémage me met à la meilleure place sur une Backyard, comme à Monteux 2023... Un top 3 !
A nous 3 donc (Florian, Xavier et moi) à arriver à passer la nuit, en se motivant mutuellement.

 

Mon assistance me prépare un peu d’eau chaude, à mettre dans toute nourriture, pour ne pas trop déranger l’estomac.
Cette 2° nuit va être importante, les 36h sont passées. Il est minuit.

Il va falloir « aller chercher le soleil » afin de rendre cette nouvelle nuit moins compliquée. Je vais tenter un compte à rebours d’ici le jour naissant. J’ai encore les images du lever de soleil de la précédente journée, et je veux revivre ce moment. A moi de tenir sans perdre confiance.

A chaque départ, je suis derrière mes 2 compères... Comme si j’étais le prochain à lâcher (et ce fut bien le cas à Dijon 2 fois, Hossegor, Chatonnay).
Mais je préfère rester dans ma bulle, et à l’écoute de mes temps de passage (qui, pour cette nuit encore, s’allongent un peu). Ne pas s'inquiéter, la marge est bonne.

 

L’alimentation se passe bien mieux qu’à la nuit précédente, l'effet eau chaude. Les jambes sont toujours là. Mon assistance veille au grain. Ils assurent ! Bravo !

 

Au fut et à mesure que le jour approche, je recolle au binôme. Je n’ai pourtant pas accéléré, mes 2 compagnons auraient ils baissé de rythme ?

A nouveau le lever de soleil (le 2°)... qui me redonne la patate.

Je cherche même à jouer avec le soleil sur les photos :

 

Cheminant plus groupés, j’arrive à discuter avec chacun d’eux.

Xavier semble lutter avec un léger problème de releveur, tandis que Florian connaît quelques baisses de régime (son record est à 31, cela peut se comprendre).
C’est même moi qui termine la boucle le premier. 

Au départ de la 45° boucle, Xavier fait demi-tour, ses problèmes de releveurs auront eu raison de sa détermination, dommage !
Je me retrouve avec Florian qui chemine devant à nouveau.

Je n’ai jamais été dans les 2 derniers (3 top 5, 1 top 4, 1 top 3) : c’est alors une grande satisfaction.
Oui mais maintenant qu’on est là, il faut viser la victoire ! Surtout que je retrouve un regain d’énergie avec ce nouveau lever de soleil, les jambes arrivent encore à tourner dans les temps similaires des premiers tours. Comme quoi se préserver dans la montée et la descente du terril a porté ses fruits.

Je sens à ce moment là l’envie d’un duel, ne serait-ce que pour aller chercher le record qui n’est qu’à une poignée de boucles.
En effet, il est 9 heures, il fait beau, je me sens plutôt bien, je n’ai rien de prévu d’autre pour ce dimanche !
Alors pourquoi ne pas aller jusqu'à 18h, soit la fin d’après-midi, pour dépasser mon record personnel en faisant 54 tours ? La 3° nuit sera une autre dimension. En tout cas la motivation est bien là...

Le 46° tour est bouclé quand j’attends Florian, que j’ai dépassé sur le parcours.
Il arrive à un peu plus d’une minute du départ, ça semble dur pour lui.

Il a besoin de s’asseoir. Nous (public restant et moi) arrivons à le motiver pour repartir sur cette 47° boucle.

Une fois repartis tous les 2, il me dit vouloir arrêter. Je lui dis d’attendre au moins le bout de la ligne droite, avant la montée du terril, mais cela ne servira à rien. Il préfère faire demi tour, me laissant seul sur le parcours. Seul ? Oui, seul...
La victoire est alors au bout de ce tour, de ce dernier tour...

Oui, car il y a toujours un dernier tour. Celui qu’on rêve de faire, mais qu’on ne sait jamais si l’on pourra l'atteindre. Celui où chaque pas devient une victoire, où chaque souffle est un rappel de tout ce qu’on a traversé pour en arriver là.

J’ai donc l’honneur d’être celui qui doit boucler ce dernier tour, malgré un mental qui fut au plus bas dans la 1ere nuit froide.

Et tant pis pour le record à aller chercher. Il était à 6 boucles.

Et là je profite, on m’encourage et on me félicite... de loin car je n’ai pas le droit d’être accompagné.
Je passe le terril sans trop de précaution dans la descente, sachant la fin. Les jambes sont là. Alors j’accélère, je longe le canal bien plus rapidement que les tours précédents, Les quelques montées sont faites en courant.

Je passe la ligne, un peu euphorique, en un peu plus de 45 minutes.

 

Première victoire sur une Backyard ! Une énorme satisfaction !

Tout comme une énorme gratitude envers mon assistance de choc, Annick et Romain, qui ont vraiment assuré.

 

 

Cette course, plus qu’une performance pour moi, est une aventure partagée.
Ce sont ces moments de complicité avec d'autres coureurs, ces sourires échangés malgré la fatigue, ces encouragements qui nous portent. C’est l’intensité d’un défi où l’on court les uns avec les autres (le fameux "ensemble on va plus loin"), bien plus que courir contre les autres.

Dommage pour le record perso, mais cela montre bien qu'une BackYard n'est pas qu'un sport individuel.

Gagner une BackYard, c’est bien sûr une fierté. Mais ce que je retiens surtout, c’est cette magie du dernier tour, celui qu’on ne fait jamais seul, car il est le reflet de tout ce que les autres nous ont donné pour y arriver...

Et en particulier mon assistance 5 étoiles, qui a été d'une redoutable efficacité. Jamais je n'aurai pu aller si loin. Merci ! Merci ! Merci !

Merci Fred et Maud pour cette belle organisation et big up à tous les bénévoles.

 

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EN CHIFFRES

47 heures/47 boucles
315 km (2° meilleur résultat pour 7 BY, et une petite revanche sur le championnat du monde par équipes où je suis parti un peu trop tôt pour l'EdF)
250 concurrents pour 1 seul survivant

 

 

 

MERCI pour vos encouragements et félicitations.