L'auteur : jedaf
La course : La Ronde Forestière - 12.5 km
Date : 10/4/2016
Lieu : Brassac (Tarn)
Affichage : 1610 vues
Distance : 12.5km
Objectif : Terminer
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Dimanche 10 avril 2016, la Ronde forestière de Brassac. 13 kilomètres. J'y étais.
Je fais partie, non sans mérite car il m'a fallu batailler 65 ans pour y parvenir,de ce que l'on appelle hermétiquement les V3M. Je sais courir, je le fais depuis longtemps et sérieusement mais depuis juste quelques mois en ce qui concerne les "courses de sentier", trails en langage branché.
Ce matin-là nous sommes 230 passionnés au départ en ce magnifique dimanche ensoleillé. Je suis accompagné de Nicolas (« pastisomaitre » pour les connaisseurs et les lecteurs de comptes rendus), mon fils, qui est par rapport à mon niveau de course ce que peut-être un tournedos Rossini par rapport à un Kebab.
L'ambiance est chaleureuse, l'accueil convivial, le lieu superbe, les organisateurs parfaits. Le départ est tranquille et débute par un petit tour de village. Très vite les coureurs ambitieux disparaissent dans un nuage de poussière tandis que nous nous étalons en un long cordon telles des fourmis laborieuses.
Quelques centaines de mètres dans les ruelles et nous nous embranchons dans un sentier qui grimpe sous les frondaisons magnifiques de ce tout début de printemps en ce beau pays tarnais. Le rythme décroît, les enjambées deviennent des trots et les trots des pas. Un rapide coup d’œil pour savoir si ceci est un phénomène personnel ou général. Ouf ! Tous partagent ma première difficulté. Cette mise en bouche dure un kilomètre. Voilà c'est fait. De temps en temps les mains sur les cuisses, je regarde le fils qui, pour me faire plaisir, fait semblant de souffrir. Brave enfant ! Je vais le remettre sur mon testament.
J'accroche les pas de celui qui me précède. L'allure est quand même soutenue. Sur mes traces il n'y a pas encore de lambeaux de poumons ensanglantés. Cela me rassure. Ce premier raidillon passé, nous trottons dans des sentiers forestiers superbes où l'on oublie qu'il s'agit malgré tout d'une course et où l'on aimerait courir plus lentement pour en profiter davantage. On aperçoit l'Agout majestueuse, on longe des ruisseaux paisibles.
Aux 4 kilomètres, le premier point d'eau est le bienvenu où l'on voit deux tables, l'une avec de l'eau, l'autre avec une bouteille de rouge et du pâté. Cette seconde est le ravito du personnel du ravito d'eau. Il y a une anormalité dans l’organisation.
Réhydratés, nous repartons, guillerets. L'ambiance est bonne enfant. Je me souviens de superbes sentiers en sous-bois, de monotraces à flanc de collines dégagées où l'on se remplit les yeux de sublimes vallées, d'une cloche de vache qu'agitait un organisateur pour nous signaler un point dangereux, de passerelles jetées sur un ruisseau, de rochers que l'on passe avec précaution.
Je me sens rassuré, car une fois la machine à température, je suis le rythme général sans grandes difficultés. Si je dépasse peu, peu me dépassent. Si je souffre en côte, j'ai la joie de voir souffrir d'autres que moi. Ah ! la joie sadique du coureur de fonds (de fond des bois).
Je me souviens d'un tronçon vers le 7ème kilomètre alors que je guettais désespérément le second point d'eau où sur 5 à 600 mètres le chemin disparaissait pour devenir une sente à peine visible à travers un bois clairsemé s'accrochant à des rocailles. Face à la pente très raide, nous avons carrément escaladé, parfois en s'aidant des mains. Le sommet se dérobait devant nous avec la sournoiserie de la nature qui joue avec vous.
Je fais le bilan de mes poumons, toujours deux, je perçois un léger espace entre deux battements de mon cœur, c'est bon. Le plus dur dans l'affaire c'est quand votre fils, qui vous accompagne alors qu'il vient de faire les 50 kilomètres de St Amand Soult et les 40 kilomètres de Lavelanet, vous dit :" Papa, je vais garder mon téléphone en main comme ça je ferai des photos et des vidéos, cela nous fera un souvenir." Alors que je souffre, transpire, galère, je le vois qui accélère subitement et cours se placer 100 mètres devant moi puis qui me laisse repasser devant, le smartphone braqué sur moi, qui dans la pente la plus rocailleuse saute de rocher en rocher, comme un izard à la saison du rut, me filme d'en haut puis redescend à ma hauteur. "Ça va ? C'est pas trop dur ?" Comment peut-on ainsi rester concentré ?
Les coureurs qui m'accompagnent jettent parfois un furtif coup d’œil latéral : "Qu'est-ce qu'il fait celui-là, pourquoi ne double-t-il pas ?"
Nos sommes arrivés après avoir traversé un pré environné d'un paysage enchanteur au ravitaillement du kilomètre 9. Nous savons qu'ensuite il n'y aura que du bonheur.
Deux tables; l'une présente des boissons désaltérantes, eau et sodas, sur lesquelles nous nous précipitons. Un verre de soda à la main je jette un coup d’œil sur la seconde table. Entièrement garnie de charcuteries locales ! Je fais signe à mon fils et nous faisons quelques pas chassés sur la gauche. Le pâté est sublime, on pioche aussi dans le saucisson, le boudin et bien d'autres délicieuses spécialités. Discrètement nous échangeons notre soda contre un vin chaud. Nous perdons donc facilement 10 minutes mais quel bonheur ! Un lieu agréable, une équipe super, une musique décoiffante. Je crois que j'aime vraiment le trail.
On repart en marchant, notre verre de vin chaud à la main. Au bout d'une centaine de mètres nous mettons nos verres vides dans nos sacs (La préservation de l'environnement est une priorité absolue) et nous repartons en galopant.
A partir de là il n'y a quasiment plus que du plat et de la descente dans des bois magnifiques. Tout le long du parcours le sol est parfait, c'est un soulagement pour nous qui sommes habitués à courir sur des terres argileuses glissantes et collantes où quelques dizaines de mètres suffisent parfois à vous faire grandir de 10 centimètres. La course ressemble plus alors à un concours d'échasses landaises qu'à un galop fougueux.
On voit le village à travers les arbres encore peu feuillus alors que nous parcourons la dernière sente très pentue où il convient, à cause de la fatigue, de préserver ses chevilles fragilisées par les nombreuses roches qui roulent dissimulées sous les feuilles mortes. Au fil des lacets on entend les premières vagues d'une banda et les commentaires de l'animateur.
Un tour du village, un passage sur le vieux pont, un dernier dépassement pour le fun et nous arrivons mon fils et moi côte à côte sur la ligne d'arrivée. La banda joue en notre honneur. Si, si, tout Brassac est là pour nous acclamer c'est sûr.
Où est le stand de bière ?
Bravo aux organisateurs et merci pour tout.
Ah ! Une dernière. J'avais dit à mon fils que je comptais quand même mettre moins de 2 heures pour faire ce parcours de 13 kilomètres. Mais j'avais sous estimé le dénivelé, preuve que j'ai encore beaucoup à apprendre.
Mais j'ai largement atteint mon objectif, j'ai mis 1 heure 59 minutes et 56 secondes.
Nicolas me dit :"Tu sais que tu es au pied du podium, tu es 4ème des V3." Ce à quoi j'ai répondu :"C'est sans doute que nous n'étions que 4.". Vérification faite nous étions 5.
Merci, Patrick.
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1 commentaire
Commentaire de Freddy55 posté le 22-04-2016 à 15:55:23
Merci pour ce récit plein d'humour, c'est un régal de te lire.
Vivement le prochain !
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