L'auteur : Khioube
La course : Marathon du Mont-Blanc
Date : 29/6/2014
Lieu : Chamonix Mont Blanc (Haute-Savoie)
Affichage : 3814 vues
Distance : 42.195km
Matos : Salomon XT Wings, bâtons Guidetti
Objectif : Se défoncer
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Dimanche matin, 3h30. Le réveil sonne aux Praz, je me lève. Tom et moi allons faire un tour sur le balcon pour prendre la température. Il fait frais et, surtout, il pleut des cordes. Rejoints par Clément, l'autre membre de notre petit trio de coureurs / joueurs de football gaélique, nous prenons notre petit déjeuner - le délicieux riz au lait préparé par ma chère Mathilde qui fait désormais partie de mon alimentation de pré-course (le riz au lait, pas Mathilde). Après avoir ironisé sur notre situation (quelle idée de se lever à une heure pareille pour aller courir sous la flotte ?), nous retournons nous coucher. Le réveil sonne deux heures plus tard. Je n'ai pas réussi à me rendormir, Tom non plus, nous n'avons presque pas dormi de la nuit. Bien que ce soit ma seconde participation au MMB et que j'aie gardé de bons souvenirs de la première, je suis très nerveux avant de prendre le départ. Est-ce la perspective de courir dans le vent et la pluie qui m'inquiète ? Ce n'est certainement pas l'idée de ne pas devoir monter jusqu'au sommet des Posettes, en tout cas... Nous enfilons les tenues que nous avions soigneusement préparées la veille au soir, je tâche de ne rien oublier. Je suis pourtant à deux doigts d'oublier mes bâtons, heureusement que mes deux acolytes sont mieux réveillés que moi.
Nous rejoignons la place du triangle de l'amitié en trottinant, il ne pleut plus, c'est agréable. Notre projet est de partir ensemble et de courir ensemble jusqu'au premier ravitaillement ; ensuite, on verra comment chacun se sent. Lorsque nous arrivons sur la ligne de départ, il se remet à pleuvoir, le coup d'envoi de la course est dans moins de cinq minutes. Nous avons tout juste le temps de lancer les GPS, d'enfiler nos coupes-vent après une longue hésitation et de nous souhaiter bonne chance.
Les jambes sont lourdes, je sens que je ne suis pas au mieux pour démarrer. Peut-être est-ce le manque de sommeil (j'ai assez mal dormi les trois dernières nuits), à moins que ce ne soit le kilomètre vertical qui se rappelle au bon souvenir de mes mollets...
Au bout de quelques secondes je me rends compte que j'ai totalement oublié de me mettre de la Nok sur la poitrine, ce qui pourrait s'avérer fatal. Quelle erreur de bleu ! Heureusement, je n'aurai pas de problème à ce niveau-là ; c'est un truc à te faire abandonner une course... Je constate également que je n'ai pas noué mon short. Dès la première descente, je commence à le perdre sous le poids de mon stock de barres et de gels ! Non mais franchement, je suis un winner...
Je règle mon pas sur celui de Clément, qui a une réputation de métronome. Allure visée, 10km/h. Dès les premières minutes de course, je bénis ma visière qui me permets d'avancer tranquillement sans être trop gêné par la pluie ; il y a parfois des accessoires à 5 euros qui peuvent vous changer la vie... Au bout de 4km, Clément et moi perdons Tom, dont l'objectif est de finir le parcours : ayant dû abandonner à la Saintexpress pour cause de blessure, c'est son premier véritable marathon. Je m'accroche autant que je peux à Clément. Autant nous avons un niveau similaire sur chemin plat, autant il est bien meilleur grimpeur que moi (il l'a prouvé lors du km vertical, qu'il a terminé 12mn avant moi!). À la moindre petite côte, je le vois doubler avec aisance les autres concurrents ; heureusement, je suis à l'aise en descente et j'arrive à le rattraper.
J'arrive finalement à Vallorcine à 9h02 (954e position), soit au bout de 2h et quelques poignées de secondes. Autant que je me souvienne, j'avais mis le même temps l'an dernier. Merde alors, je pensais quand-même avoir bien progressé depuis ! Je savais bien que les jambes ne répondaient pas très bien ce matin. Cette fois, cependant, je ne m'arrête pas au ravitaillement. Je mange vite un ou deux Tuc®, je bois un coup et je sors mes bâtons. Clément et au-dessus de moi, à quelques lacets. Il se retourne, je lui fais signe ; c'est la dernière fois que je le verrai sur le parcours et j'en ai parfaitement conscience. Je tâche d'avancer à mon rythme sans m'arrêter. Assez rapidement je me rends compte que j'ai vraiment sommeil ; j'ai les yeux qui se ferment. Je n'ai qu'une envie, c'est de m'asseoir au bord du chemin et de faire une petite sieste. Ce n'est pas comme si j'étais à l'UTMB et que j'en étais déjà à 15h de course ! Je ne sais pas si c'est le froid, le vent, ou juste l'effet du ravitaillement mais je retrouve un peu d'énergie dans la fin de l'ascension du col. Je ne cours pas en montée mais j'arrive au moins à limiter la casse en ne m'arrêtant pas (à part pour enfiler ma paire de gants, accessoire malheureusement indispensable là-haut). Je me fais rattraper par Bertrand (alias Seydoublen), que j'ai à de nombreuses reprises affronté sur un terrain de football gaélique, on discute pendant deux minutes et il s'échappe à la recherche de son camarade de course.
Malgré mes efforts pour ne pas trop traîner en chemin, j'ai quand-même perdu à peu près 200 places entre Vallorcine et le col des Posettes – qu'il m'aura fallu 1h08 pour atteindre. Au ravitaillement je prends une tasse de thé, une pâte d'amande et je repars. La descente est facile, c'est une piste de 4x4, mais pas forcément très agréable. En face il y a un troupeau de moutons qui descend de la montagne, c'est joli, j'aimerais bien pouvoir m'arrêter pour profiter de la vue mais ce n'est pas vraiment le moment... je descends vite au Tour (je remonte de 80 places au classement en 23 minutes), et je poursuis mon effort jusque Tré-le-champ (encore une quarantaine de places de gagnées !), où m'attendent mes proches comme l'an dernier.
Mathilde m'accompagne au ravitaillement, je prends une nouvelle tasse de thé, une pâte de fruits, elle me dit que mes parents sont en route et qu'ils devraient être là d'ici une dizaine de minutes. Je profite de cette occasion pour faire une bonne pause (bonne pour moi, pas pour mon classement ou mon temps...). Elle me dit que Tom ne devrait pas tarder à arriver en haut des Posettes ; par contre elle n'a pas vu passer Clément. Dommage, j'étais curieux de savoir si j'avais réussi à limiter les dégâts face à ce bouquetin... (il était finalement passé 17 minutes plus tôt).
Après cette interruption salutaire, je reprends mon chemin. Je sais que l'ascension qui suit va être difficile, j'avais eu beaucoup de mal dans cette partie l'année précédente. En partie à cause de la chaleur, certes, mais aussi par manque de caisse. Comme dans les Posettes, je m'efforce de ne pas trop traîner, je m'appuie autant que je peux sur mes bâtons. La montée à la Flégère se fait en deux temps : on commence par une côte bien raide, suivie d'une descente technique dans la forêt, avant de reprendre l'ascension. La descente est un vrai bonheur, elle est pleine de racines, de pierres – bref, de pièges. Je regagne quelques places au classement, même s'il est difficile de doubler dans ces singletracks. Contrairement à l'année précédente, je ne m'arrête pas, je ne regarde pas le chrono et je ne souffre pas vraiment. C'est plutôt agréable, comme sensation ! Il n'y a vraiment que dans la dernière côte vers la Flégère, celle où l'on sort des bois et que l'on voit le refuge, où j'ai un peu souffert. Heureusement, il y a une bonne marcheuse devant moi, alors je lui emboite le pas autant que je peux, c'est plus facile comme ça. A cause de la météo, l'ambiance est nettement moins festive que l'année précédente (on peut difficilement en vouloir aux musiciens), mais le ravitaillement est tout aussi appréciable. Heureux d'être arrivé au sommet et de n'avoir plus que de la descente jusqu'au centre de Chamonix, je fais une nouvelle pause, le temps d'ingurgiter quelques Tuc®, un gel coup de fouet (au cas où), quelques verres de Coca® et de replier mes bâtons.
S'ensuit alors la meilleure partie de la course. Plus la descente est technique, plus je m'éclate ! Non seulement on ne me double plus, mais je regagne beaucoup de places au classement. Je ne sais pas si c'est le fait d'avoir fait beaucoup de danse classique étant jeune (si si), mais je suis très confiant (peut-être un peu trop, mais pour l'instant je ne me suis pas pris de gamelles...) dans ces conditions de course. Inévitablement je me dis que c'est dommage d'être aussi mauvais en montée quand on est capable de faire la différence en descente ! Chacun sa spécialité, on va dire...
Après la descente technique, on rejoint une piste beaucoup plus roulante, on passe devant le charmant chalet de la Floria où nous étions allés nous promener la veille. Les promeneurs nous informent que le but est proche, que nous sommes juste à l'heure pour l'apéro... l'ambiance est joviale, c'est agréable. Une dernière petite pause pour enlever le coupe-vent (qui aura été très utile tout au long du parcours, malheureusement) et on repart. Il reste 1km de plat. J'ai encore du jus alors j'accélère. J'aperçois Clément sur le parcours, je lui demande combien il reste exactement : je ne connais pas bien Chamonix et je n'ai pas envie de me cramer avant la ligne d'arrivée. Rassuré par ses indications et par la vue du Super U (on a les repères qu'on peut), j'accélère et finis en sprint pour doubler sur le fil deux vétérans qui terminent tranquillement, gamins à la main. C'est toujours deux places de prises, hein, flûte ! Je finis la course en 6h27, soit 32 minutes de moins que lors de ma première tentative. Certes, ce n'est pas le même parcours, la comparaison est donc un peu artificielle. Mais bon, je me dis que Kilian n'a fait que 6 minutes de mieux qu'en 2013, j'ai donc plus progressé que lui. Ha ha, dans ta tronche, le Catalan ! (pardon, Saint-Kilian, je t'aime)
Mes parents et Mathilde sont à l'arrivée, je suis heureux de les voir. Après avoir bu un coup, nous rejoignons la famille de Tom pour attendre son arrivée. Une heure après moi, il arrive ! Il a l'air content et en pleine forme, le contrat est donc rempli et le weekend se termine parfaitement ! Il ne nous reste plus qu'à rentrer prendre une bonne douche avant de se taper un bon gros McDo, juste parce qu'on a le droit...
Mon bilan de la course est plutôt positif. J'ai le sentiment d'avoir bien mieux géré ma course, de ne pas avoir connu de coup de mou. L'année précédente, je me souviens avoir fini en me disant « les maratrails, plus jamais ! » ; cette fois, je suis déjà prêt à repartir ! Cela s'explique probablement en partie par le fait que la course se termine cette fois par une longue descente, alors que le parcours classique s'achève avec une montée épique vers le Brévent ; mais je pense aussi avoir bien progressé sur le plan foncier, je suis convaincu que j'aurais pu continuer de courir si nécessaire.
Je suis plutôt content de la manière dont j'ai géré mon alimentation, également. C'était moins aléatoire que d'habitude, j'avais pris de quoi me nourrir régulièrement et j'ai tâché de m'y tenir. Certes, la tranche de saucisson à Vallorcine n'était pas prévue au programme, mais on n'est jamais à l'abri d'un accident, hein ?
Il me reste évidemment beaucoup de progrès à faire. Pas besoin d'être un génie pour comprendre qu'il faut que je me mette sérieusement à bosser les montées – je le savais avant d'arriver à Chamonix, j'en ai eu la confirmation lors du kilomètre vertical et du marathon. Le jour où j'arriverai à grimper rapidement sans perdre trop de jus, je pense que mes résultats s'en ressentiront nettement – surtout si j'arrête de faire des pauses interminables aux ravitaillements ! En tout cas j'ai hâte de m'y remettre, c'est sans doute la meilleure preuve que tout s'est bien passé...
Merci à mes deux acolytes et à nos formidables supporters pour ce weekend génial !
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5 commentaires
Commentaire de Seydoublen posté le 04-07-2014 à 11:21:02
Super CR Guillaume, les mêmes sensations que toi à la fin de la course où j'aurais pu encore courir un peu ! Du coup, je suis déjà inscrit pour un prochain trail ;) àbientôt sur les sentiers ou sur le pré ;)
Commentaire de Khioube posté le 04-07-2014 à 11:42:13
C'est cool, quand l'envie est encore plus grande après une bonne course comme ça ! Je ne sais pas encore quel sera mon prochain, mais ce sera vraisemblablement en septembre ou octobre. D'ici là, peut-être que j'arriverai à me motiver pour me faire des enchaînements de montées à Fourvière ! :)
Commentaire de Arclusaz posté le 07-07-2014 à 16:40:38
Bravo Guillaume !!!
belle course, c'est sur l'alliance danse classique/foot gaélique est indispensable pour réussir en trail.
Pour les montées, tu sais où et avec qui tu peux en faire entre midi et 2....
Et surtout, faut que tu nous présentes Mathilde : elle fait du riz au lait et fait la supportrice, une perle !
Commentaire de Khioube posté le 07-07-2014 à 20:29:17
Merci Laurent !
Ne t'inquiète pas, je compte bien profiter des séances d'exploration à Caluire pour devenir un meilleur grimpeur. Sinon, je confirme que Mathilde est une perle. Et encore, je n'ai pas mentionné le risotto de la veille de course pour prendre des forces ! ;-)
Commentaire de Kirikou69 posté le 08-07-2014 à 13:55:50
Bravo pour ta course et ton récit.
Je t'ai aperçu au départ mais déjà tu étais très loin devant moi.
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