Récit de la course : Trail Verbier St Bernard - 140 km 2023, par Grego On The Run

L'auteur : Grego On The Run

La course : Trail Verbier St Bernard - 140 km

Date : 7/7/2023

Lieu : Verbier (Suisse)

Affichage : 480 vues

Distance : 140km

Objectif : Pas d'objectif

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X-Alpine 2023 Cela tabasse !

Pour ceux qui veulent la version avec photos c'est ici : 

https://firstquartilerunners.wordpress.com/2024/07/05/recit-x-alpine-2023/

Elle tabasse cette course.
J’écris ces lignes 1 an jour pour jour après la course courue en 2023.

Ce soir c’est le départ de l’édition 2024. Je n’y serai pas, je l’avais promis à ma femme.

Alors revenons sur cette septième participation à l’X-Alpine qui est un Ultra que j’entreprends comme un boxeur qui entre sur le ring et qui sait qu’il va passer des moments difficiles.

Je maintiendrai le suspens jusqu’au bout concernant ce récit parce que c’est plus drôle.

Il est 22 heures et c’est le top départ. J’ai la tête des beaux jours.

 
Contrairement à l’année précédente je suis plutôt en forme, je ne suis pas en convalescence. Tout baigne.

 
La météo est plutôt bonne, quelques risques d’averse le matin à venir, mais rien d’inquiétant. De toutes façons j’ai toujours un équipement de type skieur qui va avoir très froid en toutes circonstances.

Une première partie qui se passe bien, tout baigne.
Jusqu’à Sambrancher je mène bon train par rapport à l’année précédente. Le départ est très rapide, je me mets dans le rouge assez régulièrement mais la carlingue tient assez bien. J’ai nettement plus de coffre que l’année dernière si bien que j’arrive à Sambrancher avec 32 minutes d’avance sur mon chrono de l’année dernière en 131ième position. Il est 2h09 du matin.

La partie jusqu’à Champex est assez roulante et se termine par une petite montée en sous bois bien sympathique. J’aime bien cette arrivée un peu improbable sur le ravito de Champex, elle surprend car je ne l’anticipe pas. Il est 3h45 du matin. Et c’est le début de la fin qui commence.

Comme un caillou dans la chaussure.
Je ne sais plus ce qu’il se passe mais je commets une erreur de débutant. Je bois un peu de ma boisson favorite. Je mange un peu par si par là… Et je pars très vite du ravito, trop vite. En fait je me retrouve le long du lac à prendre conscience que j’ai oublié de remplir mes flasques : c’est bête.

Cela me mine le moral tout net. Je passe le long d’une fontaine et décide de remplir une demi flasque d’une eau dont je n’ai aucune idée du caractère potable. Mais comme on est en Suisse, je me dis qu’il ne peut en être autrement. Las !

L’aube est là. La clarté au-dessus de l’horizon apparaît et je vais attaquer la plus grande difficulté de ce Trail avec la montée sur Orny. Je suis dans les sous bois et commence à avoir mal à l’estomac. Je ne me sens pas terrible, je dois m’arrêter. Mon système digestif commence à se dérégler et ce n’est que le début.

Après le sous bois on attaque la partie de pierriers. C’est une des plus grosses difficultés, paysage très minéral, technique car parfois les gros rochers tels des « Boulders en Namibie » obligent les coureurs à devoir mettre les mains pour prendre appuis. Et il se met à pleuvoir. Nous sortons tous nos Gore Tex. Le ciel est complètement plombé. Il s’agit d’une petite pluie fine. Rien de méchant, mais c’est toujours astreignant de devoir s’arrêter, trouver un rocher, sortir la Gore Tex qui prend le vent, remettre son sac, le régler et devoir repartir alors que l’on a son élan stoppé.

Le BINGE à la cabane d’Orny
J’arrive à la cabane d’Orny l’estomac dans les talons à 6h57. J’ai maintenu mon avance de 34 minutes par rapport à l’année précédente. Je bouffe (je n’ai pas d’autres mots) des barres produites par une marque qui sponsorise l’UTMB. Cela n’est pas mauvais au goût, sauf qu’à un moment il faut bien arrêter ce que l’on appelle un craquage sur la nourriture. C’est donc l’estomac lesté que j’envisage la descente et remontée en faux plat vers La Fouly.

 
Sur le chemin des macchabées
J’ai désormais l’habitude de ce chemin en direction de La Fouly qui n’est plus aussi terrible que d’habitude ne serait-ce que cette fois depuis l’année dernière nous ne sommes pas aussi rincés que lors des premières éditions où nous avions commencé l’épreuve en gravissant Le Catogne et ses 1900 mètres de D+. Je me refais une petite santé et j’arrive à La Fouly sur les coups de 10h20 avec une avance sur mon chrono de l’année dernière qui s’égrène.

 
En direction du Grand Saint Bernard
J’accuse le coup. Il y a de grandes rafales de vent dans l’ascension du col du Grand Saint Bernard. Je n’ai plus trop de problème gastrique, cette fois c’est ma psyché qui prend le relais et qui commence à complètement partir en vrille. Il s’agit du deuxième très gros grain de sable.

En Ultra étant donné les longs moments de solitude avec soi-même on se met à gamberger et à ne plus faire attention au paysage qui devrait nous retenir toute notre attention. Je pense à mes enfants qui commence dès aujourd’hui à passer du temps autour d’une piscine alors qu’ils ne savent pas encore bien nager. C’est une pensée qui m’angoisse. Je me retiens d’appeler ma femme alors que je suis à quelques encablures du lac. Je pense à l’ordinateur portable que j’ai laissé juste derrière une fenêtre alors qu’il fait soleil et très chaud : va-t-il prendre feu ?

J’arrive de l’autre côté du col, pas complètement rassuré, pas dans mon assiette. Il est 13h49 et mon avance sur mon chrono de l’année dernière s’est réduit de 15 minutes. Je suis 135ième.

Le troisième grain de sable
La galère se poursuit cette fois en raison d’un nouvel invité. Il s’agit d’une brûlure que je ressens à l’aine. Mon boxer, qui est nouveau sur ce type de longue distance, frotte. Or j’avais bien validé le dispositif sur des sorties de 1h30, mais pas sur un long format de course. On est parti depuis plus de 15 heures. C’est chaud !

J’arrive à Bourg Saint Pierre à 17h14 et je n’ai plus aucune avance sur mon chrono de l’année dernière. Cela me mine aussi.

Pourtant durant ce ravito je me refais une petite santé, passage aux toilettes qui soulagent. Cela dit je vais devoir m’arrêter sur les rebords du sentier à venir toutes les 30 minutes. Je dois faire le constat que j’ai le système digestif complètement en vrac.

Un regain de forme jusqu’à la cabane de Mille
Sur cette montée en plein soleil jusqu’à la cabane de Mille je ressens un « petit » mieux même si je ne le sais pas encore, mais je creuse ma tombe. Je ne m’alimente plus mais je ne m’en rends pas vraiment compte.

J’arrive à Mille à 20h11 avec 10 minutes de retard sur le chrono de l’année dernière. Or je n’arrive pas à manger, je commence à avoir froid, il y a beaucoup de vent. Il faut que je reparte très vite.

Le début de la fin
C’est le coup de grâce sur ce chemin qui mène à Brunet. J’avais trouvé ce sentier somptueux l’année dernière et c’est avec ravissement que j’anticipais retrouver ce single. Or un coup de mou terrible s’abat sur moi. Le jour s’efface et ce qui me reste d’énergie également. Je suis dans l’incapacité totale de relancer. Pour la première fois sur un Ultra je ressens des nausées. Et je fais le constat que je n’ai à peu près rien mangé depuis Bourg Saint Pierre.

Faisons le constat des grains de sables :

Envie de vomir
Plus rien mangé depuis près de 4 heures
Brûlure toujours vivace à l’aine
L’envie de courir m’a quitté
Mis bout à bout, ces grains de sables deviennent des sables mouvants dans lesquels je m’enfonce sans force pour en ressortir.

Conclusion : La décision d’arrêter s’impose d’elle-même.

J’arrive à Brunet en titubant. Il est 22h06, il fait nuit ou presque. Je rends mon dossard telle une délivrance.

Épilogue
Je trouve du réconfort dans la cabane Brunet, il me faudra du temps pour me réchauffer. Je pense que je me suis pris une bonne insolation car le soleil tapait fort en montant vers la cabane de Mille. Vers minuit je me sens de repartir finalement mais il est trop tard, le dossard est rendu. C’est dommage mais je ne regrette rien. La suite du parcours me fait peur de toutes manières, ma psyché angoissée a gagné le combat.

C’est rude : sur le ring je fais le constat suivants des manches remportées de part et d’autre : X-Alpine 3 points – Grégo 4 points (finishers 4 fois contre 3 abandons).

Pour moi l’X-Alpine demeure la plus difficile épreuve d’Ultra que je connaisse. A côté, la TDS et même le Tor des Géants c’est pour les minettes ! Bien sûr je force le trait. Néanmoins je trouve que la configuration, la technicité de cet Ultra en font une épreuve parmi les plus dures que l’on puisse se mettre sous les chaussures de Trail.

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