Récit de la course : L'O'Rigole - 71 km 2008, par LeSanglier

L'auteur : LeSanglier

La course : L'O'Rigole - 71 km

Date : 7/12/2008

Lieu : Le Perray En Yvelines (Yvelines)

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Distance : 71km

Objectif : Pas d'objectif

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Pas de miracle

Fin août : la saison se termine avec l’abandon à Courmayeur sur l’UTMB. Pas d’envie, pas de plaisir, il est temps de couper. J’arrête totalement de courir pendant un mois, et songe à la meilleure manière de débuter la saison suivante. L’objectif 2009 sera la Transpyrénéenne (650 km et 50 000 m D+ en moins de 10 jours) fin juillet, comme en 2008. Cette année, j’y suis arrivée en excellente forme, mais avec la sensation que j’aurais pu aller encore un peu plus loin. Je choisis donc logiquement de démarrer ma préparation plus tôt, pour profiter de quelques semaines supplémentaires et arriver encore plus en forme.

En 2008, j’ai démarré ma préparation vers le 10 janvier. Je comptais donc anticiper et débuter mi-octobre, après un mois et demi de coupure totale. J’ai programmé comme épreuves intégrées à ma prépa le Sparnatrail (50 km et 1 200 m D+ la 09/11) et l’Origole (75 km et 2 000 m D+ le 07/12). Après seulement deux semaines de reprise de la course à pied, le Sparnatrail s’est passé difficilement. Un bon premiers tiers de course avec de bonnes sensations, et une énorme hypolgycémie à mi-course m’a laissé sec pour le restant. J’ai juste réussi à relancer un peu dans les cinq derniers kilomètres, aidé par Kourpavix, qui m’a rattrapé.

Malheureusement, pendant l’épreuve, notre voiture a été visitée et dévalisée. Outre les pertes matérielles, financières et morales, j’ai perdu dans l’affaire pas mal de documents professionnels. Ce coup dur nous a pas mal secoués Sandrine et moi, et du coup nous n’avons pas eu goût à courir, ni trop le temps de le faire, pendant quelques semaines. Notre seule sortie, qui a été commune, entre le Sparnatrail et l’Origole, a été un footing en jean de 6 km pour revenir de la Foire des Vignerons Indépendants, au Parc des Expos de Versailles, où nous avions goûté 18 crus différents…

Forcément donc, l’idée de courir 75 km de nuit, dans la boue, avec un dénivelé conséquent, ne nous enchante ni l’un ni l’autre. Un long moment, l’idée de troquer la roiée boue contre une soirée ciné nous taraude. Nous nous présentons toutefois au Perray-en-Yvelines, doté de tout l’attirail du parfait trailer. Bien content de bavarder avec les copains coureurs, nous nous préparons sans pression (mais avec du thé et du café) pour ce qui sera sans doute une version écourtée de l’épreuve.

Nous partons de devant la Mairie du Perray, peloton de trois ou quatre-cents coureurs composé de ceux qui envisagent les 75 km et de ceux qui ne feront qu’une boucle, soit 28 km. J’entame la balade avec RunStephane, Sandrine pas très loin de nous. Nous sommes placés loin de la tête de course, et me concernant j’ai décidé d’y aller tout doucement, ne pouvant de toute façon pas prétendre à mieux. Un gros kilomètre de bitume plus tard, nous sommes bien chauds : ça commence à cailler à minuit, mais en courant c’est tout à fait supportable, et même agréable. Il fait beau, on voit la lune, on devine des étoiles, super.

Avec Stéphane, nous abordons les premiers sentiers, roulants. Nous doublons un peu de monde, plus habitué apparemment au bitume qu’à la surface glissante, humide et sale d’un sentier forestier détrempé. J’essaie d’éclabousser un peu Stéphane, mais il ne s’en rend même pas compte, c’est pas marrant. Nous rattrapons bientôt Bombyx, ce qui m’étonne franchement. Il nous avoue envisager 10 h 15, ce qui m’étonne encore plus. Si Gaël termine en 10 h 15, il est clair qu’aujourd’hui je ne peux pas rentrer dans le temps limite de 12 heures.

Bon, en tous cas pour le moment je me sens super bien, ce qui m’étonne encore plus que le reste. Les jambes tournent parfaitement, le soufle est bon. Ok, l’allure est faible, mais tout de même : je n’ai suivi aucun entraînement structuré depuis début septembre, j’ai du courir environ 150 km en 3 mois, dont 6 km dans les quatre dernières semaines. Là, je me dis que le fond est vraiment un socle stable, qui reste valable des mois même sans entretien régulier.

À l’occasion d’un arrêt pipi, Stéphane et Gaël me lachent, et je me retrouve tout seul (façon de parler) dans les bois. Je m’éclate bien, le terrain est vraiment très plaisant. Glissant à souhaits, boueux, humide, il faut jouer de ses appuis pour arriver à progresser sans fatiguer excessivement les muscles. J’adore ça, ce qui n’est pas le cas de pas mal de monde autour de moi : ça jure, ça grommelle, ça essaie de passer à-côté des flaques. Dommage, elles nous tendent les bras !

Je prends progressivement un peu de vitesse pour larguer quelques gros lourds : bon sang, on a la chance de courir en pleine nuit dans des bois, et certains coureurs ne trouvent rien de mieux que de hurler à la moindre occasion (et même sans occasion d’ailleurs) : Olivier, Fabien Jérôme, vous êtes là ? Attention, souche ! Branche ! Flaque ! Put… on est dans les bois les gars, c’est normal qu’il y ait des branches, il suffit de faire gaffe. Et vos copains, si vous les perdez, c’est pas la fin du monde hein. Je glisse ma façon de penser au type qui hurle, mais il n’a pas l’air de bien comprendre. Bref, je me casse en ronchonnant tout seul.

Deuxième occasion de ronchonner un peu plus loin, juste après m’être paumé (erreur d’innatention) : je tombe sur un couple, homme grand et costaud, femme petite et très fine, qui discute beaucoup. Enfin, le type discute, la nana écoute : « Bois, mange, doucement, la première n’est pas loin, économise-toi. » Pfff, je perds quatre gros lourds pour en regagner deux. En plus, le type pousse la nana dans les montées : ça je n’ai pas du tout aimé. Je les largue à leur tour, en songeant que décidément, il y en a qui n’ont rien compris.

Et puis pendant une grosse quinzaine de bornes, je n’aurai plus l’occasion de ronchonner, parce que je m’éclate : ce parcours est génial. Je rattrape Gaël et nous faisons un bout de chemin à deux, jusqu’à ce que je parte un peu devant dans une succession de bosses au milieu des fougères. Le terrain est souple, amortissant, on ne s’entend presque pas courir, et les bruits de la forêt prennent toute leur ampleur. Des types tombent de temps en temps, j’y ai droit deux fois également, mais rien de bien méchant. Côté sensations, je cours sans problème quand c’est plat, je sens mes chevilles fragiles en descente (perte musculaire sans doute), et je me sens faible en montée (assurément perte musculaire). Petit à petit, les jambes commencent à tirer, et lorsque je me relève de ma seconde chute, je sens mes iscchios au bord de la crampe.

Je termine cette première boucle en 3 h 38 mn, pour 28 km et un peu moins de 700 m D+. Je décide de repartie avec Sandrine si elle veut poursuivre, et d’arrêter là sinon. Gaël arrive quelques minutes après moi, et terminera effectivement en 10 h 33 mn, jolie précision. J’attends, j’attends, et Sandrine finit par arriver en un peu plus de 4 heures. Elle ne repartira pas, moi non plus. Pour une reprise, ça nous suffira !

En conclusion, il va être temps de rechausser pour de vrai les baskets, et de reprendre l’entraînement. Je suis rassuré sur le fond, qui est toujours là. Reste à retrouver tout ce qui a été perdu ces trois derniers mois, puis à construire sur ces bases pour arriver fin juillet au top du top. La très bonne nouvelle, c’est que ces quelques heures de nuit en forêt m’ont rudement donné envie d’y retourner.

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