L'auteur : Oliv'BCA
La course : Toubkal Trail
Date : 6/10/2009
Lieu : Imlil (Maroc)
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Distance : 125km
Objectif : Terminer
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J'avoue avoir un peu de mal à trouver par où commencer... du coup je vais essayer de faire ça dans l'ordre.
L'avant course (Marrakech/Imlil)
Le rendez-vous pour la remise des dossards est le Mardi 06 Octobre au Grand Hôtel Tazi, pour que ça se goupille bien je dois arriver sur Marrakech la veille au soir. J'ai réservé mon avion un peu sur le tard et pour avoir un prix correct c'était la meilleure solution.
J'arrive à l'hôtel sur le coup des 22h et les organisateurs sont déjà là, c'est l'occasion d'avoir un premier contact avec Nico Valésia (très sympa) qui à eu l'idée de cette course.
On s'arrange pour me dégoter une chambre (visiblement il y eu un petit couac au niveau des réservations pour ceux qui avaient besoin d'une chambre un peu en avance), c'est pas le grand luxe mais je ne suis pas là pour ça...
Il fait nuit, mais la température est bien agréable, presque trop chaud en arrivant de Munich. Il paraît que la température est élevée en ce moment dans la région, je fais confiance mais c'est la première fois que je mets les pieds au Maroc.
Le lendemain matin sera libre, j'en profite pour allez me balader en ville voir un peu le souk, la médina, les tanneurs de cuir et autres marchands de tapis. La ville est chouette mais pour moi qui ne suis pas habitué la demande permanente peu être pesante à la longue.
Tanneurs de cuir
J'ai eu la bonne idée de me balader en espadrilles, ce qui fait qu'après quelques heures à déambuler dans les ruelles j'ai une petite ampoule sur chaque pieds hihihi, un vrai roi des préparations chiadées! Je ne suis pas inquiet, je sais que ce n'est pas un point de frottement que je risque de retrouver dans mes chaussures.
Le temps de faire quelques essais de marchandage, chose pour laquelle je suis horriblement mauvais, et de me faire délester bien volontiers de quelque dirhams, il est temps de rentrer à l'hôtel pour le repas de midi et cette fois récupérer mon dossard.
De retour à l'hôtel, je commande un tajine qui va mettre.............. attendez..........encore un peu.............. entre 2h et 2h30 à arriver! Une chance pour eux que je ne sois pas du genre à gueuler, mais ils pourrons s'assoir sur le pourboire.
Cette attente sera l'occasion pour moi de faire connaissance avec deux grecs qui participent aussi à la course: Nicolaus Mangitsis (Nikos) et Kostantinos Tsiantos (Kostas).
Kostas et Nikos
Beaucoup de participants sont là dont un certain Marco Olmo (pour le 42km) que tout le monde regarde... il essaie de se faire petit mais ça ne sera pas évident... Beaucoup d'italiens seront de la partie étant donné que l'organisation est italienne aussi.
Banquet de bienvenue avec des confiseries locales, très sympa!
Le soir je vais manger un plat de pâtes à la carbonara avec les grecs sus-nommés, ils rejoignent leurs supporters (famille et amis) avec un photographe personnel. Le groupe est très sympa et tout le monde parle à peu près bien anglais... j'avoue que mon grec laisse encore à désirer. Pour finir malgré ma résistance, le repas me sera offert... Petit détour par le souk en rentrant, de nuit entre les charmeurs de serpents, les vendeurs de jus de fruits et les magasins en tout genre, le spectacle est permanent.
Retour à l'hôtel pas trop tard, histoire de dormir un peu, et transfert à Imlil tôt le lendemain matin, escortés par la police locale, excusez du peu... Les arches de départ et d'arrivée sont déjà montées ainsi que des tentures blanches en dessous desquelles les repas seront prix. On retrouve aussi un peu partout le drapeau marocain.
Journée tranquille, ensoleillée et on profite de la fraicheur relative à 1700m sans s'exposer au soleil.
La course
Petit déjeuner à 3h du matin, pour moi ça sera pain au chocolat, ça passe très bien. Les départs du 125km et du marathon seront groupés à 5h30, du coup j'ai le temps de retourner m'allonger un moment.
On signe une feuille de présence au départ et après un discours assez cours (c'est très bien!) de Nico, le coup d'envoi est donné, directement en côte dans les rues de la ville. Je n'utilise pas encore les bâtons pour ne pas gêner, mais je ne cours pas non plus, trop tôt à mon goût pour essayer de courir dans les montées! La première côte fait 760mD+, assez régulière, pour arriver à Tizi Mzik ("Tizi" c'est "col", je serais revenu moins bête du Maroc, et plus léger mais c'est une autre histoire) à 2479m d'altitude.
Il fait nuit, je suis plutôt sur l'arrière de la course, ça bouchonne assez peu. Dès que la lumière est suffisante, j'enlève la frontale, j'en profite pour faire une pause pipi et repartir tranquillement. J'arrive au col, la montée est passée comme une lettre à la poste (ne pas tenir compte des éventuelles périodes de grève).
La descente qui s'en suit en direction du refuge Tamsoult est assez roulante et permet d'envoyer un peu, j'en profite pour commencer à doubler un peu plus.
On ne sait pas trop qui est sur le 42km ou sur le 125km du coup, je reste à mon rythme, ou du moins j'essaie. La montée recommence juste avant d'arriver au refuge.
J'y retrouve Kostas qui est sur le point de repartir, et come j'ai démarré avec trois litre de boisson, je ne ferais pas de pause ici et je lui emboite le pas. Je me sens bien et j'ai suffisamment à manger et à boire pour le moment.
La côte qui suit en direction de Tizi n'Aguelzim (3557m) fait quelque chose comme 1350m, certains passages sont raides et assez techniques avec quelques rochers et toujours beaucoup de caillasses, mais à la montée ça ne gène pas tellement.
On passe devant une superbe cascade et un peu plus haut le vent se lève avec des rafales assez violentes.
Cascade d'Irhoulidene
La veste accrochée sur mon sac décide donc qu'il est temps de me gifler le visage, et donne une prise au vent qui finit par être pénible. Sans risque réel de chute, le vent me déséquilibre régulièrement. Il fait froid sur ce passage, je sort donc mes gants.
On arrive à la portion de la côte que les organisateurs appellent les "100 criantes", c'est à dire 100 virages dans un couloir d'éboulis où on est sensés avoir envie de crier à chaque virage... c'est dans le couloir ci-dessous en montant à droite.
vu du haut:
La montagne est raide, mais le sentier dessiné dessus l'est moins, à mon gout la montée est normale pour un sentier de montagne. J'arrive sans encombre avec mon collègue grec au col.
La descente qui suit est un régal, beaucoup de pierres mais courable, seulement les dépassements sont parfois compliqués, surtout quand la personne rattrapée n'y met pas du sien Grrrrrrr...
A nouveau on attaque un peu la montée suivante (70mD+) avant l'arrivée au refuge du Toubkal.
Le sport national est le croisé de mulet...
Ce ravitaillement tombe bien, je commençait à avoir un léger début de crampe sur les derniers mètres de montée. J'en profite pour bien boire, pas mal de coca. Je mange aussi différents types d'amandes ou autres noix histoire d'avoir du salé, et un bout de patate bouillie. Le choix est très restreint aux ravitaillements, il a fallu composer avec les denrées locales et j'imagine que le casse-tête à dû être sympa pour les organisateurs...
Quelques étirements et ça repart, on voit déjà des gars qui reviennent du sommet du Toubkal comme des fusées. Très exactement 100m de dénivelé entre le refuge et le sommet, le tout en trois km annoncés sur le profil... cette fois ça grimpe et l'altitude n'aide pas! J'ai l'impression de me trainer mais j'ai plutôt tendance à rattraper des gens donc c'est bon signe, je ne doit pas être si à la rue.
Pas mal de touristes trekkeurs sont présents sur cette portion du parcours, ils nous encouragent chaleureusement! On ne sait jamais s'il faut saluer en italien ou en français, du coup je me plante une fois sur deux.
Mention spéciale à un groupe de français qui voulais m'envoyer "dans le journal de Claire Chazal", dès qu'ils ont su que j'était français aussi.
Je croiserais Marco Olmo qui descend et donne l'impression d'être facile... il finira 4e en 6h59 (42km et 3300mD+), à 1h20 du premier quand même (un local).
Kostas prends un peu d'avance, il finira l'ascension quelques minutes avant moi. Il attaque la descente quand j'arrive, de mon côté je fais une pose photo/repos de quelques minutes, je ne suis pas inquiet, on se reverra à la descente.
Kostas au sommet (dans la main droite la médaille finisher du Kentavros ultra marathon que Nikos organise en Grèce).
Signature du point de passage (n°126):
Je commence la descente à mon tour, je continue à prendre quelques photos ou vidéos que je n'ai pas pris le temps de faire à la montée.
On me prends en photo avec mon appareil (pfff... il faut même que je remonte un peu du coup)
J'en profite pour tirer mon chapeau à l'organisation, le parcours jusqu'au sommet du Toubkal est presque toujours à l'ombre et nous évite de griller au soleil pendant les heures chaudes (sauf pour ceux qui vont trop vite).
A un tiers de la descente, je croiserais Nikos, le second grec, qui en fini avec la montée et m'annonce Kostas pas loin devant.
Entre temps je recroise mon groupe de français supporters, "AAAHHH c'est le français de tout à l'heure!!!!" Cette fois j'ai droit à la ola! J'avoue, ça m'a fait accélérer un peu, je les remercie chaleureusement au passage, si j'avais eu mon appareil à la main j'en aurait fait un petit film... mais c'est passé trop vite (regrets).
J'en oublie le principal pour ceux qui veulent des infos sur la course proprement dite, cette descente est très raide et très techniques, beaucoup de gros cailloux et de graviers (adhérence assez pourrie) assez casse gueule sur le haut, et plus on descend, plus on a de gros rochers. Malgré tout cette descente est très ludique pour les adeptes de descentes techniques.
Je rejoins Kostas peu après avoir vu mon groupe de français. Il me dit de passer devant pour donner le rythme. Je m'exécute et on enchaine le reste de la descente sur un bon rythme.
La descente aura finalement duré 40min jusqu'au même ravitaillement du refuge du Toubkal. J'essaie de manger un peu plus que la première fois, mais je mâche pendant 5 min avant d'avaler quoi que ce soit de consistant (patates pour le coup), je tape donc dans les noix salées, les morceaux de banane et le coca, de toutes façons j'ai assez de gel pour tenir. Je remplis cette fois ma réserve d'eau, une longue portion nous attends même si elle est majoritairement descendante.
Le soleil cogne maintenant, j'improvise un casquette saharienne:
On repart du refuge toujours dans un bon rythme, et voilà que je tombe nez à nez avec deux coureurs à contre-sens: un certain Benoit Laval que je reconnais grâce à sa photo de profil sur kikourou, et un ami à lui dont j'ai oublié le nom.
Il me mettra en garde contre la descente suivante qui est à ce qu'il m'a dit plus dure que celle du sommet du Toubkal au refuge... je commence à me demander ce qui nous attends.
L'échange est assez bref et on repart chacun de son côté avec notre compagnon respectif. La fin de la montée est un peu plus raide et Kostas a un coup de moins bien (j'apprendrais par la suite qu'il avait mal au crâne, peut-être un contrecoup de l'altitude), il me dit de partir devant et je lui réponds que je l'attends au col qui n'est plus très loin.
On devine le col...
Une idée pour noter les temps de passage, mais je n'y penserais qu'une fois...
A ce moment tout va bien pour moi, je fini la montée sur un bon rythme et j'en profite pour faire quelques photos à Tizi n'Ouanoumss (3670m). En me voyant l'attendre, Kostas me crie de ne pas l'attendre et de partir devant, il semble un poil énervé. Du coup, je ne veux pas lui imposer un rythme et lui mettre la pression, je pars devant en me disant qu'on se reverra au pire au prochain ravitaillement.
La descente qui suit est... longue... assez technique, relativement raide, par endroits il ne faudrait pas tomber, mais surtout interminable... elle reste ludique jusqu'à un gros km du lac d'Ifni (1300m de descente), après quoi il faut avoir le moral...
Suivez les points blancs!
Je cours tout le long jusqu'à... une première pause technique avec un léger coup de moins bien. Je redémarre pas bien inquiet, j'ai encore de bonnes jambes. Juste avant que le lac d'Ifni soit en vue, j'aperçois Kostas qui revient sur moi.
Il me demande pourquoi je l'ai attendu malgré mes consignes lol... Je lui réponds que je n'ai attendu personne, il a visiblement retrouvé la forme et le sourire.
Quelques minutes plus tard, je suis obligé de faire une pause technique de plus, mes intestins font des nœuds inquiétants cette fois... et je commence à sentir la fatigue.
Le t-shirt du Kentavros Ultra Marathon 2008, et le lac d'Ifni (turquoise).
La partie qui suis est plate, on pense pouvoir envoyer un peu en courant.... mais il s'agit en fait d'un champ de cailloux de 10 à 30cm de diamètre, plus ou moins stables, qui font que même sur le plat on doit avancer péniblement à 7 ou 8km/h (pas fait de mesures, c'est mon impression du moment, voir avec météo France pour la fiabilité).
Kostas est en pleine bourre et je peine un peu à le suivre ici. Le lac en revanche est superbe et change de couleur suivant le côté depuis lequel on regarde (turquoise de face et émeraude de côté, le troisième côté c'est argenté, mais ça ne compte pas à cause du soleil couchant).
Emeraude
Argenté
Un pseudo-ravitaillement (juste de l'eau et quelques noix diverses) est installé au pseudo col après le lac, un petit verre et ça repart.
S'en suit une descente de 650m pour une dizaine de km afin de rejoindre le ravitaillement suivant. Beaucoup de piste, parfois pavée très irrégulièrement, parfois terreuse avec quelques cailloux, et parfois un sentier qui coupe la piste.
Depuis le début de la course l'attention est constante pour les appuis, je ne sais pas si c'est la cause, mais je commence à fatiguer. Je donne le rythme en descente, mais j'ai les yeux qui ne demandent qu'à se fermer alors qu'il fait encore plein jour... de bonne augure pour cette nuit. Kostas commence à être à cours d'eau et l'arrivée, après quelques traversées de villages, au ravitaillement est un soulagement pour tous les deux (il est environ 17h15). On est seulement au km 49...
Ici, un peu plus de choix de nourriture, riz, patates, bananes, noix, mais j'avoue que rien ne me fait envie mis à part un lit. Je dis à Kostas de repartir sans moi, que d'une façon ou d'une autre il faut que je me repose avant de repartir. Je resterai ici une bonne heure, les bénévoles sont très sympas. Je mange un peu de sel, ça m'a réussi au GRP, mais le riz et les patates on tellement peu de gout que j'ai vraiment du mal à les avaler... La nuit fini par tomber, cela fait maintenant une bonne heure que je suis assis ici et ça ne va presque pas mieux.
J'ai promis à Kostas de repartir et de toute façon je n'envisage pas (encore) sérieusement l'abandon.
J'ai besoin de dormir et un bénévole m'annonce des matelas et du couscous au ravitaillement suivant (qui est à 17km et 1350mD+/550mD+)... ça me décide à redémarrer.
Une quinzaine de coureurs sont déjà passés quand je profite d'un départ de 3 italiens pour redémarrer en pleine nuit.
Le rythme est tranquille, la montée est assez douce et régulière, mais toujours très caillouteuse, je suis sans problèmes pour le moment. Je dois faire une pause technique de plus, et m...de! Je commence à me dire que les 75km restant vont être compliqués. Je reviens malgré tout sur mon groupe.
Une seconde pause de même nature va me séparer définitivement du groupe... il fait bon dans la nuit, je redémarre, mais cette fois ci se sont mes yeux qui décident de se fermer, je marche comme si j'étais bourré. Mes bâtons me servent plus à ne pas perdre l'équilibre qu'à avancer, je veux faire un micro-sieste... le problème est de trouver un endroit pour s'allonger. "Ho, quelle chance, une grosse touffe d'herbe!" qui s'avèrera être un buisson piquant bien hérissé et dense. J'avance encore un peu, mais comme je ne trouve rien je commence mon entrainement pour devenir fakir.
Suivront 5 pauses du même type, d'une dizaine de minutes car après ça je commençait à avoir froid, et sans fermer l'œil malgré le confort.
Les quelques trailers qui me trouvent allongé me demandent des nouvelles, mais je leur dit que je n'ai pas besoin d'aide, que je profiterais juste du prochain ravitaillement pour me reposer vraiment.
Enfin je finis la montée sur Tizi n'Ououraine (3120), 550m à descendre pour être au ravitaillement! J'y suis presque! Sauf qu'il faut ajouter 10km ou presque... je n'ai aucune idée du nombre de pauses ou du temps que j'ai mis pour descendre. Je me suis seulement fait doubler par deux ou trois personnes en fin de descente, une quinzaine de minutes avant le ravitaillement.
Ca y est j'y suis (Azib Likemt 2561m)!!!! Et là, c'est le drame... en fait de lits il y a trois futons (je ne demande pas mieux), tous occupés.... entre autre par un des gars qui m'a doublé il y a 15 minutes.
Un médecin est posté à ce ravitaillement, me demande si ça va, je réponds que j'ai besoin de repos. Il comprend, mais je dois attendre pour une place sur un matelas.
J'ai eu toute une heure pour le maudire intérieurement, ainsi que moi même (pour m'être fait doubler si près du but) et le reste de la planète (à commencer pas Jean-Michel Touron et Tercan qui n'abandonnent jamais et du coup m'enlèvent cette possibilité), assis sur ma chaise en essayant vainement de manger quelque chose qui me cale enfin. En guise de couscous, ce sera semoule nature, deux bouchées passeront. Du coup je bois du coca...
Après 1h sur ma chaise, un certains nombre de coureurs sont passés, mais une coureuse sous perfusion décide de redémarrer, je la bénit et m'allonge enfin sous une couverture, plus le temps passe, plus des idées d'abandon me traversent l'esprit. Mais je ne vois aucune route qui repart d'ici, le mieux est d'attendre un peu.
Et là je vois Nikos arriver, je l'appelle, il est confiant, il veut dormir un moment et me dit que l'on repart ensemble après. C'est d'accord pour moi.
C'est repartit pour 1000mD+ vers Tizi Likemt (3555m) que nous atteindrons vers 7h du matin après deux pauses techniques et avec un vent à décorner des bœufs. La montée a été très lente, on a mis trois heures pour 1000mD+ assez raides, j'avait envie tout le long de faire demi-tour et de rendre mon dossard au ravitaillement précédent (énervé en silence comme jamais)...
D'ailleurs en cumulé depuis 17h15 la veille (soit en 14h), j'ai fait 20km pour 2350mD+ et 550mD-, je m'épargnerais le calcul de vitesse moyenne sur cette portion...
Je ne sais pas si c'est lié à l'altitude ou au lever du soleil, mais les deux seuls moments vraiment venteux et froids ont été peu après le lever du soleil vers 7h le matin.
La descente suivante est assez technique et raide une fois de plus et nous fait perdre 1200m d'un coup, un autre jour je m'y serais probablement éclaté, là je suis de très mauvais poil et à part un statut de finisher, je trouve de moins en moins de raisons de continuer...
Tachedirt en vue.
Trois autres français nous rejoignent au ravitaillement de Tachedirt (2360m) où sont entreposés les sacs avec le rechange, on est au km 79.
Il y a un peu plus à manger et je prends surtout des bananes, un peu de pain, un thé et beaucoup de coca.
Il reste une boucle de 30km qui revient au même point, et une quinzaine de km pour rentrer sur Imlil, le village d'arrivée. Un abandon ici signifierais 250km de piste en 4x4 pour rentrer... pas envisageable. Rendre mon dossard et faire les 15km qui manquent pour rentrer à pied... mouais, faire 15km après abandon me serait plus désagréable que 45km et boucler tout ça, vu l'heure ça me ferait arriver nettement de nuit. OK je repars, mais je veux faire moins de 48h, psychologiquement c'est moins de 2 jours et surtout c'est la barrière horaire initialement prévue (rallongée à 56h quelques mois avant le départ).
L'estomac n'est pas remis, mais la sensation de sommeil s'estompe et les jambes répondent (en même temps c'est le minimum syndical après la nuit de repos qu'elles ont eu). Nikos voit que je vais mieux et me dit de partir devant, je lui soutiens qu'on finira ensemble et que je l'attends au col de Tizi n'Tachedirt (3220m) 850m plus haut. Je croise un trekkeur très sympa qui vient des Alpes et avec qui je discute un moment, puis arrivé en haut, j'attends Nikos à l'abri d'un tas de pierres.
Des locaux en embuscade me proposent un coca, je me demande un moment si c'est un ravitaillement supplémentaire... dans le doute je refuse. Un italien qui passe après moi n'aura pas cette lucidité... et au moment de repartir il se fait interpeller avec insistance par les vendeurs, bah oui c'était pas gratuit... Après moult négociations il faudra qu'il paye! Merci à l'organisation d'avoir dit de partir avec 100 Dirhams, sans ça je ne sais pas comment ça aurait pu finir.
Un hélicoptère le l'armée tourne, peut-être celui utilisé pour la sécurité de la course...
Je dis à Nikos quand il arrive de ne pas commander et on repart sur le même principe, chacun à son rythme, mais à la descente cette fois. La descente (toujours technique et très caillouteuse) se passe bien, ça faisait longtemps que je n'avais plus vraiment eu de plaisir sur ce trail mais je sens que ça reviens un peu. Malgré tout je reste en dedans, ça fait trop longtemps que je ne digère plus rien et je soupçonne les batteries d'être un peu vides. La pente est irrégulière et la descente commence à être longue, mais les paysages sont vraiment superbes:
Nikos mettra finalement assez peu de temps à me rejoindre au ravitaillement de Timichchi (1940m) 1300m plus bas. La pause sera brève, je ne peux toujours pas vraiment manger et Nikos ne veut pas s'éterniser.
La prochaine étape est la station de ski de Oukaimeden (2596m) après une montée de 1200m au col de Tizi n'Ouhatiar (3124).
La montée est belle, on traverse d'abord des villages assez verts avec beaucoup de cultures en cascade et d'irrigation, pour finir sur un col à l'ambiance très haute-montagne, si ce n'est les mulets croisés régulièrement.
Petite scène de vie sauvage entre deux villages: j'aperçois un serpent noir d'un bon mètre essayant d'engloutir un gros (à mon gout) lézard vert. Le serpent file dès qu'il me voit, mais le lézard reste bien amorphe (paralysé ou étourdi), du coup j'ai pu avoir une preuve que je n'ai pas rêvé!
Pas eu le temps photographier le serpent, mais la blessure au museau du lézard atteste de la morsure!!!
Le ciel se couvre un peu, je vois assez loin derrière moi et pas de Nikos, ses amis grecs sont sensés nous attendre à la station de ski pour 18h, on sera visiblement en retard! Au col le brouillard arrive et toujours pas de Nikos en vue, je décide de ne l'attendre qu'à la station de ski 500 m plus bas.
Je ne vous fait pas de dessin pour la descente, moins technique que les autres, mais engagées quand même, pour finir par une piste en faut-plat descendant, puis plate, puis en faut-plat montant, très long, trop à mon gout, d'autant que je suis maintenant de nuit, dans le brouillard, à chercher des marques blanches de peinture réfléchissante sur des pierres... qui sont parfois réfléchissantes même sans peinture, heureusement qu'on suit une grosse piste.
Dès que je sors du brouillard, c'est ma propre respiration qui vient me polluer la vue.
Enfin le ravitaillement, il est 19h30, je mange un peu, boit un peu, et décide d'attendre Nikos au chaud sous une couverture, car je sens que je risque de l'attendre un moment...
Ses amis grecs arrivent et me demandent des nouvelles, ça va mieux pour moi, mais je leur annonce Nikos probablement un bonne heure derrière, d'autant qu'il a du faire toute la descente de nuit et peut-être même dans le brouillard. Kostas est passé ici à midi.
Coup de fil, il arrive seulement au col et me fait passer le message de continuer sans lui. L'avenir lui donnera raison, il arrivera seulement deux heures plus tard et finira avec son épouse.
Je repars donc seul à 20h pour 6km de piste en légère montée jusqu'à Tizi n'ou Addi, j'ai à nouveau sommeil et doit faire deux où trois courtes pauses. Suit une descente un peu casse-gueule, du moins la nuit, sur Tachedirt. Je parviens à courir la plupart du temps, mais j'ai conscience de ne pas vraiment avoir le droit de chuter ici... on ne vois pas très bien jusqu'où on tomberait (dans le doute... s'abstenir). Le point positif est que ce peu d'adrénaline me tient plus éveillé.
J'arrive enfin à Tachedirt, je ne m'y attarde pas j'ai trop envie de finir... et un peu peur de manger. Plus que 16km, principalement descendants, je sais que c'est gagné.
La descente à Tinerhourhine (1898m) me semble très longue, c'est une partie mixte entre pistes plus larges et sentiers, qui passent près des maisons assez souvent (beaucoup de déchets par endroit...). Je suis impatient d'arriver, j'essaie de trottiner tout le long.
Arrivé au point bas il me reste 400mD+ pour atteindre Tizi n'Tamatert (2302m), la montée se passe bien, sans être exceptionnel, le rythme n'a rien à voir avec la nuit précédente.
La dernière descente est d'abord sur sentier un peu technique, je suis presque surpris de reprendre un coureur... depuis le temps que je n'ai vu personne je croyais faire la course seul.
Je continue de courir, même les derniers km sur route (la seule portion de route, si on oublie les 500m peut-être autour de Tachedirt). Et là surprise, un flash... et je reconnais Kostas! Il est plus de 2h du matin, il est arrivé vers 18h30, et il est assis à 1km de l'arrivée pour m'attendre et finir avec moi (comme prévu 90km plus tôt).
J'avoue que ça fait plaisir, il cours avec moi et leur compère photographe Vassilis s'occupe du shooting (et comment dire... son flash de nuit coupe la vue pour quelques secondes, c'est pas un petit APN)!
Je passe la ligne d'arrivée (au bout de 44h52min) avec Kostas qui gueule tant qu'il peut pour rameuter les troupes, je serais peut-être passé inaperçu sans ça, mais finalement Nico (l'organisateur) et d'autres bénévoles sont alertés et j'ai droit à ma médaille et à mon t-shirt finisher en bonne et due forme!
Le pauvre Nico a tellement peu dormi ces derniers jours que malgré son sourir il a les yeux mi-clos!
L'après course
Je veux prendre une douche, je file donc à ma chambre, l'eau est glacée, c'est un supplice, mais je ne vois pas d'alternatives! Je ne peux même pas crier, mes compagnons de chambrée dorment, alors je souffre en silence (j'aurais dû en fait, après tout c'est eux qui ont vidé le cumulus!). Au final c'est bon pour la récup il paraît.
Je redescends boire un thé et manger un peu, puis je remonte dormir, enfin!
Je me relève vers 7h pour essayer d'assister à l'arrivée de Nikos, mais le bougre est arrivé une heure plus tôt d'après ce que je vois sur les résultats... raté. Tant pis je prends le petit déjeuné avec quelques français matinaux.
Je reprends de l'appétit pour le repas de midi, ce qui se soldera par une cuisante rechute un peu avant la remise des récompenses l'après-midi.
J'essaie de descendre pour la remise des récompenses (qui est faite visiblement autant pour faire plaisir aux officiels locaux chargés de les remettre que pour les athlètes, l'organisation de cette course a vraiment dû être un calvaire...):
On commence par récompenser les... 10 premiers hommes des 125km (à dos de mulet pour les premiers)
Le premier, à dos de mulet, qui a gagné un minaret plus ou moins miniature!
Puis les 10 premières femmes des 125km. Puis idem j'imagine pour le 42km...
Après un bonne demi-heure debout et ayant à peine attaqué les récompenses femme du 125km, la fièvre et la ch..sse auront raison de moi.
Je raterais aussi le repas et la fête berbère. Kostas aura bien essayé (il paraît) de m'apporter à mangé, mais il m'a trouvé étalé tout habillé et ronflant sur mon lit...
Le retour aura aussi été pénible pour moi... transfert en car, avion et fièvre...
Je remercie simplement mes parents, qui m'ont fait la surprise de m'attendre à l'aéroport de Lyon alors que je m'apprêtais à passer probablement un de mes pire nuits dans l'aéroport en attendant mon transfert pour Munich le lendemain.
En parlant de remerciements, bien sûr il y a Nico Valésia, l'organisateur, qui nous a proposé un trail vraiment unique, splendide, et extrèmement difficile...
Les bénévoles, très sympas et dispos, souvent frigorifiés la nuit.
Mes amis grecs, j'en profite pour faire la pub de la course qu'ils organisent en grèce, le Kentavros ultra marathon:
http://www.kutp.gr/Index.asp?C=2
(moi non plus je ne comprends rien au grec... mais bon je vous donne le lien quand même)
Guy Bruyère, un copain de chambrée avec qui j'ai passé de bons moments.
Jean-Michel (pas Touron) et Jean-Pierre avec qui j'ai voyagé au retour (même si j'ai surtout dormi!).
Jean-Michel Touron et Tercan sans qui je n'aurais peut-être pas fini (voir dans quel état Jean-Mi arrive parfois à finir et le CR de Tercan sur l'UTMB...).
Merci aux Kikous qui ont suivi la course aussi!
J'en oublie sûrement!
Mon avis sur la course
- très certainement le trail le plus technique que j'ai faite (GRP, Aiguilles Rouges ou Tour des Fiz loin derrière). Et celui où j'ai le plus peiné...
- à réserver aux bons descendeurs, ou au moins à ceux qui apprécient les descentes techniques... sinon ça risque de vite être un calvaire.
- cette course a tout pour devenir une course référence si elle perdure.
- ravitaillements peu fournis, pas un problème de quantité, mais peu de choix et très peu de gout... mieux vaut le savoir. Ce n'est absolument pas un reproche, il faut faire avec les moyens sur place, mais autant prévenir à l'avance d'éventuels participants.
- pensez au SMECTA.
- ne pas confondre avec le trail du Toubkal, par une organisation française, mais qui ne passe pas en haut du Toubkal.
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6 commentaires
Commentaire de L'Castor Junior posté le 28-10-2009 à 10:36:00
Merci Olivier pour ce quart d'heure d'évasion sur les cîmes. Un régal, malgré la souffrance que tu as vécue.
Merci aussi pour la mise en garde : moi qui voulais être de la partie, je vais réfléchir à deux fois avant d'envoyer mon inscription...
Bravo, enfin, une fois de plus, pour être allé au bout de l'effort, comme après la Montagn'Hard. T'es un vrai dur à cuire, toi ! ;-))
Commentaire de eric41 posté le 28-10-2009 à 15:13:00
Bravo Olivier pour ta volonté.Quel moral!
Superbes paysages.Merci.
Eric
Commentaire de Tercan posté le 28-10-2009 à 18:48:00
Ben dis donc... ça avait l'air carrément balèze comme balade !!! Mais magnifique apparemment !!!
Bravo à toi d'avoir terminer... et avec classe comme d'hab'
Comme dis le Castor : t'es un dur à cuire :)
A bientôt sur les sentiers
Commentaire de Sanggi posté le 09-11-2009 à 22:08:00
Merci pour ce CR Olivier, et bravo pour ce défi! c'est sur le 24h d'Aulnat que j'ai vu un circadien arborer fièrement le t shirt finisher, ma curiosité comblée par le récit d'un coureur qui a adoré cette course.
Bon, si l'édition 2010 pointe son nez, je devrai en etre !
Commentaire de Tamiou posté le 15-12-2009 à 16:22:00
Merci de nous avoir fait partager cette aventure.
Pour avoir fait l'an dernier un Trek du côté du M'goun, j'avais l'impression de m'y retrouver et l'envie d'y retourner.
Merci encore, superbe réçit très complet.
Commentaire de leptichat posté le 06-09-2011 à 17:56:05
Super Recit..ca decrit ce qui attend Psyko et moi, dans 1 mois exactement!
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