Récit de la course : Le Tour des Glaciers de la Vanoise 2013, par mazbert

L'auteur : mazbert

La course : Le Tour des Glaciers de la Vanoise

Date : 30/6/2013

Lieu : Pralognan La Vanoise (Savoie)

Affichage : 2525 vues

Distance : 72km

Objectif : Pas d'objectif

8 commentaires

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TGV ou le plaisir de courir

    Tout commence un peu comme toutes les courses de cette année 2013, c'est à dire dans le froid (8°) et sous la pluie. Il est 17h00 quand j'entre sous la tente blanche chauffée par un feu de bois où les bénévoles congelés nous attendent pour nous remettre nos enveloppes de coureur. Le briefing à lieu dehors, dans la fraîcheur mais sans pluie. C'est long, très long mais finalement c'est vers 19h50 que je pars avec 13 autres kikoureurs au resto pour dépenser le bon de 12€ que l'organisation nous a remis pour nous nourrir.

   Sympa ce petit moment convivial avec d'autres coureurs, moi qui suis un solitaire c'est bien de partager un peu avec d'autres passionnés. En plus ça permet de mettre un visage sur des pseudos, de se dire qu'on est pas le seul tarré à venir se faire mal avec plaisir.

     Une petite nuit chez des amis à Bozel plus tard et me voilà à 5h du mat sur la ligne de départ. Il fait plus chaud que la veille à 17h00, la brume recouvre les rues et nous bouche la vue du paysage. La tension monte dans le portillon de départ et c'est avec 10 minutes de retard que le TGV de la TGV prend son envol (il fallait que le la fasse !).

   Nous quittons rapidement les rues du village pour attaquer un chemin forestier avant de basculer sur un single. Les visages sont tendus, je perçois la concentration des trailers autour de moi, l'ambiance est étrange dans cette longue file indienne qui monte vers le rocher de Villeneuve, personne ne parle.

   Je passe le Lanchetton où nous commençons le chemin en double sens vers le sommet à 2200m. Dans le prés avant la montée finale, nous croisons les premiers qui dévallent la pente relativement forte pour rallier Pralo. Le chemin n'est vraiment pas large et tout le reste de la montée va s'avérer compliqué avec tous ces croisements.

   Finalement je badge au sommet à 6h33. Le temps se lève et la brume joue avec les sommets pour nous donner une première idée des somptueux paysages qui nous attendent.

   La première partie de la descente n'est pas évidente avec toutes ces personnes à croiser. Il faut rester très attentif pour ne pas se faire mal et ne pas géner les grimpeurs. Cela enlève pas mal au plaisir que je peux avoir habituellment en descente.

   Après avoir croisé des jeunes installés au ptit déj avec Pastis et litres de rouge, nous rejoignons un sentier en montée jusqu'à un hameau où nous sommes accueillis par un jeune garçon avec sa cloche, sympa. Le reste de la descente se fait au pas de course sur un chemin forestier roulant. J'en profite pour faire un arrêt "gros besoin" qui me soulage énormément de mon mal de bide depuis le début de la descente.

   C'est à 7h28 que je badge à Pralo. Gros arrêt pour moi comme prévu. Je prends bien mon temps pour m'alimenter, remplir ma réserve d'eau, souffler un coup. Puis je traverse le village par la route principale, déserte à cette heure ci, pour entammer la seconde boucle.

   Nous rejoignons le domaine nordique qui m'a fait tant suer certains hivers. Puis 5km en montée légère nous mènent au Prioux. Devant nous la vallée que nous allons remonter jusqu'au refuge de Péclet-Polset.

    En chemin je croise Caral avec qui j'échange 2, 3 mots avant de le doubler.

    Arrivés au Prioux, nous traversons la route pour prendre un joli sentier qui monte vers le refuge de la Valette. Dans l'ombre du petit Mont Blanc nous grimpons assez vite à flanc de montagne. Je me retrouve en chasse patate pendant pas mal de temps entre deux groupes. Finalement je recolle devant et double peu avant le sommet.

   Les derniers lacets en montée sont superbes avec le jeu de l'ombre et du soleil.

   Ensuite c'est clignotant à droite et début d'un fabuleux single roulant vers le refuge du Roc de la Pêche.

     Je me sens bien sur ce terrain, les jambes suivent et c'est derrière un coureur avec un gros sac bleu que je remonte pas mal de traileurs dans un décors de rêve.

    Nous croisons des jeunes femmes aussi, c'est sympa !!!

   C'est donc au pas de course que l'on rejoint le pont qui va nous mener au refuge du Roc de la Pêche.

   Une petite traversée et un joli raidillon nous rappelle que ce n'est que le début de la course et qu'il reste du dénivelé et du kilométrage à faire.

   Passage au refuge, je croise les deux premiers qui reviennet de Péclet polset, ils semblent frais, comme s'ils n'avaient rien courru. Devant nous le GR bien large et les 5 bons km qui nous séparent du point de contrôle suivant.

   C'est d'un bon pas et seul que j'entame cette longue montée. les coureurs descendants commencent à se multiplier, je suis étonné de voir que très peu d'entre eux ont un petit mot pour nous. Progressivement la montée se durcit.

    Les passages sont de plus en plus raides et la fatigue commence à se faire sentir. Le pas est moins léger, moins rapide. Je commence à croiser les mêmes tenues, les mêmes casquettes, les mêmes bruits de bâtons. On se double se redouble se dédouble !!!

   Vers 2300m la neige est de plus en plus présente, le souffle est plus court et le refuge se fait de plus en plus désirer. Je demande aux descendants si c'est loin en espérant une réponse du type " non, 5 minutes et c'est plat". Bref j'ai hate d'arriver.

   Enfin le refuge se dessine au loin. Quelques névés plus tard je badge à 10h27. Le paysage est aussi beau que la montée est dure. J'en prends plein les yeux, à tel point que je filme mais oublie de prendre des photos. Encore un long arrêt avec un bon ravito, une recharge de l'eau et hop : descente.

   Là je lâche les chevaux et couvre la distance entre Péclet Polset et le roc de la Pêche à presque 11,5km/h. Tout au long j'essaie d'avoir un petit mot d'encouragement pour ceux qui souffrent dans la montée. Je sais à quel point cela fait du bien d'avoir un petit mot de la part de ceux qui sont déjà passés par là.

   Au roc de la Pêche je passe à 11h09 en 126° position, 500m plus loin on tourne à gauche pour ce long sentier qui zèbre la montagne et nous fait remonter vers le petit Mont Blanc.

     C'est en papotant avec un alsacien que j'effectue toute cette partie jusqu'au Prioux. Je ne vois pas le temps passer et ne garde que peu de souvenir de ce passage. Ensuite c'est 5km de descente relativement roulante jusqu'à Pralo pour le second passage.

   Il est 12h22 quand je badge. Je prends encore mon temps, change de tenue, mange bien regarde avec envie tous les promeneurs aux terrasses devant leurs glaces, leurs bières qui nous encouragent sans trop comprendre ce qu'on fait à courir comme des cons.

   Je repars avec RayaRun mais nous ne trouvons plus le chemin. Les bénévoles sont partis car les 2 premiers arrivent. Finalement c'est avec tout espoir de victoire envolé que je quitte une dernière fois Pralo pour le col du Bochor.

   Là les choses sérieuses commencent. LA PISTE DE SKI !!! Elle est raide, très raide, surtout avec 48km dans les jambes. C'est étrange de voir ces silhouettes voguants sur ce lit de cailloux en plein soleil, ça me rappel un album de Tintin avec le capitaine Haddock.

   Tous nous en bavons, devant derrière. certains font des S pour que ce soit moins raide, d'autres, comme moi, montent droit dans la pente pour faire moins de distance. Chacun sa technique mais je pense qu'on a tous dans la tête une longue liste de jurons pour cette piste qui défile.

   Le chemin dans la forêt jusqu'au Bochor n'est pas une partie de plaisir non plus. C'est le moment de la course où le mental commence à jouer, c'est lui qui prend le pouvoir. C'est un moment étrange, un basculement dans une autre course qui va être une succession de moment d'euphorie et de déprime totale.

   Enfin le Bophor, un petit ravito non prévu très sympa et l'attaque du chemin vers l'aiguille de la Vanoise.

   C'est encore en papotant que je fais cette partie entre le ravito et le refuge des Barmettes. Les jambes commencent à durcir et parler me permet de penser à autre chose qu'à mes jambes.

    Enfin la dernière partie de la course. La montée des Barmettes au refuge de la Vanoise. Difficile de mettre des mots sur tout ce qui a pu me passer par la tête pendant ce long chemin de croix. Je pense que je me suis mis dans ma bulle, renfermé sur ma souffrance, laissé aller par moments ... Bref j'ai vécu cette montée traversé par des sentiments confus mélants souffrance physique, découragement, confiance, plaisir, rage, colère, etc... Le tout dans un paysage extraordinnaire :

Les mûrs de la Vanoise

 

Chute d'eau après les mûrs

Arrivée au lac des Vaches

Au dessus du lac juste avant le passage sur la neige

Refuge de la Vanoise

    Dernier badjage à 15h01. Je suis exténué, j'ai du mal à m'alimenter, à réfléchir. Je me pose et regarde autour de moi. L'un est allongé, l'autre s'étire, un troisième essaie de faire passer ses crampes. Nous avons tous ce regard perdu qui n'est pas celui de la fatigue mais celui de la concentration du sportif qui est dans l'effort et dans la gestion de son physique et de son mental. Les sourires ne sont pas loin, les quelques mots échangés sont sur le ton de la plaisanterie, on sent un esprit de corps dans ce ravito qui vous booste. Je ne sais pas top pourquoi mais je repars en me disant que si celui qui part devant moi le fait, je peux le faire. Il ne faut plus réfléchir mais agir.

    Les deux premiers km à croiser des camarades en souffrance dans la montée sont durs pour moi. Je glisse, je n'arrive pas à lancer la machine, je me fais doubler, bref je ne suis pas bien.

   Puis je repasse le lac des Vaches. les touristes se multiplient et cela me redonne de l'énergie. Je vois aussi les masques de souffrance sur les concurrents que je croise. J'essaie d'avoir un petit mot pour chacun d'eux mais c'est moins facile que 6h avant car j'en chie beaucoup plus.

   Enfin on passe le dernier petit pont avant les Barmettes et on plonge vers Pralo.

   La fin c'est une descente continue avec des passages raides et des passages roulants. Une fois seul, une autre derrière un gars en blanc qui était déjà avec moi au premier sommet à 6h22 du mat. Je double quelques concurrents qui n'ont plus rien dans les jambes. Je double aussi des alpinistes qui redescendent de leurs courses et me demande ce qu'on fait là à courir !!!

   Je rentre dans la dernière grande avenue seul, enfin je le pense, quand j'entends une sorte de locomotive furieuse dans mon dos qui me double au sprint en me disant qu'il est désolé mais aime bien sprinter à la fin. C'est Rayarun qui me pique la 118° place, le coquin, j'aurai ma vengeance un jour.

   Finalement je passe la ligne en filmant après avoir tapé dans les mains des spectateurs nombreux et chaleureux qui sont dans Pralo. Il est 16h15, je suis parti depuis 10h50 et heureux d'avoir fait cette course, de l'avoir vécue et fini.

   Devant un coca Rayarun vient s'excuser, mais de quoi, d'être un coureur? Si j'avais pu le doubler je n'aurais pas hésité non plus. Enfin je lui dis quand même qu'il a oublié son T-shirt Finisher, ce serait dommage de partir sans !!!

 

Il ne me reste plus qu'à soigner mes énormes coups de soleil, à faire le montage de mon petit film et à me préparer pour la 6000D, y'a des partants?

 

PS : Merci à l'organisation pour ce trail de repli qui étant très beau dans l'ensemble. vivement que je puisse faire la vrai TGV avec la même météo !!!

8 commentaires

Commentaire de Aurely42r posté le 03-07-2013 à 14:59:28

Bravo.... Bien sympa toute ces photos....

Commentaire de la panthère posté le 03-07-2013 à 17:19:54

super reportage! manque les marmottes.....bravo et bonne prépa 6000D

Commentaire de mazbert posté le 03-07-2013 à 18:51:57

Merci la panthère et bravo pour ta victoire, j'ai pas pu rester jusqu'à ton podium, désolé !!!

Commentaire de xekebo posté le 03-07-2013 à 20:24:43

Bravo à toi ! Sympa ces photos... j'en ai encore des images plein la tete. Après quelques jours de repos il reste de cette edition de très bon souvenirs. Il faudra revenir pour finir le vrai TGV mais on en a eu un bel aperçu quand même ! la dernière boucle a été très longue... enfin surtout l'ascension car le retour était plus direct... mais il fallait être fort mentalement pour ne pas ceder à la tentation de stopper à Pralognan lors du second passage !! Bravo à toi et aux autres Kikou !

Commentaire de RayaRun posté le 04-07-2013 à 00:47:55

Merci pour ce CR et ces belles photos, nous n avons jamais fait la course loin l un de l autre et je me rend compte que j étais dans le même état d esprit aux mêmes endroits. Bravo en tout cas et à la vrai TGV ou ailleurs pour la revanche ;-)

Commentaire de caral posté le 04-07-2013 à 06:48:28

Salut et bravo!!! super photos, super CR et très belle course. A un de ces jours!!!

Commentaire de jofro posté le 04-07-2013 à 07:58:12

Merci pou ce beau CR et les photos, ca nous replongent dedans...

Commentaire de pitas posté le 10-07-2013 à 10:32:34

Bravo pour cette course!
c'etait sympa de se rencontrer au resto la veille (j'etais à ta droite).
En tout cas, super photos, c'est bien cool de les revoir maintenant.

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