Je profite de ce jour exceptionnellement férié ici en GB, pour faire un court compte rendu de ce Cape Wrath Ultra. Rentré tard chez moi Lundi soir, j’ai eu un énorme coup de barre hier et Mardi, et je fus incapable de pondre ne serait-ce que quelques lignes, avant aujourd’hui.
Un grand merci à Jacques pour ce suivi. J’espère vraiment que, la forme retrouvée, tu auras l’occasion un jour de découvrir ce fabuleux itinéraire. Comme je te l’ai expliqué en privé, je connaissais cette course depuis début 2018, grâce à un collègue qui m’avait demandé un congé de 25 jours pour randonner sur le Cape Wrath Trail avec sa copine, et qui connaissant mon goût pour l’ultra, m’avait fait découvrir le site de la course dont la seule édition avait à l’époque eu lieu en 2016. Mais c’est toi Jacques qui en Mai 2019, suite à un message sur le fil « Un ultra en UK ? « , a réveillé une envie folle de faire cette épique aventure, et m’a donc incité à m’inscrire pour l’édition 2020.
L’édition 2020 fut bien sûr annulée à cause de la pandémie, et l’édition 2021, ne pouvant pas se dérouler fin Mai, fut reportée début Août, mais une semaine après ma précédente course déjà programmée (Lakeland 100). Je décidais d’un report pour l’édition 2022. Trois ans donc d’attente donc depuis mon inscription
Pas fait de prépa vraiment spécifique pour une course par étapes de ce type. Je n’ai pas changé grand-chose à mon entraînement. Mais Après 2020 ou 2021 durant lesquelles je me suis aligné principalement sur des longs formats (en général des 100 miles « roots avec peu de monde »), j’ai eu besoin en ce début d’année de diversifier et m’aligner sur des formats très différents : 10 miles, 2 semi-marathons, marathon, maratrail, 50 miles, 120km, 100 miles, faits d'ailleurs dans un certain désordre
. Un peu de tout finalement, avec des résultats plus ou moins honorables. Ma forme fut plutôt moyenne en Avril avec un Ultra du Pas du Diable qui m’a bien lessivé pendant 3 semaines, handicapant ma fin de prépa pour le marathon de la « route du Louvre » une semaine (
) avant le début du Cape Wrath Ultra.
Ce Cape Wrath Ultra fut une expérience unique et magnifique, et je me dis que j’ai eu une chance folle de pouvoir faire un truc pareil. L’itinéraire traverse des coins incroyables que même peu d’Écossais connaissent et ont la chance de découvrir dans leur vie. Des participants Écossais parlaient de leur surprise et émerveillement en découvrant ces paysages où il n’avaient jamais mis les pieds.
J’ai beaucoup aimé le professionnalisme de l’orga – vraiment au top - (orga qui est aussi derrière la Dragon’s Back Race au Pays de Galles, et depuis cette année, la Northern Traverse dans le nord de l’Angleterre), et la taille « humaine » de l’évènement loin d’un gros barnum. Cela a permis de nouer des liens, avoir des moments de partage, plus facilement avec d’autres participants et certains bénévoles. J’ai trouvé l’ambiance très bonne et conviviale. Nous avons bien mangé, en quantité et qualité.
J’ai enfin rencontré Patrick (Pat46) et son ami et quasi-voisin Julien. Ces dernières années, j’avais eu l’occasion de suivre Pat46 sur Kikourou lors de courses XXL (comme l’Eufòria par exemple) et nous étions déjà plus ou moins en contact sur Facebook, WhatsApp depuis quelques temps. Je me suis tout de suite senti bien à l’aise avec eux. Des gars extras
. Heureusement car nous allons nous revoir en Juillet pour le Off organisé par l’écureuil en Vanoise et Maurienne
. J’ai aussi retrouvé un Anglais très sympa, Dave, rencontré ces dernières années dans les collines du Surrey (au sud de Londres) lors de sorties trail. Dave avait un ami, Ed aussi inscrit au CWU. J’ai aussi fait la connaissance de deux autres Anglais, Alex et son ami Chris, avec qui j’étais en entré en contact pour partager la veille de la course, un Airbnb à Fort William, lieu de départ du CWU. Nous nous sommes arrangés pour que tout ce petit monde (7 personnes au total, 3 Français et 4 Anglais) partage la même tente de 8 personnes. S’est joint à nous Nick pour compléter notre tente, que personne dans notre groupe ne connaissait auparavant.
Malheureusement, au fil des journées et à la suite d’abandons, nous perdîmes quelques personnes dans notre « groupe » : Nick, Chris et Ed. Avec le nombre de participants diminuant de jour en jour (la plupart ne souhaitant pas rester sur place), et l’orga souhaitant évidemment limiter le nombre de tentes à monter et démonter chaque jour, 2 Italiens (Alessio et Andrea) vinrent donc nous rejoindre (5 Latins, 2 Anglais dans notre tente maintenant
) et ça resta comme ça jusqu’à la fin, nous ne fumes plus jamais 8 dans notre tente. Alex à cause d’une blessure, abandonna à l’issue de l’étape 5, mais décida de rester et faire des bouts d’étape (hors « compétition ») lors des jours 6 et 7, chose permise par l’orga. Il fit l’étape 8 (la plus courte) en entier en marchant.
Concernant ma course, dans l’ensemble, je n’ai pas trop à me plaindre. Je pense que j’avais suffisamment récupéré du marathon fait le week-end précédent (et d’un semi 2 semaines avant
). Je crois avoir fait preuve d’une certaine régularité tout le long. Une régularité parfois même lassante : En gros, même quand j’avais l’impression d’avoir fait une « bonne » étape, mon classement semblait rester obstinément le même
.
Mais il y a eu quelques moments où je fus dans le fond du trou. J’ai clairement sous-estimé la difficulté du terrain – tourbières, zones marécageuses qui sapent vraiment beaucoup d’énergie- lors de l’étape 2. Je pensais savoir à quoi m’attendre, mais ce fut tout de même un choc : Je ne pensais pas mettre autant de temps (9h20) pour boucler une cinquantaine de km, ce qui doit être un record me concernant. Les étapes se courent en autonomie totale (en eau et nourriture), et j’avais mis mes vivres dans des sacs « congélateur », distincts et annotés pour chaque journée. Mais je n’avais clairement pas suffisamment pris pour l’étape 2. Alors qu’il restait quelques km plats et faciles à parcourir (incluant 2km de route), je me suis senti totalement vidé : Absolument plus rien dans le réservoir, et totalement incapable de courir. En fait j’étais presque sur le point de vaciller et tomber dans les pommes. Je ne pense pas avoir connu ça dans toutes mes courses faites jusqu’à présent. Des coups de moins bien, oui, mais pas à ce point. Je rencontrai là Julie, une bénévole travaillant au service restauration, qui se proposa de m’accompagner jusqu’à l’arrivée. Heureusement qu’il n’y avait qu’une poignée de km restants. Ses mots réconfortants me firent du bien. Après la course, je fus pris d’une fringale et je mangeai comme un lion cette après-midi et ce soir là. Les matins suivants, lors du petit-déjeuner où elle servait, Julie se montra toujours très enthousiaste et enjouée en me voyant prêt pour une nouvelle étape.
Les étapes 3, 4 et 5 se passèrent bien, malgré quelques mésaventures que je ne raconterai pas ici, et le temps exécrable lors de la 4ème étape. Malgré le temps en général maussade durant toute la semaine, les munros (sommets Écossais de plus de 3000ft soit ~914m) restèrent visibles, ce qui permettait de profiter de la beauté sauvage des Highlands. Visibles sauf justement lors de l’étape 4 où les plus hauts sommets du coin restaient bouchés. Plus que d’autres étapes sans doute, j’aurais adoré profiter d’un temps clair lors de ce jour 4. Peut-être une prochaine fois…
À la fin de l’étape 5, ma cheville droite commença à couiner, ce qui m’alarma pour les journées restantes. Je décidai de lever le pied lors de l’étape 6, la plus longue d’après l’orga. Après avoir fait l’effort de rattraper Patrick (qui partait toujours avant moi ; On nous donnait à la fin de chaque étape une heure conseillée pour partir le lendemain matin), je décidai de rester avec lui et d’avancer à son rythme pour m’économiser. Dave aussi n’était pas loin et faisait un peu le yo-yo avec nous deux. Ce fut une journée frustrante car sur le papier, c’était une étape faite pour moi, avec des km de pistes forestières très roulantes que j’aurais du courir à bon rythme en temps normal. Là, j’alternais marche et petit jog dépassant rarement le 7 ou 8 km/h. Une derrière ascension et une magnifique descente finale le long d’un torrent dans un petit vallon. Patrick et moi passèrent ce jour là la ligne ensemble. Ce fut tout de même une belle journée passée en sa compagnie. Je ne fondis pas en larmes mais il y a eu en cette fin d’après-midi un peu d’émotions tout de même
Je pensais souffrir le martyre lors de l’étape 7, une des plus longues, mais finalement elle se passa plutôt bien. Je me dis que j’avais eu raison de ne pas trop forcer la veille. Sans vraiment le chercher, je partis d’Inchnadamph en même temps que Julien, le copain de Patrick. Nous étions très proches l’un de l’autre au classement et depuis la veille, il avait repris l’ascendant sur moi, avec une grosse demi-heure d’avance. Mais pour moi, il n’était pas question de faire la course et essayer de lui reprendre du temps. Il était aussi très régulier et m’accrocher à lui et finir l’étape serait déjà très bien. Nous fîmes le yo-yo tout la journée. En gros, en montée, nous pouvions avancer ensemble au même rythme. Dans les descentes scabreuses et dans les tourbières, il était bien plus à l’aise que moi et me larguait : D’autant que ma cheville droite me faisait beaucoup plus souffrir dans ces passages où mes appuis pouvaient être très fuyants. Par contre, dès qu’il y avait du sentier ou de la piste roulante, je pouvais me rapprocher de lui.
Lors de cette 7ème étape, la météo fut une des plus belles de toute cette semaine. Pas beaucoup de soleil mais peu de pluie finalement. De très nombreux « lochs » vus et longés ce jour là. Certains passages, comme un petit sentier sinueux entre deux petits lacs en début de parcours, évoquèrent un instant certains coins de mes chères Pyrénées, sauf que nous nous trouvions à une altitude de 375m et non de 2000m ! La fin du parcours de l’étape 7 (avant le CP3) fut pénible sur un sentier « dégueulasse » le long de « lochs » au nom imprononçable. Ce qui me fit penser que parfois, n’avoir pas de sentiers du tout était peut-être plus facile à négocier que de telles immondicités de chemins. Je rattrapais Julien au niveau du CP3 et nous fîmes la fin du parcours ensemble sur une belle route, scénique, peu fréquentée, longue de 6km. Malgré quelques jolis coups de cul de 50m de D+, nous ne marchâmes jamais. Après plus de 50km parcourus, nous avions l’impression de faire des séances de cote à l’entraînement. Nous passâmes l’arrivée ensemble. Ce fut, je pense, une de mes journées préférées : Des paysages toujours sublimes ; La vue de l’océan pour la première fois ; la météo plutôt clémente ; les moments de partage avec Julien ; les rencontres faites en rattrapant certains coureurs plus lents - parfois je ralentissais pour discuter quelques minutes avec certains, voyant dans leurs yeux la joie et la conviction qu’ils allaient maintenant finir; la sensation que le plus dur était maintenant fait et qu’il me restait qu’à savourer la dernière journée, la plus courte nous amenant jusqu’au Cape Wrath. J’avais vraiment bien profité de cette journée.
Le 8ème et dernier jour, étant classés respectivement 16 et 17, Julien et moi dûment partir entre 7h15 et 7h30, après les 15 premiers partis à partir de 7h. Certains diront que ce fut la seule journée où nous fîmes pas de grasse matinée
, habitués à partir en général après 8h les jours précédents. Julien et moi fîment l’intégralité ensemble. Sur les premiers km de route, je fus surpris de constater notre vitesse moyenne sur un km (10.5km/h entre le 3ème et 4ème
), et ce malgré les quelques coups de cul. Nous n’avions sans doute jamais couru aussi vite depuis le premier jour. L’étape s’apparenta plus à un trail côtier et fut bien plus facile et moins grasse que celles des jours précédents. Le terrain restait spongieux par moments avec de belles grimpettes dans sa seconde partie, mais rien à voir avec ce que nous avions connus les jours précédents. Et puis après plus de 3h30, le moment de délivrance arriva et Julien et moi passèrent la ligne d’arrivée ensemble.
Beaucoup de choses sont à raconter mais je vais m’arrêter là, j’essaierai de développer tout cela plus tard dans un vrai récit.
Je me disais que ce Cape Wrath Ultra, était une occasion unique dans une vie. Mais il est fort probable que j’y retournerai un jour, tellement j’ai apprécié l’expérience et ce coin perdu du monde.
À noter que les inscriptions pour 2023 sont ouvertes.
Je poste ci-dessous les petites vidéos faites par l'orga pour chaque journée lors de cette édition 2022. Cela donne une bonne idée de ce que nous avons vécu. L'accent est aussi mis sur les différentes équipes qui rendent nos "exploits" possibles. J'ai des frissons en revisionnant ces vidéos...
Jour 1 :
https://www.youtube.com/watch?v=02p9eXB3_nQ&list=PLXYvQzYIt-EWttLChQzM5y5HClhO4sNm1&index=1Jour 2 :
https://www.youtube.com/watch?v=ID7o3AlnKUc&list=PLXYvQzYIt-EWttLChQzM5y5HClhO4sNm1&index=2Jour 3 :
https://www.youtube.com/watch?v=IPF9baml4hg&list=PLXYvQzYIt-EWttLChQzM5y5HClhO4sNm1&index=3Jour 4 :
https://www.youtube.com/watch?v=fTXUWb42Xd8&list=PLXYvQzYIt-EWttLChQzM5y5HClhO4sNm1&index=4Jour 5 :
https://www.youtube.com/watch?v=1BMIH_b6Q8s&list=PLXYvQzYIt-EWttLChQzM5y5HClhO4sNm1&index=5Jour 6 :
https://www.youtube.com/watch?v=t9IYNHtDRm0&list=PLXYvQzYIt-EWttLChQzM5y5HClhO4sNm1&index=6Jour 7 :
https://www.youtube.com/watch?v=EB6UNVMfbF4&list=PLXYvQzYIt-EWttLChQzM5y5HClhO4sNm1&index=7Jour 8 :
https://www.youtube.com/watch?v=7nAQWwrFaR4&list=PLXYvQzYIt-EWttLChQzM5y5HClhO4sNm1&index=8