La navette ? Vous voulez rire ?
Après une nuit tranquille dans un dortoir que nous occupons seuls, nous nous réveillons à 6h00 pour profiter d'un petit déjeuner agréable servi par le patron du gîte, aux petits soins avec nous. Ce dernier nous parle à nouveau de la navette qui relie Vallouise à Entre-les-Aygues, à l'ouest, et que de nombreux randonneurs empruntent avant de se lancer dans l'ascension du Col d'Aup Martin, point culminant du GR54. Cette navette serait d'autant plus appréciable que de récents glissements de terrain ont emporté une partie du GR qui passe au sud de l'Onde. Nous ne sommes heureusement pas du genre à nous laisser distraire ainsi de notre objectif de boucler, à pied, le tour de l'Oisans, et déclinons donc cette offre pourtant sympathique.
Petit pêle-mêle de la journée.
Comme la veille avant le départ, je me tartine les pieds de crème anti-frottements, et l'ensemble des parties du corps exposées au soleil de crème solaire à fort indice de protection. Mathias, à qui le soleil de la veille a commencé à donner un teint d'écrevisse, m'en emprunte d'ailleurs un peu afin de limiter les dégâts.
Nous quittons le gîte à 6h43, et suivons donc la route jusqu'au Pont des Places où le GR rejoint cette dernière. Nous poursuivons ensuite jusqu'au parking d'Entre-les-Aygues, en nous faisant doubler, au passage, par la fameuse navette. Pas bien grave : nous aurons certainement l'occasion de doubler ses passagers lors de notre montée "sportive" au col !
L'ascension commence le long du Torrent de la Selle, dans un cadre magnifique. Nous marquons une pause devant un abri au Jas Lacroix, à 1946 m d'altitude (1h48' pour gravir 770 m : nous sommes bien partis tranquillement).
L'abri de Jas Lacroix.
Vue sur le Col de l'Aup Martin.
Nico et Michel.
Nous nous arrêtons également au Champ Rond, à 2170 m, d'où la vue sur le chemin parcouru est déjà saisissante, puis nous entamons la montée finale vers les 2761 m du Col de l'Aup Martin, que nous atteindrons à 10h15, après 3h32' de rando-course.
Michel et Serge.
Nico au Champ Rond.
La vue sur l'ensemble des environs est à couper le souffle, sorte de paysage lunaire où subsistent de larges bandes d'herbe bien verte.
Vue depuis le Col de l'Aup Martin.
Serge, Michel et Nico sur le Col de l'Aup Martin.
Michel, Nico et Mathias.
Vue depuis le Col de l'Aup Martin.
La descente infernale
Nous rejoignons ensuite le Pas de la Cavale, à 2735 m, en une dizaine de minutes, puis entamons une longue descente vers le Refuge du Pré de la Chaumette.
Cette descente me donne enfin l'occasion de démontrer au monde entier - ou, du moins, à mes quatre compagnons - mes prodigieux talents de descendeur. Serge, excellent grimpeur, dit souvent qu'il est mauvais descendeur (Michel est d'ailleurs persuadé qu'il dispose là de ses plus belles marges de progression). Je vais donc m'efforcer de lui montrer que l'on peut trouver bien pire, à un niveau qu'il n'imaginait peut-être même pas.
En effet, sitôt la descente entamée, mes quatre compagnons s'envolent bien loin devant moi, et je les vois me prendre dix, puis quinze, puis cinquante, puis cent mètres... de D- en un temps record. Partout où ils courent, je ne trouve rien de mieux à faire que marcher péniblement, en tentant vainement d'assurer un minimum de stabilité. Je sens pourtant bien que cette descente est relativement roulante (je croise d'ailleurs un groupe de randonneurs à cheval), mais il n'y a rien à faire : je suis tétanisé, et me résous donc à l'idée de laisser mes camarades filer, en espérant qu'ils n'auront pas à m'attendre trop longtemps malgré tout.
Arrivé sur le Vallon de Rougnoux, j'hésite sur le chemin à prendre. Certes, le GR continue à descendre sur ma droite, mais je crois me souvenir que mes compagnons ont parlé, le matin même, d'une succession de cols rapprochés les uns des autres aujourd'hui, et, justement, le chemin à gauche mène vers le Col du Cheval de Bois. Je commence à suivre le GR pendant cinq minutes, puis, pris d'un nouveau doute, je remonte et entame l'ascension du col pendant un bon quart d'heure, avant de réfléchir un peu plus sereinement et de conclure qu'ils m'auraient attendu s'ils s'étaient écartés du GR. Je reprends donc le chemin de la descente, et les aperçois, enfin, attablés au Refuge du Pré de la Chaumette, où j'apprends qu'ils m'attendent depuis... plus d'une heure.
Rien de tel pour prendre la pleine mesure de mon rôle de boulet de l'équipe...
Heureusement pour moi, ces montagnards sont d'une patience sans bornes, et je peux moi aussi profiter d'un ravitaillement Coca/tomates particulièrement bienvenu à cette heure (il est déjà midi).
Trois p'tits cols et puis s'en vont
Nous repartons vers 12h30, pour entamer l'ascension des trois derniers cols de la journée. La montée au Col de la Vallette, à 2668 m, ne pose pas de difficulté, et je rejoins Serge, Michel et Nico quelques minutes avant Mathias, que ses maux de ventre ralentissent implacablement dans chaque ascension. Les 850 m de D+ sont avalés en 1h10' : je ne dois pas être loin de mon record de vitesse ascensionnelle. La vue est, là encore, magnifique. Il faut dire que nous sommes particulièrement gâtés par la météo, avec un ciel bien dégagé et un temps chaud et sec depuis le début de notre aventure.
Serge, Michel et Nico au Col de la Vallette.
Mathias termine l'ascension du Col de la Vallette.
Vue depuis le Col de la Vallette.
Vue depuis le Col de la Vallette.
Nous descendons sur le Vallon de Gouiran, dans un terrain schisteux qui me convient paradoxalement davantage que le mélange de pierres et de terre rencontré après l'Aup Martin. C'est là que Michel me donne quelques conseils pour améliorer un peu ma technique de descente, ou plutôt pallier mon manque flagrant de maîtrise : une posture semblable à celle du skieur, les jambes pliées et les épaules en avant des fessiers. Ah, si seulement je savais skier...
Nous remontons ensuite sur le Col de Gouiran, à 2597 m, où nous marquons une petite pause, puis redescendons sur le Vallon Plat avant d'entamer l'ultime ascension du jour vers le Col de Vallonpierre, à 2607 m.
Vue depuis le Col de Gouiran.
Nico, Mathias, Michel et Serge au Col de Gouiran.
Vue depuis le Col de Gouiran.
Vue depuis le Col de Gouiran.
Vue depuis le Col de Vallonpierre.
Serge, Mathias et Michel au Col de Vallonpierre.
Nico au Col de Vallonpierre.
Mathias qui domine les environs depuis le Col de Vallonpierre.
Après dix minutes d'arrêt, nous entamons la descente sur le Refuge de Vallonpîerre, à 2271 m, en bordure du lac éponyme, où nous marquerons une dernière pause qui sera l'occasion de se ravitailler en eau et de s'alimenter un peu (ah, que j'aime ces barres de nougat...).
Nous descendons ensuite sur la vallée de la Séveraisse, où le GR est très agréable jusqu'à Rif du Sap, petit chemin passant au travers d'une végétation luxuriante. Michel et Nicolas sont partis devant, et ont opté pour la route, tandis que Mathias, Serge et moi décidons de suivre le GR jusqu'à hauteur du Casset. A l'approche du Bourg, je regrette presque notre choix, car le sentier si agréable s'est mué en vaste autoroute à 4x4 : une bonne dizaine de mètres de large, sur un sol presque lisse, et où il devient difficile de s'abriter du soleil dont les rayons brûlent plus ici que sur les sommets.
Heureusement, le GR bifurque à gauche et redevient plus sauvage, jusqu'à un petit pont très pittoresque qui nous permet de rejoindre le Casset, près de La Chapelle en Valgaudemar. Serge nous a doublés dans cette dernière portion, et Mathias et moi ne pouvons réprimer notre joie à la vue du panneau "Le Casset, 0,1 km".
Cela fait en effet plus de 11h que nous avons quitté Vallouise et une descente pénible pour moi et des ascensions difficiles pour Mathias ont assez largement entamé notre résistance physique et mentale.
Bilan de la journée :
11h17' pour
48,8 km et
3226 m de D+.
Bilan cumulé des deux jours :
20h17' pour
95,6 km et
5868 m de D+.
Le repos des guerriers
L'arrivée au gîte est donc une véritable délivrance. Serge connaît les lieux pour y avoir déposé, quelques semaines auparavant, un pot de 2 kg de sa poudre magique qui constitue, seulement coupée d'un peu d'eau, sa seule source de ravitaillement pendant la journée.
L'endroit est très agréable et, comme à Vallouise, les propriétaires et les autres clients sont aux petits soins avec nous. Après une petite bière et un petit Coca, la douche, qui fonctionne à l'énergie solaire (voilà une façon toute simple de profiter des énergies renouvelables) fait un bien fou, et me permet de nettoyer un peu deux débuts d'ampoules au pied droit, que je tenterai de soigner avec un Compeed.
Le repas est copieux, mais un cafouillage dans la répartition des parts nous prive, Serge, Michel, Nico et moi, de plat principal... Heureusement, nos voisins se proposent de nous donner une large part de leur propre assiette, et la propriétaire nous prépare, en catastrophe, une bonne casserole de pâtes.
J'avoue que j'aurais eu du mal, après une telle journée, à me contenter des feuilles de salade prises en entrée...
Je n'ai ce soir encore, à ma plus grande joie, aucune douleur musculaire ou articulaire, mais je redoute un peu la journée de demain, qui est celle qui avait contraint Mathias à l'abandon l'an dernier. Mathias, d'ailleurs, est lui très marqué par ses douleurs gastriques, et s'interroge sur ses chances de parvenir à boucler l'étape de demain.
Nous décidons d'ailleurs de nous répartir en deux groupes, Michel, Nico et Serge optant pour un trajet
a priori plus agréable mais aussi plus technique, tandis que Mathias et moi nous contenterons de suivre le GR.
Enfin, tout cela dépendra de notre état le lendemain au réveil...
A suivre...
L'Castor Junior
6 commentaires
Commentaire de le_kéké posté le 01-08-2006 à 09:09:00
Quel suspence, vite la suite ...
L'castor et Mathias vont-ils finir la prochaine étape ?
L'castor va-t-il progresser en descente ?
La poudre de Serge passerait-elle les controles anti-dopages ?
Passionnant ce récit en épisode
Commentaire de hérisson posté le 01-08-2006 à 10:11:00
Merci pour ces cr et les magnifiques photos :
cé quoi la poudre de serge : du maxims ?
hérisson
Commentaire de Manuwak59 posté le 01-08-2006 à 15:08:00
Passionnant, en éffet. Ca va faire des envieux, l'aventure est si belle !!. Tu as dû en prendre des notes pour te souvenir de tous ces moments.
Les photos sont splendides.
A bientôt de te lire.
Manuwak59.
Commentaire de devey posté le 01-08-2006 à 18:03:00
super vivement la suite
Commentaire de Kiki14 posté le 01-08-2006 à 20:40:00
oui un grand bravo pour les photos et les commentaire et aussi pour la photo de Mathias....
Commentaire de jojo57 posté le 04-08-2006 à 18:45:00
Non seulement ton récit est superbe mais les photos font rêver . C'est beau la montagne !!!
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