Récit de la course : Trail du Lac d'Annecy - Marathon Race 2018, par GlopGlop

L'auteur : GlopGlop

La course : Trail du Lac d'Annecy - Marathon Race

Date : 27/5/2018

Lieu : Doussard (Haute-Savoie)

Affichage : 4064 vues

Distance : 43km

Matos : Des jambes en bon-état et un mental du même métal.

Objectif : Terminer

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Histoire de me mettre la pression, c’est ZE Course! Dénivelé jamais atteint , comme toutes les premières fois, va falloir assurer !

19 Avril 2018

Tombé dans le Trail, l’année dernière au même endroit sur la Short Race, J’ai découvert tous les bienfaits de cette activité comparativement à la CAP sur plat. Même si l’effort du déplacement et de l’hébergement est là, retrouver du dénivelé au travers de sublimes paysages veut que 2 ou 3 fois par an, je me voue à ces pèlerinages.

 Un an déjà, j’étais au départ de la Short Race à Menthon St Bernard au pied du mont Baron. Dans le sas, je pensais  à ceux qui se lançaient concomitamment de Doussard, là-bas au bout du Lac, à l’assaut du Col de la Forclaz. Cette course alors hors de portée, je me la suis mise en objectif moi, tout jeune Master 3 !

Comme précisé dans mes précédents récits, mes entrainements se sont déroulés presque exclusivement en un lieu considéré comme le plus haut du plat pays qu’est le Centre Val de Loire au lieu-dit Belvédère des Caillettes culminant à… 130m, quand même ! C’est en ce lieu que j’y ai fait la connaissance de 2 autres trailers en prépa aussi pour Annecy. Entre David inscrit sur l’ultra 114 et Michel sur la Maxi 84, c’est dire si je fais figure de petit nouveau sur mon humble 42 ! Rendez-vous est pris sur place , ce 27 Mai!

A force de répétitions, tutoyer les 1000D+/D- est devenu possible et le Trail Du Graouly au mois dernier à Metz avec ses 1300mD+ et 34K laisse ouverte, une possibilité de terminer Annecy même si je n’ai pas idée de ce que peut représenter le double du dénivelé.

Mais si à chaque jour suffit sa peine et à chacun suffit sa charge, je vais me concentrer sur mon objectif il me reste 5 semaines…

22 Mai 2018

Les dés sont jetés ! La période d’affûtage est close. Hier 10k tranquille le long du canal , longeant les propriétés à humer les effluves odorantes des Pyracantha, Acacias et autres Photinia en pleine floraison. C’est beau le mois de Mai !

C’est bâché ! 240k et 9000m de dénivelé depuis le 10 mars au travers de 2 à 3 sorties hebdomadaires. Le cumul semble important mais toutefois, je n’ai jamais dépassé 1200m en D+ et surtout jamais fait de longues descentes. Comme tout un chacun à l’aune d’un examen à venir, on se découvre des tas de raisons qui jettent une ombre sur les résultats à venir.

Ai-je suffisamment pratiqué ? Pourquoi ces douleurs récurrentes à la plantes des pieds ?

Internet me diagnostique une aponévrosite pour le pied gauche et une métatarsalgie pour le droit. Pas beau de vieillir! Le Voltarene sera donc de sortie à Annecy.

Vais-je terminer ? Qu’importe le temps et le positionnement, je veux revoir cette ligne d’arrivée dans le village Maxi-Race au bord du Lac. A tout prix, partir cool, à l’allure que je pense avoir pour le dernier quart quand le mur au dessus de Menthon sera là pour achever les mal –en- point et rester dans ma zone afin que le cardio ne dépasse pas les 150. Partir en contrôlant son intensité car en peloton les sensations sont brouillées et le départ en sur régime est fréquent voire systématique. En montée, privilégier la marche rapide au dépend du trot et penser à boire dès le départ pour économiser mes réserves. J’envisage 8h00. Cette terra incognita va démarrer dès la cinquième heure, la beauté des paysages au travers d’une météo agréable devrait alors appuyer mes efforts.

Ces préceptes vont certainement s’opposer à la réalité du terrain et de la situation. C’est dire que l’ascenseur émotionnel va plafonner ce 27 mai ! 1700 au départ, c’est quelque part réconfortant. Mais dans mon ascenseur à moua, je serais tout seul ! Car l’inconnu de la course sera bien là, vais-je avoir la carrure pour enquiller autant de dénivelé ? 

25 Mai 2018 .

Annecy nous voilà !

Si ce We est un objectif pour moi. Pour d’autres c’est une étape à des visées plus ambitieuses. Néanmoins, le sérieux de cette manifestation se mesure à l’aune de son historique, de sa réputation, des sommités inscrites aux courses. D’Haène pour la seconde fois y sera, l’année dernière sur le 110k et cette année sur le 84k.

 

Un passage par le Campanile, une visite du quartier historique de la ville baignant entre le vert et le bleu turquoise du lac, un bon resto et illico retrait des dossards au village de la Maxi Race. Le temps doux est de la partie, ça sent bon tout ça ! Que ça sent bon !

Fouille des sacs à l’entrée du village, direction la zone de retrait des dossards. Pour y parvenir, il faut traverser une foultitude de stands digne d’une foire d’exposition et longer la ligne d’arrivée.

Et à cet instant, hausse du ton du speaker, viva de la foule, les regards se tournent vers la piste… Un visage emblématique surplombé du bob Salomon blanc…  apparaît François d’Haène en final de son 84k !, la ’Machine‘ est passée, relâchée et souriante!

J’apprendrais plus tard qu’il finira 33eme avec 2 heures sur le premier! Il n’était pas là pour décrocher de titre mais faire profiter les participants de ses conseils. Son objectif, la Western States (166km) les 23/24 juin prochains. « j’aurai besoin de fraîcheur. Ce 85 km constituera donc ma dernière sortie en compétition pour valider mon état de forme »(sic)

- bah voyons un 84 comme moi un 10 !


En attendant, tranquillou les 84 k en 11h41 ! 

https://france3-regions.francetvinfo.fr/auvergne-rhone-alpes/haute-savoie/annecy/planete-trail-s-installe-bords-du-lac-annecy-week-end-1482689.html

Quelques instants encore à le voir en prise avec un journaliste et puis retour à ma réalité.

La soirée sera dédiée à la montée (en voiture) au Semnoz via une superbe forêt de pins et Hêtres. Vue directe sur le Mont Blanc et la cuvette Annécienne. Moments magiques exaltants magnifiés par les couleurs du couchant baignant dans l’air pur !

Retour à l’hôtel et préparation du matériel. Et là, on me laisse faire mon petit bazar !

 Tout faire tenir dans un sac Salomon d’à peine 150gr !  2 flasques devant, casquette, lunette, coupe-vent, pochettes d’Hydrixir, dosettes de miel et quelques barres diverses et variées sans oublier le smartphone !

Reste un peu de place pour le magnifique dossard bigarré.

Diner frugal à l’hôtel et zou, la viande dans le torchon ! En cumulant la tension du moment , le réveil programmé à 5h30 et l’envie de bien dormir, je n’aurais été dans les bras de Morphée que bah… 3 heures !

Au saut du lit, quelques bricoles type Cake et Brownies, lait chocolaté, et chargement du paquetage.

Noc aux endroits idoines, Voltarène au pied , tapping plantaire sans oublier les ongles coupés de quoi me faire oublier mes craintes. Je pense n’avoir rien oublié, le gars semble prêt.

6h30 : Direction Doussard, le bout du lac. Rues dégagées et route côtière déserte où le clapotis de l’eau vient mourir à quelques mètres de la route. Moment parfait pour rouler qui tranche bigrement avec le trafic diurne. Seuls deux jeunes essaient de lever le pouce pour prendre un hypothétique véhicule, leurs nuits se terminent. Le second appuyé sur l’épaule du premier essaie de maintenir ses yeux ouverts qui manifestement lestés par quelques substances voudraient bien se fermer. Le lac, lisse calme reflète les premières lueurs matinales. Sur l’autre rive, mon chemin de croix se dessine. La Tournette partiellement enneigée encadrée par le col de la Forclaz et les dents de Lanfon préfigurent la torture finale et la montée du Veyrier.

Le calme voluptueux de cette journée naissante voudrait que le temps s’arrête. Là me revienne les vers de Lamartine sur la fuite rapide des heures et du temps corrupteur mais ce Lac est celui d’à côté, Le Bourget n’étant qu’à quelques dizaines de kilomètres, parallèle à Annecy. Cela doit être la région qui veut ça !

Gérer 1700 trailers nécessite une organisation à la hauteur. Doussard (alt : 460m) n’est qu’une étape dans la Maxi-Race pour la 84k et la 114k. J’imagine la débauche de bénévoles nécessaire. Ils sont là et là, à la gestion du parking, du gymnase pour la nuit des relais, du ravito et à notre départ. Les entrées des sas en fonction des numéros de dossards catégorisent les compétences, je vais donc me positionner … vers la fin.

Si l’on reconnait le bruit du bonheur qu’il fait en partant, là je le tiens bien, il est là… le bonheur !

Et ce refrain me revient…

« C'est une bougie, le bonheur 
Ris pas trop fort d'ailleurs 
Tu risques de l'éteindre 
On l'veut le bonheur, oui, on l'veut
Tout le monde veut l'atteindre 
Mais il fait pas de bruit, le bonheur, non, il fait pas de bruit 
Non, il n'en fait pas 
C'est con le bonheur, ouais, car c'est souvent après qu'on sait qu'il était là »

Et bien non, là, il est là !

En stabulation, les uns contre les autres, fixant la nuée de drones (3) en stationnaire, je savoure ce moment que j’ai tant attendu. Je l’ai préparé, je suis là au départ de ma Marathon Race ! Loin devant en visuel, Le Veyrier, vais-je l’atteindre ? Depuis mon inscription ce 18 novembre dernier, je l’attendais ce moment !

Je savoure donc ces instants… Pensée à ceux de l’XL Race partis 1 h plus tôt du même endroit…et à ceux de la Short Race qui partiront de Menthon dans 1h. Montée crescendo du timbre du starter au micro lorsque les 5 dernières minutes sont évoquées, les drones virevoltent, décompte et largage du troupeau. Alea Jacta Est !

Pas d’échauffement programmé. Je sais que je ne vais pas partir vite, la prudence comme fil rouge. Comme souvent, les 2 premiers kilomètres sont au plat ce que la peinture est à l’huile, et une obsession, ne pas se soumettre à l’euphorie du départ. Beaucoup de dépassements, m’enfiche Je reste à 6’/k et pi voilà!

Le sous-bois et la masse de la montagne devant nous annoncent le rétrécissement et le début de la première montée. La cohorte s’éfiloche pour entreprendre le monotrace qui nous emportera 700m plus haut en 3 lacets. L’ambiance est encore décontractée. Je saurais presque tous de ma voisine de devant en plein verbiage. De l’augmentation du volume de ses (beaux) mollets grâce aux 3 séances hebdomadaires à la salle en passant par ses futures vacances en Corse chez une amie loin de sa progéniture.

De par la densité de coureurs, notre progression de lente est passée à l’arrêt. L’explication est arrivée 20 mn plus tard lorsque nous dûmes enjamber un tronc d’arbre conséquent au travers de la sente. Me revint alors le principe des bouchons routiers.

Sur la route, c’est la trop grande densité de véhicule qui congestionne le trafic. Un automobiliste prend un peu de distance avec son prédécesseur ou ralentit légèrement, celui qui le suit sur-réagit de même en amplifiant le mouvement et la circulation se bloque.

Cette analogie physique a donc distendu au possible notre peloton, les premiers ayant pris leurs distances. Plus aucune chance de les rattraper si toutefois cette idée saugrenue m’avait traversé l’esprit .

L’arrivée au col de la Forclaz (Alt : 1150m) en 1h35 est saluée par de nombreux spectateurs et quelques clarines. La descente est immédiate,  200D- sur un chemin rural herbeux face à la Tournette avant d’envisager la longue montée vers Lancrenaz.  J’ ai les poils. La chance de vivre ces instants rares dans une vie moderne revient en moi. Que c’est beau tout ça ! Tout est net, les couleurs sont tranchées, aucun rappel citadin ne s’invite et c’est tant mieux !

Les quelques habitats du lieu dit  « La Côte » (alt :1000m )annoncent la rampe à eau. L’ambiance sonore des  tintements de Clarines nous suivra régulièrement au gré des courbes du circuit. Les locaux ont joué le jeu et cette note a participé à la fusion de ce trail dans les alpages.

 

La montée au roc Lancrenaz, 700m plus haut, commence…

Je biberonne régulièrement mes flasques d’anti-oxydant, ça a l’air de gazer…

Longer le nant de Montmin (nant en Savoie et en Suisse désigne un ruisseau ou un torrent dans un vallon encaissé-[lu dans Wilipédia]) me fait déjà regretter de n’avoir pas prévu une camera type ‘Gopro’. Des visions fugaces de nature préservée me frappent régulièrement, tel ce virage au travers des fougères où le nant en cascade passe sous un petit pont de bois. J’ai de nouveau les poils !

Ce chemin en sous-bois fort sympathique fait alors place à un raidillon plein ciel semi carrossable au refuge du Pré-Verel. (Alt : 1227m)

Face à nous, tout là-haut, le Chalet de l’Aulp (Alt : 1426m) annonce les hostilités. Nous sommes alors au pied de la Tournette. Il parait que ça se monte en rando, la Tournette. Comme ça, là, je ne vois pas comment tellement sa masse est imposante ! Pas de petit chemin qui sent la noisette pour le gravir. Bon et puis c’est pas l’objectif du jour.

Petit échange avec 2 parisiens qui comme moi sont à la peine pour trouver des lieux d’entrainement près de chez eux. Exit le circuit des 25 bosses près de Fontainebleau qui ressemblerait plus à de l’escalade et retrait vers la vallée de Chevreuse me disent-ils. Bon moi c’est toujours mon Belvédère en Forêt d’Orléans. Faut faire avec !

Petite fraicheur après le chalet de l’Aulp en sous-bois. Un restaillon de névé. La boue qui s’ensuit nous rappelle les dernières neiges d’Avril.

Chalet des Crottes (Alt : 1335m) On y vend des fromages de chèvre. J’ai pas d’argent sur moi ! (excuse de M%* !&, je sais !)

Et là premier plan sur le bout du lac en contrebas. Cristina Cordula serait là,  j’aurai droit à un  Magnifaïk !


Et aussi premier plan sur le col des Nantets (Alt :1426m) et tout là-haut le Roc Lancrenaz (Alt : 1667m)

C’est féérique. V’là ti pas que le bonheur me revient en tête, Sacré Maé!)

Et puis, rappelez-vous ces distributeurs de chewing-gum d’antan où trônaient de multiples boules de toutes les couleurs ? C’est cette image qui s’imprime lorsque je regarde cette longue mais longue file de petits points bigarrés qui grimpent péniblement tout là-haut.

Mais manifestement, cela ne m’appréhende pas. Je vais bien. Je contrôle mon cardio et évite de courir en montée. Pendant de long instants nous aurons le lac, pas celui de Julien Doré mais d’Annecy tout là-bas dans la vallée telle une perle enchâssé dans son écrin. Crotte de crotte, pas de Caméra, suis obligé de poser de temps en temps les bâtons pour m’arrêter et sortir mon smartphone. (J’imagine alors que ce n’est pas l’objectif des premiers à fond dans le gaz).

D’aucuns vont dire qu’on est là pour courir et faire un temps, bah non pas forcément. Traverser la nature en se chargeant d’émotions, se remplir la tête d’images et finir serait plus dans ma visée.

Le pas de l’aulp ouvert sur un précipice à gauche appréhendé un instant se passe facilement sans même me tenir au câble… J’ai toujours du mal à sortir mon regard du Lac.

Le passage du Roc se fait lui, dans une ambiance singulière ! Pas celle que l’on pourrait s’attendre à trouver en altitude mais plutôt celle d’une arrivée en ville. Un animateur fait le show, aidé d’une sono conséquente. Nos prénoms sont égrainés pigmentés d’une pointe d’humour au passage d’une étroite mais imposante porte rocheuse.

Roc Lancrenaz : Alt : 1667m - 15 kms -1600D+. Jamais fait ça encore, j’attaque l’inconnu et surtout la descente, celle qui dure sur 12 kms jusqu’à Menthon. Parait qu’elle est spéciale ! vais voir !

Le panorama est sublime. La carte postale dans toute sa magnificence. Le vert turquoise en contrebas est hypnotisant mais dois-je m’arrêter comme le font quelques dizaines de participants sortant réconforts sucrées en guise d’excuses  ou poursuivre ?

Voyant là une opportunité de reprendre quelques places, je relance !

2km de chemin d’Alpage derrière les dents de Lanfon, ça le fait… puis 10 kms en sous- bois et là … ça ne le fait plus ! mais alors plus du tout. Mon manque d’entrainement en descente vient de me le rappeler brutalement.

Virages sur virages en pente prononcée à très prononcée. Mes Cascadia chaussées  ‘sec’ glissent à la moindre occasion. Et celles-ci ne manquent pas. Boue, sol instable, cailloux roulants de tous diamètres et déclivité m’oblige à descendre pépère. Et là, ça double ! Mais comment font-ils ? saperlipopette !!! Si je les imite, je me plante c’est évident. Y a du boulot là !

Pour éviter l’emballement et le pied sur le frein, j’augmente la cadence… des douleurs légères aux genoux apparaissent, c’est une alerte, l’endroit est spécial !

Texto des miens  restés  au village de la MaxiRace pour annoncer l’arrivée du premier en moins de 4 heures ! 3h53 exactement. J’entame mon 20ème k… Mais comment a t-il fait le premier?  Sacrebleu de Crédiou !!!

 

Quelques petites remontées symboliques sont autant de poses salutaires car point de plat depuis la première montée au col de la Forclaz ! et ça repart en descente et merci les cailloux qui roulent … comme des boules de flipper (pardon pour ma culture musical année 80’) !

Rampes à eau à Villard Dessus. La nature est belle. Verdoyante à souhait, vert prononcé pas celui que lui voit dans le cagnard  méditerranéen, un beau vert des montagnes !

Christophe , mon bonheur est toujours là, il n’est pas parti! Mais mes genoux lancent des alertes douloureuses dès que je cours. Je ne sais pas ce que c’est, ça se passe sur les extérieurs. Y a quoi sur les extérieurs des genoux ?

Menthon St Bernard (Alt: 508m) se devine après quelques encablures, diverses courtes remontées et les premières maisons à flanc de colline. Une odeur de barbecue s’invite. Normal, c’est dimanche, il est midi et il fait beau ! De beaux clichés relaxants. Quelques familles à l’apéro profitent du temps. Puis au hasard des pavillons gentiment fleuris et fleuris, un petit garçon tenant à bout de bras un saladier, propose à qui le veut, des cerises ! Il sera récompensé par d’innombrables mercis. Belle initiative !

Rampe à eau en entrée de Gymnase, invitation à une aspersion de la tête par des bénévoles. Immense sensation de fraicheur ! Il devait faire chaud là-haut sur le caberlot ! Même chose sur les cuisses.

L’entrée dans le Gymnase, c’est la cour des miracles ! D’abord saisi par une humidité que Jardiland et ses serres pourrait envier, les chaises sont toutes prises d’assaut par des êtres hagards, affalés en phase de récupération. Par terre quelqu’un n’a pu aller plus loin, dos dans l’eau, les pieds au mur il récupère de crampes et refuse toute aide. Les bénévoles sont aux petits soins face aux tables garnies de ressources diverses, sucrées et salées. Quelques chips, je demande de remplir une flasque de Pepsi, l’autre d’eau pure et bien fraiche. Je ne charge pas plus, il semblerait qu’une rampe à eau supplémentaire soit installée au col de contrebandiers.

Après 6mn, je ne m’attarde pas, espérant rester dans un temps raisonnable. Déjà 5h08, 1600D+/D- et 27k depuis Doussard. L’affalé dos dans l’eau est toujours dans la même position! Est-il au bout de sa course ?

Tiens mais qui voilà ti-pas arrivant au Gymnase alors que j’en sors ? ma voisine volubile de la montée au col de la Forclaz ! Ça a l’air de le faire pour elle aussi !

Je cherche et trouve enfin 200m de plat avant le contournement du château emblématique de Menthon. J’attends le passage obligé par le tunnel à vache, c’est fait !  L’assaut du Veyrier c’est pour maintenant !

Quelques lacets escarpés au sein d’habitats épars et la route forestière et son pentu arrive ! Il me revient subitement que l’année dernière sur la Short Race, je courais encore. Aujourd’hui point de vélocité mais quelques kms en plus assurément.

Appuyé sur mes bâtons, je suis néanmoins agréablement surpris , les 700m du mont Baron sont gravis sans hausse excessive du cardio. Rester sous les 150 est mon mantra depuis le début. Alors je gère…Je biberonne mon pepsi régulièrement…

Et vivre l’entourage, rien à voir avec un 10k citadin. Je comprends mieux pourquoi la Hêtraie est si belle. Les arbres régulièrement visités pour un vidage de vessie masculine sont magnifiques. Ou sont les femmes ? Ca se trouve, elle ne font jamais pipi ( !). Là, un(e) crampé(e) pose, une proposition d’entraide ne tarde pas, ici une lune rapidement dévoilée pour un besoin irrépressible. Ce jeune couple dont la femme manifestement subit l’épreuve et qui est reboosté par son homme, ce vieux couple dont l’homme barbu aux cheveux longs bouclés gris revient sur ses pas rejoindre sa compagne l’encourageant avec un  ‘j’arrive mon Amour !’  Ces situations sont autant de cartes postales, de jalons, de repères mémoriels qui font de cette épreuve, une bien belle tranche de vie.

La descente au col des contrebandiers me parait longue d’autant plus que mes flasques se vident rapidement.

Et là badaboum (sic JP Belmondo). Pas d’eau au ravitaillement, les bidons dons dons sont vides ! 30 mn m’annonce t-on avant que l’eau n’arrive d’en bas ! Le ravito espéré s’évapore…

Re badaboum (re sic JP Belmondo) ! C’est donc le Coeur gros et le gosier en restriction que je m’en vais à l’assaut du dernier mais costaud dernier mur (250D+).

Gabin a dit en 1976 « je sais, maintenant je sais ». Et bien moi maintenant je sais aussi ! je sais ce que c’est que d’être crampé. J’en avais jamais eu !  Ça vous arrête net la crampe, le quadri droit bloqué !

J’appelle l’assistance, en l’occurrence mon ainé resté au village de la MaxiRace . « Des minéraux, prends des minéraux, ton Hydrixir »  me répond t-il.

Saisissant un sachet de réserve, je le verse dans mon restant d’eau. Et…revigorée en 2 mn !

C’est impressionnant de comprendre ainsi comment fonctionne un organisme. Il est vrai que j’étais au pepsi et à l’eau pure depuis Menthon, 800m plus bas. Il manquait quelque chose dans mon alimentation. Les fameux sels !

L’imminence de la crête est annoncée par des points de vue autant sublimes que fugaces parmi les saillies rocheuses arbustives. Encore quelques escaliers bouchonnés, des rochers et des rochers et c’est la délivrance !

Sacrifiant au rituel du selfie face à Annecy, je ne pause que 2 mn. Me connaissant, j’aurais bien posé séant. Non pour récupérer mais apprécier le point sublime.

Puis, 1km en crête à monter, redescendre et remonter puis plongée dans la descente finale. Mais après une glissade et une chute sur le fondement confirmant encore le mauvais choix de mes chaussures, je décide de sursoir à toute velléité de vitesse.

Tiens changement de programme ! Au sortir du Pré Vernet et au pied du Mont Rampon , le sentier part à droite toute et s’en va contourner le Mont Rampignon à l’opposé de l’arrivée. ( Je le saurais après, tout égaré que j’étais dans les sous-bois). J’ai soif ! Je conserve néanmoins quelques gouttes.

Cette sente est un modèle du genre. Trouver pire relève d’un apostolat voué à l’échec même si j’ai cru lire dans un récit récent de TiKrimi qu’il y aurait aussi entre le col de la Cochette et Doussard une spéciale de même tonneau. Ici, déclivité, dévers, sol mouvant, pierres fixes et roulantes, racines aériennes ou rampantes et débris d’arbres de tous calibres y sont réunis. On dirait une piste inclinée tracée dans la jungle au bull !

 S’y rajoutent mes genoux qui crient grâce et l’ambiance est donnée ! J’ai toujours soif ! Je pressurise mes deux flasques, là c’est sûr, elles sont vides, vides comme les caisses d’un état d’Afrique centrale.

Les derniers kilomètres sont longs, je n’entends pas encore les échos sonores du Village. Si ça se trouve tout est plié ? Alternant marche et semblant de trot à l’agonie, je tire les kilomètres… J’appelle les miens en attente sur la ligne d’arrivée, qu’ils ne s’en aillent pas sans moi.

Une éclaircie, c’est bon signe,  je retrouve le chemin pierreux casse pattes de l’année dernière annonçant le débouché sur le lac. Là tous les cailloux sont mouvants. C’est un lit de bille ! Tiens, une nouveauté sympathique, la passerelle surplombant la route en rive de lac, quelques marches, là où on en est, ça ne compte plus, passage de la route et tapis rose dans la descente annonçant le futur rouge de l’arrivée puis dernier kilomètre sur le ponton et la piste piétonne longeant la plage d’Albigny. Les touristes vont et viennent dans leurs pérégrinations dominicale, certains m’encouragent, d’autres m’ignorent.

Surprise, malgré mes genoux retords, j’arrive à courir, oh pas bien vite, on va dire, 6’/k mais la fatigue n’est pas marquante. Est-ce ma gestion de course qui paie ? J’en arrive à récupérer 2 places dans les derniers mètres que le Speaker met en avant en citant avec force et fracas, mon prénom.

Le tapis rouge et le surplomb final sous l’arche signent la fin de cette Marathon Race.

Je saute sur la première bouteille d’eau tendue puis une deuxième, en garde une troisième pour la route et file chercher mon lot de finisher. Je range mon bonheur dans ma mémoire, je ne l’oublierai pas.

Il est 16h50, 9H17 depuis le départ, 1487/1689 au scratch et 28/38 dans la cat V3.

  

03 juin 2018 :

Debriefing

Je pense avoir bien géré ma course, peut-être trop dans la prudence. Après tout c’était une découverte.  Prônant la beauté des espaces au dépend de la performance, j’ai laissé du temps au temps et je n’ai pas vu le temps passer ! Cela ouvre des perspectives intéressantes. Déjà réitérer la distance, certainement et puis trouver un moyen de traiter le problème de la gestion des descentes. C’est primordial quand ces descentes représentent la moitié de la distance.

A l’aune de mes 60 ans, cette ‘performance’ alimente mon assurance et ma sérénité que les années voudraient bien atténuer. Si la vitesse n’est plus, l’endurance est un objectif qui participera à mon bien-être et à l’entretien de mon corps qui il ne faut pas l’oublier est notre premier véhicule, notre bien à tous.

Quelques jours ont passé et déjà je me dis que… je reviendrai bien ! Rester sur cette distance et l’améliorer plutôt que de monter en gamme et de coller en fin de peloton.

 

Mes impressions sur l’événement :

Les biens

On en prend plein les yeux et la tête :

-          Des rives Annéciennes verdoyantes et turquoises.

-          De l’organisation au cordeau , de la préparation jusqu’aux courriels pré-course.

-          De l’engagement des bénévoles, des photographes et des locaux.

-          Du balisage sans faille.

-          De la présence d’athlètes de prestige dont F d’Haene de nouveau présent en course et dans son stand de vigneron.

-          Des paysages alpins sublimés par le temps.

-          De l’ambiance globale et de l’esprit Trail qui perdure au sein du peloton. Aucune animosité, cette entraide entre les traileurs en cas de pépins, le partage d’informations sur les entrainements et le matériel, la convivialité… Pas ou très peu de déchets sur le chemin, en un mot, l’esprit Trail, cette fraternité je l’ai croisée !.

Les moins biens !

-          Multiplicité des courses au sein de la MaxiRace qui poussent l’événement dans l’industriel. Quel est l’intérêt des relais ? Faire un 85 en relais de 2 ou 4, autant faire la MarathonRace,  la ShortRace, la FeminaRace  ou encore un semi en ville !

-          Beaucoup, beaucoup de monde, bouchons sur les monotraces de la montée au col de la Forclaz et bouchons au Lancrenaz (départs décalés à prévoir ?)

-          Centre-Ville d’Annecy et parking engorgé ce WE de mai

-          Prix des hôtels à la hausse. Pas folles les guêpes !

-          Lot finisher un poil mesquin ! on ne court certes pas pour cette attribution encore faut-il que les coûts d’inscription soient en rapport.

-Textile en coton ! Au prix de l’inscription et au nombre de bénévoles par définition non gratifiés, où va donc la trésorerie ? Dans les bouteilles d’eau ? Le sponsor Salomon pourrait faire un geste qui s’en trouverait amplifié par la pub ambulante que l’on ferait par la suite lors de nos entrainements.

-Bouteille de bière : L’année dernière pour la Short Race, ont été distribuées des bouteilles de 750ml ! Apprécié ! Cette année Short Race comme Marathon Race, la contenance est tombée à 330ml. Je n’ose imaginer l’année prochaine s’il me venait l’idée de revenir. Dois-je venir avec une flasque de 100ml ou sera t-on à l’eau ?

 

 

Un p’tit mot pour la fin ?

Au cours d’une vie, chacun a des envies, des désirs, des rêves. Pourtant, souvent, des barrières se dressent. Volontaires ou non. Et puis un jour, on aimerait les voir derrière !

Alors, on se donne les moyens d’aller de l’avant, plus loin.

Le plus dur, c’est de prendre la décision de se lancer ! et puis de pouvoir dire "j'y étais!"

 

 

 

 

 

4 commentaires

Commentaire de Katman posté le 08-06-2018 à 22:22:28

Magnifique récit! Merci de nous faire vivre ...ou revivre en ce qui me concerne cette belle course. Je me suis juré en montant au Mont Baron que je n’y remettrai plus les pieds dans ce merdier... mais au bout de quelques 10 jours passés à revivre mon périple je pense planifier l’ultra race l’an prochain.

Commentaire de GlopGlop posté le 08-06-2018 à 22:41:45

Merci, on échange ainsi nos ressentis. Je lis tous ceux d'Annecy, j'adore le coin ! et puis perso, j'ai mis que 2 jours avant d'envisager de revenir !
Mais je m'en tiendrais à la Marathon Race. J'ai l'intention de moins flâner, changer de chaussures pour des plus accrocheuses, on m'a parlé des Columbia-Colorado et puis courir dans les descentes car c'est là que j'ai perdu énormément de temps. Donc certainement à l'année prochaine Katman !

Commentaire de boutentrail posté le 12-06-2018 à 17:03:05

Bravo ! :-)

Commentaire de GlopGlop posté le 12-06-2018 à 19:57:52

Idem 2 x idems car toi c'est deux fois plus !

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